Clio
Des voyages dans le monde entier en compagnie de conférenciers passionnés
  Trouver votre voyage
Lettres et brochures
S'abonner aux lettres électroniques de Clio

Pour vous abonner à nos lettres électroniques, merci de nous indiquer votre adresse mél.

Votre mél


Abonnez-vous à nos
    lettres électroniques

Nous suivre
  Haut de page
Les Pays-Bas
Unité et diversité des pays néerlandais

  Partir avec Clio
  01 53 68 82 82
  Nous contacter
Il convient tout d’abord de préciser quelles furent les significations successives du nom de « Pays-Bas ». Ce terme apparaît aujourd’hui, pour le grand public, comme un synonyme de celui de « Hollande », alors que celle-ci ne représente qu’une province des Pays-Bas actuels. Dans le passé, les Pays-Bas ne correspondaient pas à une définition aussi restreinte. Ils comprenaient les Pays-Bas et la Belgique actuels, augmentés d’une partie du nord de la France, celle qui s’étend des côtes flamandes aux collines d’Artois. Quand, à la fin du XVIe siècle, les antagonismes religieux et la révolte anti-espagnole entraînèrent la division de l’ensemble néerlandais, les Pays-Bas septentrionaux, acquis au protestantisme, devinrent les Provinces-Unies des Pays-Bas, alors que les régions méridionales demeurées catholiques furent dès lors désignées sous le nom de Pays-Bas espagnols, puis de Pays-Bas autrichiens à partir de 1714, la France de Louis XIV étendant pour sa part ses conquêtes vers le nord, en Artois et en Flandre. À l’issue des guerres de la Révolution et de l’Empire, l’unité des Pays-Bas fut rétablie pour l’essentiel sous l’autorité de la dynastie d’Orange mais cette construction politique voulue par l’Angleterre n’eut qu’une existence éphémère et la révolte des Pays-Bas méridionaux entraîna en 1830 la formation d’un royaume de Belgique, beaucoup moins étendu que ne l’avait été la Gaule « Belgique » de César, limitée par le Rhin au nord et la Seine au sud. Aujourd’hui, les différents territoires réunis jadis sous le nom de Pays-Bas sont regroupés pour l’essentiel dans le cadre du Benelux, même si l’on peut parler de « Pays-Bas français » à propos de Lille, d’Hazebrouck et de Dunkerque. Les Pays-Bas proprement dits représentent dans cet ensemble 40 840 km2 et comptent 16 millions d’habitants (densité 392/km2) ; la Belgique s’étend sur 30 521 km2, avec 10 300 000 habitants (densité de 337/km2) ; enfin, le petit Luxembourg n’a qu’une superficie de 2 505 km2 et n’est peuplé que de 438 000 habitants. Dès 1921, l’Union économique belgo-luxembourgeoise ou UEBL a préparé le rapprochement des trois pays, réalisé par la signature de la convention de Londres du 5 septembre 1944, qui donne naissance, le 1er janvier 1948, au Benelux, une zone de libre échange complétée en 1958 par la mise en place d’une véritable union économique allant de pair avec l’intégration des trois pays au sein de la Communauté économique européenne née du traité de Rome de 1957. Malgré leur diversité géographique et humaine – le littoral néerlandais et flamand apparaît bien différent des terres ardennaises et mosanes, la communauté néerlandophone se distingue nettement de la Wallonie francophone, la division religieuse intervenue au XVIe siècle a laissé de nombreuses traces – l’ensemble de ces régions n’en présente pas moins, au cours du dernier millénaire, des éléments d’unité historique et culturelle qui justifient pleinement de l’aborder comme une « unité de destin » particulière dans la « longue histoire » de l’Europe.

Un espace largement conquis sur la mer

 « Dieu a créé la terre mais il a laissé aux Néerlandais le soin de créer les Pays-Bas ». Ce vieux dicton – parfois formulé différemment : Deus mare, Batavus litora fecit, « Dieu a créé la mer et le Batave la côte » – correspond bien à une réalité car c’est à une nature hostile que les habitants de ces régions ont dû disputer l’espace qui leur était nécessaire pour vivre et prospérer. La mer, les marais, les tourbières, les landes et les terres pauvres de l’intérieur ont constitué – avec un climat humide, froid et brumeux – autant d’obstacles que le travail et la ténacité ont permis, au fil des siècles de surmonter, au point que ces régions densément peuplées ont compté très tôt parmi les plus riches du globe. Marges demeurées hors de l’histoire quand le centre de gravité de celle-ci se trouvait dans le bassin méditerranéen, ces terres aux limites longtemps incertaines sont devenues un carrefour indispensable aux trafics et aux activités de l’Europe du Nord quand celle-ci a réalisé, avec ses progrès agricoles, ses manufactures textiles et l’essor de la Hanse germanique, son décollage médiéval. Étendus sur une superficie correspondant à peu près à celle d’une dizaine de départements français, les anciens Pays-Bas présentent une certaine diversité. Nés des dépôts sédimentaires secondaires, tertiaires et quaternaires, les paysages de plaine dominent mais le socle ancien apparaît à l’est avec le massif ardennais qu’entaillent les coupures réalisées par la Meuse et ses affluents. Prolongement occidental des massifs hercyniens allemands, l’Ardenne s’élève en Belgique, au Signal de Botrange, jusqu’à 694 m. Schistes et grès ont donné naissance à des sols froids et à des tourbières ; alors que la forêt de conifères et de feuillus s’étend de 300 à 600 m, les landes envahies de bruyères occupant les hauteurs. Si l’on excepte le cours de la Meuse, les vallées encaissées et les méandres des fleuves (Ourthe, Semois, Amblève) ont créé des milieux isolés. Sur les marges méridionales du massif ardennais, la Gaume belge et le Gutland luxembourgeois sont des prolongements septentrionaux des bonnes terres du Bassin parisien. Au nord de l’Ardenne, le Condroz constitue une région intermédiaire entre celle-ci et les plateaux limoneux de Hesbaye, du Brabant et du Hainaut qui s’étendent à l’ouest. Zone de plaine aux sols relativement riches en même temps que couloir de communication en direction du sud, ces régions constituèrent de tout temps un espace de grande circulation et un champ de bataille où s’affrontèrent, au fil des siècles, la plupart des grandes puissances de l’histoire européenne. La Flandre intérieure apparaît ensuite comme une vaste plaine sableuse aux capacités agricoles initialement bien médiocres mais qui seront valorisées par le travail des hommes. C’est déjà le domaine du « plat pays », l’altitude générale se situant entre 10 et 20 m. Cet ensemble se relève sensiblement vers l’est, en Campine, sur la frontière belgo-hollandaise. Au-delà du « pays des fleuves » formé de sols alluviaux, on retrouve au nord sables et cailloutis tertiaires mais le paysage a été ici profondément marqué par les glaciations quaternaires, quand l’inlandsis scandinave (la calotte glaciaire) recouvrait une bonne partie des actuels Pays-Bas où il a laissé d’importants vestiges morainiques correspondant aux rares hauteurs d’aujourd’hui. Les sols sont ici naturellement très pauvres. Nées de la sédimentation marine et fluviale les basses plaines maritimes qui s’étendent vers l’ouest et au nord sont souvent situées sous le niveau de la mer depuis les transgressions flandrienne et dunkerquienne. Protégées le plus souvent par des digues, ces terres qui s’étendent des côtes de la Flandre française jusqu’à la Frise ont été méthodiquement conquises par les hommes grâce à un labeur millénaire. Le défrichement et la mise en valeur, par la hache et par la houe, des sols de l’intérieur ont été entrepris dès le Néolithique et régulièrement poursuivis durant l’Antiquité et le Haut Moyen Âge mais c’est la lutte contre l’eau qui constitue, dans les régions littorales, l’expérience la plus originale. Pays-Bas ou Nederland, et Hollande, le « pays creux », ont constamment vécu sous la menace des eaux. Poursuivie jusqu’à la fin du Moyen Âge, la lente transgression dunkerquienne transforma en « mer du sud » ou Zuyderzee l’ancien lac Flevo des Romains et l’inondation de 1421 détruisit soixante-douze villages. Chaque siècle connut ensuite une inondation catastrophique d’une ampleur comparable ; la dernière, en février 1953, fit 1800 morts en Zélande et dévasta 175 000 hectares de polders. Ce furent les Frisons qui, à partir du Ve siècle après J.-C., entreprirent les premiers de conquérir progressivement sur la mer les schorre qui, de simples pâturages temporaires de type « pré salé » sont destinés, au fur et à mesure que progresse la sédimentation, à devenir des polders protégés par des digues. C’est à partir des Xe et XIe siècles que les côtes de Flandre et de Zélande voient à leur tour les populations littorales entreprendre la conquête de nouvelles terres, avec les encouragements et l’aide des bourgeoisies urbaines – portuaires et marchandes de Bruges ou de Middelburg, industrielles de Gand – et des grandes abbayes telles que celles de Furnes ou de Middelburg intéressées à l’extension de leurs domaines fonciers. Le mot « polder » apparaît à Walcheren, la plus avancée des îles de Zélande, en 1219 et, en trois siècles, de 1200 à 1500, 80 000 hectares sont gagnés sur la mer du fait de l’action des associations de paysans, organisés en wateringen. À partir du XVIe siècle c’est en Hollande que les résultats sont les plus spectaculaires mais des efforts analogues sont poursuivis avec succès en Zélande et en Frise. Grâce à l’ingénieur Vierlingh, l’endiguement des prés salés fait alors de rapides progrès mais, au tournant des XVIe et XVIIe siècles, le pompage, réalisé grâce aux moulins à vent et mis au point par l’ingénieur Leeghwater, permet d’assécher 28 000 hectares entre 1590 et 1640. Avec l’aide des capitaux investis par les marchands d’Amsterdam, 180 000 autres sont gagnés entre 1540 et 1715. Créé en 1798, le Waterstaat hollandais peut réaliser dès le XIXe siècle des programmes très ambitieux, hors de portée des particuliers, tels que l’assèchement de la mer de Haarlem. De 1918 aux années 1970, c’est le Zuyderzee qui est progressivement et méthodiquement asséché. Le plan Delta d’aménagement des estuaires du Rhin, de la Meuse et de l’Escaut constitue enfin, dans le dernier tiers du XXe siècle, la clef de voûte de cette longue lutte contre la mer.

Les origines antiques et médiévales

La région a connu la présence des Néandertaliens, puis des chasseurs de rennes du Paléolithique supérieur, notamment dans la vallée de la Meuse ardennaise. Les plaines centrales sont ensuite colonisées par des paysans néolithiques et la tradition mégalithique s’impose ici, comme dans le reste de l’Europe du nord-ouest, avec par exemple l’allée couverte de Wéris, dans la vallée de l’Ourthe ou le menhir de Velaine sur Sambre. Avec l’âge du bronze qui se développe au cours du IIe millénaire avant J.-C., la région mosane semble proche culturellement de l’est de la France (jusqu’au Jura) alors que les découvertes réalisées dans la vallée de l’Escaut semblent témoigner d’affinités avec la France du nord-ouest et les îles Britanniques. Les migrations celtiques du premier millénaire avant J.-C. conduisent vers l’ouest de nouvelles populations, supplantées ensuite par les Belges, qui sont eux-mêmes des Celtes germanisés. Plus au nord, c’est au Ier siècle avant J.-C. que les Bataves s’installent dans la région des Bouches du Rhin, alors que les Frisons de la province de Groningue construisaient des tertres ou terpen pour se mettre à l’abri des inondations. 57 avant J.-C. : César bat les Nerviens, l’un des principaux peuples belges sur les bords de la Selle, un petit affluent de l’Escaut, à hauteur de Cateau-Cambrésis. Éburons, Morins et Ménapiens font mine de se soumettre. 54 avant J.-C. : La révolte des Éburons aboutit à la destruction des deux légions des légats Sabinus et Cotta. César, qui juge les Belges « les plus courageux de tous les peuples de la Gaule » se porte au secours de Quintus Cicéron assiégé par les Éburons et entreprend l’année suivante, après avoir reçu le renfort de trois légions, le massacre général de ce peuple rebelle. Les Trévires d’Indutiomar sont vaincus et, même si le chef éburon Ambiorix demeure insaisissable, la région est à peu près « pacifiée ». La paix romaine s’installe à partir du règne d’Auguste et les différents peuples belges sont transformés en civitates gallo-romaines. L’histoire de la région se confond alors en effet avec celle de la Gaule romaine. Elle est marquée par la construction d’un remarquable réseau routier et par l’installation de près de quatre cents villages dans les régions agricoles les plus riches. Tongres, l’ancienne capitale des Atuatuques, Tournai, Arlon, et Namur sont alors les principales villes. Un solide limes fortifié est établi en Germanie inférieure, avec comme centre de gravité la région de l’actuelle Leyde, sur la frontière du Rhin où la localisation de Lugdunum Batavorum demeure discutée. 28-47 : Campagnes de Corbulon pour venir à bout de la révolte des Frisons. 70 : Révolte du chef batave Julius Civilis à la faveur de la « crise de 69 » et des luttes opposant Vitellius à Vespasien. Cerialis est chargé par Vespasien de vaincre les rebelles. Milieu du IIIe siècle : Un premier assaut est lancé par les Barbares – Francs et Alamans à partir du limes rhénan, Frisons et Saxons sur les côtes – contre le nord de la Gaule et entraîne d’importantes destructions. Pour contenir la pression barbare l’Empire autorise ensuite la colonisation des régions frontalières par des Germains. Première moitié du IVe siècle : Diverses sources signalent dès cette époque la présence de communautés chrétiennes dans le nord de la Gaule Belgique, liées à la présence de soldats et de marchands orientaux sur le limes rhénan. L’évêché de Tongres est fondé par saint Servais. Hiver 406-407 : Vandales, Suèves et Francs franchissent le Rhin et envahissent la Gaule. Les premiers s’éloignent rapidement vers la péninsule Ibérique et l’Afrique du Nord mais les Francs s’installent durablement en remontant les cours de l’Escaut et de la Meuse. 358 : Installation des Francs en Toxandrie (Brabant). 431 : Le roi franc Clodion s’empare de Tournai alors que les Francs Ripuaires occupent les régions entre Meuse et Rhin et que les Francs Saliens s’avancent jusqu’à la Somme. 481 : Mort à Tournai de Childéric Ier, petit-fils de Clodion et fils de Mérovée. Clovis lui succède. Les temps mérovingiens voient se confirmer la christianisation de la région, grâce à l’action d’évangélisateurs étrangers tels que Willebrord (premier évêque des Frisons en 695), Vaast ou Boniface et de saints locaux comme Amand, Bavon ou Éloi. Des diocèses sont organisés autour de Tongres, Cambrai, Tournai, Thérouanne et Utrecht. 687 : Pépin II de Herstal, petit-fils de Pépin de Landen, fondateur de la lignée pippinide et chef de file de l’aristocratie austrasienne, bat les Neustriens en 567 à Tertry, près de Saint-Quentin. 732 : Le fils de Pépin II, Charles Martel, bat les envahisseurs arabes à Poitiers. Son fils Pépin III, dit le Bref, lui succède comme maire du palais auprès des derniers Mérovingiens. Il est proclamé roi des Francs en 751 et sacré par le pape Étienne II en 754. 751-768 : Règne de Pépin le Bref, suivi de celui de Charlemagne (768-814) qui est sacré empereur d’Occident à Rome par le pape Léon III en 800 et qui fait de Nimègue et de Maastricht deux de ses résidences. La région mosane apparaît alors comme l’un des centres de gravité du nouvel Empire carolingien. 820 : Première offensive des Vikings contre la côte flamande. Elle est repoussée mais, en 834, le delta formé par la Meuse, le Rhin et l’Escaut est occupé par les Danois. Le port de Duurstede est incendié et pillé ; l’attaque se renouvelle en 835 et 836. 843 : Le traité de Verdun, conclu avec son frère Louis le Germanique et son demi-frère Charles le Chauve, donne à l’empereur Lothaire, fils aîné de Louis 1er mort trois ans plus tôt, les terres s’étendant entre le Rhin à l’est et l’Escaut, la Haute Meuse et la Saône à l’ouest. 850 : Lothaire laisse les Vikings s’installer durablement sur les rives du Waal, la branche du Rhin en aval d’Emmerich qui finit par se confondre avec la Meuse. Ils pourront de là menacer toute la Rhénanie inférieure pendant une quarantaine d’années. Après avoir ravagé le bassin de l’Escaut, les Scandinaves s’attaquent à celui de la Meuse à partir des années 880. Décembre 862 : Mariage du comte carolingien de Flandre Baudouin Bras de Fer avec Judith, la fille de Charles le Chauve. 879 : Mort de Baudouin Bras de Fer. Son fils Baudouin II contrôle les régions de Courtrai et de Gand ainsi que la côte, de l’Yser à Bruges. Après avoir tenu tête aux Vikings et défendu l’embouchure du Zwin, Baudouin étend son pouvoir au sud, vers le Ternois, le Tournaisis et le Boulonnais. L’espace territorial de la Flandre médiévale est alors à peu près constitué. Octobre 891 : La victoire remportée par Arnulf de Carinthie contre les Vikings près des marais de la Dyle, non loin de Louvain, écarte la menace scandinave. Utrecht et Deventer recueillent l’héritage de Duurstede (Dorestad) qui a été complètement ruinée. vers 900 : Premier texte attesté en ancien néerlandais : Les Psaumes de Wachtendonk. 918 : À la mort de Baudouin, Arnould et Adalolphe, les deux fils qu’il a eus d’une fille d’Alfred le Grand, le roi d’Angleterre, se partagent le comté mais demeurent alliés. Après la mort d’Adalolphe et la reconstitution de l’unité du comté, Arnould parvient en 948 à prendre aux Normands Montreuil, à l’embouchure de la Canche. Le comte Arnould Ier contribue par ailleurs au renouveau ecclésiastique après les dévastations perpétrées par les Normands et bénéficie pour cela de l’aide de saint Gérard, abbé de Brogne (près de Namur) qui dirige la réforme des grandes abbayes bénédictines de Saint-Bavon de Gand, Saint-Bertin, Saint-Omer, Saint-Amand et Saint-Vaast. 922 : Charles le Simple remet à un certain Dirk les biens de l’abbaye d’Egmont. Son fils reçoit plus tard d’Othon II des terres en Frise. Leurs successeurs augmentent ces territoires aux dépens de l’évêque d’Utrecht et du comte de Flandre et, à la fin du XIe siècle, Dirk V prendra le titre de comte de Hollande. 925 : Le roi de Germanie Henri l’Oiseleur impose son autorité en Lotharingie, étendant largement vers l’ouest l’espace germanique. 953 : L’empereur Othon Ier confie le titre de duc de Lotharingie à son frère Brunon, évêque de Cologne, qui divise le duché, de part et d’autre du cours de la Chiers, en Haute Lotharingie au sud – qui sera à l’origine de la Lorraine – et en Basse Lotharingie au nord, correspondant, pour tous les territoires étendus sur la rive droite de l’Escaut, à la majeure partie de la Belgique actuelle. Othon installe par ailleurs sur le siège épiscopal de Liège, jadis illustré par saint Lambert, Notger, un noble souabe qui lui est dévoué et qui va donner à la cité mosane un superbe essor. La vie culturelle se développe alors rapidement dans tout le pays mosan, autour des grandes abbayes de Saint-Vanne, Stavelot et Gembloux. Au siècle suivant, le prince-évêque de Liège Otbert profitera du soutien apporté à l’empereur Henri IV contre le pape Grégoire VII pour étendre sa principauté jusqu’à Bouillon. Après Otbert, ce ne seront plus des Allemands mais des Lotharingiens qui occuperont le siège épiscopal. 963-998 : Sigefroi est seigneur de Luxembourg – dont le nom, issu de Lucilhinburuc, signifie « petit château fort ». Son fils Giselbert portera le titre de comte et c’est Wenceslas, fils de Jean l’Aveugle mort à la bataille de Crécy qui prendra en 1346 le titre de duc. Xe siècle : Le travail du bronze, l’artisanat textile et les échanges assurent déjà aux régions mosanes et flamandes une prospérité que traduit, à la veille de l’an mil, l’essor de villes telles que Liège, Tournai, Gand, Bruges, Dinant et Namur. La région entretient des contacts étroits avec la Rhénanie et, au-delà de la mer du Nord, avec les côtes anglaises.

Du comté de Flandre aux Pays-Bas

1005 : Le comte de Flandre Baudouin IV défie le roi de Germanie en s’emparant de Valenciennes. Allié au roi de France Robert Ier et au duc Richard de Normandie, Henri l’Oiseleur réagit en venant attaquer Gand mais Baudouin prend sa revanche en 1012 et obtient Valenciennes, l’île de Walcheren et le sud de l’archipel zélandais. En 1033, il s’empare du château impérial d’Eename, sur la rive droite de l’Escaut et le fait détruire. 1051 : Baudouin V négocie le mariage de son fils avec la veuve du comte de Hainaut, ce qui témoigne de ses intentions vis-à-vis du territoire impérial. L’empereur Henri III ne peut empêcher l’union momentanée des deux comtés. Baudouin V est alors un personnage très important. Il a marié sa fille Mathilde au duc de Normandie, le futur Guillaume le Conquérant, et il est en France le tuteur du jeune roi Philippe Ier. 1067-1070 : Baudouin VI est comte de Flandre. À sa mort, son fils Arnould III et sa mère Richilde doivent faire face à la révolte de Robert le Frison, frère cadet du comte défunt. Ils sont vaincus en 1071, ainsi que le roi de France Philippe Ier qui les soutenait, et Robert devient comte de Flandre jusqu’à sa mort en 1093. Il associa son fils Robert II le Jeune au pouvoir dès 1087. Robert a prêté hommage à Philippe Ier dès 1071 mais le considère davantage comme un allié que comme un suzerain. Il organise une cour comtale brillante et crée en 1081 la charge de chancelier. Il part en pèlerinage à Jérusalem en 1087. 1096-1099 : Robert II participe à la première croisade, à l’issue de laquelle Godefroi de Bouillon devient, après la prise de Jérusalem, « avoué et défenseur du Saint Sépulcre ». 1107-1108 : Renier de Huy réalise les fonts baptismaux de l’église Saint Barthélémy de Liège, qui apparaissent comme l’apogée de l’art roman mosan. 1127 : Le roi de France Louis VI impose comme comte aux Flamands Guillaume Cliton, petit-fils de Mathilde de Flandre et fils de Robert Courteheuse, duc de Normandie, mais les villes se révoltent en février 1128 et se déclarent pour Thierry d’Alsace, petit-fils de Robert le Frison. Quand Guillaume Cliton est tué au siège d’Alost le 27 juillet 1128, la victoire de Thierry d’Alsace est acquise et le roi de France a subi en Flandre un nouvel échec. Le comte laisse aux villes une large autonomie. Son fils Philippe, qui règne de 1168 à 1191, crée des villes nouvelles parmi lesquelles Dunkerque, Damme, Nieuport, Mardick et Gravelines. C’est sous son règne qu’apparaissent les premières wateringues chargées de la maîtrise de l’eau. Le mariage de Philippe d’Alsace avec Élizabeth de Vermandois (1155) lui donne de plus une autorité qui s’étend jusqu’à Saint-Quentin, Compiègne et Amiens. En épousant la sœur du comte, Marguerite d’Alsace, le comte de Hainaut, Baudouin V, est devenu également son allié. Juillet 1185 : Par le traité de Boves, Philippe Auguste oblige Philippe d’Alsace à renoncer au Valois, à l’Amiénois et à une partie du Vermandois. 1191 : Après la mort de Philippe d’Alsace, survenue devant Saint-Jean d’Acre au cours de la troisième croisade, alors qu’il n’a pas d’enfant, son beau-frère Baudouin V de Hainaut devient Baudouin VIII de Flandre et neutralise ainsi les visées de Philippe Auguste sur le comté. 2 janvier 1200 : Après une victoire remportée près d’Ypres, Baudouin IX – comte de Flandre de 1194 à 1205 – obtient de Philippe Auguste, au traité de Péronne, la restitution d’une partie de l’Artois. C’est le comte Baudouin IX qui part à Constantinople ceindre la couronne de l’Empire latin d’Orient créé en 1204, avant de mourir captif chez les Bulgares. Philippe Auguste profite de la disparition de Baudouin IX pour se jouer de son frère Philippe de Namur, régent du comté. Il marie Jeanne, l’une des filles de Baudouin à Ferrand de Portugal, dans l’intention d’en faire un comte de Flandre qui ne serait pas dangereux. Quand le roi de France s’empare d’Aire et de Saint-Omer, Ferrand réagit pourtant et s’allie au roi d’Angleterre Jean sans Terre. Une flotte française est détruite à Damme mais Philippe Auguste prend une éclatante revanche à Bouvines le 27 juillet 1214. Ferrand est fait prisonnier et le roi de France peut imposer ses conditions à Jeanne de Flandre, qui doit raser les fortifications de Valenciennes, Ypres, Audenarde et Cassel. Ferrand ne sera libéré qu’en 1226, sous le règne de Louis VIII après que la comtesse eut accepté de placer la Flandre sous l’autorité du Parlement de Paris. Jusqu’à sa mort, survenue en 1233, Ferrand se comporta désormais en vassal loyal du roi de France. 1247 : Guillaume II de Hollande, fils de Florent IV et de Mathilde de Brabant, est élu roi des Romains, dans le contexte de la lutte entre l’empereur Frédéric II et le Saint-Siège, mais il ne peut exploiter cette opportunité. 1256 : Par le « dit de Péronne » Saint Louis tranche la dispute entre Marguerite, la sœur de la comtesse Jeanne (morte en 1244), et son premier mari Bouchard d’Avesnes et ses descendants. Le roi de France accorde la Flandre à Gui de Dampierre, fils d’un second mariage de Marguerite et le Hainaut à Jean d’Avesnes. Les deux comtés se retrouvaient ainsi séparés, pour le plus grand intérêt du roi de France. 5 juin 1288 : Le duc de Brabant Jean Ier bat à Worringen le prince-évêque de Cologne Siegfried de Westerburg. Cet épisode témoigne de la volonté des Brabançons d’étendre leur domination vers les régions étendues entre Meuse et Rhin et vaut à leur duc de récupérer le Limbourg. 1289 : Le comte Floris V de Hollande soumet les Frisons. 1294 : Le roi de France Philippe le Bel convie à Paris le comte Gui de Dampierre et le jette en prison en lui reprochant d’avoir voulu marier sa fille Philippine au prince de Galles, héritier de la couronne d’Angleterre. Le comte reste détenu quatre mois et doit donner sa fille en otage pour être libéré. En Flandre le roi de France joue le camp des patriciens – nommés pour cette raison Leliaerts, les « partisans des fleurs de lys » – contre le « commun », c’est-à-dire le peuple des travailleurs urbains sur lequel le comte cherche à s’appuyer. 1296 : Une nouvelle guerre anglo-française conduit le comte de Flandre à choisir l’un des camps. Contre son gré car il sait que la prospérité de son comté repose sur la paix, dans la mesure où l’industrie textile flamande est très dépendante de l’importation des laines anglaises. Quand celle-ci est suspendue, Gui de Dampierre finit par se rallier, en janvier 1297, à l’alliance anglaise. 1299 : Trois ans après l’assassinat du comte Floris V de Hollande, son fils meurt sans enfant et c’est son neveu, Jean d’Avesnes, comte de Hainaut, qui devient comte de Hollande. Son fils Guillaume III sera reconnu comte de Zélande par le comte de Flandre. 1300 : Vaincu, Gui de Dampierre doit se rendre au roi de France à Ardenbourg. Philippe le Bel le fait enfermer à Compiègne et décide l’annexion de la Flandre au domaine royal. Le gouverneur français Jacques de Châtillon se rend très vite impopulaire et la résistance flamande se développe rapidement, animée par Pierre de Conninck, Guillaume de Juliers et Jean de Namur. 18 mai 1302 : Les « Matines de Bruges » font écho aux « Vêpres siciliennes » de 1282. Les insurgés baptisés Klauwaerts, par allusion aux griffes du lion symbolisant le comté flamand, massacrent par surprise presque toute la garnison française. Toute la Flandre se dresse contre l’occupant et contre ses collaborateurs Leliaerts. 8 juillet 1302 : Les chevaliers français sont complètement défaits à Courtrai par les milices communales flamandes, lors de la fameuse bataille dite « des Éperons d’Or ». Sept cents éperons ornèrent en effet comme des trophées l’église Notre-Dame de Courtrai. 1308 : L’évêque de Liège Thibaut de Bar évite de justesse une révolution sociale en partageant le pouvoir entre les patriciens, là aussi favorables au roi de France, et le menu peuple des « métiers ». Une nouvelle flambée de violence éclate en 1312 et voit le peuple brûler de nombreux patriciens réfugiés dans la collégiale Saint-Martin. L’année suivante, la paix d’Angleur donne le pouvoir aux métiers et marque une victoire de la « démocratie urbaine ». En 1316, l’évêque Adolphe de la Marck doit également faire des concessions au parti populaire et garantir les libertés communales. En fait, les métiers vont bientôt donner naissance à une nouvelle oligarchie. 18 août 1304 : Philippe le Bel bat les milices flamandes à la bataille de Mons en Pévèle où Guillaume de Juliers est tué. En juin 1305, le traité d’Athis-sur-Orge replace la Flandre sous la suzeraineté française. Il est confirmé par le traité de Paris de 1320. 1305-1322 : Robert de Béthune, fils de Gui de Dampierre est comte de Flandre. À sa mort, Louis de Nevers, époux de Marguerite de France, fille du roi Philippe V, lui succède. 1323-1328 : La Flandre maritime se rebelle contre les percepteurs du comte, qui fait appel à son suzerain. Gand, repassée sous le contrôle des Leliaerts, est la seule ville qui le soutient. Philippe de Valois vient écraser les rebelles à Cassel (23 août 1328). La répression est terrible. Les chefs sont exécutés, les murailles de Bruges et d’Ypres démantelées. Décembre 1337 : La Flandre est entraînée de fait dans la guerre franco-anglaise et l’arrêt des importations de laine anglaise engendre rapidement une situation difficile. Un bourgeois de Gand, Jacques d’Artevelde, réclame l’alliance avec l’Angleterre et dénonce l’attitude du comte, acquis au camp français. Jacques d’Artevelde négocie avec le duc de Brabant et le comte de Hainaut et obtient la reprise des exportations de laine anglaise. Ypres et Bruges se solidarisent avec Gand. Le 3 décembre 1339, Flandre et Brabant déclarent s’unir contre tout agresseur – c’est la France qui est visée. 1338 : Anvers devient étape de la laine anglaise importée sur le continent. 1339 : Le comte Renaud II de Gueldre est fait duc par l’empereur Louis V. 26 janvier 1340 : Alors que Louis de Nevers a quitté son comté pour gagner Paris, Édouard III fait son entrée à Gand où il est rejoint par les ducs de Brabant et de Gueldre et où il est reconnu comme roi de France par les magistrats de la ville ainsi que par ceux de Bruges et d’Ypres. Il promet à Bruges qu’elle deviendra pendant quinze ans l’étape continentale des laines anglaises. Juin 1340 : La flotte française rassemblée à l’embouchure du Zwin, à l’Écluse, est détruite par les Anglais. 25 septembre 1340 : Après leur échec devant Tournai, les rebelles doivent signer la trêve d’Esplechin. 1345 : Extinction de la lignée masculine des comtes de Hollande. C’est une fille de Guillaume II, Marguerite, épouse de l’empereur Louis de Bavière, qui hérite des comtés de Hollande, Zélande et Hainaut qu’elle va abandonner à son fils Guillaume. Son frère Albert lui succédera en 1377 ou 1379 et son fils Guillaume IV deviendra à son tour comte de Hollande, de Zélande et du Hainaut. Il n’aura que des filles de son mariage avec Marguerite de Bourgogne, fille du duc Philippe le Hardi qui pourra récupérer les comtés. Mai 1345 : Tisserands et foulons s’affrontent à Gand. Le 17 juillet, d’Artevelde est assassiné par la populace qui le rend responsable des difficultés nées de la guerre. 26 août 1346 : Le comte Louis de Nevers est tué à la bataille de Crécy. 1349 : Louis de Male, successeur de Louis de Nevers, réussit à rétablir son autorité sur la Flandre où le pouvoir des tisserands gantois est brisé. Gendre du duc de Brabant dont il a épousé la fille Marguerite, Louis de Male veut assurer la neutralité de son comté et, dès le 25 novembre 1348, a conclu à Dunkerque la paix avec l’Angleterre. Il pratiquera ensuite une politique de bascule entre les deux adversaires, fondée avant tout sur la recherche de son intérêt. 3 janvier 1356 : Les villes brabançonnes imposent à Wenceslas, frère de l’empereur Charles IV de Luxembourg et gendre du défunt duc de Brabant Jean III, la « Charte de la Joyeuse Entrée » qui définit les libertés du pays. Le comte de Flandre Louis de Male, marié à Marguerite, fille elle aussi du défunt duc Jean III, convoitait pour sa part le Brabant et engagea la guerre en juin 1356. Vainqueur le 17 août à Scheut, il peut s’emparer de Bruxelles, Malines, Anvers, Louvain, Tirlemont, Gembloux et Nivelles et s’y fait reconnaître duc de Brabant. Dès le 24 octobre, Bruxelles se révolte et Wenceslas et son épouse Jeanne reprennent le contrôle du Brabant. La paix est finalement conclue à Ath, le 4 juin 1357. Louis de Male garde Malines et Anvers et fait reconnaître ses droits à la succession au trône ducal. 1378 : Début du Grand Schisme d’Occident. Le clergé de Gand et le comte prennent parti pour Urbain VI, le pape de Rome, et contre Clément VII, celui d’Avignon. Le comte veut surtout, dans cette affaire, prendre ses distances avec son suzerain, le roi de France. 1381 : La révolte gantoise dite des « chaperons blancs » est vaincue à Nevele mais la lutte se poursuit entre Gantois et Brugeois. 27 novembre 1382 : L’armée du roi de France Charles V écrase les tisserands gantois rebelles à Roosebeke. 30 janvier 1384 : Mort de Louis de Male. C’est le mari de sa fille Marguerite, le duc de Bourgogne Philippe le Hardi, fils du roi de France Jean II le Bon, qui devient alors comte de Flandre. Il rétablit la paix dans le comté en accordant une amnistie générale, le 18 décembre 1385.

Le temps des grands ducs d’Occident

27 avril 1404 : Philippe le Hardi meurt à Hal. Il a préparé, par une habile politique matrimoniale, le rassemblement des terres néerlandaises, en mariant notamment son fils Jean à la fille du comte de Hainaut et sa fille Marguerite à l’héritier du dit comté. Son intervention au profit du Brabant contre la Gueldre prépare également la réunion de cette principauté à l’ensemble des Pays-Bas bourguignons. 1406 : Antoine, frère cadet de Jean sans Peur, devient duc de Brabant et l’Escaut est désormais un fleuve bourguignon. Novembre 1407 : Le duc de Bourgogne et comte de Flandre Jean sans Peur fait assassiner Louis d’Orléans, ce qui déclenche en France la guerre civile opposant Armagnacs et Bourguignons. 23 septembre 1408 : Jean sans Peur écrase les Liégeois révoltés. Ils avaient déposé l’évêque Jean de Bavière pour le remplacer par Thierry de Horn, tué au cours de la bataille. En contrepartie de son intervention, le duc obtient la liberté de circulation pour ses troupes dans la principauté de Liège, une énorme contribution de guerre et le démantèlement des remparts de Dinant. En 1409, le second mariage d’Antoine de Brabant, veuf de sa première épouse, avec Élizabeth de Goerlitz fait entrer le duché de Luxembourg dans l’espace bourguignon. À l’extinction de la postérité mâle de la Maison de Bourgogne, le Luxembourg passera sous la domination des Habsbourg. 1415 : Le duc Antoine est tué à la bataille d’Azincourt. 1418 : Jean sans Peur marie son neveu Jean IV de Brabant à Jacqueline de Bavière, la fille unique de Guillaume de Bavière, comte de Hainaut, Hollande, Zélande et seigneur de Frise. 10 septembre 1419 : Jean sans Peur est assassiné à Montereau lors d’une rencontre avec le Dauphin, le futur Charles VII. Philippe le Bon succède alors à son père. 21 mai 1420 : Traité de Troyes par lequel Henri V d’Angleterre se voit, avec l’appui de Philippe le Bon, confier le royaume de France. Sa mort prématurée en 1 422 et celle du roi Charles VI la même année placent le duc de Bourgogne en position d’arbitre entre le Dauphin de Bourges et Henri VI d’Angleterre qui n’est qu’un enfant. 1421: L’inondation dite de la Sainte-Élizabeth noie des dizaines de villages. 1424 : C’est à cette date que remonte le plus ancien manuscrit connu de l’Imitation de Jésus Christ de Thomas A Kempis, qui témoigne du remarquable élan mystique que connaissent alors les Pays-Bas, illustré à la génération précédente par Ian Ruysbroeck l’Admirable (1293-1381) et par l’essor des béguinages dans toutes les grandes cités flamandes. 1425 : Création de l’Université de Louvain par le duc Jean IV de Brabant. 3 juillet 1428 : Par la paix de Delft, Jacqueline de Bavière cède Hollande, Frise, Zélande et Hainaut au duc de Bourgogne. 1429 : Philippe le Bon crée l’ordre de la Toison d’Or. 1430 : La mort de Philippe de Saint Pol place Philippe le Bon à la tête du Brabant, du Limbourg et du marquisat d’Anvers. Le « grand-duc du Ponant » règne désormais de la Frise au Jura et des côtes de la mer du Nord au Rhin. 1432 : Jean Van Eyck réalise le retable de l’Agneau Mystique conservé à Gand. Il peint deux ans plus tard le portrait des époux Arnolfini. 20 septembre 1435 : Par le traité d’Arras, Philippe le Bon se rapproche du roi de France Charles VII et se voit exempté, à titre personnel, de tout hommage au roi de France. Juillet 1453 : Le duc de Bourgogne et comte de Flandre brise la révolte des Gantois. 1464 : Le Florentin Tomaso Portinari devient le chef du comptoir brugeois de la banque Médicis. 16 juillet 1465 : Les troupes de Louis XI sont vaincues par celles de la Ligue du Bien Public suscitée par Charles le Téméraire à Montlhéry. Le jeune comte de Charolais entend effacer la politique d’Antoine et de Jean de Croy qui avaient conseillé à Philippe le Bon, devenu sénile, de vendre au roi de France les cités de la Somme. Par les traités de Conflans et de Saint-Maur, la Bourgogne récupère Péronne, Montdidier et Roye. Août 1465 : Les Bourguignons mettent à sac Dinant. 22 décembre 1465 : Par le traité de Saint-Trond Charles le Téméraire impose ses volontés aux Liégeois révoltés. 15 juin 1467 : Mort de Philippe le Bon. Le 26 octobre Charles le Téméraire écrase de nouveau les Liégeois rebelles à Brusthem. 1468 : Entrevue de Péronne au cours de laquelle le Téméraire apprend la nouvelle révolte de Liège. Louis XI, qui l’a fomentée, est obligé de s’associer à la campagne menée contre la ville, qui est pillée et incendiée. 3 décembre 1470 : Louis XI déclare la guerre au duc de Bourgogne mais celui-ci le bat en Picardie et aide Édouard IV d’York à prendre le pouvoir en Angleterre. Louis XI est bientôt obligé d’accepter, lors de la signature du traité du Crotoy, la confirmation des clauses de celui de Péronne. Par les ordonnances de Thionville, le Téméraire crée le Parlement de Malines, cour suprême de justice servant de juridiction d’appel pour toutes les provinces des Pays-Bas, et réunit, également à Malines, une Chambre des Comptes regroupant celles de Lille et de Bruxelles. Louis XI organise, en favorisant les foires françaises, en interdisant l’exportation des céréales vers les Pays-Bas et en encourageant la piraterie contre les pêcheurs flamands, une véritable guerre économique contre les provinces les plus riches du duché bourguignon. 7 janvier 1477 : Après avoir été vaincu par les milices des cantons suisses à Granson et à Morat, le Téméraire est tué devant Nancy. 1477 : La fille du duc défunt, Marie de Bourgogne, doit signer à Gand où elle est séquestrée par les représentants des métiers, le Grand Privilège qui redonne à la ville une large autonomie. D’autres chartes provinciales sont concédées au cours des mois suivants, qui ruinent l’œuvre unificatrice et centralisatrice des ducs bourguignons. 19 août 1477 : Marie épouse l’archiduc Maximilien de Habsbourg, fils de l’empereur d’Allemagne. 7 août 1479 : Maximilien bat à Guinegatte les troupes de Louis XI. Avec l’appui de Marguerite d’York, veuve de Charles le Téméraire, il reconstitue contre Louis XI l’alliance anglo-bourguignonne. 27 mars 1482 : Marie de Bourgogne meurt d’une chute de cheval. 23 décembre 1482 : Sous la pression des Gantois, Maximilien signe avec Louis XI le traité d’Arras, qui replace le duché de Bourgogne dans le royaume de France et promet au dauphin Charles la jeune Marguerite d’Autriche dotée de l’Artois, du Mâconnais, de la Franche-Comté et de l’Auxerrois, promesse qui demeurera sans suite. 1485 : Création de la Bourse d’Anvers. 1488 : L’empereur Maximilien transmet à Anvers les privilèges de Bruges que de nombreux marchands quittent alors pour Anvers. 1489 : Hans Memling réalise la Châsse de sainte Ursule, conservée aujourd’hui à l’Hôpital Saint-Jean de Bruges. 1493 : Maximilien de Habsbourg succède à l’empereur Frédéric III. En 1494, il transmet les Pays-Bas à son fils Philippe le Beau qui restaure l’autorité, entamée par les concessions que les villes avaient arrachées à Marie de Bourgogne. 1496 : Conclusion d’un traité de commerce avec l’Angleterre. Philippe épouse la même année, le 18 octobre, Jeanne, la fille des Rois Catholiques d’Espagne. Don Juan, le frère de Jeanne, s’est marié pour sa part avec Marguerite, la sœur de Philippe le Beau, mais il mourra le 4 octobre 1497, suivi par l’infant Miguel le 20 juillet 1500, ce qui offrira aux Habsbourg la succession espagnole. 1499 : Les Portugais installent l’étape des épices à Anvers. 1504 : Philippe le Beau rétablit le Parlement de Malines supprimé en 1477 après la mort du Téméraire. 25 septembre 1506 : Mort de Philippe le Beau. Les États repoussent l’offre de tutorat du roi de France Louis XII et préfèrent se tourner vers l’empereur Maximilien qui confie la régence à sa fille Marguerite d’Autriche, veuve de Don Juan d’Espagne puis de Philibert de Savoie et tante du jeune Charles né en 1500, l’aîné des deux garçons issus du mariage de Philippe le Beau et de Jeanne la Folle. Chargée du gouvernement des Pays-Bas, elle doit compter avec les réserves de la noblesse, l’hostilité des villes et les intrigues de Guillaume de Croy, seigneur de Chièvres, gouverneur de l’archiduc Charles. 1509 : Érasme de Rotterdam rédige son Éloge de la Folie. Vers 1510 : Jérôme Bosch peint son grand triptyque du Jardin des Délices conservé aujourd’hui au Prado. 1515 : Proclamation de la majorité de l’archiduc Charles âgé de quinze ans.

Des dix-sept provinces de Charles-Quint à l’indépendance des Pays-Bas

Mars 1516 : Au lendemain de la mort de Ferdinand d’Aragon Charles devient Charles Ier, roi de Castille et d’Aragon. Il ne quittera les Pays-Bas qu’en juin 1517 pour se rendre en Espagne. 28 juin 1519 : Charles est élu Empereur sous le nom de Charles V (Charles Quint). 1520 : Première traduction en néerlandais des œuvres de Luther. 1er juillet 1523 : Deux moines augustins, Henri Voes et Jan van Essen, sont brûlés à Anvers pour avoir mis en cause les dogmes catholiques. Dans les Pays-Bas septentrionaux, Jan de Bakker (Johannes Pistorius) est brûlé à La Haye en 1526. 14 janvier 1526 : Par le traité de Madrid, François Ier, vaincu et fait prisonnier l’année précédente à Pavie, doit abandonner à Charles Quint le duché de Bourgogne et tous ses droits de suzeraineté sur la Flandre, l’Artois et Tournai. 1529 : La paix de Cambrai ou « paix des Dames », négociée entre Louise de Savoie, la mère de François Ier et Marguerite d’Autriche voit Charles Quint perdre la Bourgogne. 1er décembre 1530 : Mort à Malines de Marguerite d’Autriche. Marie, sœur de Charles Quint et reine douairière de Hongrie, la remplace au gouvernement des Pays-Bas, qu’elle conservera pendant vingt ans. 1535 : Écrasement des anabaptistes de Münster, secte millénariste apparue en 1529 dont le chef, Jean de Leyde, est un Néerlandais. 1538 : Charles Quint impose Corneille de Berghes comme prince-évêque de Liège, remplacé ensuite par Georges d’Autriche. La principauté est devenue un protectorat impérial. Les forteresses de Mariembourg, de Charlemont et de Philippeville sont construites sur les frontières méridionales de la principauté, face à la France. 1540 : Après une nouvelle révolte, Gand se soumet à l’autorité de l’Empereur et perd une bonne partie de ses privilèges traditionnels. C’est par ailleurs au cours des années 1540 que le calvinisme réalise des progrès rapides aux Pays-Bas, bien que l’hérésie y fût punie de mort. Le luthéranisme n’avait séduit que quelques fidèles depuis les années 1520. 1542 : Les jésuites s’installent aux Pays-Bas où ils établiront une province de leur ordre en 1564. Avec eux, franciscains et augustins seront l’avant-garde de la reconquête catholique dans les Pays-Bas méridionaux. 1544 : L’anatomiste bruxellois André Vésale devient médecin de Charles Quint. Il préconise le recours à la méthode expérimentale en s’attaquant aux théories médicales des Anciens, notamment à celle de Galien. Charles Quint annexe la Frise (1533) le duché de Gueldre et le comté de Zutphen et parachève ainsi l’unité des Pays-Bas, désignés à partir du traité de Venloo (1543), sous le nom des « Dix-Sept Provinces » – duchés de Brabant, de Limbourg, de Luxembourg et de Gueldre, comtés de Flandre, d’Artois, de Hainaut, de Hollande, de Zélande, de Namur, et de Zutphen, marquisat d’Anvers, seigneuries de Frise, de Malines, d’Utrecht, d’Overijssel et de Groningue. Le gouvernement des dix-sept Provinces était assisté de trois conseils collatéraux : le Conseil d’État, chargé des affaires diplomatiques et militaires et de la collation des grandes dignités civiles et ecclésiastiques, le Conseil privé, doté de pouvoirs législatifs, héritier de l’ancien Conseil d’État de Charles le Téméraire, enfin le Conseil des Finances chargé d’administrer les domaines, de percevoir l’impôt et de contrôler les Chambres des Comptes. Ces nouvelles structures témoignent d’une volonté de centralisation mais l’Empereur ne remet pas en cause les États Généraux et provinciaux. 1548 : Par la Transaction d’Augsbourg, Charles Quint regroupe les dix-sept provinces des Pays-Bas et la Franche-Comté dans le Cercle de Bourgogne qui était indépendant de l’Empire mais que celui-ci devait défendre en cas de besoin. Après le traité de Madrid de 1526, qui avait obligé le roi de France à renoncer à son ancienne suzeraineté sur la Flandre et l’Artois, l’acte d’Augsbourg mettait un terme définitif à la division apparue lors du traité de Verdun de 843, qui faisait de l’Escaut une frontière séparant la Flandre, relevant à l’ouest du royaume de France, des territoires dépendant à l’est de l’Empire. 1549 : Charles Quint promulgue une Pragmatique Sanction organisant la succession dans les dix-sept provinces, de telle sorte que « les pays de par-deçà soient conservés en une masse et soient inséparablement possédés par un seul prince. » 1553 : Après les autres marchands qui sont partis au cours des décennies précédentes, les Hanséates quittent Bruges, que l’ensablement du Zwin condamne, pour Anvers. 25 octobre 1555 : Abdication de Charles Quint à Bruxelles, en faveur de son fils Philippe, de son pouvoir sur les Pays-Bas. Il abdiquera également de son pouvoir sur l’Espagne en 1556 et mourra à Yuste, en Extremadure, le 21 septembre 1558. 1557 : Emmanuel-Philibert de Savoie, lieutenant-général des Pays-Bas espagnols écrase les troupes françaises du connétable Anne de Montmorency à Saint-Quentin et prend Noyon. Juillet 1558 : Le comte d’Egmont écrase le maréchal de Termes à Gravelines. 1559 : Division des Pays-Bas en dix-huit évêchés dépendant des trois archevêchés de Malines, Cambrai et Utrecht. 3 avril 1559 : La paix de Cateau-Cambrésis met un terme à la guerre franco-espagnole et rend Bouillon à la principauté de Liège. 24 août 1559 : Philippe II quitte les Pays-Bas en s’embarquant à Flessingue pour l’Espagne, après avoir confié le gouvernement à sa demi-sœur Marguerite de Parme. Elle dépend en fait du Conseil d’État présidé par le franc-comtois Antoine Perrenot de Granvelle (qui se voit attribuer en 1561 l’archevêché de Malines) et où siègent, à côté des représentants de l’Espagne, des princes locaux comme le comte d’Egmont et le prince Guillaume d’Orange. 1562 : Création de l’Université de Douai. Pieter Bruegel peint la même année Le Triomphe de la Mort. 1564 : Le rappel de Granvelle, qui était très impopulaire, ne désarme pas le mécontentement de la noblesse protestante qui cherche à imposer sans succès le « Compromis des Nobles ». 5 avril 1566 : Une délégation d’opposants est reçue par Marguerite de Parme. Les opposants prennent alors le nom de « Gueux ». 1566 : Installation de la nouvelle Bourse d’Anvers dont la prospérité n’a cessé de se développer depuis le début du XVIe siècle et qui s’est imposée comme le centre de redistribution dans toute l’Europe du Nord des épices ramenées d’Asie du Sud à Lisbonne par les marins portugais. L’agriculture la plus productive de l’époque, le tissage, les constructions navales, la métallurgie et le dynamisme du commerce font alors des Pays-Bas l’une des plus riches régions d’Europe. Outre Anvers, dont la population dépasse 100 000 habitants au milieu du XVIe siècle, Bruxelles, Liège, Tournai, Namur et Audenarde connaissent un brillant essor. 19 août 1566 : Les calvinistes envahissent les églises anversoises et les saccagent en détruisant notamment de nombreuses œuvres d’art. Cette fureur iconoclaste marque le début des troubles religieux aux Pays-Bas où le calvinisme n’a cessé de progresser au cours des années précédentes. Le mouvement iconoclaste gagne en effet rapidement Armentières, Ypres, Gand, la Frise et la Hollande. 1567 : Les pasteurs de Bray et La Grange organisent à Valenciennes un régime théocratique de type genevois. Les calvinistes prennent le contrôle de Tournai, Utrecht, Bois-le-Duc et Maastricht. En août, Don Fernando Alvarez de Toledo, duc d’Albe, s’avance vers Bruxelles à la tête de ses tercios en ayant reçu du roi Philippe II les pleins pouvoirs pour restaurer l’ordre. Le duc institue le Conseil des Troubles qui engage une vigoureuse répression. 5 juin 1568 : Les comtes d’Egmont et de Hornes sont décapités à Bruxelles, alors que les troupes du protestant Louis de Nassau viennent de remporter le combat de Heiligerlee. L’insurrection se développe et les « gueux de mer » entretiennent la piraterie depuis la côte frisonne ou anglaise. 1569-1572 : Christophe Plantin, le célèbre imprimeur anversois, réalise les huit volumes de sa Bible polyglotte. 1er avril 1572 : Guillaume de La Marck et ses gueux de mer s’emparent de La Brielle, en Zélande. Flessingue et Arnemuiden tombent à leur tour. 24 mai 1572 : Assisté de troupes françaises, Louis de Nassau s’empare de Mons ; les États de Hollande réunis à Dordrecht proclament Guillaume d’Orange stadhouder (toujours au nom de Philippe II) mais le massacre de la Saint-Barthélémy, survenu à Paris en août, exclut désormais un soutien français aux protestants des Pays-Bas et Mons doit capituler. Replié en Zélande, Guillaume d’Orange affirme alors publiquement son adhésion au calvinisme. 1573 : Défaite de la flotte espagnole à Enkhuizen mais prise de Haarlem par les forces du Roi Catholique. Philippe II remplace le duc d’Albe par Don Luis de Zuniga y Requeséns qui proclame une amnistie et supprime le Conseil des Troubles. Il meurt au bout de deux ans et la contestation s’amplifie. 3 octobre 1574 : Prise de Leyde par les protestants et création de l’Université l’année suivante. 4 novembre 1576 : Les tercios espagnols mutinés parce qu’ils ne recevaient pas leur solde mettent Anvers à sac. 8 novembre 1576 : La Pacification de Gand proclamée par les États Généraux établit une paix inviolable entre les dix-sept provinces, supprime les poursuites contre les hérétiques, exige le départ des soldats espagnols et étrangers, interdit l’exercice du culte catholique en Zélande et en Hollande et autorise celui du culte calviniste dans les autres provinces. Le nouveau gouverneur, Don Juan d’Autriche, le vainqueur de Lépante, négocie l’Édit perpétuel de Marche-en-Famenne en vue d’obtenir le maintien du catholicisme et de l’autorité royale mais le refus de Guillaume d’Orange d’accepter le premier point conduit Don Juan à se réfugier à Namur pour y préparer la contre-offensive. 23 septembre 1577 : Guillaume d’Orange fait son entrée à Bruxelles. Les États destituent Don Juan et offrent le gouvernement à l’archiduc Mathias, jeune frère de l’empereur Rodolphe II. 1er octobre 1578 : Après avoir battu les rebelles à Gembloux, Don Juan d’Autriche meurt près de Namur. C’est le prince de Parme, Alexandre Farnèse, qui lui succède. 6 janvier 1579 : Les représentants des États du Hainaut et d’Artois signent à Arras la paix avec Philippe II. Les excès sanglants du fanatisme calviniste et les destructions engendrées par l’iconoclasme suscitent une réaction catholique qu’Alexandre Farnèse va exploiter en s’engageant à respecter les libertés locales et en se posant en défenseur du catholicisme. Contre la Confédération d’Arras, les calvinistes constituent bientôt l’Union d’Utrecht (23 janvier) regroupant Hollande – Guillaume d’Orange est entré à Amsterdam l’année précédente –, Gueldre, Zélande et Frise auxquelles se joignent initialement Gand, Bruges, Ypres, Anvers, Malines, Bruxelles, Tournai et Maastricht. La division des dix-sept provinces était désormais acquise. 29 novembre 1581 : Le prince de Parme prend Tournai aux calvinistes. La malheureuse tentative du duc d’Anjou, le frère du roi de France Henri III, pour tenter de se mettre à la tête des protestants et établir sa souveraineté sur les Pays-Bas profite au camp espagnol. 1583 : François d’Anjou est chassé d’Anvers par la population. Alexandre Farnèse reprend Nieuport, Menin, Ypres, Bruges et Dixmude. Guillaume d’Orange épouse la fille de l’amiral de Coligny, tué lors de la Saint-Barthélemy. 1584 : Assassinat à Delft de Guillaume d’Orange par Balthazar Gérard (10 juillet) et siège d’Anvers par Alexandre Farnèse. La ville tombe l’année suivante, le 17 août, et 40 % des habitants la quittent pour partir vers les Pays-Bas septentrionaux où, en 1611, la moitié des principaux marchands d’Amsterdam seront originaires des provinces méridionales. La fermeture des bouches de l’Escaut et la conquête par les Hollandais des îles à épices portugaises vont entraîner la ruine commerciale d’Anvers au profit des ports des Pays-Bas du Nord. 1586 : Alexandre Farnèse remporte une série de victoires dans le nord-est des Pays-Bas. 1588 : Défaite de l’Invincible Armada espagnole dans sa tentative de débarquement en Angleterre. Philippe II a mobilisé Alexandre Farnèse pour cette opération désastreuse et l’envoie ensuite guerroyer en France. C’est à Arras qu’il meurt le 2 décembre 1592. Le gouvernement général des Pays-Bas est alors confié à l’archiduc Ernest, l’un des fils de l’empereur Maximilien II, qui reperd rapidement les provinces du Nord. 1588 : Maurice de Nassau, fils de Guillaume d’Orange, devient stadhouder de Hollande et l’indépendance des Provinces-Unies est proclamée. 11 février 1596 : Un frère d’Ernest, l’archiduc Albert – qui a été vice-roi du Portugal – vient le remplacer à Bruxelles. Il prend aux rebelles Guines, Ardres et Hulst (en Zélande). 1595-1597 : Cornelis van Houtman et De Keyser contournent l’Afrique, hivernent à Madagascar et vont jusqu’à Java d’où ils ramènent une riche cargaison. 1596-1597 : Expédition de Barentz dans la mer de Kara à la recherche du passage du nord-est. Il meurt au cours de l’hivernage en Nouvelle Zemble. 2 mai 1598 : Le traité de Vervins rétablit entre la France et l’Espagne la paix rompue depuis 1595. 6 mai 1598 : Philippe II cède les Pays-Bas à sa fille l’infante Isabelle et à son futur époux l’archiduc Albert. L’Espagne conservait en réalité l’essentiel de son pouvoir sur les Pays-Bas, notamment à travers les clauses de l’accord relatives aux successions et aux mariages.

Les Provinces-Unies du Siècle d’or au XVIIIe siècle

Formées par les provinces des Pays-Bas septentrionaux confédérées en 1579 dans l’Union d’Utrecht, les Provinces-Unies sont au nombre de sept. Trois sont surtout continentales et paysannes (Groningue, Overijssel, Gueldre), quatre sont tournées vers la mer et le Zuiderzee (Frise, Utrecht, Hollande, Zélande). Au cours des guerres conduites contre l’Espagne – interrompues en 1609 par la trêve de Douze Ans puis reprises de 1621 à 1648, jusqu’au traité de Münster –, les confédérés d’Utrecht ont réalisé diverses annexions : au nord, l’ancien comté de Drenthe, au sud une partie de la Flandre et du Brabant (avec Bréda) et la région de Maastricht. Ces acquisitions, propriété commune des sept provinces, portent le nom de Pays de la Généralité. Les Provinces-Unies ainsi constituées disposent d’une façade littorale allant des bouches de l’Escaut jusqu’au golfe du Dollart. Elles contrôlent les débouchés de trois grands fleuves – Rhin, Meuse et Escaut, ce qui, dans le cas du dernier, isole de la mer libre Anvers demeurée au sein des Pays-Bas espagnols. Les différentes provinces ne disposent pas des mêmes ressources. Celles de l’est sont avant tout paysannes, pauvres et faiblement peuplées ; celles de l’ouest, dont le territoire a été patiemment conquis sur l’eau des fleuves ou sur la mer, disposent de terres fertiles et tirent de la pêche, du tissage et du commerce maritime d’importantes ressources. Dynamique et entreprenante, la bourgeoisie calviniste profite pleinement du déclin des Pays-Bas méridionaux, spécialement affectés par les guerres religieuses de la seconde moitié du XVIe siècle, pour créer dans les Provinces-Unies un laboratoire du capitalisme commercial devenu au XVIIe siècle, pendant plusieurs décennies, le premier pôle économique de l’Europe : Amsterdam succède à Venise et à Anvers – et précède Londres – dans le rôle de « ville-monde » si bien décrit par Fernand Braudel. De toutes les provinces, la Hollande apparaît comme la plus active et ses villes – Amsterdam, Leyde, Rotterdam, Haarlem et La Haye – ont profité en priorité de l’émigration des protestants partis des Pays-Bas méridionaux. Nées de la lutte contre l’ennemi commun espagnol, les Provinces-Unies ont ensuite préservé de larges autonomies locales. Chaque ville dispose d’un pouvoir municipal représenté par son bourgmestre et ses échevins. Des délégués des villes forment ensuite des États provinciaux chargés de voter les lois particulières à chaque province. Chacune d’entre elles emploie un conseiller-pensionnaire responsable de l’administration et un stadhouder chargé du pouvoir exécutif. Les provinces envoient des délégués à La Haye pour y constituer les États Généraux chargés de diriger la politique étrangère et de fixer les charges fiscales et militaires de chacune. Le pensionnaire de Hollande – la plus importante des provinces, celle où se réunissent les États Généraux – joue évidemment un rôle prépondérant de conseiller des États, ce qui lui vaut son titre de « Grand Pensionnaire ». Nommé pour cinq ans et indéfiniment rééligible, il est devenu, assisté d’un Conseil d’État et d’une Chambre des Comptes, l’un des principaux personnages de l’État. La famille d’Orange, qui a joué le premier rôle dans la lutte contre l’Espagne (Guillaume d’Orange et ses deux fils, Maurice et Frédéric-Henri de Nassau) occupe dans plusieurs provinces la fonction de stadhouder ; celles de capitaine et d’amiral général lui ont également été attribuées, ce qui lui donne un poids particulier dans le système institutionnel des Provinces-Unies où le nom de « Stadhouder » finit par désigner le chef de la maison d’Orange. L’histoire intérieure des Provinces-Unies est donc tout naturellement marquée, au XVIIe siècle, par l’opposition entre, d’une part, la grande bourgeoisie d’Amsterdam – désireuse d’affirmer la puissance de la province de Hollande, favorable à la paix dans la mesure où elle favorise le développement du commerce et attaché à un protestantisme modéré – et, d’autre part, les princes d’Orange qui, calvinistes acharnés, bénéficient du soutien de la masse du peuple et aspirent à la monarchie. 1600 : Ouverture de la première faïencerie à Delft. 1602 : Création de la Compagnie hollandaise des Indes orientales, la VOC ou Verenigde Oost Indische Compagnie. À la faveur de l’annexion du Portugal par l’Espagne (1580-1640), les Hollandais s’emparent de plusieurs colonies portugaises : certains comptoirs des Indes comme Cochin, Ceylan, Malacca, la majeure partie des îles de la Sonde, les Moluques et, en Amérique du Sud, une partie de la Guyane. Ils s’implantent également pour quelques années au Brésil, à Pernambouc, et vont par ailleurs commercer jusqu’en Chine à Canton et au Japon à Nagasaki. 1607 : Conclusion d’un armistice de huit mois entre les Provinces-Unies et l’Espagne. 1609 : Le Pensionnaire des États de Hollande, Oldenbarneveldt, impose au stadhouder Maurice de Nassau la trêve de Douze Ans conclue avec l’Espagne. 1609 : Création de la Banque d’Amsterdam. 1613 : Fondation de la Bourse d’Amsterdam. 1614 : Lemaire fonde la Compagnie du Sud et trouve au sud de la Terre de Feu le détroit qui porte son nom. 1616 : Frans Hals peint le Banquet des officiers de Saint Georges. 1618 : Synode de Dordrecht. Victoire des gomaristes, affirmant que la prédestination est antérieure à la chute d’Adam, sur les arminiens, partisans de conceptions plus libérales. 1619 : À l’initiative de Maurice de Nassau un synode protestant condamne Oldenbarneveldt à mort sous prétexte d’hérésie ; il est exécuté le 1er mai. Maurice de Nassau jusqu’en 1625, puis son frère Frédéric-Henri jusqu’en 1647, gouvernent la République en véritables dictateurs. 1619 : Création, dans l’île de Java, du comptoir de Batavia par Jan Pietersz Coen, un gouverneur énergique qui sera ensuite remplacé par Van Diemen. 1621 : Reprise de la guerre avec l’Espagne. Des colons hollandais s’installent dans l’île de Manhattan, à l’embouchure de l’Hudson, et y fondent la Nouvelle Amsterdam – la future New York. La même année voit la création de la Compagnie hollandaise des Indes occidentales. 1625 : Le prince Justin de Nassau capitule dans Bréda. Frédéric-Henri de Nassau succède à son frère Maurice. 1627 : Exil du juriste Grotius en France jusqu’en 1634. Il s’évade après avoir été condamné pour arminianisme. Il sera l’auteur du De jure bellae ac pacis (Le droit de la guerre et de la paix) qui formule les premiers principes du droit international. 1629 : Descartes s’installe aux Pays-Bas. Son Discours de la méthode est publié à Leyde en 1637. 15 juin 1630 : Traité d’alliance entre les Provinces-Unies et la France. 1637 : Frédéric-Henri de Nassau prend le titre d’Altesse, et ne dissimule pas son ambition de créer une monarchie. Le 10 octobre, il reprend Bréda. 21 septembre 1639 : L’amiral Tromp remporte sur la flotte espagnole la victoire des Dunes, au large de Gravelines. 1641 : Les Hollandais enlèvent Malacca aux Portugais. 1642 : Rembrandt peint La Ronde de nuit. 1642 : Abel Tasman découvre pour le compte de la VOC la Tasmanie et l’île méridionale de la Nouvelle Zélande après avoir fait le tour de l’Australie. 19 février 1644 : Traité d’alliance et de commerce entre la France et les Provinces-Unies. 30 janvier 1648 : Traité de Münster. L’Espagne reconnaît les Provinces-Unies. 1650 : Fils de Frédéric-Henri, Guillaume II, stadhouder dans six provinces comme l’avait été son père, désireux d’imposer à son profit une monarchie héréditaire, tente un coup de force contre Amsterdam, qui constitue le foyer d’opposition à ses prétentions mais il échoue et meurt peu après, à l’âge de vingt-quatre ans. Les États de Hollande profitent du désarroi de la maison d’Orange-Nassau et suppriment alors les charges de capitaine et d’amiral général alors que les charges de stadhouder demeurent vacantes dans plusieurs provinces. Dans ces conditions, c’est le Grand Pensionnaire de Hollande qui dispose désormais de l’autorité la plus grande au sein de la République. Octobre 1651 : Le Parlement anglais vote l’Acte de Navigation qui réserve aux seuls navires anglais l’importation de denrées de provenance coloniale et ne permet plus aux étrangers d’introduire en Angleterre que les produits originaires de leur propre pays. C’est un coup très dur pour les « rouliers des mers » hollandais. 1652 : Guerre anglo-hollandaise. L’amiral hollandais Tromp bat l’amiral anglais Blake au large de Douvres et le contraint à se réfugier dans l’estuaire de la Tamise. La paix est rétablie en 1654 par le traité de Westminster. Las de la guerre, les bourgeois d’Amsterdam se résignent à accepter l’Acte de Navigation et l’expulsion de leur territoire du fils du défunt roi d’Angleterre Charles Ier – qui sera restauré en 1660 sous le nom de Charles II. 1652 : Les Hollandais s’installent au Cap de Bonne Espérance. 1653-1672 : Jean de Witt exerce les fonctions de Grand Pensionnaire de Hollande. 1654 : Les États de Hollande votent l’Acte d’Exclusion par lequel ils s’engagent à ne jamais donner à Guillaume d’Orange, fils posthume de Guillaume II aucun pouvoir civil ou militaire dans leur province. Dans le même esprit, ils s’engagent à opposer le veto de la province à une éventuelle nomination comme capitaine ou amiral général d’un représentant de la famille d’Orange ; ces décisions devaient être prises à l’unanimité par les États Généraux. 1656 : Le philosophe juif Spinoza est exclu de la synagogue. Il publiera en 1679 son Tractatus theologico-politicus. vers 1658: Vermeer peint la Vue de Delft. 1665 : Nouvelle guerre anglo-hollandaise. Elle est marquée par la prise de la Nouvelle Amsterdam que défendait le gouverneur hollandais Pieter Stuyvesant, qui doit se rendre au duc d’York, frère du roi Charles II d’Angleterre et futur Jacques II. En 1667, l’amiral hollandais Ruyter s’avance dans la Tamise jusqu’aux portes de Londres pour y détruire les chantiers navals. Le traité de Bréda met fin à la guerre en juillet 1667. 1672-1678 : Guerre de Hollande menée par Louis XIV contre les Provinces-Unies. L’armée française franchit le Rhin le 12 juin au gué de Tolhuis. Le 20 juin, l’ouverture des écluses de Muyden permet, en noyant une vaste superficie des terres patiemment gagnées sur l’eau, d’empêcher la prise d’Amsterdam et de La Haye. Les délégués des États proposent la paix à Louis XIV lors des conférences d’Utrecht mais celui-ci réclame davantage que les pays de la Généralité et le double de l’indemnité proposée. Il exige d’autre part le plein exercice du culte catholique et la frappe de médailles expiatoires que des ambassadeurs viendraient lui remettre chaque année à Versailles. Ces exigences suscitent un sursaut d’indignation que va exploiter le jeune prince Guillaume d’Orange. La révolution éclate alors en de nombreuses villes contre l’autorité de la bourgeoisie républicaine d’Amsterdam. Guillaume d’Orange est proclamé stadhouder dans cinq provinces sur sept, dont celle d’Amsterdam. Il reçoit également les titres d’amiral général et de capitaine général. Août 1672 : Après l’assassinat de Jean de Witt et de son frère Corneille (20 août), le prince d’Orange cumule la totalité du pouvoir. Une tentative de Luxembourg contre La Haye, lancée au cours de l’hiver sur les canaux gelés, échoue complètement. 1674 : Charles II d’Angleterre, qui s’était allié à Louis XIV contre les Provinces-Unies, conclut avec elles une paix séparée. Face à la coalition suscitée par Guillaume d’Orange, les Français évacuent la majeure partie du territoire conquis en Hollande mais, le 11 août, Condé bat complètement à Seneffe, près de Charleroi, Guillaume d’Orange et ses alliés espagnols et impériaux. 1676 : La flotte hollandaise est vaincue en Méditerranée par Duquesne à Stromboli et Agosta (où Ruyter est tué) et par Tourville à Palerme. 1677 : Charles II d’Angleterre donne en mariage sa nièce Marie au prince Guillaume d’Orange. Août 1678 : La paix est signée à Nimègue entre la France et les Provinces-Unies. Elles ne subissent aucune perte territoriale et le tarif douanier français de 1667, promulgué par Colbert pour gêner leur commerce, est même abrogé. C’est l’Espagne qui est la grande perdante du conflit. 1683-1689 : Séjour de Locke en exil aux Pays-Bas. 1685 : La révocation de l’édit de Nantes entraîne l’afflux de plusieurs milliers de huguenots français aux Pays-Bas. 13 février 1689 : Le Parlement anglais proclame Guillaume d’Orange et son épouse Marie roi et reine d’Angleterre sous les noms de Guillaume III et de Marie II. 1690 : Début de la guerre de la Ligue d’Augsbourg, dite aussi de la Seconde Coalition, dans laquelle les Provinces-Unies sont de nouveau engagées contre la France. 9 juillet 1690 : Bataille de Beachy Head (Bévéziers) qui voit Tourville battre la flotte anglo-hollandaise. 29 mai 1692 : Tourville est vainqueur, à la pointe de Barfleur, de la flotte anglo-hollandaise. 1693 : Victoire de Tourville sur un convoi anglo-hollandais à Lagos, au large du Portugal. 1694 : Jean Bart et les corsaires de Dunkerque créent une insécurité permanente en mer du Nord. Septembre 1697 : La France conclut avec la Hollande le traité de Ryswick. Louis XIV doit reconnaître Guillaume III comme roi d’Angleterre. 1697 : Le tsar de Russie Pierre le Grand visite les chantiers navals de la Zaan proches d’Amsterdam. 7 septembre 1701 : Grande Alliance de La Haye réunissant l’Angleterre, l’Empereur et les Provinces-Unies. La guerre de Succession d’Espagne sera officiellement déclarée à la France en mai 1702. La reconnaissance du fils de Jacques II qui vient de mourir en France comme roi d’Angleterre, venant après l’occupation par les troupes françaises des places de la Barrière, le maintien des droits de Philippe V d’Espagne sur la couronne de France, le monopole de l’asiento accordé aux Français pour la traite négrière en direction des colonies espagnoles, jette les Provinces-Unies et l’Angleterre dans la coalition. 1702 : La mort de Guillaume III est un coup très dur pour la coalition mais le Grand Pensionnaire de Hollande, Heinsius, est un adversaire tout aussi déterminé de la France. 1709 : Échec de l’ambassade de Torcy à La Haye, malgré les concessions considérables proposées par Louis XIV. Mars-juillet 1710 : Échec des conférences de Geertruydenberg. Le maréchal d’Huxelles et l’abbé de Polignac ne peuvent accepter les exigences des coalisés. 1711 : La mort accidentelle du stadhouder de Frise Jean Guillaume d’Orange prive l’illustre famille d’un chef de file capable de peser sur la vie politique des Provinces-Unies. 24 juillet 1712 : Villars bat l’armée hollandaise et impériale à Denain. 11 avril 1713 : Par le traité d’Utrecht, la Hollande peut rétablir ses garnisons dans les places de la Barrière. Ce bilan est bien maigre et les efforts contre l’ennemi français se sont révélés vains. 1716 : L’Assemblée des États Généraux ne parvient pas à réformer le système politique des Provinces-Unies. 1718 : La Hollande adhère à la Quadruple Alliance contre l’Espagne. 1727-1736 : Échec des tentatives de réformes du Grand Pensionnaire Van Slingelandt. 1747 : À la faveur de la guerre de Succession d’Autriche, les troupes françaises du maréchal de Saxe s’avancent jusqu’à Berg-op-Zoom. 1756-1763 : Les Pays-Bas préservent leur neutralité pendant la guerre de Sept Ans. 1780 : L’Angleterre déclare la guerre à la Hollande, accusée de soutenir les Insurgents américains. Au traité de Paris de 1784, elle devra abandonner à l’Angleterre des places en Inde et la liberté de commercer dans les Moluques. Un parti « patriote » conteste alors l’autorité du stadhouder Guillaume V d’Orange accusé d’être incapable mais l’épouse de celui-ci, Wilhelmine de Prusse, fait intervenir son frère dont les troupes s’avancent jusqu’à La Haye pour y restaurer l’autorité du stadhouder.

Les Pays-Bas espagnols et autrichiens aux XVIIe et XVIIIe siècles

1609 : Conclusion de la trêve de Douze Ans entre les protestants hollandais et l’Espagne. 1611 : L’Archiduc réunit à Bruxelles une commission de magistrats et de légistes chargés d’unifier le droit des Pays-Bas espagnols. L’Édit Perpétuel promulgué le 12 juillet sera le fruit de ces travaux, à l’origine du premier code de lois belge. Sous le gouvernement de l’infante Isabelle et de l’archiduc Albert, le pays connaît un brillant réveil économique dans le domaine agricole et dans celui des industries de luxe comme celles du verre ou de la soie. Par la création, en septembre 1618, du Mont de Piété de Bruxelles, l’infante permet aux plus modestes de profiter de crédits à des taux abordables. Le succès de cette initiative la fera ensuite exporter en Espagne. 1620 : L’imprimeur anversois Abraham Verhoeven lance le premier « journal », intitulé Nieuwe Tijdinghe. 13 juillet 1621 : Mort de l’archiduc Albert. Février 1622 : Ambroise de Spinola s’empare de Juliers et menace la Hollande. Trois ans plus tard, le même Spinola obtient la reddition de Bréda immortalisée par Vélasquez. 14 septembre 1629 : Frédéric-Henri de Nassau prend Bois-le-Duc ; ce revers est le premier d’une série qui affecte les Espagnols, qui perdront en 1632 Maastricht, Limbourg et Fauquemont. 11 avril 1632 : Philippe IV nomme à la tête du Conseil, pour surveiller l’infante Isabelle, le légiste anversois Pierre Roose. 22 mai 1632 : Frédéric-Henri de Nassau appelle à la révolte contre « le joug espagnol » les populations des Pays-Bas catholiques. Il promet « de les conserver et maintenir avec leurs privilèges, franchises et droits, comme encore avec le public exercice de la religion catholique romaine ». Les États Généraux sont convoqués la même année par l’infante Isabelle mais ils se sépareront le 10 juillet 1634 sans n’avoir rien obtenu, les ministres « espagnols » s’opposant aux tentatives de compromis de l’archiduchesse, qui souhaitait parvenir à la paix avec l’ennemi protestant car « c’est l’unique remède aux maux du pays et l’assuré moyen pour en empêcher la ruine ». L’infante et archiduchesse Isabelle d’Espagne était morte entre-temps, le 1er décembre 1633, dans les bras de Marie de Médicis, la mère de Louis XIII, alors exilée à Bruxelles. 4 novembre 1634 : Le cardinal-infant Ferdinand, frère de Philippe IV d’Espagne, fait son entrée à Bruxelles pour y occuper les fonctions de gouverneur des Pays-Bas, après l’intérim du marquis d’Aytona, lieutenant-gouverneur et capitaine général chargé de succéder à Isabelle. Mai 1635 : Entrée des Français aux Pays-Bas espagnols. Richelieu fait le choix de la « guerre ouverte » contre l’Espagne et d’une intervention directe dans la lutte commencée en 1618 lors de la révolte de la Bohême contre l’Empereur et appelée à durer encore treize ans, jusqu’aux traités de Westphalie – et vingt-quatre ans avec l’Espagne, jusqu’au traité des Pyrénées. Les Français ne parviennent pas à s’emparer de Tirlemont et le cardinal-infant prend rapidement l’initiative face aux Hollandais. L’année suivante, les troupes espagnoles des Pays-Bas pénètrent en France et s’emparent de Corbie, jetant le trouble à Paris. 21 octobre 1639 : L’amiral hollandais Tromp détruit la flotte espagnole de la mer du Nord. 30 mai 1640 : Mort de Pierre-Paul Rubens qui a dominé pendant trente ans la peinture européenne. Avec Jordaens et van Dyck, il renouvelle la peinture flamande de la première moitié du XVIIe siècle. 9 août 1640 : Le cardinal-infant ne peut empêcher la reddition d’Arras. La Bassée, Lens et Bapaume seront perdues l’année suivante. Dès le 9 novembre 1640, le gouverneur des Pays-Bas est mort à Bruxelles. 6 mars 1642 : Condamnation par le Saint-Siège de l’Augustinus de Corneille Jansen (Jansénius), évêque d’Ypres. C’est l’Université de Louvain qui a été le cadre principal de la querelle opposant molinistes – des jésuites pour la plupart – et jansénistes. 19 mai 1643 : Le duc d’Enghien, le futur Grand Condé, bat devant Rocroi les troupes espagnoles du gouverneur Francisco de Melo. Peu après, Don Manuel de Moura, marquis de Castel-Rodrigo (gouverneur de 1644 à 1647) perd Gravelines et Dunkerque. 1647-1656 : Léopold-Guillaume, archiduc d’Autriche, fils de l’empereur Ferdinand II et de Marie-Anne de Bavière, occupe le poste de gouverneur. Il reprend aux Français Armentières, Comines, Lens et Landrecies. 30 janvier 1648 : La paix de Münster est conclue entre les Espagnols et les sept Provinces-Unies des Pays-Bas septentrionaux reconnus « libres et souverains États » alors que l’Espagne perdait les débouchés de l’Escaut. 20 août 1648 : Victoire de Condé à Lens. 14 juin 1658 : Victoire française des Dunes, suivie de la prise de Dunkerque le 23. 7 novembre 1659 : Le traité des Pyrénées rétablit la paix entre la France et l’Espagne. L’Artois, le sud de la Flandre et du Hainaut, Philippeville et Mariembourg reviennent à la France. 17 septembre 1665 : Mort de Philippe IV d’Espagne. Au nom du droit de « dévolution » favorable aux enfants nés d’un premier mariage, Louis XIV réclame la Flandre pour sa femme Marie-Thérèse d’Autriche, fille du défunt roi d’Espagne. Mai 1668 : Par la paix d’Aix-la-Chapelle, qui met fin à la guerre de Dévolution, Louis XIV s’empare de Tournai, Audenarde, Courtrai, Lille, Armentières, Charleroi, Bergues et Furnes. 12 juin 1672 : L’armée de Louis XIV franchit le Rhin pour aller attaquer la Hollande. Cette nouvelle guerre se termine le 10 août 1678 quand est conclue la paix de Nimègue avec les Provinces-Unies et le 17 septembre suivant par le traité signé au même endroit avec l'Espagne. Louis XIV rend Gand, Courtrai, Audenarde, Ath et Charleroi mais récupère Aire, Saint-Omer en Artois, Maubeuge sur la Sambre, Cambrai, Valenciennes, Bouchain et Condé dans la haute vallée de l’Escaut, Cassel, Ypres et Furnes en Flandre maritime. 1684 : L’Espagne abandonne à la France le Luxembourg occupé par Louis XIV qui sera contraint de lui restituer lors de la paix de Ryswick de 1697. 1er juillet 1690 : Victoire du maréchal de Luxembourg à Fleurus. Il bat, au cours des années suivantes, Guillaume d’Orange à Steinkerque (1692) et à Neerwinden (1693). Les Français se sont emparés de Mons en 1691 et de Namur l’année suivante. 26 mars 1692 : Entrée dans Bruxelles de Maximilien Emmanuel de Bavière, nouveau gouverneur des Pays-Bas, gendre de l’empereur Léopold Ier et vainqueur des Turcs à Mohacs et à Belgrade. Il sera un gouverneur efficace, attaché au développement économique et aux progrès commerciaux du pays, à la différence des gouverneurs espagnols aussi éphémères qu’incompétents qui l’avaient précédé. Maximilien Emmanuel bénéficie des conseils de son trésorier général des finances, Jean de Brouchoven, comte de Bergeyck. Septembre 1695 : Guillaume III reprend Namur malgré la diversion menée par le maréchal de Villeroi qui bombarde Bruxelles, défendue par le gouverneur Maximilien Emmanuel de Bavière. La capitale des Pays-Bas espagnols est très éprouvée puisque seize églises, les bâtiments de la Grand Place et plus de trois mille maisons sont alors détruits. 20 septembre 1697 : La paix de Ryswick met fin à la guerre de la Ligue d’Augsbourg commencée en 1688. Louis XIV doit rendre Mons, Courtrai, Charleroi et Luxembourg. 1er avril 1699 : L’Édit Perpétuel met en place une politique protectionniste favorable au développement de l’industrie des Pays-Bas. Cette politique suscite évidemment l’hostilité de l’Angleterre et de la Hollande mais les émeutes qui éclatent à Bruxelles le 25 mai conduisent à l’abandon de la politique de redressement économique du gouverneur et l’Édit Perpétuel est abandonné le 27 juillet 1700. 1er novembre 1700 : La mort du roi d’Espagne Charles II va déclencher la guerre de Succession d’Espagne. 7 septembre 1701 : Grande Alliance de La Haye entre l’Angleterre, la Hollande et l’Empire contre la France, en raison de l’accès du duc d’Anjou au trône d’Espagne sous le nom de Philippe V. 2 juin 1702 : Philippe V impose une réforme administrative aux Pays-Bas. 19 mai 1706 : La victoire remportée à Ramillies par Marlborough oblige les Français à évacuer Bruxelles. Anvers, Ostende, Menin et Termonde tombent également. 1708 : Défaite française d’Audenarde. Capitulation de Lille. 1711 : Philippe V d’Espagne cède le Luxembourg à Maximilien-Emmanuel de Bavière. 24 juillet 1712 : Victoire de Villars à Denain. 11 avril 1713 : Traité d’Utrecht. Le partage de l’héritage espagnol est admis par la France. 6 mars 1714 : Traité de Rastadt. Charles de Habsbourg, couronné Empereur sous le nom de Charles VI, obtient les anciens Pays-Bas espagnols. 15 novembre 1715 : Traité d’Anvers, dit de la Barrière, entre l’Empereur et les Provinces-Unies qui obtiennent l’occupation de diverses places, dont Namur, Tournai, Menin et Furnes, destinées à les protéger contre toute tentative française. La fermeture de l’Escaut était confirmée. Les Pays-Bas catholiques sortent alors d’un siècle et demi de guerres qui les ont largement ruinés. Février 1716 : Charles VI reçoit à Vienne des délégués des Pays-Bas. Il ne considère ces territoires que comme une possession périphérique qu’il espère pouvoir échanger contre d’autres possessions qui, situées en Allemagne et en Italie, pourraient se rattacher plus directement aux États Habsbourg d’Autriche. Contre l’avis de son ministre, le comte Lothaire de Königsegg, l’Empereur ne souhaite pas gouverner de manière trop autoritaire. 1er avril 1717 : Organisation à Vienne du Conseil suprême des Pays-Bas, qui durera jusqu’en 1757. C’est le prince Eugène de Savoie qui est nommé gouverneur et capitaine général des Pays-Bas mais, retenu par les campagnes menées contre les Turcs, il laisse le pouvoir au ministre savoyard Hercule Turinetti, marquis de Prié. Septembre 1719 : L’artisan François Anneesens qui avait pris la tête d’un mouvement populaire entraînant des émeutes à Anvers et Malines, est exécuté. 1721 : Création d’une « Compagnie impériale et royale des Indes », ou Compagnie d’Ostende mais elle sera suspendue en 1727 en raison de l’hostilité de l’Angleterre, de la Hollande et de la France. Charles VI n’insiste pas car il veut assurer la succession de sa fille Marie-Thérèse. 23 décembre 1724 : Prié est rappelé à Vienne. L’archiduchesse Marie-Élizabeth reçoit le gouvernement des Pays-Bas. Elle l’assumera pendant seize ans et cette période sera un moment de paix et de prospérité retrouvées. 20 octobre 1740 : Mort de Charles VI. Sa sœur Marie-Élizabeth meurt à son tour le 25 août 1741. L’Europe se retrouve alors plongée dans la guerre de Succession d’Autriche (1740-1748) qui oppose la fille de l’empereur défunt, Marie-Thérèse, à la France favorable à un prince allemand, Charles-Albert de Bavière. L’Angleterre intervient dans le conflit à partir de 1743. 1744 : Charles de Lorraine est désigné comme gouverneur des Pays Bas. 11 mai 1745 : Les Autrichiens et les Anglais sont battus à Fontenoy. Le 21 février 1746, les troupes du maréchal de Saxe s’emparent de Bruxelles. 18 octobre 1748 : Le traité d’Aix la Chapelle restitue les Pays Bas à Marie Thérèse. Elle supprimera le conseil suprême des Pays-Bas et gouvernera depuis Vienne. L’autorité impériale se renforce en s’appuyant sur la noblesse de robe contre la noblesse traditionnelle et en contrôlant de près les affaires de l’Église. Comme en d’autres pays, les jésuites seront supprimés en 1773 après les décisions prises en ce sens par Clément XIV. Le gouverneur général Charles de Lorraine fait sa deuxième entrée à Bruxelles en 1749. Il sera très efficacement secondé par des ministres plénipotentiaires de grande valeur – le marquis Botta Adorno, le comte de Cobenzl, le prince de Stahremberg – jusqu’à sa mort survenue le 4 juillet 1780. 29 novembre 1780 : Mort de l’impératrice Marie-Thérèse. Avènement de Joseph II, qui visite les Pays-Bas au début de l’été de 1781. 1782 : À la faveur de la guerre opposant Anglais et Hollandais, Joseph II et ses deux représentants sur place, l’archiduchesse Marie-Christine et son mari le duc Albert de Saxe-Teschen, obtiennent l’évacuation par les Hollandais des places de la Barrière. Octobre 1784 : Joseph II cherche à forcer le blocus de l’Escaut mais la « guerre de la marmite » – un boulet a troué une marmite à soupe, seule victime de cette « guerre » – maintient le statu quo, d’autant que le roi de France Louis XVI ne soutient pas son beau-frère. Le 8 novembre 1785, le traité de Fontainebleau confirme la fermeture de l’Escaut. Cet échec encourage l’Empereur à imaginer le troc de la Bavière contre les Pays-Bas mais l’Angleterre et la Prusse s’y opposent. 17 mars 1783 : L’Empereur promulgue l’Édit de suppression des couvents des ordres contemplatifs, suivi en 1786 par celui supprimant les séminaires épiscopaux. Ces mesures se heurtent à la résistance de l’épiscopat des Pays-Bas. L’archevêque de Malines proteste et l’évêque de Namur se voit privé de son bénéfice. Ces mesures vont mobiliser l’opinion catholique contre l’Empereur. 1786 : Réforme administrative réduisant les libertés locales, confirmée par les édits du 1er janvier 1787. Une réforme complète de la justice est aussi mise en œuvre. 30 mai 1787 : L’archiduchesse Marie-Christine suspend l’exécution des principaux édits impériaux. Joseph II la désavoue en envoyant à Bruxelles le comte de Trauttmansdorff qui rétablit les édits le 17 décembre 1787. 18 juin 1789 : L’empereur Joseph II décide la suppression des États du Brabant qui refusaient de voter l’impôt. Le mouvement révolutionnaire qui se développe alors voit coexister en son sein une minorité démocratique conduite par l’avocat bruxellois Vonck, favorable à une indépendance nationale et à un régime parlementaire, et une tendance « statiste » – voulant rétablir l’autorité des États – dirigée par l’avocat Van der Noot, hostile aux réformes « éclairées » de Joseph II et n’aspirant qu’au retour au statu quo ante. 18 août 1789 : Déclenchement de la révolution à Liège. Le prince-évêque prend la fuite. Les aspirations formulées sont très comparables à celles qui triomphent alors en France. Automne 1789 : Gand tombe aux mains des insurgés, Mons et Bruxelles se soulèvent. La « révolution brabançonne » chasse les Autrichiens qui évacuent les Pays-Bas en décembre. 12 janvier 1790 : Proclamation par les « statistes » de la République des États-Unis de Belgique. Les vonckistes sont exilés en France en mars. L’assemblée constituante française, qui déclare alors « la paix au monde », refuse de recevoir les représentants du gouvernement belge. 20 février 1790 : Mort de Joseph II. Léopold II lui succède et cherche la conciliation. 27 juillet 1790 : Angleterre, Provinces-Unies et Prusse s’engagent à Reichenbach à garantir à Léopold II le rétablissement de son autorité dans les Pays-Bas. Septembre 1790 : Van der Noot mobilise vingt mille paysans dans sa « croisade » pour la liberté mais les troupes autrichiennes des généraux Bender et Baillet-Latour les dispersent. Novembre-décembre 1790 : Les Autrichiens réoccupent les Pays-Bas et la révolution y est brisée, à Bruxelles (le 2 décembre) et à Liège où le prince-évêque César Constantin de Hoensbroeck, qui avait fui en Allemagne, retrouve son pouvoir. Décembre 1791 : Les États refusent de nouveau de voter les impôts. 1er mars 1792 : Mort de Léopold II. Avènement de François II.

Dans la tourmente révolutionnaire (1792-1815)

20 avril 1792 : La déclaration de guerre de la France au « roi de Bohême et de Hongrie », c’est-à-dire à l’Empereur, fait des Pays-Bas autrichiens un théâtre d’opérations. 6 novembre 1792 : Victoire de Dumouriez à Jemmapes. Il entre en vainqueur à Bruxelles et toute la Belgique est conquise dès le 2 décembre. 15 décembre 1792 : Décret abolissant les privilèges. Convocation d’assemblées appelées à se prononcer sur le rattachement à la France. La demande d’annexion rencontre un écho favorable à Liège mais elle est fortement « sollicitée » dans les régions flamandes. Les réquisitions, le poids des impôts, l’introduction des assignats et les persécutions contre les prêtres réfractaires vont bientôt dresser la majorité du peuple des campagnes contre les occupants. 1er février 1793 : En même temps qu’elle déclare la guerre à l’Angleterre, la Convention la déclare aux Provinces-Unies. Le 25 février, Bréda est prise par les Français mais doit être rapidement évacuée. 18 mars 1793 : Victoire autrichienne de Neerwinden. Les Français doivent abandonner la Belgique. Dumouriez rallie peu après le camp ennemi. 16 octobre 1793 : Victoire française de Wattignies. Elle écarte le danger autrichien et permet d’entamer la reconquête immédiate de la Belgique. 25 juin 1794 : La victoire de Fleurus, remportée par Jourdan sur les Autrichiens les chasse définitivement des Pays-Bas. Anvers est prise le 27 juillet. Les anciens Pays-Bas autrichiens sont dès lors rattachés définitivement à la France jusqu’en 1813. Dans les Pays-Bas septentrionaux, les « patriotes » attachés à la cause de la Révolution française avaient déjà constitué en 1793 des comités révolutionnaires dans diverses villes avant d’être dispersés, après les victoires autrichiennes en Belgique du début de 1793, par le prince d’Orange Guillaume V que soutenaient les Anglais. En 1794, ces mêmes patriotes, conduits par Hermann Willem Daendels, un agent français fondateur d’une Légion batave, appellent à l’intervention française, réalisée par Pichegru de décembre 1794 à janvier 1795. Les Français sont à Amsterdam le 20 janvier. Le 21, à l’issue d’un mémorable raid de cavalerie terminé sur la glace, ils s’emparent de la flotte hollandaise bloquée par la mer gelée au Helder, près de l’île de Texel. Janvier 1795 : Le stathouder Guillaume V se réfugie en Angleterre. Un gouvernement provisoire est constitué (26 janvier), qui proclame les Droits de l’homme et du citoyen et abolit le stathoudérat et les titres de noblesse. 16 mai 1795 : Traité franco-néerlandais de La Haye. La République batave abandonne à la France la Flandre zélandaise, Venlo et Maastricht, doit verser une indemnité de cent millions de florins et accepter l’occupation du pays par vingt-cinq mille hommes, occupation dont les frais sont évidemment supportés par les Hollandais. 1er octobre 1795 : Proclamation de l’annexion des Pays-Bas autrichiens et de l’évêché de Liège à la France. Le pays est divisé en neuf départements – Lys, Jemmapes, Sambre-et-Meuse, Escaut, Dyle, Ourthe, Meuse inférieure, Deux-Nèthes-et-Forêts. 11 octobre 1797 : Les Anglais détruisent la marine hollandaise à Camperdown et s’emparent ensuite de la plupart des colonies néerlandaises. 17 octobre 1797 : Par le traité de Campo-Formio, l’Autriche reconnaît l’annexion par la France des Pays-Bas autrichiens et de la principauté de Liège. 22 janvier 1798 : Daendels et le général Joubert « purgent » de vingt-deux députés fédéralistes l’assemblée élue au suffrage universel le 1er mars 1796, au profit des unitaristes qui sont minoritaires mais partisans d’une République centralisée, « une et indivisible ». 1798 : Adoption aux Pays-Bas septentrionaux d’une constitution calquée sur le modèle de la constitution française de l’an I, puis sur celle de l’an III. Les provinces disparaissent pour être remplacées par des départements. Les corporations sont abolies et l’égalité des communautés religieuses proclamée. Le projet de constitution est adopté par les électeurs à une large majorité mais avec une très faible participation le 23 avril 1798. Dissolution de la Compagnie des Indes orientales. 12 juin 1798 : Les radicaux sont chassés du pouvoir mais tentent d’y revenir avec l’appui des Français. 12 octobre- 5 décembre 1798 : Guerre des paysans en Belgique. L’établissement de la conscription soulève une partie du pays contre la présence française. La répression est sévère et frappe notamment le clergé. Il faudra l’établissement du Consulat et la signature du concordat de 1801 pour que soit rétabli l’ordre. En 1798-1799 l’occupant français doit également faire face au Luxembourg à la « guerre des gourdins », révolte violemment réprimée contre les abus de la conscription. 18 juin 1799 : Installation à Bruxelles de la loge maçonnique des Amis philanthropes, suivie en mai 1800 par celle de la loge La Concorde à Mons ; il y aura une quarantaine de loges en Belgique à la fin de l’Empire. Août-octobre 1799 : Une tentative de débarquement anglo-russe à laquelle participe le fils de Guillaume V, le futur roi Guillaume Ier, est repoussée par Daendels et par le général Brune. Le duc d’York doit signer la capitulation d’Alkmaar le 18 octobre. 1801 : Bonaparte impose une nouvelle constitution réduisant le nombre des électeurs et donne aux départements les limites des anciennes provinces. 1802 : À la faveur de la paix d’Amiens, la République batave récupère la colonie du Cap de Bonne Espérance et les colonies d’Amérique, reperdues lors de la reprise de la guerre en 1803. Seule Java échappe initialement à la conquête anglaise. 1803 : La ligne télégraphique optique Paris-Lille de Chappe est prolongée jusqu’à Bruxelles. 1805 : Une nouvelle constitution, approuvée par un plébiscite ne rassemblant que 4 % des électeurs, est donnée à la République batave, élaborée par Rudger-Jean Schimmelpenninck, son ambassadeur à Paris. Il est mis à la tête du gouvernement avec le titre de conseiller-pensionnaire. Il réforme en 1805-1806 la fiscalité et l’instruction publique. 1806 : Imposée en Belgique, la conscription n’y rencontre guère d’hostilité, ce qui est sans doute lié à la prospérité dont bénéficie alors le pays, du fait de l’essor rapide des activités minières et métallurgiques. À cette date, les départements belges comptent 3 348 612 habitants, avec de grandes différences de densité (220/km2 dans le département de l’Escaut, 40/km2 dans celui de Sambre-et-Meuse). 5 juin 1806 : La République batave est érigée en royaume au profit de Louis Bonaparte et se voit dotée d’une nouvelle constitution. Le nouveau roi de Hollande et son épouse, Hortense de Beauharnais, font leur entrée à La Haye le 23 juin. Contre la volonté de son frère, Louis Bonaparte refuse d’imposer la conscription à ses sujets et ne se préoccupe guère de mettre en œuvre le blocus continental. L’état de guerre quasi-permanent contribuait en effet à la ruine durable du commerce maritime néerlandais : le trafic d’Amsterdam passe de 2 400 navires en 1805 à 300 en 1809. 1807 : William Cockerill installe sa première entreprise métallurgique à Liège. Avril 1808 : Après avoir transféré sa capitale de La Haye à Utrecht en octobre 1807, le roi Louis l’installe à Amsterdam. 16 septembre 1808 : Décret impérial interdisant l’entrée en France des denrées coloniales hollandaises susceptibles d’être d’origine anglaise. Août 1809 : Tentative anglaise contre Walcheren, visant en réalité Anvers. Elle est repoussée mais l’échec est surtout dû à l’incompétence de Lord Chatham. 24 juin 1810 : Napoléon fait occuper Amsterdam par le général Oudinot. 2 juillet 1810 : Abdication de Louis. Napoléon décide d’intégrer directement les Pays-Bas dans l’Empire français (décret de Rambouillet du 9 juillet). Un gouverneur général, Charles-François Lebrun, est installé à Amsterdam et la conscription est introduite. Elle contribue au développement d’un sentiment hostile à l’hégémonie française, alors que la perte de Java confirme en 1811 la ruine de l’Empire colonial qui avait fait la fortune des Provinces-Unies. L’activité économique se ralentit : 23 faïenceries sur 30 ferment à Delft entre 1810 et 1811. Octobre 1813 : Soulèvement général des Pays-Bas au lendemain de la défaite subie par les Français à Leipzig, à l’initiative de Van Limburg-Stirum à La Haye et de Karel Van Hogendorp à Amsterdam. Octobre-novembre 1813 : Un gouvernement provisoire néerlandais est constitué après le repli des troupes françaises vers Utrecht. Le fils du stathouder Guillaume V (qui était mort en 1805), le futur roi Guillaume Ier, débarque à Scheveningue le 30 novembre et prend le 2 décembre à Amsterdam le titre de prince souverain, en promettant une constitution, déjà préparée par Van Hogendorp. Daendels se rallie à Guillaume. 16 décembre 1813 : Décès en prison du maire d’Anvers Werbrouck, qui était poursuivi pour détournement de fonds mais qui passera pour une victime de l’occupation française. 15 février 1814 : Conférence interalliée de Troyes. Projet de reconstitution des anciens Pays-Bas. Le premier traité de Paris (30 mai 1814) prévoit que la Hollande, « rendue à la souveraineté de la maison d’Orange, recevra un accroissement de territoire ». Mars 1814 : Proclamation de la Constitution. Le pouvoir exécutif appartient au prince et le pouvoir législatif à ses ministres qui proposent les lois, celles-ci devant être approuvées, sans être modifiées, par les États Généraux dont les députés sont élus par les États provinciaux. La conscription et le Code civil introduits par les Français demeurent en vigueur. 21 juillet 1814 : Guillaume obtient des Alliés le principe d’une Union des Anciens Pays-Bas et de l’évêché de Liège avec la Hollande. Août 1814 : L’Angleterre rend aux Pays-Bas leurs colonies, à l’exception de Ceylan, de la colonie du Cap, d’une partie de la Guyane et de Cochin, sur la côte indienne de Malabar. 16 mars 1815 : Guillaume annonce aux États Généraux sa décision de prendre le titre de roi des Pays-Bas et se fait acclamer sous le nom de Guillaume Ier. Le 24 mars, les représentants des Puissances réunies à Vienne le reconnaissent comme « roi des Pays-Bas et grand-duc de Luxembourg » – sa part du domaine flamand des Nassau avait été échangée avec le Luxembourg, rattaché au nouveau royaume par une union personnelle. Les Belges ne seront pas consultés à propos de l’union ainsi réalisée, conséquence logique de la défaite française qui entraînait la fin du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. 18 juin 1815 : Des troupes hollandaises et belges, soit 8 000 hommes, participent à la bataille de Waterloo où leur chef, le prince héritier Guillaume, est blessé. 20 novembre 1815 : Le second traité de Paris donne au nouveau royaume des Pays-Bas Mariembourg, Philippeville et Bouillon.

Le royaume des Pays-Bas au XIXe siècle

Le nouveau royaume apparaît dépourvu d’unité. Guillaume Ier espérait rallier aisément la partie flamande de la Belgique à une large communauté néerlandaise au sein de laquelle la minorité francophone ne disposerait que d’une situation marginale. Espoir irréaliste dans la mesure où la rupture religieuse intervenue trois siècles plus tôt avait engendré deux sociétés et deux cultures bien différentes. Les catholiques flamands ne pouvaient se reconnaître dans une monarchie calviniste et les Wallons ne pouvaient admettre que le néerlandais fût considéré comme la langue « nationale » du royaume, seule utilisée dans l’armée et l’administration à partir de janvier 1823. L’opposition libérale reproche par ailleurs à Guillaume Ier le fait que les ministres ne soient responsables que devant lui et que le budget ne puisse être contrôlé que tous les dix ans. Ils rejetaient également la censure sévère établie par la loi sur la presse de 1815. Le choix du libre échangisme est de plus mal vécu en Belgique où les industriels locaux souhaitent être protégés de la concurrence anglaise. L’addition de tous ces mécontentements constituait dès les années 1820 une lourde hypothèque pour le nouveau royaume des Pays-Bas. 1825 : Le gouvernement supprime les séminaires ecclésiastiques et fonde à Louvain un collège philosophique dont les futurs prêtres devront suivre les cours. 1827 : Après avoir tenté de renouer avec la tradition « joséphiste », Guillaume Ier doit finalement signer un concordat avec le pape. 25 août 1830 : La révolution éclate à Bruxelles ; le roi pense calmer l’agitation en renvoyant van Maanen, le plus impopulaire de ses ministres, avant de tenter une reprise en main de la situation par le recours à la force. Après plusieurs jours d’affrontements, les troupes hollandaises se replient. 4 octobre 1830 : Un gouvernement provisoire proclame l’indépendance de la Belgique et annonce qu’il va préparer la réunion d’un Congrès chargé de donner une constitution au pays. Fin 1830 : Les troupes hollandaises ont évacué toute la Belgique sauf Anvers et Maastricht. Guillaume Ier se retrouve isolé car les libéraux anglais alors au pouvoir ne sont pas disposés à le soutenir, pas plus que la Russie, l’Autriche et la Prusse préoccupées en priorité par les développements de l’insurrection polonaise. 1831 : Après avoir imposé un armistice, les représentants des puissances réunis à partir de janvier à Londres proposent un plan de séparation, le traité des Dix-huit articles du 26 juin 1831. Alors que le roi Guillaume était prêt à admettre la sécession, les prétentions territoriales de Léopold Ier – le roi que les Belges se sont donnés en juin – le conduisent à reprendre la lutte : ce sera la « campagne de dix jours » du 2 au 12 août 1831. Les Hollandais sont initialement vainqueurs mais l’engagement d’une armée française commandée par le maréchal Gérard les empêche de pousser plus loin. 14 octobre 1831 : Le traité des Vingt-quatre Articles confirme l’indépendance des provinces des Pays-Bas méridionaux qui prendront le nom de royaume de Belgique. Le Luxembourg et le Limbourg sont partagés et la dynastie d’Orange voyait le royaume des Pays-Bas limité à l’ancien territoire des Provinces-Unies. 23 décembre 1832 : Le maréchal Gérard obtient la capitulation de la citadelle d’Anvers. 1839 : Le roi Guillaume Ier reconnaît enfin la division des Pays-Bas de 1815 et le traité signé cette année-là proclame la liberté de navigation sur l’Escaut. La « neutralité perpétuelle » de la Belgique fait l’objet d’un traité signé par toutes les puissances, celui dont le chancelier allemand Bethmann-Hollweg dira en 1914 qu’il n’était qu’un « chiffon de papier ». 7 octobre 1840 : Abdication en faveur de son fils de Guillaume Ier, qui mourra trois ans plus tard. Guillaume II règne jusqu’en 1849. 1844 : Échec d’une tentative de révision de la constitution. 1848 : Adoption d’une constitution inspirée par Thorbecke, le chef de file de l’opposition libérale. Le budget devait être désormais soumis annuellement à la seconde chambre élue au suffrage censitaire. Les libertés fondamentales étaient garanties et l’administration des colonies serait soumise au contrôle des députés. 1849-1890 : Règne de Guillaume III. 1850-1853 : Premier ministère Thorbecke d’inspiration libérale. 1853 : Le « mouvement d’avril » mobilise les calvinistes contre le ministère libéral qui a autorisé la réorganisation de la hiérarchie catholique en Hollande. Le roi prend parti pour les protestants, Thorbecke doit se retirer et son successeur Van Hall, fait voter des lois limitant les libertés des catholiques. 1860 : Abolition de l’esclavage dans les colonies néerlandaises. 1862 : Le conflit relatif à la neutralité de l’enseignement fournit à Thorbecke l’occasion de revenir à la tête du gouvernement jusqu’en 1866. 11 mai 1867 : À Londres, le grand-duché de Luxembourg est déclaré neutre par les grandes puissances. 1870 : Fin du système des « cultures forcées » aux colonies, notamment en Indonésie où, contre divers avantages, les paysans consacraient une partie de leurs terres à des cultures d’exportation suggérées par les autorités, qui se chargeaient ensuite de la commercialisation et en tiraient de gros profits alors que ce système gênait le développement des cultures vivrières nécessaires à la satisfaction des besoins alimentaires des populations locales. 1871-1872 : Dernier cabinet Thorbecke, qui a incarné le camp libéral pendant plus de vingt ans. 1873-1903 : Guerre d’Atjeh en Indonésie, dans la partie la plus septentrionale de Sumatra. 1874 : Loi sociale interdisant le travail des enfants. 1885 : Van Gogh peint Les mangeurs de pommes de terre. 1889 : Octroi de subsides aux écoles privées. 1890 : Mort de Guillaume III. La reine Wilhelmine lui succède avec une régence de la reine Emma jusqu’en 1898. Elle régnera jusqu’en 1948. Guillaume III étant mort sans postérité mâle, le grand-duché de Luxembourg revint, selon l’ordre de primogéniture, à la branche aînée de la maison de Nassau. 1894 : Fondation d’un parti social-démocrate hollandais, qui aura deux députés en 1897. 1899-1902 : L’opinion hollandaise prend parti pour les Boers d’Afrique du Sud attaqués par les Anglais et un contingent de volontaires néerlandais s’embarque pour l’Afrique australe afin de participer à la lutte. 1901 : Les élections amènent au pouvoir Abraham Kuyper, chef de file des conservateurs protestants « antirévolutionnaires ». Les libéraux prennent leur revanche aux élections de 1905 puis, après un nouvel intermède conservateur issu de l’alliance des différents partis religieux, libéraux et socialistes alliés l’emportent en 1913 mais la rupture est rapide. Août 1914 : Le gouvernement hollandais ordonne la mobilisation générale ; le maintien de la neutralité hollandaise n’est pas mis en question mais l’opinion s’indigne de la violation de la neutralité belge par l’Allemagne puis, plus tard, des contrôles effectués par les Anglais à la faveur du blocus naval, y compris sur les navires neutres, les Pays-Bas étant soupçonnés, à juste titre, de se livrer à la contrebande au profit de l’Allemagne. 14 janvier 1919 : La Chambre luxembourgeoise, après l’abdication en novembre 1918 de la grande-duchesse Marie Adélaïde qui s’était montrée trop favorable à la cause allemande, rejette l’instauration de la république et accepte que la grande duchesse Charlotte succède à sa sœur. Une décision approuvée par plébiscite à 80 % en septembre 1919.

La révolution belge de 1830 et le royaume de Belgique jusqu’en 1914

25 août 1830 : La foule envahit à Bruxelles la place de la Monnaie alors que l’on donne à l’Opéra La Muette de Portici d’Auber qui exalte la révolte des Napolitains contre l’oppresseur espagnol. L’émeute se développe, des incendies sont allumés. La police demeure passive, les armureries sont pillées. Une garde bourgeoise est organisée et contient l’émeute populaire. 23 au 23 septembre : Vaine tentative hollandaise pour reprendre Bruxelles où un gouvernement provisoire est proclamé le 26. Le 6 octobre, les Hollandais doivent évacuer Liège, puis Gand le 17. Un Congrès national est élu le 3 novembre au suffrage censitaire et confirme le 18 la proclamation de l’indépendance de la Belgique. La révolution polonaise, qui paralyse Nicolas Ier, et l’arrivée au pouvoir à Londres du libéral Palmerston vont se révéler favorables à la cause belge. 27 octobre 1830 : Le bombardement d’Anvers par les forces hollandaises rend désormais impossible une solution de compromis entre les insurgés belges et Guillaume Ier. 17 novembre 1830 : La conférence des puissances réunie à Londres impose un armistice entre Belges et Hollandais. 20 janvier 1831 : Palmerston obtient la reconnaissance de la « neutralité perpétuelle » de la Belgique, contre Talleyrand qui souhaitait son partage entre la Hollande, la Prusse et la France. 7 février 1831 : Approbation de la constitution belge qui créait une monarchie constitutionnelle. On veut proposer au duc de Nemours, fils de Louis-Philippe, de monter sur le trône mais la conférence de Londres interdit que le royaume de Belgique puisse revenir à un membre d’une dynastie représentée à la conférence. Le 4 juin 1831, c’est le prince Léopold de Saxe-Cobourg, accepté par les puissances, qui est élu roi des Belges sous le nom de Léopold Ier. Le 26 juin, le traité de Londres, dit « des 18 articles », est approuvé par le Congrès. Il assure l’indépendance belge mais prive le royaume du Limbourg et de la Flandre zélandaise qui restent hollandais malgré leur ralliement à la révolution de l’année précédente. 21 juillet 1831 : Léopold de Saxe-Cobourg fait son entrée à Bruxelles. Ce jour sera retenu comme la fête nationale belge. 2 août 1831 : Les Hollandais rompent l’armistice et attaquent la Belgique. La résistance de Louvain donne aux troupes françaises du maréchal Gérard le temps d’intervenir, ce qui conduit les Hollandais à renoncer à leur entreprise de reconquête. 29 août 1831 : La « guerre des Dix Jours » est à peine terminée que les élections au suffrage censitaire entraînent la formation d’une Chambre « unioniste » dans laquelle catholiques et libéraux sont unis contre l’ennemi commun hollandais. 14 octobre 1831 : Les puissances imposent le traité dit « des 24 articles » plutôt favorable à la Hollande mais Guillaume Ier refuse de l’accepter car il espère toujours être restauré à Bruxelles et conserve donc la citadelle d’Anvers, reprise en décembre 1832 par les Français qui évacuent ensuite la Belgique à la demande de Léopold Ier, marié à une fille de Louis Philippe. 12 juillet 1833 : Un nouvel armistice belgo-hollandais est négocié (convention de Zonhoven) et sera régulièrement renouvelé jusqu’à la conclusion de la paix en 1839. 1834 : Les libéraux répondent à la renaissance de l’Université de Louvain par la création de l’Université libre de Bruxelles. 1836 : Ouverture des premières lignes de chemin de fer en Belgique. Le réseau est conçu pour relier la Hollande à la France et la Rhénanie à Ostende, qui devient le port des liaisons avec l’Angleterre et connaît alors un essor rapide. Malines apparaît alors comme le principal centre ferroviaire d’une Belgique qui va exploiter au mieux sa position de carrefour. 1838 : Publication du Lion des Flandres (Leeuw van Vlaanderen) de l’écrivain Henri Conscience, qui marque le début du réveil identitaire flamand au sein du royaume de Belgique, alors totalement dominé par la bourgeoisie francophone. 19 avril 1839 : Signature du traité de paix avec la Hollande. C’est, sur le plan intérieur, la fin de l’unionisme qui était justifié par le danger hollandais. 1840 : Formation d’un ministère libéral qui dure un an et se voit remplacé par un ultime ministère unioniste formé de libéraux modérés et de catholiques qui durera plus de quatre années mais, en mars 1846, c’est un gouvernement catholique homogène qui prend en main la direction des affaires du pays. Le 14 juin suivant, un congrès libéral se prononce sur la question scolaire, l’abaissement du cens électoral et le libéralisme économique. 1846-1847 : Séjour de Karl Marx à Bruxelles. Juin 1847 : Les libéraux gagnent les élections et constituent un cabinet homogène. 1848 : La Belgique est épargnée par la vague révolutionnaire qui déferle sur l’Europe mais doit repousser deux tentatives « d’invasion » organisées par des républicains radicaux français, près de Mouscron et à Quiévrain. 1850 : Débats parlementaires autour de l’adoption d’une loi scolaire relative à l’enseignement public, qui déclenche une vive opposition des catholiques. 1863 : Le Congrès de Malines où Montalembert se fait l’avocat du catholicisme libéral, ne permet pas de réunir les catholiques libéraux et les ultramontains et, l’année suivante, ce sont les libéraux qui gagnent de nouveau les élections contre des catholiques divisés. 10 décembre 1865 : Mort de Léopold Ier. Avènement de Léopold II. 1866 : Suppression du délit de coalition, ce qui signifie la possibilité de jouir du droit de grève. 1867 : De nombreux groupes socialistes commencent à se développer en Wallonie, dans les régions industrielles. Cesar de Paepe apparaît alors comme le leader de ce premier socialisme belge. 1869 : Constitution du « parti » catholique, près d’un quart de siècle après celle du parti libéral. 14 juin 1870 : Victoire catholique aux élections. 12 septembre 1876 : Ouverture à Bruxelles de la conférence coloniale qui débouche sur la création de l’Association internationale africaine dont le roi Léopold II assume la présidence. 11 juin 1878 : Victoire des libéraux aux élections. Ils votent la loi du 10 juillet 1879 imposant l’installation d’une école laïque dans chaque commune, l’interdiction pour celles-ci « d’adopter » une école libre et la suppression de l’enseignement religieux. C’est la loi Van Humbeeck, appelée « loi du malheur » par les catholiques qui vont créer, en engageant leurs propres ressources, un enseignement libre qui accueillera bientôt 60 % des élèves. 25 novembre 1878 : Rencontre de Léopold II et de l’explorateur Henry Morton Stanley, suivie de la création du Comité d’études du Haut-Congo. En 1880-1882, l’explorateur fait reconnaître par les chefs indigènes, sur la majeure partie du bassin du Congo, l’autorité de l’État indépendant, confirmée par la conférence coloniale de Berlin en février 1885. En 1892-1893, la traite des Noirs organisée depuis Zanzibar est éradiquée dans l’est du Congo où les mahdistes sont anéantis au cours des années suivantes. 5 juin 1880 : Le gouvernement libéral de Frère-Orban décide la rupture des relations diplomatiques avec le Vatican, en raison du soutien apporté par Léon XIII à la cause de l’école catholique. 10 juin 1884 : Les élections donnent une victoire écrasante aux catholiques, qui demeureront au pouvoir jusqu’en 1914. Le premier ministre Auguste Beernaert travaille à établir la pacification scolaire. 5 avril 1885 : Création à Bruxelles du Parti ouvrier belge. 1886 : De graves émeutes, nées de la misère ouvrière, se développent au printemps dans la région industrielle de Charleroi. 1888 : James Ensor peint L’Entrée du Christ à Bruxelles. 16 avril 1893 : Vote de la loi instituant le suffrage universel « plural » : tout Belge de vingt-cinq ans a le droit de voter, mais un ou deux votes supplémentaires pouvaient être attribués sous condition de famille, de propriété ou d’instruction. L’extension du suffrage est fatale aux libéraux, qui ne sont plus que vingt à la Chambre après les élections de 1894 qui voient le triomphe des catholiques, avec 114 députés, dont la politique sociale a séduit la majorité de la population. Les socialistes avec 28 députés remportaient également un grand succès. 20 août 1908 : La Belgique récupère l’État indépendant du Congo, qui a valu à Léopold II des campagnes hostiles de dénonciation du travail forcé imposé aux indigènes. Le Parlement approuve la 20 décembre. Dans les premières années du XXe siècle, la Belgique est l’une des puissances industrielles les plus dynamiques. La densité de sa population, sa richesse charbonnière, l’importance de son réseau ferroviaire, l’abondance des capitaux accumulés au cours des décennies précédentes, l’activité de son commerce extérieur, qui voit un tiers de sa production exporté, tout cela en fait un État prospère qui va bientôt tirer du Congo des ressources supplémentaires. 17 décembre 1909 : Mort de Léopold II, trois jours après l’instauration de la conscription, rendue nécessaire par les menaces planant alors sur l’Europe. Avènement de son neveu, Albert Ier, le 23 décembre 1909. 1910-1911 : Relance de la question scolaire. Formation du ministère catholique de Broqueville qui remporte les élections de mai 1912, introduit l’obligation de l’enseignement primaire, le financement des écoles catholiques et l’usage du néerlandais dans l’enseignement moyen. 30 avril 1913 : Instauration du service militaire universel et obligatoire.

Les Pays-Bas et la Belgique au XXe siècle

2 août 1914 : Ultimatum allemand à la Belgique. Les forces allemandes entreprennent l’invasion du pays au cours des jours suivants pour mettre en œuvre le plan Schlieffen visant l’encerclement et la destruction des armées françaises. La résistance inattendue des forts de Liège se prolonge jusqu’au 16 août. Les forces allemandes se rendent coupables, au cours des jours suivants, du massacre de Dinant et de l’incendie de Louvain. La résistance d’Anvers fixe ensuite plusieurs divisions allemandes. Anvers est contrainte de capituler le 10 octobre, après l’évacuation du gros des forces qui l’occupaient. 16 au 27 octobre 1914 : La bataille de l’Yser permet de stabiliser le front en Flandre occidentale. La quasi totalité de la Belgique se trouve occupée. Albert Ier s’installe à La Panne, alors que le gouvernement belge est replié au Havre. 17 octobre 1918 : Dans le cadre de la grande offensive alliée, l’armée belge reconquiert Ostende et Bruges. 28 juin 1919 : Traité de Versailles. La Belgique récupère les cantons de Saint-Vith, Eupen et Malmédy. Elle obtient en Afrique centrale un mandat pour administrer le Ruanda et le Burundi qui faisaient partie de l’ancienne Afrique orientale allemande. Les Pays-Bas, qui sont demeurés neutres durant la guerre, et où l’empereur Guillaume II viendra se réfugier en novembre 1918 pour y vivre en exil jusqu’à sa mort survenue en 1941, ont beaucoup souffert de la guerre : limitations imposées par l’Angleterre à leurs importations, maintien de forces mobilisées importantes pendant toute la durée du conflit ; mais, malgré les revendications belges, ils parviennent à conserver, lors de la Conférence de la Paix, le débouché de l’Escaut et le Limbourg. 16 novembre 1919 : Des élections générales ont lieu en Belgique, au suffrage universel masculin à vingt et un ans dont l’introduction a été décidée par la loi du 10 avril précédent. Le parti catholique perd sa majorité absolue, le parti libéral recule très largement, les socialistes emportent soixante-dix sièges. Octobre 1921 : Fin du ministère d’Union sacrée de Carton de Wiart en raison des prises de position antimilitaristes des socialistes. La Belgique entre dans une phase prolongée d’instabilité gouvernementale. 1924 : La Belgique rattrape le niveau de production atteint en 1914. 1930 : Flamandisation de l’Université de Gand. Le mouvement nationaliste flamand se développe durant cette période derrière le Vlaams Nationaal Verbond de Staf Declercq et le Verdinaso, ou Verbond van Diets Nationaal Solidaristen, de Joris van Severen qui réclame la reconstitution des dix-sept provinces des Pays-Bas. 1932 : La crise commencée en 1929 fait que les exportations belges ont diminué de moitié en trois ans. 1932 : Achèvement en Hollande de la grande digue fermant le Zuiderzee. 17 février 1934 : Mort accidentelle d’Albert Ier à Marche-les-Dames. 1934-1935 : Alors que Léopold III a succédé à Albert Ier, la crise atteint son intensité maximale et les politiques de déflation menées alors demeurent inefficientes. Mars 1935 : Le financier Paul Van Zeeland constitue un ministère qui dévalue le franc belge et tente de mener une « expérience » interventionniste inspirée du New Deal rooseveltien et des théories keynesiennes mais son gouvernement d’union nationale souffre de l’opposition entre les libéraux de Max Léo Gérard et les socialistes d’Henri de Man attachés au « planisme ». 7 mars 1936 : Remilitarisation de la Rhénanie par Hitler. 24 mai 1936 : Les élections générales bouleversent l’ensemble du paysage politique belge. Le parti « rexiste » du jeune Léon Degrelle enlève 21 sièges de députés en rassemblant 10 % des voix, presque autant que le parti libéral. Les catholiques perdent seize sièges. Les socialistes en perdent six au profit des communistes et, avec seize sièges, les nationalistes flamands doublent leurs voix. 27 juin 1936 : Un nouveau gouvernement Van Zeeland fait voter les lois instituant les congés payés et la semaine de quarante heures. 28 octobre 1936 : Le Parlement belge vote des mesures de réarmement. L’année suivante, la Belgique se libère des engagements qui la liaient à la France et affirme s’attacher de nouveau à la neutralité (avril). Elle obtient de l’Allemagne en octobre une déclaration prenant acte de sa neutralité. 11 avril 1937 : Le duel électoral Degrelle-Van Zeeland tourne à l’avantage du second, soutenu par tous les partis institutionnels et par l’Église catholique. 1937 : Mariage aux Pays-Bas de la princesse héritière Juliana avec le prince Bernhard de Lippe-Biesterfeld. Mai 1938-février 1939 : Ministère Paul Henri Spaak en Belgique. 2 avril 1939 : Les élections générales belges voient progresser catholiques et libéraux et reculer rexistes et communistes. La même année, les socialistes entrent dans le gouvernement néerlandais. 10 mai 1940 : Début de l’offensive allemande à l’ouest. Les parachutistes allemands s’emparent des forts de Liège et de Rotterdam, alors que les villes hollandaises sont cruellement bombardées. Les Pays-Bas capitulent au bout de quatre jours de combat alors que la Belgique résiste dix-huit jours. Après la percée obtenue à Sedan par les grandes unités blindées allemandes et la rupture du front français, l’armée belge se replie difficilement. Le 25 mai, Léopold III refuse de suivre ses ministres en exil. La résistance belge sur la Lys rend possible le rembarquement anglais de Dunkerque quelques jours plus tard mais le roi doit accepter le 28 mai une capitulation devenue inévitable et ne comportant que des clauses militaires ; Lord Gort a déjà ordonné depuis plusieurs jours aux troupes anglaises de détruire le matériel et les stocks qu’elles ne pourront réembarquer. Un gouvernement belge en exil va s’installer à Londres. À partir de l’été de 1941 l’entrée en guerre allemande contre l’URSS mobilise dans la « croisade contre le bolchevisme » les volontaires rexistes ou nationalistes flamands alors que la résistance ne se développe vraiment en Belgique qu’à l’extrême fin de l’Occupation. Le roi Léopold III est transféré en Allemagne le 7 juin 1944 et Bruxelles est libérée par les forces américaines le 3 septembre suivant. Le gouvernement en exil d’Hubert Pierlot s’installe alors. L’épuration, dite « chasse aux inciviques », prend alors – pour légitimer la « résistance » des exilés – des proportions totalement exagérées : près de 350 000 dossiers sont constitués, dont 85 % déboucheront sur un non-lieu. Février-mars 1942 : Les Japonais s’emparent des Indes néerlandaises. 1942-1944 : Déportation des Juifs hollandais, parmi lesquels Anne Frank qui deviendra la figure emblématique des victimes juives du nazisme. 5 septembre 1944 : Les gouvernements belge, hollandais et luxembourgeois installés à Londres conviennent de supprimer les droits de douane entre les trois pays. Ces décisions sont complétées par une union tarifaire le 1er janvier 1948. Le Benelux est né. 17 septembre 1944 : Échec à Arnhem de l’opération aéroportée anglo-américaine Market Garden. Pour venir à bout de la résistance allemande en Zélande, les bombardements alliés détruisent les digues et noient l’île de Walcheren. 16 décembre 1944 : Les Allemands déclenchent l’offensive des Ardennes, stoppée au bout de quelques jours. 4 mai 1945 : Capitulation des dernières forces allemandes des Pays-Bas. 4 septembre 1948 : La reine Wilhelmine, partie en exil en 1940, abdique en faveur de sa fille Juliana. 4 avril 1949 : Les trois pays du Benelux adhèrent à l’Alliance atlantique. Juin 1949 : Les femmes belges participent pour la première fois aux élections législatives. Elles sont gagnées par les sociaux-chrétiens qui ne disposent pas pour autant d’une majorité à la Chambre. 23 août-2 novembre 1949 : La Conférence de la Table Ronde réunie à La Haye débouche sur l’indépendance des Indes néerlandaises et donne naissance à l’Indonésie qui dénoncera en 1954 « l’union » toute formelle maintenue avec les Pays-Bas. En 1963, la Nouvelle-Guinée occidentale (Irian Jaya), remise par les Pays-Bas à l’ONU est finalement accordée par celle-ci à l’Indonésie. 12 mars 1950 : 58 % des électeurs belges se prononcent, lors d’un référendum, en faveur du retour du roi Léopold avec 70 % de oui en Flandre et 57 % de non en Wallonie ; mais devant l’agitation persistant en Wallonie autour de la « question royale » Léopold III cède ses pouvoirs, le 1er août, au prince Baudouin, et abdique finalement en sa faveur le 16 juillet 1951. 1951 : Les trois pays du Benelux s’associent avec la France, l’Allemagne de l’Ouest et l’Italie au sein de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA). 1953 : Les inondations catastrophiques qui affectent la Zélande font près de deux mille victimes. 1954 : Victorieux lors des élections législatives belges, les socialistes relancent la guerre scolaire mais sont battus aux élections de 1958. Un pacte scolaire est finalement négocié le 20 novembre 1958 par les trois grands partis catholique, libéral et socialiste. 1957 : Les trois pays du Benelux adhèrent au traité de Rome constituant la Communauté économique européenne ou Marché commun. 1959 : Découverte aux Pays-Bas des gisements de gaz de Groningue. 1960 : La Belgique accorde l’indépendance au Congo mais celui-ci entre dans une crise qui le plonge dans une situation chaotique pendant plusieurs années. 24 décembre 1960 : Le vote d’une loi sur la question linguistique vise à apaiser les affrontements communautaires entre Flamands et Wallons mais les élections de mars 1961 voient arriver à la Chambre cinq députés fédéralistes flamands de la Volksunie. Les partis communautaires progressent encore aux élections de 1968. 1970 : Une réforme constitutionnelle partage la Belgique en quatre régions : francophone, néerlandophone, germanophone et bruxelloise qui est une région bilingue. Le déclin économique de la région wallonne – dont l’économie a longtemps reposé sur l’extraction charbonnière et la métallurgie – aggravée par une baisse rapide de la natalité, favorise la montée en puissance d’une Flandre beaucoup plus dynamique, plus jeune, profitant à plein, à partir des années soixante, de la nouvelle économie née de l’intégration européenne, de la mondialisation et du développement des services. 1975 : La Guyane hollandaise accède à l’indépendance sous le nom de Surinam. 1980 : Abdication de la reine Juliana en faveur de sa fille Beatrix. 1985 : Signature de l’Acte Unique européen. 5 avril 1990 : Crise constitutionnelle en Belgique après le refus du roi Baudouin de signer le décret dépénalisant partiellement l’avortement. Baudouin est déclaré « dans l’incapacité de régner » pour la journée du 5 avril, pour que le décret puisse être promulgué. 1990 : Signature de la convention de Schengen par les trois pays du Benelux. 1991 : Le traité de Maastricht engage l’Union européenne sur la voie de la monnaie unique. 14 juillet 1993 : Le Parlement vote la loi faisant de la Belgique un État fédéral. 31 juillet 1993 : Mort du roi Baudouin. Son frère lui succède sous le nom d’Albert II. 1991 : Négociation du traité de Maastricht qui engage l’Union Européenne sur la voie de la monnaie unique. Il sera signé en février 1992. 20 octobre 1996 : Marche blanche de 350 000 manifestants à Bruxelles pour dénoncer l’impuissance de la justice face à l’affaire Dutroux. 2 octobre 1997 : Les ministres des Affaires étrangères des quinze pays de l’Union européenne signent le traité d’Amsterdam, qui remplace et complète celui de Maastricht. 14 juin 1999 : À la suite d’un lourd échec électoral, le premier ministre social-chrétien belge Jean Luc Dehaene démissionne et un gouvernement libéral dirigé par Guy Verhofstadt est constitué. Les partis au pouvoir sont sanctionnés en raison de la crise de l’État belge, résumée par l’affaire Dutroux et le scandale alimentaire de la dioxine. La forte poussée du Vlaamsblok en Flandre témoigne par ailleurs de la vigueur du nationalisme flamand.

Les années qui s’étendent de l’ouverture du XXIe siècle à 2015 ont été marquées, pour les Pays Bas et la Belgique, par l’émergence d’une crise qui a pris divers aspects. Les abdications respectives de la reine Beatrix des Pays Bas au profit de son fils Willem Alexander (avril 2013) et du roi Albert II de Belgique (en juillet 2013) ont signifié une rupture symbolique avec le siècle précédent. Mais les événements dynastiques ne revêtent qu’une importance relative dans ces deux monarchies parlementaires où les souverains ne jouent pas un rôle politique de premier plan.

En Belgique, la question nationale demeure posée car les deux communautés – flamande et wallonne – constitutives du pays s’éloignent manifestement de plus en plus et les progrès réalisés par les séparatistes flamands modérés du NVA de Bart de Wever semblent confirmer cette évolution. Une très longue crise gouvernementale, résultat de l’incapacité à s’entendre des différents partis de gouvernement, a débouché en 2011 sur la formation d’un ministère Elio di Rupo, leader du parti socialiste francophone mais les élections de mai 2014 ont abouti à la formation d’un gouvernement dirigé par le libéral francophone Charles Michel, issu d’une coalition dominée par le parti séparatiste néerlandophone Alliance néo-flamande (NVA). Au cours des années précédentes, le mouvement flamand était surtout représenté par l’aile radicale du Vlaamsblock et des organisations qui lui ont succédé, ce qui contribuait à son isolement.

Avec le NVA , l’existence de la Belgique paraît pourtant à terme davantage compromise car ce parti dispose d’une capacité de rassemblement de l’électorat flamand bien plus importante. Outre la question constitutionnelle qui demeure posée, dans la mesure où les Flamands entendent développer les transferts de compétences aux communautés, notamment sur le plan social, la Belgique doit affronter une situation économique difficile, avec un taux d’endettement s’élevant à 105 % de son PIB à la fin de 2014 et un chômage à 8,5 %. Les recettes proposées par le nouveau gouvernement (retraite à 67 ans, réforme du système des préretraites, gel de l’indexation automatique des salaires) ont remobilisé les syndicats qui s’opposent vigoureusement aux réformes libérales. 

Les Pays Bas sont confrontés pour leur part à la montée d’un puissant courant « populiste » anti européen et hostile à la déferlante migratoire qui, dans un contexte de crise, affecte un pays qui présente la plus forte densité de peuplement d’Europe. Les dogmes des années 90 (générosité des aides sociales, ouverture européenne, accueil des étrangers) sont largement remis en cause. En 2002, le courant populiste de Pym Fortuyn, assassiné durant la campagne électorale, emporte 17 % des voix et 26 sièges sur les 150 du Parlement. Il reflue aux élections anticipées organisées en 2003 mais l’assassinat par un islamiste, en novembre 2004, du cinéaste Théo Van Gogh relance le mouvement. En juin 2005, lors du référendum relatif au projet de constitution européenne, les Néerlandais rejettent le texte par 63 % des voix, malgré les prises de position favorables au « oui » des principaux partis politiques.

Aux européennes de 2009 et aux municipales de 2010, le Parti de la Liberté de Geert Wilders a confirmé les progrès du camp populiste, avant de devenir, lors des législatives qui ont suivi la troisième force politique du pays. Il va soutenir le gouvernement du libéral Mark Rutte, qui entreprend de rétablir les finances publiques. Davantage que les questions économiques, qui ont dominé le champ politique pendant plusieurs décennies, ce sont désormais les problèmes identitaires qui s’imposent dans le contexte de « guerre civilisationnelle » engendrée par l’essor de l’islamisme combattant.

Les années 2016 et 2017 n'ont pas vu la situation s'améliorer sensiblement dans les deux pays. La Belgique est dirigée par une coalition incertaine regroupant trois partis néerlandophones et un parti francophone placée sous la direction du libéral Charles Michel. Elle a été frappée de plein fouet par les attentats islamistes perpétrée dans le métro et à l'aéroport de Bruxelles  et quelque peu discréditée aux yeux de ses partenaires européens quand  le gouvernement régional wallon a bloqué la ratification du traité CETA de libre-échange avec le Canada. La situation économique, avec une croissance faible à 1,3% et une dette publique devant atteindre 107% du PIB en 2017 est également préoccupante. La persistance du chômage et l'aggravation de l'invasion migratoire demeurent de lourds défis que le royaume ne paraît guère en mesure de relever avec succès.

La situation économique apparaît plus favorable aux Pays-Bas où les élections législatives de mars 2017 ont permis le maintien du gouvernement libéral du premier ministre Mark Rutte. Le parti de ce dernier (VVD) recule sensiblement et son partenaire social- démocrate s'effondre mais le parti populiste de Geert Wilders, même s'il a progressé, n'a pas gagné son pari d'arriver en tête de ce scrutin. La question migratoire n'en reste pas moins posée et les perspectives de réchauffement climatique susceptibles d'entraîner une montée du niveau des eaux ont conduit à la mise en œuvre d'un ambitieux programme de renforcement des digues et des systèmes de protection d'un territoire qui demeure toujours au péril de la mer.

L'année 2018 a vu la Belgique renouer avec une situation de crise politique qui lui est familière. Le premier ministre Charles Michel, qui s'était fixé comme objectif de "durer" pendant toute un législature - c'est à dire jusqu'en mai 2019 - a finalement été contraint de démissionner le 18 décembre 2018, la Nouvelle Alliance Flamande (NVA) ayant décidé de quitter le gouvernement fédéral, mis en cause pour avoir approuvé le pacte de Marrakech concernant l'immigration. Le pouvoir politique se trouve donc paralysé par une nouvelle crise au long cours, analogue à celle qu'a connue le pays quand il est resté pendant des mois sans gouvernement. Les élections européennes du printemps 2019 ont confirmé la fragmentation du pays et ont notamment vu un retour en force du Vlaams Belang, le mouvement nationaliste flamand, qui s'était affaibli ces dernières années au profit de la NVA de Bart De Wever. A l'inverse les socialistes et les écologistes ont progressé en Wallonie. La question de la formule institutionnelle susceptible de mieux correspondre à la réalité du pays demeure donc posée. Aux Pays-Bas, le premier ministre Mark Rutte dirige une coalition de quatre partis qui apparaît fragile mais la poussée populiste incarnée par Geert Wilders semble avoir été contenue, ce qu'ont confirmé les élections européennes du printemps de 2019. Le libéral Mark Rutte est souvent assimilé à Emmanuel Macron dont il soutient les projets réformateurs mais à qui il s'oppose quand il s'agit d'imaginer une réforme du système européen allant dans le sens d'une plus grande intégration, notamment en matière budgétaire. Le bilan économique apparaît très positif, avec une croissance proche de 3% en 2018, une dette publique ramenée à 50% du PIB et un chômage tombé sous le seuil des 4%. Des inquiétudes demeurent toutefois quant aux conditions dans lesquelles va s'effectuer le Brexit, les Pays-Bas étant traditionnellement très proches du Royaume-Uni en matière économique. La question climatique et en particulier la menace de la montée du niveau de la mer prend aux Pays-Bas une importance primordiale, au point que le gouvernement se voit accusé d'en faire trop peu en ce domaine.

La Belgique a été, en 2020-2021, fortement  impactée par l’épidémie de Covid et les instances gouvernementales ont montré leurs divisions à propos des politiques à suivre alors que l’opinion s’est exaspérée des mesures restrictives imposées à la population, au point que certaines manifestations ont dégénéré dans des violences urbaines. Les débats relatifs à la sortie du nucléaire et à l’immigration ont également divisé le gouvernement de coalition d’Alexander de Croo. Victorieux lors de élections législatives de mars 2021, le premier ministre néerlandais Mark Rutte pensait reconduire sans difficulté sa majorité sortante, mais le parti libéral et ses trois partenaires potentiels n’ont fini par s’entendre qu’à la mi-décembre. Comme en Belgique, des manifestations de rejet des mesures sanitaires prises par le gouvernement ont failli tourner à l’émeute. L’assassinat en juillet, par des tueurs de la maffia marocaine, du  journaliste d’investigation Peter R. de Vries a également suscité une forte réaction de l’opinion, ce qui a poussé le gouvernement à augmenter considérablement les moyens alloués à la police, chargée d’enrayer la mise en place dans le pays  d’un narco-Etat. Mark Rutte, qui entendait, au niveau européen, se poser en pourfendeur  de  "l’illibéralisme » hongrois de Viktor Orban, a du en rabattre pour faire face aux défis de la pandémie de Covid et au départ vers la place de Londres des géants nationaux Unilever et Shell. Des difficultés compensées par la croissance (4% en 2021), celle-ci permettant de lancer un plan ambitieux de lutte contre le réchauffement climatique, indispensable dans ce pays dont un tiers du territoire se trouve sous le niveau de la mer, donc potentiellement menacé de submersion en cas de montée significative du niveau des eaux.