Clio
Des voyages dans le monde entier en compagnie de conférenciers passionnés
  Trouver votre voyage
Lettres et brochures
S'abonner aux lettres électroniques de Clio

Pour vous abonner à nos lettres électroniques, merci de nous indiquer votre adresse mél.

Votre mél


Abonnez-vous à nos
    lettres électroniques

Nous suivre
  Haut de page
L'Autriche
De l'empire Habsbourg à l'Union européenne

  Partir avec Clio
  01 53 68 82 82
  Nous contacter
Après avoir gouverné un empire de 50 millions d'âmes qui couvrait, à la veille de 1914, une superficie de 676 000 kilomètres carrés, l'Autriche est devenue en 1919 un petit Etat enclavé d'Europe centrale, étendu sur 83 000 kilomètres carrés et peuplé de 6,5 millions d'habitants. L'Empire austro-hongrois qui constituait encore, à la veille de la première guerre mondiale, l'une des cinq grandes puissances européennes, a, en fait, implosé sous les coups de boutoir militaires et idéologiques de ses vainqueurs. Si l'histoire de l'Autriche est, aujourd'hui comme hier, indissociablement liée au destin des Habsbourg, précisons que l'entrée de cette prestigieuse famille dynastique sur la scène de l'Histoire, au XIIIe siècle, s'inscrit dans la tradition d'un rêve impérial qui remonte à Charlemagne (début du IXe siècle), puis aux empereurs germaniques (du Xe au XIIIe siècle). Ce rêve consistait à reconstituer en Europe l'Empire romain d'Occident, disparu au Ve siècle, et à faire le pendant à l'Empire romain d'Orient, devenu byzantin.
Au début du XXe siècle, à une époque où l'Etat-Nation s'est imposé partout en Europe, la pax austriaca n'en était pas moins parvenue à faire vivre ensemble aux côtés de 12 millions d'Allemands et 10 millions de Magyars (qui constituaient le cœur de l'Empire austro-hongrois), 22 millions de Slaves, 3 millions de Roumains, sans oublier 800 000 Italiens. La multiplicité d'influences culturelles de la Mitteleuropa permet de comprendre la situation de carrefour de l'Autriche qui va constituer pendant plusieurs siècles la pierre angulaire de cet espace danubien. Espace d'autant plus soudé culturellement qu'il avait dû affronter, aux XVIe et XVIIe siècles, la menace et la réalité d'invasions ottomanes de grande ampleur. Ce sera le génie des Habsbourg de faire vivre le sentiment d'une communauté de destins au sein d'une sorte de koinè plurielle et supranationale rassemblant des peuples aux identités multiples. L'empereur François-Joseph aimait répéter qu'il s'adressait à ses « peuples » et l'hymne impérial des Habsbourg était chanté en onze langues. En ce sens, l'empire des Habsbourg n'a jamais constitué la « prison des peuples » à laquelle on a tenté de le réduire. Les nationalités étaient respectées. Le loyalisme à l'égard de l'empereur constituait un indiscutable facteur de cohésion, tandis qu'une véritable communauté d'intérêts unissait des peuples aux histoires et aux cultures différentes.

Au cœur de l'Europe centrale, un territoire enclavé mais ouvert

Dans ses frontières actuelles, issues de 1945, l'Autriche se caractérise géographiquement par un espace très allongé d'ouest en est, dont le relief de type alpin couvre 70 % de la superficie. Les Alpes autrichiennes, qui s'étendent sur près de 60 000 kilomètres carrés, présentent une série de chaînes d'orientation ouest-est, découpées en massifs bien individualisés. Une chaîne centrale élevée, où se succèdent les massifs cristallins de l'Ötzal et des Hohe Tauern, forme un faîte granitique long de 250 kilomètres et porteur de grands glaciers. Situé au sud des Hohe Tauern, le Grossglockner constitue, à 3 797 mètres d'altitude, le point culminant de l'Autriche. Des cols, tel celui du Brenner (au sud du Tyrol), qui, à 1 316 mètres d'altitude, constitue le plus bas des cols alpins, facilitent le franchissement de cette imposante chaîne montagneuse centrale. Celle-là constitue d'ailleurs une formidable ligne de partage des eaux, le drainage se faisant, au nord, vers le Danube et au nord-ouest, vers le Rhin (région du Vorarlberg). L'écoulement des eaux opère une direction méditerranéenne, dans la région du Tyrol méridional et une direction danubienne, à l'est de l'Autriche, avec deux fleuves, la Drave et la Mur, dont les vallées séparent les Alpes de Carinthie et de Styrie (au sud) de la chaîne centrale (au nord). La structure longitudinale en plis serrés des Alpes de Carinthie s'ouvre par le col du Tarvis. La disposition de cet ensemble hydrographique alpin est importante pour expliquer la situation géographique de carrefour qui est celle de l'Autriche. Au nord du dispositif montagneux central du pays, les vallées de l'Inn et du Danube permettent, de fait, un passage ouest-est, la vallée longitudinale de l'Inn constituant le couloir, de loin le plus important, vers l'est tandis qu'à l'ouest, le Lech s'ouvre sur la Bavière. Le col du Brenner assure, quant à lui, dans un axe longitudinal, la liaison entre l'Europe du Nord et l'Italie. Ajoutons, concernant le relief alpin, qu'au nord de la chaîne centrale de l'Autriche, au-delà du sillon de l'Inn, de la Salzach, de l'Enns et de la Leitha (en gros du Vorarlberg à la région de Salzbourg, en passant par le Nord du Tyrol), les Préalpes calcaires offrent des sommets dénudés et, dans la partie orientale, des reliefs karstiques grandioses.

À côté de cet ensemble géomorphologique de type alpin qui couvre, rappelons-le, plus de 70 % de la surface du pays, le Nord-Est et l'Est de l'Autriche correspondent à un deuxième ensemble bien circonscrit, celui du Bassin pannonien. Le bassin tectonique de Vienne, morcelé en plusieurs unités (Weinviertel, Marchfeld, Seewinkel), et qui s'identifie, de surcroît, au cœur démographique, économique et politique du pays, se trouve à la jonction de trois plaines : la plaine de Moravie, au nord de Vienne, celle de Pannonie, au sud, et, enfin, entre les deux, la vallée du Danube. Cette dernière, étroite à l'ouest, puis s'élargissant à partir de Vienne (vers la plaine hongroise), est riche en lœss, c'est-à-dire en alluvions fertiles. L'altitude y varie de 365 mètres dans les plaines de l'Ouest, à 185 mètres dans les basses plaines de l'Est, situées en aval de Vienne. La région du lac de Neusiedl, à une trentaine de kilomètres au sud de Vienne, évoque déjà la plaine hongroise. Plus au sud encore, le Burgenland, ancienne marche militaire frontalière de la Slovaquie, de la Hongrie et de la Slovénie, et Land (se traduit par « Etat » en allemand et désigne par conséquent chacun des 9 Etats fédérés constitutifs de la République d'Autriche depuis 1918. Les Länder autrichiens ont des compétences moins étendues que les Länder allemands, par exemple sur le plan judiciaire) tardivement intégré à l'Autriche (1921), représente, en termes de relief, l'espace le plus plat du pays. Il est formé de collines et de plaines qui caractérisent la transition vers la grande plaine pannonienne, dont le cœur se situe en Hongrie.

Un dernier ensemble géomorphologique caractérise le territoire autrichien. Il s'agit du paysage de l'Oberösterreich (Haute-Autriche), dont le Danube constitue la frontière méridionale, et qui s'identifie au monde hercynien d'Europe centrale : ce sont les paysages pittoresques de la Wachau, là où le Danube s'encaisse, entre Linz et Krems, dans le socle cristallin. Plus au nord, les vieux massifs hercyniens du Mühlviertel et du Waldviertel sont des régions tabulaires, couvertes de forêts, et qui ont été colonisées au Moyen Age.

En ce qui concerne le climat, le dispositif alpin autrichien, véritable château d'eau, détermine les conditions météorologiques du pays. Les massifs centraux reçoivent, en moyenne annuelle, plus de deux mètres de précipitations (en partie sous forme de neige). Les hivers, rigoureux dans la chaîne centrale du pays, le sont nettement moins dans le bassin carinthien de Klagenfurt, au sud, où l'enneigement hivernal est moindre. De surcroît, l'ensoleillement en altitude y est élevé, ce qui favorise le beau temps hivernal (près de 2 000 heures de soleil par an à Villach, en Carinthie). Le foehn, vent dont le caractère sec et chaud provoque la fonte des neiges et qui favorise le début de la vie végétative, est un phénomène fréquent dans les grandes vallées. Les régions de plaine situées à l'est de l'Autriche reçoivent en moyenne, quant à elles, moins de 500 millimètres de précipitations par an. Le climat y est de type continental, avec de fortes amplitudes thermiques annuelles (des étés chauds mais des hivers souvent rigoureux).

Au total, si l'Autriche est un pays aujourd'hui enclavé entre sept Etats (l'Allemagne au nord-ouest, la Suisse à l'ouest, l'Italie au sud-ouest, la Slovénie au sud, la Hongrie au sud-est, la Slovaquie à l'est, et la République tchèque au nord-est), des axes naturels permettent de se mouvoir dans les quatre directions cardinales de l'Europe. On peut ainsi mieux comprendre le rôle de carrefour historique qui a été celui de l'Autriche. Comme toujours, la géographie et l'Histoire s'interpénètrent pour apporter dans le découpage territorial une cohérence spatiale aux actions des hommes. De ce point de vue, ce que l'on appelle la Vorderösterreich (ou l'Autriche antérieure) désignera, sur le temps long, les anciennes possessions territoriales des Habsbourg en Bade, Souabe, Alsace et Vorarlberg, autrement dit l'espace initial des seigneurs Habsbourg, à l'ouest. Le Tyrol y est parfois historiquement associé. L'appellation d'Innerösterreich (ou Autriche intérieure), surtout utilisée entre les XIVe et XVIe siècles, regroupait les contrées du Sud, Carinthie, Styrie, Carniole, plus le comté de Gortiz, la marche wendique et Trieste sur l'Adriatique. Le quart nord-est est désigné, quant à lui, comme la Basse-Autriche. Vienne en constitue le centre et ce territoire s'étend historiquement jusqu'au Burgenland voisin. Enfin, la Haute-Autriche, au nord, a longtemps compris l'espace allant approximativement de Linz à Salzbourg. A ce découpage en quatre entités géographiques s'est substitué, depuis 1918, une Autriche divisée en neuf Länder, sur le modèle fédéral allemand. A l'extrémité occidentale s'étend le Vorarlberg (capitale, Bregenz), puis le Tyrol (Innsbruck). Frontaliers avec l'Italie et la Slovénie, on trouve la Carinthie (Klagenfurt) puis la Styrie (Graz) qui, elle, est uniquement frontalière avec la Slovénie. Tout à l'est de l'Autriche, figure le Burgenland (Eisenstadt), frontalier avec la Hongrie. Vienne constitue à elle-seule un Land, qui se trouve au cœur de celui de Basse-Autriche (Sankt-pölken) et frontalier avec la Slovaquie et une partie de la République tchèque. Enfin, au nord, en amont de Vienne, le Land de Haute-Autriche (Linz) est frontalier avec la République tchèque et l'Allemagne tandis que celui de Salzburg (capitale du même nom) jouxte uniquement la Bavière allemande. Chaque Land est gouverné par un Landesregierung. Avec environ 1,8 million d'habitants, soit 20 % de la population du pays, Vienne dépasse de très loin les autres villes (Graz, la deuxième ville d'Autriche n'avoisine « que » les 200 000 habitants, suivie de très près par Linz). L'économie de l'Autriche, notamment marquée par l'importance du tourisme, est aujourd'hui l'une des douze plus riches au monde en termes de PIB par habitant. Avec un secteur important de la sous-traitance, l'Autriche est essentiellement un pays de petites et moyennes entreprises, dynamiques dans l'industrie chimique (cellulose, pétrochimie), électrique et électronique, l'industrie métallurgique et mécanique (secteur phare de l'économie autrichienne qui permet – comme le voisin allemand – l'exportation importante de machines-outils). Les exploitations agricoles, dans les plaines de l'Est, sont de petites tailles, d'où la méfiance des exploitants vis-à-vis des politiques intégratrices de l'UE. Hormis l'élevage et la production laitière, le reste de l'agriculture s'exporte peu. En revanche, compte tenu de l'abondante surface boisée du pays, la production de bois, cellulose et papier est massivement tournée vers l'exportation.

Lorsque l'on porte, en définitive, son regard sur l'Autriche, il ne faut jamais perdre de vue que son destin s'est longtemps et souvent identifié à un espace qui a transcendé ses propres frontières. C'est avant tout en chef d'orchestre que l'Autriche a par exemple affirmé, singulièrement à l'égard de la Bohême comme de la Hongrie voisines, son génie propre tout en s'efforçant de respecter l’entité culturelle amie.

Préhistoire, romanisation et mise en place des peuplements

Préhistoire : Des foyers de peuplement existent, en Europe centrale, dès le Paléolithique comme l'attestent les fouilles des grottes de Mixmitz en Styrie (Sud de l'actuelle Autriche). La Venus de Willendorf, qui date de 25 000 ans av. J.-C., précède de quelque cinq mille ans les fresques murales de Lascaux.

3500 av. J.-C. : Fondation de « cités lacustres » sur le Mondsee en Haute-Autriche.

VIIIe-IVe siècle av. J.-C. : Age d'or de la civilisation dite « de Hallstatt » à partir d'un foyer de peuplement d'origine vénéto-illyrienne, qui s'étendit sur toute l'Europe centrale. Le nom « Hallstatt » correspond précisément à celui d'une localité située dans le Salzkammergut (région de Salzbourg). En Haute-Autriche, ce premier âge du fer est fondé sur l'exploitation et le commerce du sel dans des proportions jusqu'alors inconnues, d'où le nom de « Salzbourg ». C'est au VIe siècle avant J.-C. qu'est fondée par les Celtes Vindobona (« ville blanche »), future Vienne.

IVe-Ier siècle av. J.-C. : Un tournant s'opère au IVe siècle avant J.-C. qui fait entrer pour environ trois siècles l'Europe centrale dans un second âge du fer. Cette culture, dite « La Tène », se caractérise en Autriche par l'apparition de la longue épée de fer, la fabrication locale d'objets autrefois importés de Grèce ou d'Etrurie et le début de la culture des nécropoles à tombes plates. Tout au long de cette période, les Celtes ont progressé le long du Danube, par vagues successives, contribuant à faire de cet espace un lieu de production et une plaque tournante des échanges entre les Grecs, les Etrusques et les peuples du Nord. Une empreinte indélébile d'origine celtique est laissée dans la toponymie autrichienne, qu'il s'agisse des fleuves (l'Inn), des villes (Vienne).

Ier siècle av. J.-C. : Sous le principat d'Auguste, à partir de 16-15 av. J.-C., la frontière septentrionale de l'Empire romain est portée sur le Danube.

46 ap. J.C. : Tandis que les territoires sud-danubiens sont soumis les uns après les autres à la puissance impériale romaine, de nouvelles provinces sont créées sous le règne de l'empereur Claude. A l'ouest, la Rhétie (l'actuel Vorarlberg), avec Vindelicorum (Augsbourg) comme capitale, sert à consolider le limes rhénan. Plus à l'est, regroupant l'ensemble des pays alpins autrichiens, la province du Norique, restée quelque temps un royaume autonome (regnum Noricum), se trouve également entièrement intégrée à l'Empire romain. Plus à l'est encore, la Pannonie est érigée en province vers le milieu du Ier siècle de notre ère. Sous Trajan, cette province sera divisée en Pannonie supérieure avec Vindobona (Vienne) comme capitale et en Pannonie inférieure, correspondant à l'actuelle Hongrie occidentale.

180 : Au moment où la Pannonie prend une importance stratégique majeure avec l'installation de grands camps romains comprenant des unités d'élite, comme la Xe Légion Gemina, stationnée à Vindobona, l'empereur Marc-Aurèle, à la suite de campagnes militaires victorieuses contre les Marcomans, les Quades et leurs alliés Sarmates, meurt de la peste dans la future capitale autrichienne, le 17 mars.

213 : Vindobona (Vienne) acquiert, sous l'empereur Caracalla, le statut prestigieux de municipe.

238 : Apparition des Goths sur le Danube.

378 : La bataille d'Andrinople voit les Goths vaincre les armées romaines.

400 : Destruction de Vindobona par les Germains.

Vers 440 : Les plaines du moyen-Danube servent de base de départ aux raids dévastateurs menés par les Huns. 

453 : A la mort d'Attila, vingt-trois ans avant la chute définitive de l'Empire romain d'Occident, les Goths de Pannonie et les peuples indigènes romanisés se soulèvent.

Vers 570 : Tandis que des Germains (Bavarois) occupent le Tyrol, les Alpes autrichiennes et la haute vallée du Danube passent sous le contrôle des Slaves. Dans le même temps, la plaine pannonienne devient la terre d'élection des Avars. D'autres Slaves, les Slovènes, fuyant la poussée des Avars, s'installent en Carniole et dans le bassin de Vienne.

582 : La prise de Sirmium par les Avars constitue le prélude à leur établissement pour plus de deux siècles sur le bassin moyen du Danube, incluant l'Autriche actuelle.

791-811 : La poussée des Francs de Charlemagne vers l'est finit par soumettre les Avars païens. Le territoire (qui ne porte pas encore le nom d'Autriche) est intégré à l'Ostmark (marche de l'Est) de l'empire carolingien. En ayant doté le pays d'un substrat linguistique et culturel germanique tout en facilitant l'établissement du catholicisme romain, Charlemagne peut, à juste titre, être considéré comme le père de l'Autriche médiévale. Le peuplement du pays, fait de Celtes romanisés, de Bavarois et de Slaves germanisés, y est bigarré. Afin de coordonner l'œuvre de christianisation, l'évêché de Salzbourg est élevé en 798 au rang de métropole. Empruntant l'axe de pénétration du Bassin danubien, des missionnaires francs, encouragés par les évêchés de Salzbourg et de Passau, arriveront, dans les premières décennies du IXe siècle, en Bohême, d'où ils poursuivront leur mission d'évangélisation jusqu'en Moravie et en Slovaquie occidentale. A cette date, le territoire de l'actuelle Autriche est pleinement christianisé.

881 : Les Moraves du roi Svatopluk s'emparent de Vindobona qui porte désormais le nom, sans doute slave, de Wiena (Vienne).

955 : Après avoir utilisé pendant plusieurs décennies les plaines du Danube comme des bases arrière pour lancer des raids dévastateurs dans toutes les directions, les Magyars sont vaincus à la bataille du Lechfeld par l'armée du roi de Germanie, Othon. La menace hongroise est définitivement conjurée. Première conséquence, la marche orientale (Ostmark de Charlemagne) est reconstituée. Elle s'appellera à partir de 996, en vieil allemand, Ostarrichi, mot qui a donné Österreich, francisé d'abord en « Austriche », devenu ensuite « Autriche ».

962 : Le couronnement à Rome d'Othon Ier comme empereur du Saint Empire romain germanique reconstitue en Europe un empire qui contrôle un gigantesque espace à dominante germanique allant de la Baltique à l'Italie.

Une première dynastie : les Babenberg

976 : L'empereur Othon II nomme le prince Léopold (Liutpold) de Babenberg margrave (Markgraf, c'est-à-dire « comte de la marche »). Les Babenberg vont alors régner en dynastes ducaux sur l'Autriche jusqu'au milieu du XIIIe siècle. Durant cette même période, la dynastie des Premyslide régnera sur la Bohême et celle des Arpad sur la Hongrie.

1020 : C'est dans la seigneurie d'Argovie, au cœur de l'actuelle Suisse alémanique, qu'est édifié, sur un éperon rocheux, dressé à 510 mètres au-dessus des eaux capricieuses de l'Aar (entre Bâle et Zurich), le château des ancêtres de la dynastie des Habsbourg. Le château d'Argovie, construit vers 1020 par un certain Radbot, s'appelait initialement Habichtsburg, « le château (Burg) des autours (Habicht) », en référence aux rapaces diurnes qui virevoltaient au-dessus du piton rocheux. Selon la légende, Radbot aurait perdu puis retrouvé l'un de ses oiseaux de proie sur la cime rocheuse qui lui apparut alors comme le lieu idéal pour l'édification d'un château. C'est une contraction de « Habichtsburg » qui donnera le nom Habsbourg.

1030 : Le nom de « Wienne » apparaît pour la première fois.

1074 : La marche de l'Est atteint la Leitha, rivière séparant l'actuelle Autriche de la Hongrie.

1114 : Fondation par le margrave Léopold III et son épouse Agnès d'Allemagne (fille de l'empereur germanique Henri IV) de l'abbaye de Klosterneuburg, au nord de Vienne. L'église abbatiale des chanoines augustins (à partir de 1133) abrite encore aujourd'hui le tombeau de saint Léopold (le margrave fondateur, canonisé en 1485 et qui deviendra officiellement en 1665 le saint patron de l'Autriche). Par lettre de donation, le souverain autrichien avait également contribué à la fondation en 1113 de l'abbaye bénédictine de Melk en Basse-Autriche.

1133 : Trois ans avant sa mort, Léopold III le Pieux (1073-1136) fait une donation permettant, au sud-ouest de Vienne, la fondation de l'abbaye cistercienne de Heiligenkreuz, aujourd'hui la plus vieille communauté cistercienne du monde. Le site entendait répondre au besoin des Babenberg de protéger, par la grâce, la frontière orientale, encore mouvante et ouverte, de l'empire. L'abbaye fut fondée à la demande du fils du margrave Léopold, Otton, futur abbé de l'abbaye cistercienne de Morimond en France et futur évêque de Freising, ainsi que l'un des plus grands historiens du Moyen Age.

1137-1254 : La dynastie Hohenstaufen fondée par le roi germanique Conrad III se trouve pour plus d'un siècle à la tête de l'empire. Sous cette dynastie culminera la lutte implacable entre l'idéologie impériale et la théocratie pontificale, autrement appelée « querelle des investitures ». Si les dynastes Babenberg seront amenés à soutenir la papauté, la famille des seigneurs Habsbourg intégrera, quant à elle, la clientèle des Hohenstaufen.

1147 : Consécration à Vienne de la première église romane, Saint-Etienne.

1156 : Le margrave Henri II Jasomirgott obtient de l'empereur Frédéric Ier Barberousse le titre de duc ainsi que le privilegium minus qui accorde à l'Autriche un statut privilégié dans le royaume de Germanie. Vienne est choisie comme capitale par le nouveau duc de Babenberg en lieu et place de Klosterneuburg.

1157 : Fondation du sanctuaire de Mariazell au nord-est de la Styrie. Ce sera le plus important lieu de piété mariale de toute l'Autriche.

1182 : Le roi de Jérusalem, Baudoin IV, octroie un morceau de la Sainte Croix à Léopold V, duc de Babenberg (1157-1194). La relique repose dans l'abbaye de Heiligenkreuz, fondée en 1133.

1192 : Le duc Léopold V obtient de l'empereur Henri VI l'investiture de la Styrie. Ainsi s'amorce, sous l'autorité des ducs d'Autriche, une politique d'unification de territoires qui sera parachevée au XIVe siècle.

Vers 1200 : Vienne connaît avec le poète et chanteur de cour Walther von der Vogelweide l'âge d'or des Minnesänger. Les Babenberg offrent alors à l'Autriche une première notoriété musicale européenne.

1241 : L'invasion mongole déferle jusqu'aux portes de l'Autriche, dans la région orientale du Burgenland, provoquant l'incendie de la ville d'Eisenstadt. Conséquence de l'invasion : de nombreuses forteresses seront ultérieurement édifiées dans cette région pour protéger la frontière orientale autrichienne.

1246 : Défaite hongroise à la bataille de la Leitha au cours de laquelle Frédéric II le Belliqueux, dernier duc de Babenberg trouve la mort. Les rois Ottokar II de Bohême et Béla IV de Hongrie revendiquent le trône laissé vacant en Autriche.

1254-1273 : Une période chaotique de deux décennies appelée le « Grand Interrègne » suit l'extinction de la dynastie impériale des Hohenstaufen. L'Autriche passe alors sous le contrôle d'Ottokar II de Bohême qui entreprend, à Vienne, la construction de la Hofburg, le palais de gouvernement.

De l'avènement des Habsbourg à la Renaissance

1273-1291 : Règne de l'empereur Rodolphe Ier de Habsbourg. Appartenant à une famille ayant fait partie de la clientèle des Hohenstaufen, Rodolphe Ier, en mettant la main sur l'héritage autrichien des Babenberg, devient l'un des princes territoriaux les plus possessionnés du monde germanique. Il bénéficie de surcroît du soutien du pape et du roi de Hongrie.

1273 : Le comte Rodolphe IV de Habsbourg, petit suzerain de quelques fiefs alsaciens et de Suisse alémanique, est élu, le 1er octobre, roi de Romains. Le 24, il est couronné roi de Germanie à Aix-la-Chapelle. Sans jamais recevoir des mains du pape la couronne impériale, il sera reconnu par tous empereur. Un Habsbourg vient, pour la première fois, d'accéder au trône suprême sous le nom de Rodolphe Ier.

1276 : Mise au ban de l'Empire du puissant roi de Bohême Ottokar II et à prise de contrôle de toute l'Autriche par le nouvel empereur Rodolphe Ier de Habsbourg. Vienne acquiert à cette occasion le privilège d'immédiateté (« Reichsunmittelbarkeit » en allemand), c'est-à-dire un statut politique de type féodal qui était traditionnellement accordé dans le Saint Empire romain germanique à une ville, principauté ou abbaye. « Immédiateté » signifie ici « sans intermédiaire ». Ce privilège accordé à Vienne eut pour contrepartie de fournir à l'empereur aide et conseils par les autorités de la ville

1278 : L'Autriche et ses dépendances sont incorporées au patrimoine des Habsbourg à l'issue de la bataille de Dürnkrut, livrée le 26 août dans le Marchfeld, et qui voit la défaite et la mort du puissant roi de Bohême Ottokar II Premyslide. L'Autriche allemande vient d'échapper à la menace d'une domination tchèque et à l'intégration dans le royaume slave voisin.

1288 : Fondation, à Vienne, de la Sankt-Nikolai-Bruderschaft, première guilde de musiciens dont la fonction est officiellement « d'honorer Dieu par l'art ». Elle sera d'une longévité impressionnante puisqu'elle ne disparaîtra qu'en 1782, sur ordre de Joseph II.

1291 : Mort le 15 juillet de l'empereur Rodolphe Ier. Le transfert de la dépouille du souverain Habsbourg dans la cathédrale de Spire, en terre rhénane, témoigne d'un lien de continuité avec le prestigieux passé impérial germanique puisque c'est là qu'étaient inhumés la plupart des empereurs allemands, qui avaient régné depuis le Xe siècle.

1292 : A peine les Habsbourg entrent-ils dans l'Histoire que la dignité impériale leur échappe : leur puissance territoriale inquiétant les princes-Electeurs, ces derniers portent leur choix, le 5 mai, non sur l'héritier de Rodolphe, Albert, mais sur un prince d'une lignée modeste de Rhénanie, Adolphe de Nassau. Celui-ci est couronné à Aix-la-Chapelle, le 24 juin.

1298 : N'ayant pas tenu ses promesses faites aux grands Electeurs, en menant notamment une politique expansionniste, l'empereur Adolphe est destitué par la diète de Mayence, le 23 juin. Il est vaincu et trouve la mort face aux troupes autrichiennes d'Albert à la bataille de Göllheim, livrée près de Worms, le 2 juillet. Six jours plus tôt, les princes-électeurs ont précisément élu Albert de Habsbourg, roi des Romains.

1298-1308 : Règne de l'empereur Albert Ier de Habsbourg. Monté sur le trône du Saint Empire à la faveur des déconvenues de son rival rhénan, Adolphe de Nassau, le souverain Habsbourg n'obtiendra l'approbation papale qu'en 1303, non sans d'importantes concessions, notamment des abandons de souveraineté en Italie et une sujétion croissante de l'empereur au Saint-Siège.

1308 : Alors que la fin de la dynastie des Premyslides intervient en 1306 avec l'assassinat du roi Venceslas III, les Habsbourg ne profitent nullement de cette vacance politique en Bohême (et en Hongrie) puisque l'empereur Albert est lui-même assassiné le 1er mai 1308. Pendant plus d'un siècle, le trône impérial et le destin de la Mitteleuropa (Europe centrale) échappent aux Habsbourg.

1308-1438 : La maison de Luxembourg prend le relais de celle des Habsbourg pour assurer les rênes du Saint Empire avec trois souverains (Henri VII de 1308 à 1313, son petit-fils Charles IV de Luxembourg de 1355 à 1378 et, enfin, Sigismond, fils du précédent, de 1410 à 1437). Deux autres souverains s'intercaleront durant cette période : Louis IV (Wittelsbach) de 1313 à 1347 et Robert de Palatinat de 1401 à 1410.

1309 : Rattachement de la Bohême à l'empire.

1354 : Avec la prise de Gallipoli, les Ottomans s'installent pour la première fois dans la partie européenne de l'empire byzantin et entament la conquête des Balkans. Douze ans plus tard, Andrinople tombe aux mains des Turcs. La route du Danube est ouverte.

1355 : Tandis qu'il est élu empereur à la tête du Saint Empire, Charles IV de Luxembourg intègre à ses possessions territoriales la Silésie, les Lusaces et la Basse-Autriche. La Bohême, épicentre de l'empire, devient l’état le plus puissant et rayonnant d'Europe centrale.

1356 : La Bulle d'or codifie l'élection impériale, confiée à sept Electeurs que sont les archevêques de Cologne, Trèves et Mayence, le duc de Saxe, le roi de Bohême, le comte palatin du Rhin et le margrave de Brandebourg.

1365 : Investi du Tyrol par son beau-père, l'empereur Charles IV de Luxembourg, le duc Rodolphe IV de Habsbourg, fondateur de la cathédrale Saint-Etienne, crée l'université de Vienne sur le modèle de celle de Prague.

1389 : Vaincus une première fois sur les rives de la Maritza en 1371, les Serbes sont écrasés par les troupes ottomanes lors de la bataille dite du « champ des Merles » à Kosovo. Les Ottomans se rapprochent de l'espace danubien.

1419-1436 : Guerres hussites en Bohême entre partisans de la réforme et défenseurs de l'Eglise catholique romaine.

1420 : Les Turcs brûlent l'église et la ville de Mariazell, haut-lieu de la culture catholique autrichienne.

1433 : Achèvement à Vienne de la flèche de la cathédrale Saint-Etienne.

1437 : La mort en décembre de l'empereur et roi Sigismond (de la maison de Luxembourg) laisse vacants les trônes de Bohême et de Hongrie ainsi que celui du Saint Empire, sur lequel le souverain régnait depuis un demi-siècle. Cette vacance permet aux Habsbourg, après plus d'un siècle d'éclipse impériale, d'opérer un éclatant retour sur la scène politique d'Europe centrale dans la mesure où le gendre du souverain défunt n'est autre que le duc d'Autriche, Albert V de Habsbourg.

1438-1439 : Règne de l'empereur Albert II de Habsbourg. Malgré la brièveté du règne, avec Albert II, une nouvelle carte de l'espace danubien se dessine, qui prendra un siècle plus tard un caractère durable : l'Autriche, la Bohême et la Hongrie se trouvent unies – depuis Vienne – sous un même sceptre.

1438 : Tandis que la diète magyare reconnaît en janvier le duc Albert d'Autriche comme roi de Hongrie et qu'au printemps, la diète pragoise reconnaît le même duc d'Autriche comme roi de Bohême, le collège impérial, réuni à Francfort, l'élit à la tête du Saint Empire sous le nom d'Albert II. Pour la première fois depuis 1308, les Habsbourg se retrouvent mêlés aux destinées du trône impérial, trône qu'en réalité, ils ne devaient plus quitter – excepté un bref aparté en 1742-1745 – jusqu'en 1918.

1439 : De retour d'une campagne contre les Ottomans, l'empereur Habsbourg s'éteint en octobre en terre hongroise. Son cousin Frédéric de Styrie lui succède.

1440-1493 : Règne de l'empereur Frédéric III de Habsbourg. Tandis que la Bohême de Georges Podebrady et la Hongrie de Matthias Corvin retrouvent une « autonomie nationale », et voyant le formidable héritage albertin se dérober sous ses pieds, l'empereur Habsbourg se résout à consolider la base territoriale originelle de l’Etat autrichien, c'est-à-dire la Basse-Autriche, l'Autriche intérieure et ses prolongements adriatiques (acquisition du port de Trieste puis de Fiume en 1471) à un moment où, à l'ouest, la Vorderösterreich et le Tyrol, berceau de la dynastie Habsbourg, échappent au contrôle de Vienne. L'empereur Frédéric III, malgré ses faiblesses, aura une haute idée de la maison d'Autriche, résumée dans la formule ou sigle AEIOU, Austriae Est Imperare Orbi Universo (« Il appartient à l'Autriche de gouverner le monde entier »).

1440 : Le prince Habsbourg Frédéric de Styrie est élu roi de Germanie par le collège des princes-Electeurs sous le nom de Frédéric III.

1452 : Frédéric III est officiellement intronisé à la tête du Saint Empire. Il sera d'ailleurs le dernier empereur à se faire couronner à Rome.

1453 : La « deuxième Rome », Constantinople, tombe aux mains des Turcs. Le surcroît de prestige obtenu par les Ottomans marque le début d'une lutte de longue haleine pour le contrôle de l'ensemble de l'espace danubien aux dépens d'une Chrétienté appelée à être de plus en plus divisée.

1477 : Souhaitant étendre son influence au-delà du cadre alpin de l'héritage historique des Habsbourg, l'empereur Frédéric III unit, le 18 août, son fils Maximilien à Marie de Bourgogne, héritière de Charles le Téméraire, mort quelques mois plus tôt. La puissance patrimoniale des Habsbourg s'agrandit ainsi de la « franche » comté de Bourgogne et des Pays-Bas. Matthias Corvin rendra hommage aux desseins matrimoniaux de l'empereur Frédéric III dans ces vers : « Que d'autres fassent la guerre ; toi, heureuse Autriche, tu conclues des mariages. Et les royaumes que Mars donne aux autres, c'est Venus qui te les donne. » L'histoire se chargera, certes, d'apporter un sérieux démenti à cette vision quelque peu irénique. Il n'en reste pas moins qu'est ici présente en germe l'idée d'un empire chrétien universel, idée que cherchera à concrétiser, en vain, Charles Quint, au siècle suivant.

1482 : Défenseur de l'indépendance de la Hongrie face à l'Autriche, et poursuivant une politique expansionniste, le roi de Hongrie Matthias Corvin se lance à la conquête de la Basse-Autriche, avec Vienne comme objectif.

1485 : Matthias Corvin entre triomphalement dans Vienne où il reçoit un serment de fidélité des autorités municipales. Le roi de Hongrie fait installer sa brillante cour dans la capitale autrichienne et y développe les artefacts de l'esprit renaissant. Avec la formule Aller Erst Ist Österreich Verloren (« Avant tout, l'Autriche est perdue ! »), la devise AEIOU est immédiatement tournée en dérision par les Viennois qui expriment là, la profonde défiance qu'ils ont toujours manifestée à l'égard de Frédéric III. C'est donc à l'initiative des Hunyadi et non des Habsbourg que le vaste ensemble territorial de l'époque d'Albert II vient d'être partiellement reconstitué. La même année, le margrave Babenberg du début du XIe siècle, Léopold III, auteur de nombreuses donations au clergé autrichien, est canonisé par l’Eglise de Rome. Il sera officiellement le saint patron de la Basse-Autriche en 1665.

1490 : La mort, à Vienne, de Matthias Corvin provoque le retour en Basse-Autriche de l'archiduc Maximilien.

1491 : Souhaitant reconstituer l'ancien empire d'Albert II, Frédéric III signe avec le roi de Hongrie et de Bohême, Vladislas Jagellon, un traité de paix stipulant qu'en cas de vacance du trône des Jagellon, la diète hongroise devrait choisir le nouveau souverain parmi les héritiers de Maximilien. Ainsi sont posées les bases d'une puissance habsbourgeoise intégrant en Europe centrale la Hongrie et la Bohême. Cette cohésion géopolitique danubienne sous le sceptre unificateur des Habsbourg sera effective à l'extinction des Jagellon en 1526. Elle perdurera quatre siècles.

1493-1519 : Règne de l'empereur Maximilien Ier de Habsbourg. Au même titre que Ferdinand II d'Aragon, le souverain Habsbourg incarne toutes les vertus du prince de Machiavel. Non seulement il est, avec Georg von Frundsberg, l'un de ses meilleurs capitaines, à l'origine de la formation des « lansquenets », ces redoutables fantassins armés de pique qui s'illustreront notamment sur les champs de bataille italiens, mais il se passionne pour les arts et les lettres, organisant à Vienne des fêtes somptueuses sur le modèle des cours italiennes. Il s'entoure d'humanistes et d'artistes allemands de renom comme Ulrich von Hütten ou Albrecht Dürer (qui réalisera le célèbre portrait de l'empereur), sans parler d'un des plus illustres musiciens européens de la Renaissance, Josquin des Prés, qu'il fait venir à Vienne. Aux yeux de Maximilien, il est nécessaire que la capitale de l'Autriche se pare d'une communauté musicale de haut niveau composée de chanteurs et d'instrumentistes internationaux. Surnommé « Maximilien Sans le Sou », en raison des difficultés financières chroniques de la monarchie autrichienne, le souverain n'en sera pas moins à l'origine d'un embryon d'administration centralisée. Non seulement, à partir de l'empereur Maximilien, la validation du titre impérial n'est plus subordonnée au couronnement à Saint-Pierre de Rome (il s'agit désormais d'une démarche élective des princes réunis à Francfort), mais, par un savant jeu d'alliances matrimoniales, les rêves de puissance du souverain deviendront au XVIe siècle une réalité géopolitique. L'empereur Maximilien ouvre en effet une période qui permettra aux Habsbourg, sur le temps long, de rayonner sur un vaste espace allant de l'Alsace aux Carpates et des Hautes-Alpes à l'Adriatique. L'Autriche en sera le noyau politique et, surtout, moral.

1496 : Obéissant à une stratégie matrimoniale visant à contenir les appétits français en Italie, l'empereur Maximilien marie son fils Philippe à Jeanne, héritière d'Isabelle de Castille et de Ferdinand II d'Aragon (Rois catholiques d'Espagne). Cette alliance matrimoniale sera à la base du futur empire européen des Habsbourg au XVIe siècle.

1500 : Naissance au Prinzenhof de Gand, en Flandre, du futur Charles Quint, fils de Jeanne de Castille et du prince Habsbourg Philippe le Beau.

1506 : La mort de Philippe le Beau fait du jeune Charles de Gand (Habsbourg) l'héritier présomptif de la couronne d'Espagne en même temps que l'héritier direct de son grand-père Maximilien en Autriche.

1508 : Couronnement de l'empereur Maximilien à Trente. L'expression de « Saint Empire » romain germanique (Heiliges Römisches Reich deutscher Nation) s'impose.

1515 : En la cathédrale Saint-Etienne de Vienne est solennisé le pacte de « succession mutuelle » initié en 1491 entre Habsbourg et Jagellon.

Entre déchirures religieuses et menaces ottomanes

1517 : Le moine augustin Luther publie ses quatre-vingt-quinze thèses à Wittenberg dressant l'opinion allemande contre Rome. Très rapidement, les prédications luthériennes, en provenance de Saxe, pénètrent dans l'espace danubien où, logiquement, les populations germanophones sont les premières touchées. C'est le cas en Bohême, en Moravie, mais aussi en Autriche et, notamment, à Vienne, qui sera à la fin du siècle à 75 % luthérienne.

1519-1556 : Règne de l'empereur Charles Quint de Habsbourg. Alors qu'il est roi de Castille depuis 1516, le jeune prince Habsbourg, dont le père est mort en 1506 et la mère déficiente mentalement, s'est trouvé propulsé, à 19 ans, par héritages cumulés, sur le devant de la scène européenne à la tête d'un ensemble territorial impressionnant qui s'étend de Séville à Vienne et de Bruges à Prague. En lutte sur trois fronts (le roi de France, la Sublime Porte ottomane et le protestantisme au nord de l'Europe), le souverain Habsbourg se voudra le champion d'un orbis christianus europeanus, dessein qui se révélera, in fine, un échec.

1519 : Alors que le 12 janvier s'éteint, à Wels, en Autriche, l'empereur Maximilien Ier, son petit-fils Charles est élu, le 28 juin, à Francfort, roi des Romains et empereur à la tête du Saint Empire romain germanique sous le nom de Charles Quint. A l'origine du choix des princes-Electeurs, il y eut, à n'en pas douter, la prise de conscience de la nécessité de recourir à un prince suffisamment puissant pour stopper la progression inquiétante des Turcs vers le cœur de l'Europe danubienne.

1521 : Les Turcs s'emparent de Belgrade dont la forteresse constituait l'essentiel du dispositif de défense de la Hongrie. Dans le souci de simplifier le gouvernement du très vaste territoire dont il a la charge, Charles Quint confie à son frère cadet, l'archiduc Ferdinand, l'administration de la Basse-Autriche et de l'Autriche intérieure (Styrie, Carinthie, Carniole).

1522 : Traité de Bruxelles par lequel Charles Quint ajoute aux fonctions de son frère, Ferdinand, la gestion de l'Autriche antérieure (Vorderösterreich), du Tyrol et du Wurtemberg. Ferdinand devient gouverneur ou lieutenant de l'empire et épouse à Linz Anne Jagellon de Hongrie, dont le frère, Louis II, épouse, en guise de mariage croisé, Marie (sœur de Charles Quint et de Ferdinand).

1526 : Le 29 août, les Turcs remportent en Hongrie une éclatante victoire à la bataille de Mohacs au cours de laquelle le roi de Hongrie Louis II Jagellon, lui-même, trouve la mort. Les Ottomans sont désormais installés au cœur de l'espace danubien et entendent bien poursuivre leur progression en direction de Vienne. Le roi défunt de Hongrie n'ayant pas d'héritier, l'ensemble de ses possessions souveraines passent, comme convenu, entre les mains de la maison des Habsbourg. C'est la véritable naissance de la monarchie autrichienne qui rassemble pour la première fois sous une même autorité (celle de Ferdinand de Habsbourg) les pays de la couronne de Bohême, l'Autriche (haute et basse) et la couronne de Hongrie-Croatie.

1528 : Alors que le XVIe siècle a globalement épargné l'Europe danubienne des violences religieuses observées en Allemagne, en France ou aux Pays-Bas, le seul acte significatif et violent en Autriche, durant cette période, concerne la décapitation en place publique, à Vienne, du chef anabaptiste Balthazar Hubmaier.

1529 : Tandis que c'est aux Habsbourg qu'incombe la tâche de contenir la poussée ottomane en Europe centrale, Soliman le Magnifique, à la tête de 120 000 hommes met, en septembre, le siège devant Vienne. Après dix-huit jours de résistance, la capitale autrichienne est sauvée. Elle restera toutefois sous la menace d'une nouvelle offensive ottomane pendant encore un siècle et demi.

1532 : A Güns, à une centaine de kilomètres au sud-ouest de Vienne, la résistance d'une petite garnison face à toute une armée ottomane contraint le sultan à la retraite et permet ainsi de sauver le cœur de l'empire. La Styrie et la Slavonie, plus périphériques, sont dévastées.

1541 : Prise de Buda par les Turcs.

1545-1563 : Concile de Trente, aux origines de la contre-réforme catholique engagée en Europe par l'Eglise de Rome.

1552 : Installation des jésuites à Vienne.

1555 : La signature par Charles Quint de la paix d'Augsbourg scelle une paix de compromis qui traduit, en définitive, l'échec du rêve d'une république chrétienne universelle et entérine une durable division de l'espace germanique entre des contrées septentrionales désormais acquise à la Réforme et des régions, au sud, qui constituent, comme l'Autriche, le bastion avancé de la contre-réforme catholique. La paix d'Augsbourg voit triompher le principe Cujus regio, ejus religio : les sujets adoptent une religion conforme à celle de leur prince.

1556 : Abdication de Charles Quint. On distingue désormais un domaine des Habsbourg d'Espagne (comprenant, sous la férule de fer de Philippe II, fils de l'empereur déchu, les possessions espagnoles, néerlandaises, bourguignonnes et italiennes) et un domaine des Habsbourg d'Autriche, où Ferdinand hérite de son frère du titre d'empereur sous le nom de Ferdinand Ier. Ce dernier ne régnera, toutefois, que sur les pays germaniques et la Bohême, ne parvenant nullement à imposer son pouvoir à la totalité de l'ancien royaume médiéval de Hongrie-Croatie dont il a, depuis 1526, en principe, hérité.

1556-1564 : Règne de l'empereur Ferdinand Ier de Habsbourg, marqué par la mise en place, à Vienne, d'une administration centrale performante. Si, dans l'ensemble des pays héréditaires de la monarchie, le souverain ne pourra empêcher l'afflux massif de pasteurs formés à Wittenberg (en Allemagne), ainsi qu'une conversion non moins notable de la noblesse au protestantisme, c'est néanmoins sous son règne que commence la reconquête catholique de la Mitteleuropa.

1556 : Création, à Vienne, par l'empereur Ferdinand Ier, du Hofkriegsrat, le Conseil de guerre chargé des affaires militaires et du financement de la guerre. Cette création parachève celles mises en œuvre depuis l'époque de Maximilien Ier, à savoir la Hofkanzlei (la chancellerie de cour), le Hofsrat (le Conseil aulique, instance judiciaire supérieure) et la Hofskammer (la chambre chargée d'administrer les revenus de la couronne).

1558 : Mort de Charles Quint dans le monastère hiéronymite de Yuste (Estrémadure).

1560 : Achèvement à Vienne du mur d'enceinte.

1564-1576 : Règne de l'empereur Maximilien II de Habsbourg. La liberté religieuse, d'inspiration érasmienne, que le nouveau souverain Habsbourg promeut, tranche avec la politique de son père et de son oncle et inquiétera son entourage ainsi que la papauté. Cela vaudra même au souverain le sobriquet, sans doute excessif, d'« enfant terrible des Habsbourg ».

1564 : À la mort, à Vienne, de l'empereur Ferdinand Ier, l'héritage est partagé entre ses trois fils, en vertu du vieux système germanique de partition du pouvoir. L'aîné, Maximilien, conserve la dignité impériale ainsi que la souveraineté sur la Bohême et la Basse-Autriche, tandis que Ferdinand hérite du Tyrol et de l'Alsace (Autriche antérieure) et que le cadet, Charles, reçoit la Styrie, la Carinthie et la Carniole (Autriche intérieure).

1568 : La paix d'Andrinople consacre le partage de la Hongrie entre l'Autriche, les Turcs et une Transylvanie devenue protectorat ottoman.

1569 : Maximilien II reconnaît le libre exercice du culte évangélique aux nobles de Basse-Autriche dans leurs domaines. Si l'empereur Habsbourg conserve dans son entourage des conseillers protestants et des humanistes appelés Hochchristen (chrétiens de cour), et s'il applique, par ailleurs, les décrets tridentins de manière tout à fait sélective, on ne saurait pour autant en faire un crypto-luthérien. Plein d'aversion pour les progrès du calvinisme, il reste fidèle à certains sacrements et à la vénération des reliques. En fait, profondément attaché aux idées érasmiennes, il cherche avant tout, dans un souci d'équilibre et de réconciliation, à s'élever au-dessus des frontières confessionnelles tranchées.

1572 : Fondation à Vienne de l'Ecole espagnole d'équitation.

1576-1611 : Règne de l'empereur Rodolphe II de Habsbourg. Derrière ce souverain adonné aux plaisirs ésotériques, le visage enserré dans une collerette, comme pour soutenir son menton proéminent – marque de fabrique morphologique des Habsbourg depuis le XVe siècle – se profile un prince possédant une très haute idée de la dignité impériale et de la fonction assignée par la Providence à la maison d'Autriche. Médiocre chef militaire, Rodolphe II sera un protecteur avisé des arts et des lettres.

1579 : Alors que la fin du XVIe siècle correspond à un renouveau du catholicisme encouragé par le concile de Trente, la progression du protestantisme dans l'empire des Habsbourg se trouve progressivement enrayée grâce à une élite ecclésiastique autrichienne désormais formée à Rome. En 1579 a lieu le premier cas d'expulsion (à Gorizia, aux portes de l'Italie) d'une minorité protestante hors de l'empire. Le phénomène se répète ensuite à Graz en Styrie, à Lavant en Carinthie, puis à Vienne, grâce aux efforts de Monseigneur Khesl, qui parvient à faire de la capitale autrichienne un bastion de la contre-réforme catholique. Vers 1600, les protestants récalcitrants seront sommés de choisir entre la conversion ou l'exil. Tout en manifestant une profonde aversion à l'encontre du luthéranisme, le catholicisme de Rodolphe II ne s'en différencie pas moins de celui, tridentin, qui imprègne, au même moment, la cour de Madrid où le souverain a grandi.

1582 : Prenant prétexte d'un tremblement de terre à Vienne, Rodolphe II décide de transférer la cour impériale à Prague (au château royal du Hradchin) qui va redevenir pour trois décennies la capitale et le centre de gravité de l'empire.

1593 : Nourrissant l'espoir de rassembler les chrétiens par la persuasion, et s'inscrivant à sa façon dans la geste de Charles Quint, Rodolphe II décide la reprise de la guerre contre les Turcs.

1599 : Le renouvellement par l'empereur Habsbourg de tous les grands officiers du royaume de Bohême ne concerne plus que des catholiques.

1606 : Tandis qu'une alliance est scellée en Hongrie entre le prince calviniste Bocskai et les Turcs, l'archiduc Matthias, frère de Rodolphe II, craignant de perdre définitivement le territoire magyar, n'hésite pas, en juin, à signer un compromis avec les magnats hongrois. Cinq mois plus tard, le même Matthias, contre l'avis de son royal frère, conclut avec les Turcs la paix de Zsitva Torok.

1608 : Matthias se fait élire en novembre roi de Hongrie par la diète, tout en obtenant le trône d'Autriche. Rodolphe II ne conserve plus que la Bohême, la Lusace et la Silésie. On voit bien que les divisions politiques ne se calquent plus sur le modèle confessionnel puisque deux princes catholiques Habsbourg s'affrontent pour le pouvoir.

1609 : Alors que Matthias n'hésite pas à prendre la tête de troupes réunies par les ordres protestants pour marcher sur Prague et détrôner sont frère, la noblesse tchèque en profite pour imposer à Rodolphe II la reconnaissance officielle et écrite de la tolérance religieuse. C'est la fameuse « Lettre de Majesté » du 9 juillet 1609, édictée par le roi et qui va constituer, autant l'aboutissement d'un processus amorcé au XVe siècle que le point de départ d'une tragique phase de convulsion qui débouchera sur la guerre de Trente Ans.

1611 : La santé mentale de l'empereur se dégradant, son frère Matthias parvient à se faire nommer à la tête d'une régence qui sera de courte durée, puisque le souverain impérial abdique le 11 novembre et meurt quelques mois plus tard, le 20 janvier 1612.

1612-1619 : Règne de l'empereur Matthias Ier de Habsbourg. La monarchie autrichienne est plus affaiblie et fragmentée que jamais. On peut alors parler d'une fédération de diètes plus que d'une véritable monarchie.

1612 : Bien qu'il ait prévu de respecter les engagements de la Lettre de Majesté, l'empereur Matthias prend la décision de quitter Prague pour réinstaller la cour et le pouvoir à Vienne.

1618 : Tandis que le prophète silésien Christoph Kotter, décryptant l'Apocalypse, n'hésite pas à prédire la fin des Habsbourg à un moment où le camp réformé atteint une puissance qu'il n'a jamais eue en Europe centrale, la défenestration de Prague, en mai 1618 (deux lieutenants royaux et leur secrétaire précipités dans le vide depuis les fenêtres du palais par des chefs protestants) marque le premier acte de la guerre de Trente Ans. Les trois victimes ayant eu, grâce aux feuillées, la chance de s'en sortir vivants puis de quitter Prague, le camp catholique n'hésitera pas à crier au miracle. Par crainte de voir se reproduire à l'intérieur de la maison d'Autriche la rupture qui était intervenue aux Pays-Bas en 1566, l'empereur Matthias déclenche, dès l'été 1618, des opérations militaires en Bohême, lesquelles déboucheront sur une impasse. La même année, l'opéra – théâtre chanté né en Italie  fait son apparition à Vienne.

1619-1637 : Règne de l'empereur Ferdinand II de Habsbourg. Succédant à son cousin Matthias, mort sans héritier, le nouveau souverain impérial est d'emblée destitué comme roi de Bohême au profit de l'électeur palatin Frédéric V. Ferdinand II, se voudra le champion de la contre-réforme et le défenseur d'un catholicisme de combat.

1619 : Alors que, le 20 mars, s'éteint à Vienne l'empereur Matthias, les protestants, après s'être emparés de la Moravie en mai, menacent cette fois directement la capitale autrichienne. C'est que l'année 1619 a failli voir les prophéties millénaristes calvinistes se produire. En effet, Vienne est assiégée et prise en tenaille, d'une part par les forces fédérées de Lusace, de Silésie, de Bohême et de Moravie, d'autre part par les protestants de Haute et Basse-Autriche, enfin, et surtout, par les forces du prince calviniste de Transylvanie, Gabriel Bethlen. Ce dernier est assuré d'être le champion devant faire tomber le papisme tant honni depuis plus d'un siècle, et qu'incarnent, à Vienne, les Habsbourg. Comme plus tard, en 1848-1849, le salut des Autrichiens va venir de l'est, en l'occurrence des « cosaques » ou cavaliers d'Ukraine polonaise, ces derniers étant dirigés par le magnat catholique Druget de Homona immédiatement érigé, à Vienne, en héros. Dès le départ, le conflit a une dimension européenne puisque le roi d'Espagne, lui-même champion de la cause catholique, décide d'intervenir depuis les Pays-Bas espagnols et le Milanais, pour soutenir massivement l'empereur Habsbourg de Vienne.

1620 : Eclatant succès remporté, le 8 novembre, par les forces impériales combattant au nom de Ferdinand II lors de la bataille, restée légendaire, de la Montagne blanche, aux portes de Prague. Frédéric quitte la Bohême : il est resté pour l'histoire le « Winterkönig », le roi d'un hiver.

1621 : Mise au ban de l'empire de Frédéric V.

1627 : En vertu de la Constitution renouvelée, la monarchie devient héréditaire dans la famille des Habsbourg, et la Bohême perd une grande partie de ses privilèges. A l'exception des juifs qui jouissent de la protection impériale, tout le royaume de Bohême est redevenu catholique. En Haute-Autriche, où les premières expulsions datent de 1624, le catholicisme est rendu obligatoire l'année suivante, et la noblesse doit, en 1627, choisir entre la conversion ou l'exil.

1628-1629 : Victoires militaires des généraux de Ferdinand II, Tilly et Wallenstein.

1629 : Les Habsbourg de Vienne peuvent s'appuyer sur l'édit de restitution pour imposer la rétrocession à l’Eglise catholique de tous les biens ecclésiastiques, bénéfices et abbayes, sécularisés depuis 1552. La paix d'Augsbourg est mise à mal.

1630-1632 : Après l'éviction et la mise au ban de l'empire de Frédéric V en 1621, après la défection du Danemark en 1629, la cause protestante trouve, en 1630, un autre champion, rapidement identifié au « Lion du Nord » annoncé par les prophéties, en la personne du roi de Suède, Gustave II Adolphe, lequel est encouragé par certains princes protestants allemands comme, en sous-main, par les agents de Richelieu. Le roi luthérien se révélera le plus redoutable chef de guerre du premier XVIIe siècle européen. Les noms de Breitenfeld et de Lützen, où il trouve la mort, en 1632, à la tête de son armée, résonnent comme autant de violentes défaites militaires infligées aux catholiques.

1634 : Assassinat de Wallenstein sur ordre de l'empereur Ferdinand II. Le souverain Habsbourg subit alors fortement la double influence des jésuites et du « parti espagnol » de la Cour, inquiets des propositions de compromis entre protestants et catholiques émises par le brillant général, fondateur de l'armée autrichienne moderne.

1635 : Après dix-sept années de guerre qui ont littéralement épuisé et ruiné les belligérants, l'empereur Ferdinand II signe, le 30 mai, le traité de Prague qui vise à suspendre l'édit de restitution pour une période de quarante ans. Les puissances étrangères – au premier rang desquelles la France, qui s'estime totalement lésée – ne l'entendent toutefois pas ainsi. Après s'être engagée par procuration pendant une décennie, la France de Louis XIII et de Richelieu entre, en mai 1635, dans la guerre ouverte contre les Habsbourg de Vienne et de Madrid. Le conflit devient véritablement européen : treize années seront encore nécessaires pour parvenir à une paix définitive et durable.

1637 : Mort à Vienne de l'empereur Ferdinand II dont le caractère impitoyable et féroce s'est plus rapproché, en définitive, de celui des dignitaires de Madrid que de ses prédécesseurs viennois.

1637-1658 : Règne de l'empereur Ferdinand III de Habsbourg. Le souverain poursuit la lutte engagée par son père tout en laissant la porte ouverte aux négociations, désireux de satisfaire au mieux les intérêts de la maison d'Autriche après deux décennies de conflit.

1645 : Défaite des troupes impériales à la bataille de Jankau (Bohême). Vienne est menacée par les Suédois qui envahissent la Basse-Autriche et assiègent Brno.

1648 : Signature des traités de Westphalie qui marquent la fin de la guerre de Trente Ans et entérinent le principe cujus regio, ejus religio, qui veut que la confession des sujets d'un pays soit en conformité avec celle de leur prince. Avec l'indépendance de la Confédération helvétique, les Habsbourg de Vienne perdent définitivement la terre de leurs ancêtres. Le traité stipule, par ailleurs, la cession à la France d'un certain nombre de leurs possessions héréditaires d'Autriche antérieure (Vorderösterreich) en Haute-Alsace et dans le Sundgau, en plus de l'abandon des terres d'empire en Basse-Alsace. La diète de Prague fixe une fois pour toutes, à l'empereur Habsbourg, les limites de son autorité en reconnaissant une pleine souveraineté aux princes territoriaux. Avec les traités de Westphalie, un nouvel ordre européen est né : le traumatisme des guerres de religion a accouché du jus publicum europaeum, l'établissement d'un droit des gens en Europe qui met fin au caractère absolu et illimité des conflits religieux. Ce droit reconnaît pleinement la souveraineté des Etats et la légitimité des conflits limités pour régler les différends. Les vaincus seront désormais admis à la table des négociations, évitant ainsi toute rancœur ou idée de revanche. Cet ordre européen sera définitivement caduc après 1918.

1658-1705 : Règne de l'empereur Léopold Ier de Habsbourg qui va incarner l'absolutisme habsbourgeois et l'idéal du prince chrétien, dans une époque où les Ottomans ont, une dernière fois, fait trembler Vienne et où Louis XIV établit son hégémonie en Europe. Peu porté sur la chose militaire, l'empereur apparaît volontiers comme un souverain imprégné de culture et de sciences. Il saura, en revanche, s'entourer de capitaines d'armées, parmi les plus talentueux d'Europe, tels Montecuccoli, Charles de Lorraine et, surtout, le prince Eugène.

1664 : Tandis que l'Autriche est à nouveau menacée par les armées du sultan, Raimundo Montecuccolli, qui commande une armée internationale constituée de contingents autrichiens, hongrois, saxons et brandebourgeois, en même temps que de six mille Français envoyés par Louis XIV, écrase, le 1er août, les forces ottomanes lors de la bataille du Raab, dite aussi « de Saint-Gothard ».

1665 : L'Autriche antérieure (Vorderösterreich), amputée de l'Alsace, revient dans le giron souverain des Habsbourg. Le très populaire margrave du XIe siècle, Léopold III, beau-frère de l'empereur germanique Henri IV, canonisé en 1485, devient officiellement le saint patron de l'Autriche. Ce saint catholique est fêté le 15 novembre.

1676 : Affichant une piété et une grande ferveur religieuse, l'empereur Léopold Ier consacre ses Etats à la Sainte Vierge, promue en 1676 « généralissime en temps de guerre et plénipotentiaire dans les négociations de paix ».

1683 : Le grand vizir Kara Mustafa, grisé par les succès diplomatiques et militaires remportés en Hongrie, se résout, en juillet, à intervenir plus à l'ouest et à marcher sur Vienne, surnommée la « pomme d'or ». Cent cinquante-quatre ans après, c'est le second siège de la capitale autrichienne par les forces ottomanes. Alors que la ville résiste depuis soixante jours, défendue avec acharnement par les 11 000 hommes du comte Starhemberg auxquels se sont joints les milices du bourgmestre Liebenberg, le duc Charles V de Lorraine, à la tête de l'armée impériale, et le roi de Pologne Jean III Sobieski unissent leurs forces pour remporter, le 11 septembre, contre les Turcs la victoire décisive du Kahlenberg. Après un siège tenace qui ébranla la conscience des Européens, Vienne est définitivement sauvée et la monarchie autrichienne avec. A partir de ce moment, la vague ottomane connaît un reflux qui ne cessera plus, l'Autriche engageant une reconquête méthodique de l'Europe danubienne et balkanique. Le spectre d'une invasion ottomane, qui aura duré un siècle et demi, est enrayé. La reconquête de la Hongrie peut commencer. Dès le 16 octobre, la prise d'Esztergom, l'ancienne capitale du royaume de Hongrie, par Charles de Lorraine, en constitue le prélude.

Du Baroque aux Lumières

1684 : Constitution, à l'instigation de l'empereur Léopold Ier, de la Sainte-Ligue (Venise, le Saint-Siège, la Pologne et des principautés allemandes), engageant la monarchie autrichienne dans un conflit prolongé contre l'Empire ottoman. Première édition du manuel d'économie politique de Johann Joachim Becher, Österreich über alles, wann es nur will (L'Autriche au-dessus de tout, pourvu qu'elle le veuille), qui inspirera tous les souverains Habsbourg du XVIIIe siècle.

1686 : Buda, « le bouclier de l'Islam » comme l'appelaient les Turcs, tombe à son tour, libérée par le prince Eugène et par le duc de Lorraine, à la tête d'une armée composée de soldats de toutes les nationalités.

1687 : Après 161 ans d'occupation turque, la ville de Mohacs est reprise par le prince Eugène. La diète hongroise vote, en témoignage de reconnaissance, le principe de l'hérédité de la couronne de Hongrie dans la maison de Habsbourg. La Transylvanie se place sous la protection habsbourgeoise.

1688 : Après 167 ans d'occupation ottomane, Belgrade est, quant à elle, une première fois libérée par les forces du prince Max-Emmanuel de Bavière. Au lendemain de la défaite du Kahlenberg devant Vienne pour les Turcs, le Grand Sultan de l'Empire ottoman, Mehmed IV, fit envoyer un émissaire à Belgrade ou s'était replié le Grand Vizir vaincu, Kara Mustafa. Celui-ci accepta le lacet de soie apporté par l'émissaire et avec lequel, selon la tradition ottomane, devaient être étranglés les dignitaires vaincus du Croissant. Le Grand Vizir sera ensuite décapité par les janissaires sur ordre de l'émissaire du Sultan.  La tête du vizir est rapportée à Vienne, au cardinal de Collonitz, lequel en fait présent au magistrat de la ville pour qu'elle demeure déposée dans l'Arsenal.

1689 : En accord avec l'Angleterre, pour briser toute tentative d'hégémonie de Louis XIV sur le continent, l'empereur Léopold Ier participe à la guerre de la ligue d'Augsbourg, déclenchée en 1689 et qui mobilise, à l'ouest de l'Europe, des forces autrichiennes considérables aux dépens de la lutte à poursuivre au sud du Danube contre la Sublime Porte. Cette conflagration européenne retardera de dix ans la conclusion de la paix avec les Turcs.

1697 : C'est à Zenta que l'armée du prince Eugène de Savoie renoue avec le succès en infligeant aux forces ottomanes une écrasante et humiliante défaite. Suivant la formule des Turcs eux-mêmes, l'armée du sultan vient de connaître là, son « jour de deuil ».

1698 : Ministre et généralissime transformé en riche mécène, le prince Eugène de Savoie fait construire à Vienne un palais, l'Himmelpfortsgasse et surtout le palais d'été du Belvédère (dû à l'architecte Lukas von Hildebrandt) qui fait alors concurrence à Schönbrunn.

1699 : La paix de Karlowitz scelle la libération de la Hongrie historique, avec la Transylvanie, mais sans le Banat de Temesvar. La même année sont célébrées les premières grandes festivités dans la partie centrale du palais de Schönbrunn, achevé six ans plus tôt. L'empereur Léopold Ier avait confié à l'architecte Fischer von Erlach le soin de bâtir un nouveau palais qui se devait d'être, à Vienne, l'équivalent du Versailles de Louis XIV.

1700 : Comme en 1689, le déclenchement de la guerre de Succession d'Espagne mobilise les forces autrichiennes sur deux fronts et entraîne un ralentissement de la progression des Habsbourg au sud du Danube contre l'Islam ottoman.

1705 : Mort de l'empereur Léopold Ier après un règne d'une durée exceptionnelle de 47 ans. La méthode de gouvernement de l'empereur aura été calquée sur celle, absolutiste, de l’Etat louis-quatorzien. En près de cinq décennies de règne, la fiscalité autrichienne aura quadruplé, l'accroissement des impôts permettant notamment d'augmenter les effectifs de l'armée impériale, lesquels sont passés de 10 000 hommes en 1618, au début de la guerre de Trente Ans, à plus de 120 000 hommes en 1705.

1705-1711 : Règne de l'empereur Joseph Ier de Habsbourg. Le nouveau souverain Habsbourg, fils de Léopold Ier, est confronté à deux guerres, l'une d'ampleur européenne (la guerre de Succession d'Espagne) et l'autre, plus circonscrite, aux portes de l'Autriche, à savoir la guerre d'indépendance menée par le chef hongrois Rakoczi (soutenu par la France de Louis XIV) contre les Habsbourg.

1707 : A l'occasion d'une diète tenue à Onod, les chefs de la révolte hongroise proclament la déchéance des Habsbourg.

1711 : La paix de Szatmar clôt l'épisode insurrectionnel hongrois. Après deux siècles d'occupation ottomane et de guerre, la Hongrie retrouve enfin la paix dans le cadre de ses frontières historiques, mais sous la férule de Vienne. Elle s'insère désormais dans l'ensemble habsbourgeois, la Gesamtösterreich, « l'Autriche unie ».

1711-1740 : Règne de l'empereur Charles VI de Habsbourg. L'Autriche, renforcée par la reconquête de la Hongrie, devient le relais de l'Italie pour la propagation du baroque.

1711 : La Pummerin, l'énorme bourdon de la cathédrale Saint-Etienne de Vienne, est fondue avec le bronze de cent quatre-vingts canons pris aux Turcs.

1713 : L'empereur Charles VI organise, par la Pragmatique Sanction, l'éventuel accès au trône d'une fille (ce sera Marie Thérèse). Moyennant l'affirmation de leurs droits et privilèges particuliers, l'empereur Charles VI négocie avec les assemblées locales de Silésie, de Croatie, de Transylvanie, des Pays-Bas ainsi qu'avec les diètes de Bohême et de Hongrie qui, toutes, reconnaissent cette Pragmatique Sanction.

1714 : Au traité de Rastatt, l'Autriche renonce définitivement à l'Espagne, mais conserve les Pays-Bas ainsi que le Milanais et le royaume des Deux-Siciles (ce dernier échappera définitivement aux Habsbourg lors du traité de Vienne de 1738 au profit des Bourbons). Avec la fin de la présence des Habsbourg en Espagne, l'Autriche devient la seule représentante de la dynastie. La parenthèse ouverte en 1516 est refermée.

1716 : Le prince Eugène fait son entrée à Timisoara, libérant la ville des Turcs.

1717 : La poussée autrichienne vers le Danube permet au prince Eugène de remporter sous les murs de Belgrade une grande victoire sur les Turcs.

1718 : La paix de Passarowitz confirme la poussée des Habsbourg vers les Balkans et le Bas-Danube en leur octroyant la petite Valachie, le Banat de Temesvar et le Nord de la Serbie. Avec des possessions s'étendant sur près de 600 000 kilomètres carrés et englobant environ 24 millions d'âmes, la monarchie autrichienne connaît alors sa plus grande extension territoriale. Ouverture à Vienne, la même année, de la manufacture d'Augarten.

1725-1735 : L'Angleterre, la Prusse, les Provinces-Unies, le Danemark et l'Espagne reconnaissent la Pragmatique Sanction de 1713.

1738 : Lors de la conclusion de la paix de Vienne, qui met un terme à la guerre de Succession de Pologne, la France reconnaît la Pragmatique Sanction, moyennant la renonciation de François-Etienne, le mari de Marie-Thérèse et gendre de l'empereur Habsbourg, à son héritage lorrain.

1737-1739 : Guerre austro-turque. Le traité de Belgrade de 1739 marque un coup d'arrêt à l'expansion autrichienne dans les Balkans et efface en partie les gains territoriaux issus de la paix de Passarowitz. Belgrade est restituée aux Turcs.

1740-1780 : Règne de l'impératrice Marie-Thérèse de Habsbourg.

1740-1748 : Guerre de Succession d'Autriche.

1740 : A la mort de l'empereur Charles VI, une histoire inédite commence. Pour la première fois dans l'histoire de la maison d'Autriche, une femme va détenir les rênes suprêmes du pouvoir. Comme l'impératrice Marie-Thérèse, le roi de Prusse, Frédéric II, vient d'accéder au trône. Il entreprend de s'emparer de la Silésie, possession que les Habsbourg détenaient depuis deux siècles et qui leur fournissait le quart de leurs ressources. Marie-Thérèse se montre inflexible : « Plutôt les Turcs devant Vienne, plutôt la cession des Pays-Bas à la France, plutôt des concessions à la Bavière et à la Saxe que de renoncer à la Silésie ! » Ainsi commence la guerre de Succession d'Autriche.

1741 : S'estimant en position de force, Frédéric II impose en avril le lieu de la bataille, Mollwitz, au sud de Breslau, provoquant la déroute des forces autrichiennes du général Neipper. Le sort de la Silésie est réglé. Le projet de partage des possessions des Habsbourg par les Etats voisins, qui avaient pourtant tous reconnu la Pragmatique Sanction de 1713, constitue l'étape suivante. L'Electeur de Bavière Charles-Albert, cousin par alliance de Marie-Thérèse, réclame la couronne de Bohême, tout en briguant le trône impérial. La France appuie la revendication bavaroise, bientôt soutenue par la Savoie et l'Espagne. Il en va désormais de la survie de la maison d'Autriche. Marie-Thérèse n'a d'autre recours que d'appeler à l'aide ses frères hongrois, recevant un écho favorable de la diète magyare, laquelle vote la levée d'une armée de 40 000 hommes. Pour la première fois de son histoire, la Hongrie se met au service de la défense de la Gesamtösterreich. Les troupes franco-bavaroises, qui ont pénétré en Haute-Autriche, sont désormais à moins de cent kilomètres de Vienne alors que Charles-Albert vient de se proclamer archiduc d'Autriche ! Durant cette année tragique est fondé, à Vienne, devant la Hofburg, le premier Burgtheater.

1742 : Au grand dam de Marie-Thérèse et de son mari, François, candidat malheureux, le collège électoral réuni à Francfort choisit, en janvier, Charles-Albert, qui prend le nom de Charles VII, comme empereur à la tête du Saint Empire. Pour la première fois depuis trois siècles, le titre impérial échappe aux Habsbourg. Cette éclipse ne durera que trois ans. En juin 1742, le traité de Berlin accorde la presque totalité de la Silésie à la Prusse. Ouverture, la même année, à Vienne, de la première loge maçonnique.

1743 : Entrée solennelle de Marie-Thérèse dans Prague à l'été. La réintégration de la Bohême dans le giron Habsbourg permet de préserver l'union des Etats héréditaires.

1745 : La mort de Charles VII, le 20 janvier, débouche sur l'élection de François-Etienne de Lorraine, époux de Marie-Thérèse, à la tête du Saint Empire, sous le nom de François Ier de Habsbourg-Lorraine. On parlera, en effet, désormais, de la dynastie des Habsbourg-Lorraine.

1746 : Création à Vienne d'un collège de jésuites qui prend le nom de Collegium Theresianum, véritable pépinière de diplomates et de fonctionnaires.

1748 : Depuis 1746, la guerre de Succession d'Autriche ne concerne plus que la France et le Royaume-Uni, qui poursuivent la lutte hors du territoire allemand. La paix d'Aix-la-Chapelle, conclue en 1748, met officiellement fin au conflit et débouche sur la validation définitive de la Pragmatique Sanction de 1713. En vertu de ce traité, l'Autriche est toutefois contrainte de céder Parme et Plaisance aux Bourbons ainsi que la Silésie à la Prusse. En reconnaissance du rôle joué par les Magyars pendant la guerre, Marie-Thérèse va s'efforcer de redonner à la Hongrie un prestige destiné à flatter ses sujets. C'est d'ailleurs un corps d'élite de hussards hongrois qui est désormais chargé d'assurer la garde personnelle de l'impératrice à Vienne, tradition qui perdurera jusqu'en 1918.

1749 : Achèvement du château de Schönbrunn.

1750 : A partir du milieu du XVIIIe siècle, dans toute l'Autriche, le Baroque évolue vers le rococo. Ornementation surchargée, profusion de dorures, de niches, de fausses tentures, baldaquins démesurés expriment bien l'exportation, en Europe centrale, du baroque italien et de sa puissance théâtrale, sous une forme spécifique.

1751 : S'inspirant des réformes entreprises par la Prusse du roi-sergent Frédéric-Guillaume Ier, Marie-Thérèse et Haugwitz mettent sur pied le financement et l'entretien d'une armée permanente de plus de 100 000 hommes. C'est dans cette perspective qu'est créée l'académie militaire de Wiener Neustadt pour former les cadres de l'armée impériale.

1755 : Trois ans après son installation à Vienne, le compositeur Gluck est nommé directeur musical de la cour. On peut dire que c'est du règne de Marie-Thérèse que date l'élévation de Vienne au rang de capitale de la musique. L'impératrice se passionne pour l'art lyrique de l'opéra italien tout en promouvant les premières créations allemandes de Gluck. Elle n'hésite pas à multiplier les salles de concert, que ce soit dans la Hofburg, aux châteaux de Schönbrunn ou de Laxenburg ou encore au théâtre de la Porte de Carinthie, la souveraine aimant elle-même danser, jusque tard dans la nuit, y compris lorsqu'elle est enceinte de quatre mois !

1756 : Kaunitz, chancelier et chef de la diplomatie autrichienne, organise le renversement des alliances. L'Autriche est désormais l'alliée de la France contre la Prusse et l'Angleterre. La guerre de Sept Ans commence.

1757 : Frédéric II étant parvenu, en mai, à mettre la main sur Prague, les forces autrichiennes du maréchal Daun contre-attaquent et parviennent à y déloger les troupes prussiennes. Le maréchal autrichien est fait grand-croix de l'Ordre de Marie-Thérèse, ordre créé spécialement pour la circonstance et qui restera jusqu'en 1918 la plus haute décoration militaire autrichienne.

1762 : Le jeune Mozart, âgé de six ans, se produit pour la première fois au château de Schönbrunn devant l'impératrice Marie-Thérèse et son mari.

1763 : Par la paix d'Hubertsbourg signée en janvier, l'Autriche perd une seconde fois la Silésie aux dépens de la Prusse. La stratégie de Kaunitz d'encercler et de rabaisser la Prusse s'est, en définitive, retournée contre l'Autriche.

1765 : Mort à Vienne de François Ier de Habsbourg-Lorraine. Joseph II devient corégent avec sa mère Marie-Thérèse pour les affaires militaires et extérieures.

1770 : Comme confirmation du rapprochement entre la France et l'Autriche, Marie-Antoinette, fille de Marie-Thérèse, épouse le futur Louis XVI.

1772 : La Galicie et la Lodomérie sont incorporées à la monarchie autrichienne dans le cadre du premier partage de la Pologne.

1773 : Formée par les jésuites, Marie-Thérèse se résigne à les expulser, favorisant l'essor d'autres ordres comme celui des piaristes, lesquels donneront une impulsion moderne à l'enseignement des élites. Fervente catholique, l'impératrice souhaite incarner dans tout l'empire la pietas habsburgica tout en renforçant le contrôle de l’Etat sur l’Eglise. Jamais la souveraine ne cherchera à s'engager dans la voie proposée par Kaunitz puis par Joseph II de dissoudre les ordres religieux et de confisquer leurs biens. Elle exprimera des réserves tout aussi fermes à l'égard de la franc-maçonnerie. S'inscrivant sur le plan religieux dans le prolongement de Charles Quint et de ses successeurs, Marie-Thérèse a voulu faire de Vienne et de son empire la citadelle du catholicisme en Europe. Si la liberté du culte est tolérée en Hongrie, le protestantisme est interdit en Autriche comme en Bohême.

1780 : Mort, à Vienne, de l'impératrice Marie-Thérèse. Sous son règne, la monarchie autrichienne est devenue un Etat de 22 millions d'habitants, indiscutablement plus opulent, plus étendu et mieux administré qu'en 1740. S'appuyant sur l'énergique comte Haugwitz, l'impératrice a pu mener à bien une politique de modernisation de l’Etat, débouchant sur le quadruplement du nombre de fonctionnaires en quatre décennies de règne, soit 20 000 hommes, chiffre considérable pour l'époque. Par ailleurs, l'usage de l'allemand dans l'armée, l'administration, l'enseignement, comme la colonisation du Banat et de la Batchka par des paysans allemands témoignent de la volonté de l'impératrice de faire de la monarchie habsbourgeoise un Etat foncièrement allemand.

1780-1790 : Règne de l'empereur Joseph II de Habsbourg-Lorraine. Imprégné et porté par les idées de l'Aufklärung, le fils aîné de Marie-Thérèse fait triompher à Vienne le despotisme éclairé, mais ses réformes connaissent un échec global face à la résistance des états nobiliaires. En dix ans de règne, ce seront tout de même près de 6 000 décrets et 11 000 lois nouvelles qui auront été promulguées : un record !

1781 : Promulgation dans l'empire, en octobre, d'un édit de tolérance qui octroie un statut légal aux protestants et aux juifs, cependant que l’Eglise catholique est mise au pas et contrôlée par l’Etat. Par ailleurs, le servage personnel est aboli en Autriche comme dans les pays de la couronne de Bohême. La même année, alors qu'il se brouille avec l'archevêque de Salzbourg, Mozart se résout à s'installer à Vienne. Son existence gyrovague y sera impressionnante : dix années passées à Vienne occasionneront onze changements de logements ! L'empereur Joseph II, lui-même musicien de formation, va soutenir les travaux en allemand du compositeur virtuose, au grand dam du parti italien de la cour. Ce choix est en concordance avec celui de l'empereur de valoriser l'unité culturelle de l'empire aux dépens de la réalité multinationale de ce dernier. Le mot d'ordre est d'adopter, dans l'administration, l'enseignement ou l'armée, la langue parlée par le plus grand nombre, à savoir l'allemand.

1782 : Joseph II décide la suppression de tous les monastères contemplatifs, les œuvres de charité étant prises en charge par l’Etat. Au total, ce sont les biens de quelques sept cents abbayes et monastères qui seront confisqués.

1783 : Despote éclairé et étatiste forcené, Joseph II promulgue la suppression de toutes les écoles de théologie dans les couvents et instaure des « séminaires généraux », où des jansénistes, voire des libres penseurs, se partagent l'enseignement des futurs prêtres.

1788-1791 : Guerre austro-turque qui voit, en 1789, le vieux maréchal autrichien von Laudon reprendre Belgrade.

1790-1792 : Règne de l'empereur Léopold II de Habsbourg-Lorraine.

1791 : Mort de Mozart, le 5 décembre, à Vienne, à l'âge de 36 ans. La disparition du compositeur prodige survient quelques mois après la représentation dans la capitale autrichienne de son dernier opéra, La Flûte enchantée, la plus viennoise de ses œuvres lyriques, en même temps que fondatrice de l'opéra allemand.

1792-1835 : Règne de l'empereur François II (puis François Ier) de Habsbourg-Lorraine.

1792-1815 : Durant vingt-trois ans, les Habsbourg sont en guerre contre la France révolutionnaire puis contre Napoléon Ier.

1792 : A un moment où l'Autriche apparaît en Europe comme le champion de la contre-révolution, la France, sous l'influence des députés girondins de l'Assemblée législative, déclare, le 20 avril, la guerre au « roi de Bohême et de Hongrie ».

1794 : La tactique des soldats professionnels autrichiens et prussiens coalisés étant apparue quelque peu compassée face à l'élan patriotique des armées de la Révolution, la première phase de la nouvelle « guerre de vingt-trois ans » tourne à l'avantage de la France, au lendemain de la victoire de Fleurus en juin. Les Autrichiens perdent définitivement les Pays-Bas qui leur revenaient de droit depuis 1713, même si, plus largement, ce territoire s'inscrivait dans l'héritage de Charles Quint.

De Napoléon à Sadowa : entre convulsions révolutionnaires et défense de l'ordre établi

1797 : Pour soutenir le patriotisme autrichien, Joseph Haydn compose un hymne à la gloire de l'empereur, le fameux Gott erhalte Franz den Kaiser, (« Dieu protège l'empereur François »), joué pour la première fois, le 12 février 1797, au Burgtheater de Vienne et dont le texte de Lorenz Léopold Haschka se veut une réplique monarchique à La Marseillaise. Ce chant patriotique restera l'hymne impérial autrichien jusqu'en 1918. Au lendemain du traité de Bâle de 1795, la France révolutionnaire, hormis l'Angleterre, n'a plus qu'un adversaire sur le continent : l'Autriche et ses alliés italiens. Le Directoire décide, depuis Paris, de lancer simultanément trois armées en direction de Vienne pour en finir avec le « perturbateur » d'Europe centrale. Mais les Autrichiens contraignent l'armée du Rhin à une humiliante retraite jusqu'en Alsace, tandis que l'archiduc Charles, le meilleur tacticien et stratège du côté Habsbourg, taille en pièces, à Altkirchen, l'armée de Sambre-et-Meuse du général Jourdan. Seul le général Bonaparte, en Italie septentrionale, parvient à faire sauter un à un tous les verrous autrichiens. Les Habsbourg découvrent un nouvel adversaire intrépide qui va électriser, pendant plus de quinze ans, la population autrichienne. Vienne n'est plus qu'à une centaine de kilomètres quand un armistice est conclu, qui met face à face Bonaparte et l'archiduc Charles, frère de l'empereur François II. Les deux hommes savent qu'il ne s'agit que d'une pause dans un duel qui devra, tôt ou tard, accoucher d'un vrai vainqueur. Le traité de Campoformio, signé le 17 octobre, fait définitivement perdre aux Autrichiens les Pays-Bas, la rive gauche du Rhin tandis que la perte de la Lombardie est compensée par l'obtention de la partie orientale de la Vénétie, de l'Istrie et de la Dalmatie. Le traité de Lunéville de 1801 confirmera globalement ces positions territoriales.

1800 : Double défaite pour les Autrichiens à Marengo en Italie, le 14 juin, face à Bonaparte (désormais Premier consul) puis à Hohenlinden en Bavière, le 3 décembre, face au général Moreau.

1804 : Anticipant la disparition du Saint Empire sous l'effet de la chevauchée napoléonienne (Napoléon s'étant, de surcroît, proclamé empereur des Français en mai), François II, tout en conservant la couronne et les insignes impériaux à Vienne, imagine alors de créer une dignité impériale propre à la famille des Habsbourg, laquelle rassemble les possessions héréditaires de la dynastie (Autriche, Bohême et Hongrie). C'est ainsi que l'empire d'Autriche est créé le 11 août 1804, comme une nouvelle entité politique au cœur de l'Europe. L'annonce n'en sera toutefois faite solennellement que le 7 décembre, à Vienne, sans cérémonie de couronnement, cinq jours après qu'en grande pompe, à Notre-Dame de Paris, Napoléon a lui-même posé sur sa tête, sous les yeux du pape, le diadème impérial. L'empereur François II reste toutefois, pendant encore deux ans, le titulaire de la vieille institution impériale du Saint Empire. Il porte alors, pendant cette courte période, le double titre d'empereur romain germanique (François II) et d'empereur héréditaire d'Autriche (François Ier). Le compositeur Joseph Haydn est nommé citoyen d'honneur de la ville de Vienne alors que les Viennois le vénèrent et l'appellent « papa ».

1805 : Audition, à Vienne, de la troisième symphonie de Beethoven, « L'Héroïque », initialement composée en l'honneur de Napoléon. Alors qu'il s'apprêtait à débarquer en Angleterre, Napoléon se voit contraint de se retourner et marcher contre l'Autriche qui vient d'attaquer la Bavière, alliée de la France. Victorieux à Ulm, le 20 octobre, l'empereur des Français fait son entrée le 13 novembre dans la capitale autrichienne qu'il fait occuper par ses grognards, s'installant lui-même au palais de Schönbrunn, avant de marcher en direction des troupes austro-russes qu'il écrase, le 2 décembre, à Austerlitz (Slavkov) en Moravie. Par la paix de Presbourg, les Habsbourg, non seulement renoncent à leurs possessions dispersées de la Vorderösterreich, cédant à la Bavière, le Vorarlberg, le Tyrol et le Trentin, mais abandonnent, de surcroît, à la France, la Vénétie, annexée au royaume d'Italie, l'Istrie (moins Trieste) et la Dalmatie, rattachées à l'Empire français.

1806 : Dissolution définitive du Saint Empire romain germanique remplacé par une confédération du Rhin (Rheinischer Bund), dont Napoléon se veut le protecteur et qui en exclue l'Autriche. Le souverain Habsbourg a cessé d'incarner le principe de légitimité dans l'espace allemand. Comprenant la nécessité de recentrer le destin de l'Autriche vers l'Europe danubienne, il renonce solennellement, le 6 août, à la prestigieuse couronne du Heiliges Reich Deutscher Nation (le Saint Empire de nationalité germanique). A Vienne, c'est dans l'église des Neufs-Chœurs-des-Anges qu'est officiellement prononcée la dissolution de la vénérable institution presque millénaire, en même temps que la naissance de l'empire d'Autriche. La couronne d'or et les insignes royaux, dont l'empereur François aura été le dernier titulaire, ont été déposés dans la salle du Trésor de la Hofburg (la Schatzkammer) où ils sont toujours conservés.

1807 : Le Tyrolien Josef von Hormayr exalte l'idée nationale autrichienne en entreprenant une œuvre qui ne sera achevée qu'en 1812, Le Plutarque autrichien ou Vie et portraits de tous les souverains et des plus célèbres généraux, hommes d’Etat ou savants de l'empire autrichien. La mission première de l'âme autrichienne est non seulement de constituer un promontoire culturel du monde germanique, mais aussi de défendre et promouvoir la confession catholique et les valeurs traditionnelles menacées par toute velléité révolutionnaire.

1808 : Inauguration, à Vienne, dans le quartier de Schottenfeld, de l'Apollo, temple de la danse. A partir de 1808, à la faveur des difficultés rencontrées par les armées françaises en Espagne, l'objectif de Vienne est clairement de reconstituer son potentiel militaire en vue de rejoindre la coalition toujours orchestrée par l'Angleterre. Cédant aux pressions de son frère Jean, véritable zélateur du concept d'armement populaire, l'archiduc Charles organise la levée de 150 bataillons de Landwehr dans les régions alpines de l'Autriche (Salzbourg, Styrie). Le sentiment national retrouve des couleurs à Vienne. Des cercles littéraires, tenus par des femmes comme la poétesse Karoline Pichler (fervente nationaliste dont la mère avait été familière de Marie-Thérèse) participent de cette effervescence patriotique autrichienne.

1809 : Tandis qu'on édite, à Vienne, les ballades guerrières de Collin (Wehrmannslieder) et à l'heure où la revanche d'Austerlitz a enfin sonné, l'archiduc Charles, à la tête d'une imposante armée de 200 000 hommes, devance en rapidité d'exécution les plans de campagne de Napoléon, franchit l'Inn et s'enfonce en Bavière. Simultanément, dans le Tyrol, l'aubergiste Andreas Hofer devient le chef d'un soulèvement contre les Franco-Bavarois. La fulgurante riposte napoléonienne débouche sur la seconde occupation de Vienne par les armées françaises. Napoléon établit ses quartiers à Schönbrunn et obtient, après un intense bombardement, la capitulation des Viennois, le 13 mai. Au grand dam des Autrichiens, le scénario de 1805 se répète, à cette différence qu'ils ont, cette fois, massé 150 000 hommes sur la rive gauche du Danube et sont bien décidés à engager toutes leurs forces pour contrer l'envahisseur français. La victoire autrichienne d'Aspern (Essling), en mai, confirme cette résistance tenace, mais ne peut empêcher une nouvelle victoire de Napoléon quelques semaines plus tard, à Wagram, au nord-est de Vienne. La paix de Schönbrunn, signée le 14 octobre, est catastrophique pour l'Autriche : elle consacre la perte de l'évêché de Salzbourg et de l'Innviertel, cédés à la Bavière, mais surtout, la fin de tout accès à la mer Adriatique, avec la cession à la France, de Trieste, de l'Istrie, de la Carniole et d'une partie de la Carinthie et de la Croatie, regroupées sous le nom de provinces Illyriennes. D'autre part, au nord-est, la Galicie est abandonnée au grand-duché de Varsovie et à la Russie. L'Autriche paie chèrement son implication dans la cinquième coalition : les Habsbourg perdent 110 000 kilomètres carrés de territoires et trois millions et demi de sujets. L'armée autrichienne est limitée à 150 000 hommes tandis que le pays doit verser à son vainqueur une lourde indemnité de guerre d'un montant de 85 millions de francs-or. Alors que l'empire des Habsbourg apparaît hors-jeu pour longtemps, Metternich est nommé chancelier et chef de la diplomatie autrichienne. En coordination avec Talleyrand, le diplomate autrichien échafaude un plan selon lequel le mariage de la fille aînée de l'empereur d'Autriche, Marie-Louise, avec Napoléon (alors, sans héritier, et en quête d'une pérennité dynastique de son trône), pourrait servir de « caution » diplomatique au jeu des deux puissances française et autrichienne. Aux yeux de Metternich, un rapprochement officiel entre la France et l'Autriche permettrait d'ébranler quelque peu l'alliance privilégiée de Napoléon et du tsar tout en laissant le temps à l'Autriche de se réinsérer en douceur dans le concert européen pour, à terme, se retourner contre la France aux côtés de l'Angleterre et de la Russie. C'est au moment de la deuxième occupation de la ville par les Français que s'éteint, dans son appartement viennois, le compositeur Joseph Haydn. Maître de la capitale, Napoléon ordonne qu'un cortège d'officiers et de soldats français forme une haie d'honneur autour du cercueil, entre l'église et le cimetière. L'empereur des Français s'inclinera également personnellement devant le tombeau de Marie-Thérèse et de son mari à la crypte des Capucins.

1810 : Napoléon épouse en mars l'archiduchesse Marie-Louise, fille de l'empereur d'Autriche, François Ier. Capturé en janvier, Andreas Hofer tombe, le 20 février, à Mantoue, sous les balles d'un peloton d'exécution français. Cet ultime épisode de chouannerie alpine promeut rapidement le vaillant chef du Tyrol au rang de héros national.

1811 : Naissance de l' « Aiglon », fils de Napoléon et petit-fils de l'empereur d'Autriche, honoré du titre de « roi de Rome » en 1814, puis de duc de Reichstadt, en 1818.

1814 : Le 31 mars, le prince von Schwartzenberg, qui représente l'empereur d'Autriche, défile dans Paris en tête du défilé des troupes coalisées, à la droite du tsar. La première abdication de Napoléon entraîne le triomphe de Metternich qui se voit accorder par l'empereur François Ier, ainsi que ses héritiers, le droit de porter les armes de l'Autriche dans le premier champ de leurs armoiries. Le 16 juin, Vienne réserve un accueil triomphal à son empereur. C'est une indiscutable revanche pour l'Autriche, cinq ans après le désastreux et humiliant traité de Vienne qui lui avait été imposé par Napoléon.

1815 : Le 9 juin, neuf jours avant l'épilogue de Waterloo, l'acte final du congrès de Vienne, qui a fait de la capitale autrichienne, neuf mois durant, le cœur diplomatique de l'Europe, aboutit à une refonte de la carte politique du vieux continent. La perte, pour les Habsbourg, des Pays-Bas autrichiens (vieil héritage de Charles Quint) et des possessions dispersées de la Vorderösterreich en Allemagne du Sud, est compensée par leur mainmise sur le royaume de Lombardie-Vénétie et sur les principautés d'Italie centrale. Surtout, sont confirmées dans leurs frontières d'avant 1792, les possessions héréditaires des Habsbourg situées dans la moyenne vallée du Danube (pays autrichiens, Bohême et Hongrie). Le Saint Empire est remplacé par une Confédération germanique (Deutscher Bund), présidée par l'empereur d'Autriche et dont les Etats souverains de Bohême et d'Autriche font partie. La Hongrie, qui possède sa Constitution propre, en est exclue.

1815-1835 : Apogée du « Système » de Metternich fondé sur l'équilibre des puissances et le maintien de la paix en Europe, dans le cadre de la « Sainte Alliance ». Le système s'impose également contre les diverses revendications nationales et libérales. Cette période, prolongée jusqu'en 1848, correspond, à Vienne, à un épanouissement culturel intense lié à l'essor de la bourgeoisie : le Biedermeier. En cette ère de paix et de prospérité, le temps est la prédominance du goût artistique sur les considérations politiques. La capitale des Habsbourg se confond désormais avec le théâtre, la musique et la danse. C'est l'époque où le Theater an der Wien affiche complet avec les drames de Grillparzer et les pièces de boulevard, en dialecte viennois, de Nestroy et de Raimund. La valse, révolution autant culturelle que sociale, fait, quant à elle, tourbillonner toute la société viennoise. D'immenses salles sont alors construites et exclusivement réservées à la valse, au premier rang desquelles l'Apollo, en plein cœur de Vienne, et d'une contenance de quatre mille places.

1816 : Création, par le comte Kolowrat, d'une Banque nationale autrichienne jouissant du monopole de l'émission de billets de banque convertibles en or.

1819 : Dans le cadre d'une extension de la censure et pour contrer les velléités nationalistes allemandes de certains leaders politiques, mise à l'index, en Autriche, des œuvres de Goethe, Schiller, Lessing, Fichte et Hegel, chantres de la nation allemande.

1828 : Mort, à Vienne, de Franz Schubert, le plus autrichien de tous les compositeurs de l'âge classique et romantique. Inhumé au cimetière viennois de Währing, dans une tombe toute proche de celle de son modèle Beethoven, le jeune prodige, mort à 32 ans, aura marqué l'histoire de la musique par l'incroyable fécondité de son œuvre, soit près de mille compositions dont six cents Lieders. Le demi-siècle viennois qui sépare l'Idomeneo de Mozart des trois dernières Sonates pour piano de Schubert peut, à juste titre, être comparé, pour les arts, au temps de gloire de Florence à la Renaissance ou de Venise à l'époque baroque.

1832 : Construction d'une voie ferrée de 130 kilomètres entre Linz et Ceske Budejovice, permettant de relier la vallée du Danube à la Bohême. En 1847, le Nordbahn est achevé, qui relie Vienne aux pays de la couronne de saint Venceslas, tandis que le Südbahn s'apprête à relier la capitale autrichienne à Trieste. En 1848, le réseau ferroviaire autrichien compte, au total, 1 622 kilomètres de lignes en exploitation.

1835-1848 : Règne de l'empereur Ferdinand Ier de Habsbourg-Lorraine, dit « le Débonnaire ». Durant ce règne, la destinée de l'Autriche est toujours dominée par la personnalité de Metternich.

1842 : Le chef prussien Otto Nicolaï fonde l'Académie philharmonique, ancêtre du célèbre Wiener Philharmoniker (l'orchestre philharmonique de Vienne).

1848 : Le 13 mars, alors qu'une délégation tchèque est envoyée à Vienne pour présenter une pétition réclamant l'égalité des Tchèques et des Allemands ainsi que la liberté de la presse, ou encore la mise sur pied de gardes civiles en Bohème, la capitale autrichienne devient, à son tour, le foyer d'une formidable effervescence révolutionnaire. La monarchie ou la dynastie ne sont nullement mises en cause. La cible de l'émeute vise clairement Metternich qui se voit contraint à l'exil en direction de l'Angleterre. Une page de l'histoire de l'Autriche se tourne. De surcroît, par crainte de troubles, l'empereur Ferdinand, appuyé par le nouveau gouvernement, cède sur toute la ligne aux revendications des émeutiers. Les concessions offertes ne contribuent, toutefois, nullement à apaiser les tensions dans l'empire d'autant qu'une seconde vague révolutionnaire, partie de Paris, éclate en juin 1848. A Prague, le général autrichien Windischgrätz obtient, après le pilonnage systématique des positions rebelles, la capitulation des insurgés pragois. En Italie septentrionale, le vieux maréchal Radetzky, venu à bout des patriotes italiens, fait une entrée triomphale dans Milan. Mais la révolution en Hongrie inquiète singulièrement Vienne par les volontés ouvertement sécessionnistes de son leader, Lajos Kossuth. Comme une tâche d'huile, la révolution éclate à nouveau à Vienne où barricades, pioches, fusils et marteaux transforment la capitale des Habsbourg en chaudron incandescent. La répression est confiée au général Windischgrätz qui utilise la puissance de feu de l'artillerie pour mater les révolutionnaires qui déposent les armes le 31 octobre. L'empereur Ferdinand le Débonnaire ayant clairement montré, du fait de ses déficiences, ses limites et son incompétence, l'abdication du souverain en faveur de son neveu François-Joseph, le 2 décembre, à Olmütz, répond au dessein de faire émerger un homme fort à la tête de l'empire pour vaincre la révolution hongroise. Entouré de ministres inflexibles, le jeune souverain Habsbourg, âgé de 20 ans, se voudra le parangon de la fermeté et de la souveraineté dans la conduite des affaires politiques. A Vienne, tandis que Johann Strauss père célèbre la victoire des forces autrichiennes sur les insurgés italiens en composant La Marche de Radetzky, son fils compose une Marche de la Révolution et des Barrikadenlieder.

1848-1916 : Règne de l'empereur François-Joseph Ier de Habsbourg-Lorraine.

1849 : François-Joseph demande l'aide du tsar Nicolas Ier pour écraser la révolution hongroise. Kossuth, qui s'était proclamé président-gouverneur de Hongrie, est contraint à l'exil. Partisan de l'exercice du droit de grâce et indigné par les méthodes de répression impitoyables du général Haynau et par les agents les plus zélés de la camarilla viennoise, François-Joseph n'en a pas moins affiché une fermeté et une résolution qui ont eu raison des idéaux libéraux et des élans de romantisme révolutionnaire. C'est la revanche « posthume » de Metternich. Les révolutions ont cependant posé un acquis : le régime seigneurial est partout aboli dans l'empire tandis que l'égalité des droits des sujets de la monarchie habsbourgeoise est reconnue. Les révolutions ont par ailleurs soulevé un problème qui demeure latent et dangereux pour le devenir et la pérennité de l'empire danubien des Habsbourg : la question de la coexistence des nationalités, à l'intérieur d'un cadre monarchique devenu parfaitement multinational.

1850 : L'Autriche, qui a rétabli l'ordre chez elle, s'oppose à une unité allemande sous domination prussienne. François-Joseph contraint le roi de Prusse Frédéric-Guillaume IV à la « reculade d'Olmütz ». Les Habsbourg reforment ainsi à leur profit la Confédération germanique de 1815, mais viennent de remporter ici leur dernier succès face à une Prusse plus que jamais revancharde.

1851 : Le 31 décembre, l'abolition de la constitution octroyée le 4 mars 1849, entraîne la naissance d'un système absolutiste. N'échappant pas à cette loi de l'Histoire qui veut que les secousses révolutionnaires cèdent rapidement la place à des régimes d'ordre, l'Autriche devient pour la première fois – l'espace de quelques années seulement – une véritable monarchie absolue, sans contrôle des notables et où l'allemand va s'imposer comme la seule langue officielle. L'abolition des droits féodaux est toutefois maintenue.

1854 : Mariage de François-Joseph avec Elisabeth de Bavière (« Sissi »). Achèvement de la ligne ferroviaire Vienne-Trieste.

1855 : Symbole du retour en force des valeurs traditionnelles, le Concordat, signé le 18 août, permet à l'Eglise catholique autrichienne de retrouver un pouvoir qu'elle avait perdu à l'époque joséphiste, notamment dans le domaine de l'enseignement.

1858 : Dans le cadre d'une politique urbaine de grands travaux engagée par l'Etat, démolition à Vienne des fortifications qui, moins de deux siècles plus tôt, avaient permis de résister aux Turcs. Les anciens remparts sont remplacés par de grands boulevards avec immeubles ceinturant le cœur historique de Vienne. Cette Ringstrasse associera volontiers culture (opéra, Burgtheater, musées), science (l'université) et vie politique (parlement, Rathaus).

1859 : Les défaites autrichiennes sur les champs de bataille italiens de Magenta et de Solferino débouchent sur l'armistice de Villafranca, signé le 11 juillet entre François-Joseph et Napoléon III. Les Habsbourg perdent alors définitivement le Milanais, ne conservant plus, en Italie, que la Vénétie.

1861 : La Patente, signée en février, prend le contre-pied de la politique fédéraliste ébauchée l'année précédente par François-Joseph. Cette politique réoriente l'Autriche vers un régime centralisateur, de surcroît favorable à la bourgeoisie allemande, tandis qu'elle confirme la subordination de la Hongrie à la politique de Vienne.

1863 : A Vienne, Johann Strauss fils obtient une véritable consécration en étant nommé directeur des bals de la Cour (Hofballmusikerdirektor), titre qui lui permet de laver définitivement ses « péchés » révolutionnaires de 1848.

1864 : La liberté de la presse permet à Max Friedländer de fonder, à Vienne, le grand journal de référence, la Neue Freie Presse, d'inspiration nationale-libérale. La même année, le compositeur allemand Richard Wagner, dont la situation financière est devenue catastrophique, est contraint de quitter Vienne pour échapper à ses créanciers. Après Mozart, c'est la deuxième fois, en moins d'un siècle, que la capitale européenne de la musique se prive des talents d'un compositeur d'exception. Wagner aura, un temps, nourri l'espoir de réaliser dans la capitale des Habsbourg son rêve de réforme théâtrale, lequel exigeait des moyens de plus en plus imposants : un effectif de cent trois musiciens, la construction derrière l'orchestre d'une paroi spéciale destinée à améliorer l'acoustique et celle d'une scène d'opéra aux dimensions inconnues en Europe, sans parler du train de vie somptueux qu'il entendait mener et faire mener aux musiciens. Le maître de Bayreuth n'en sera pas moins une source d'inspiration totale pour les grands chefs viennois de la fin du XIXe siècle, qu'il s'agisse de Bruckner, de Wolf ou de Mahler. Il aura également permis de trancher, en faveur de l'opéra allemand, le débat, longtemps entretenu à Vienne, sur la supériorité présumée de l'art musical italien.

1865 : La politique d'administration directe de la Hongrie, depuis Vienne, subit un tournant lorsque Ferenc Deák, porte-parole de l'opinion publique hongroise, jette les bases d'un compromis acceptable qui concilie le respect de la souveraineté de la Hongrie et les impératifs de sécurité de la monarchie habsbourgeoise.

1866 : En envisageant la disparition de la Confédération germanique (à son profit) et en poussant les Autrichiens à déclarer la guerre à la Prusse, Bismarck obtient à Sadowa (en Bohême), le 3 juillet 1866, la « bataille » historique pour le contrôle de l'espace germanique. Le destin a tranché : les forces autrichiennes vont être écrasées par la remarquable organisation tactique de l'armée prussienne. La paix de Prague, signée le 23 août, entérine la dissolution de la Confédération germanique et l'exclusion de l'Autriche des affaires allemandes. Bismarck a les mains libres pour réaliser, sous l'égide de la Prusse, l'unité allemande. Les Habsbourg sont, non seulement chassés d'Allemagne, berceau de leur maison dynastique, mais ils subissent simultanément la perte de la Vénétie en Italie septentrionale, ce qui pousse Vienne à choisir, pour la monarchie habsbourgeoise, un destin désormais proprement danubien en direction des Balkans.

Le temps du compromis austro-hongrois

1867 : Après Sadowa, l'accord de l'Autriche avec la Hongrie prend plus que jamais son sens. Le compromis austro-hongrois est formellement adopté le 30 mars 1867 et consacre l'union de deux Etats souverains au sein d'une même monarchie. François-Joseph ne règne plus en Hongrie comme empereur d'Autriche, mais seulement comme « roi apostolique de Hongrie ». On parle désormais d'Autriche-Hongrie ou bien de Double Monarchie, c'est-à-dire d'un Etat formé de deux entités politiques bien distinctes. Celles-ci sont délimitées par une petite rivière affluente du Danube, la Leitha, d'où le nom de Transleithanie donné au royaume de Hongrie, et celui de Cisleithanie pour désigner tout le reste, dont l'Autriche fait partie. Ce dualisme va perdurer un demi-siècle, jusqu'en 1918. Au cours de cette période, l'Autriche-Hongrie va s'identifier à une véritable puissance danubienne, au cœur de la Mitteleuropa.

1868 : Promulgation d'une loi instituant dans l'empire des Habsbourg le service militaire obligatoire sur le modèle prussien. « Une et indivisible », telle est alors la devise de l'armée austro-hongroise, plus exactement de l'armée impériale et royale (KuK, pour Kaiserlich und Königlich). Simultanément, une nouvelle législation scolaire d'inspiration libérale abolit les principales dispositions du Concordat de 1855 en établissant une école élémentaire obligatoire et laïque sous le contrôle de l'Etat (les prêtres étant toutefois autorisés à enseigner le catéchisme dans les mêmes locaux).

1869 : Inauguration, à Vienne, du Staatsoper, le nouvel opéra de style néo-Renaissance où l'on joue, pour l'occasion, le Don Juan de Mozart.

1870 : Installation de l'orchestre philharmonique de Vienne au Musikvereinsgebäude, où se donnera tous les ans, à partir du 31 décembre 1939, le Neujahrskonzert, le concert Strauss du Nouvel An.

1873 : Vienne organise l'Exposition universelle, cinq fois plus grande que celle de Paris de 1867 (cinquante mille exposants vont accueillir, au total, 7 millions de visiteurs). Alliance des trois empereurs (Guillaume Ier, François-Joseph et Alexandre II) en vertu de laquelle l'Autriche-Hongrie et la Russie s'engagent à respecter le statu quo dans les Balkans et à se consulter en cas de besoin.

1877 : Création, à Vienne, du bal le plus célèbre, l'Opernball (bal de l'Opéra) réservé à la Cour.

1878 : Alors qu'ils contestent le traité de San Stefano qui, suite aux victoires de la Russie sur l'Empire ottoman, consacre l'indépendance de la Serbie, du Monténégro, de la Roumanie ainsi que la naissance d'une Grande Bulgarie, les dirigeants austro-hongrois obtiennent, lors du congrès de Berlin qui se tient la même année, un mandat d'occupation militaire et administrative sur la Bosnie-Herzégovine, pour une durée de trente ans. L'Autriche-Hongrie devient dès lors une puissance balkanique, ajoutant deux millions de Slaves (Serbes et musulmans de Bosnie) à sa population.

1879 : Conséquence du traité de San Stefano, signé l'année précédente, l'Autriche-Hongrie et l'Allemagne concluent une alliance défensive, la Duplice, dirigée principalement contre la Russie. Le schéma de la Sainte Alliance de 1815 a vécu, tout comme l'accord signé en 1873. L'antagonisme austro-russe autour de la question des Balkans est devenu un enjeu géopolitique de premier ordre.

1880 : Alors que l'influence allemande en Cisleithanie et dans le reste de l'empire ne cesse de se réduire, la décennie 1880 coïncide paradoxalement avec l'apparition d'un courant deutschnational qui rencontre un écho certain dans les milieux universitaires viennois ainsi qu'auprès de nombreuses associations étudiantes comme la Libertas, la Teutonia ou la Germania. C'est l'époque où, redoutant la slavisation de la Cisleithanie, Georg von Schönerer, qui s'illustre comme le chantre autrichien du pangermanisme, propose le rattachement des pays allemands de la monarchie habsbourgeoise, Bohême comprise, au Reich allemand de Bismarck. Dans le même temps, les pangermanistes du Programme de Linz, qui cherchent à concrétiser le vieux rêve allemand de Mitteleuropa, réclament l'abolition du Compromis de 1867 ainsi que l'abandon des provinces annexées par l'Autriche depuis 1772 (Dalmatie, Bosnie-Herzégovine, Galicie et Bukovine), tout en promouvant la création d'une union douanière avec l'empire allemand, la Hongrie et les pays balkaniques.

1882 : Etendue à l'Italie, la « Duplice » devient la « Triplice » (ou Triple-Alliance). Elle sera renouvelée en 1912.

1885 : S'inspirant de la politique sociale menée par Bismarck en Allemagne, le comte Edouard Taaffe, ami personnel de François-Joseph, instaure en Autriche les premières lois sociales (journée de travail limitée à 11 heures, travail des enfants interdit ainsi que celui de nuit pour les femmes) augmentées en 1887 de l'assurance obligatoire pour tous les travailleurs et d'une représentation paritaire accordée aux ouvriers. Deux ans plus tard, lors du IIe Congrès de l'Internationale socialiste, Victor Adler déclare que « l'Autriche possède la meilleure législation sociale du monde après l'Allemagne et la Suisse », preuve s'il en est, que conservatisme aristocratique et avancées sociales ne sont nullement antinomiques dans l'Europe du XIXe siècle. Pied-de-nez également à l'idée distillée par l'idéologie maçonnique française d'une « prison des peuples » installée au cœur de la Mitteleuropa.

1888 : A Vienne, inauguration, avec Esther de Franz Grillparzer, du nouveau Burgtheater situé sur le Ring.

1889 : Suicide de l'archiduc Rodolphe à Mayerling.

1892 : Adoption par l'Autriche-Hongrie de l'étalon-or et d'une nouvelle unité monétaire, la Couronne (Krone), dont la valeur est de moitié inférieure à celle du traditionnel florin (Gulden).

1897 : C'est le 3 avril 1897, le jour même de la mort de Johannes Brahms, incarnation du conservatisme musical, que quarante peintres, graveurs, architectes et sculpteurs se sont rassemblés à Vienne pour former le célèbre mouvement « dit de la Sécession », dont la figure de proue est l'artiste Gustav Klimt. Le courant sécessionniste, autrement appelé Jugendstil, l'équivalent viennois de l'Art nouveau, se veut une forme d'avant-gardisme qui se traduit par une mise à l'écart (excepté certaines œuvres de Klimt) des thèmes classiques ou mythologiques, avec une géométrisation prononcée des formes et une accentuation des traits sur fond de couleurs plus ou moins vives. Comme tout mouvement, le Jugendstil génère la publication d'une revue (Ver Sacrum) mais n'échappera pas à des scissions internes. Pour autant, le succès est incontestable. Il apparaît d'ailleurs quelque peu paradoxal dans une ville, Vienne, qui a toujours affiché, et ce dans tous les domaines, un esprit farouchement conservateur et hostile à tout avant-gardisme. Il est significatif qu'il faille attendre l'année 1975 pour que l’Etat autrichien se porte officiellement acquéreur du célèbre pavillon de la Sécession, surnommé « la Tête de chou dorée ».

1898 : Assassinat à Genève de l'impératrice Élisabeth d'Autriche (Sissi) par un anarchiste italien. Ayant d'emblée mal supporté la pesante étiquette viennoise, la dépression était devenue dans les couloirs de Schönbrunn ou de Laxenburg la grande guetteuse de l'impératrice. En revanche, passionnée par la Hongrie, par sa langue et ses traditions, jouant notamment un rôle politique non négligeable dans le Compromis de 1867, Sissi tiendra, chez les Magyars, sa revanche, en restant une reine aimée, adulée et fêtée par tout un peuple. Admirée et respectée à Budapest, critiquée, voire honnie, à Vienne, son destin s'identifie, en définitive, à un climat crépusculaire qui préfigure la fin tragique que connaîtront les Habsbourg avec l'entrée dans le siècle de 1914.

1901 : Deux ans après la mort du célébrissime Johann Strauss fils, son frère cadet, Eduard, prend la décision de dissoudre l'orchestre familial, mettant ainsi fin à soixante-seize ans de gloire et de succès de cette grande dynastie de compositeurs viennois. Six ans plus tard, à la fabrique de poêles et de fourneaux de Mariahilf, en plein cœur de Vienne, le même Eduard Strauss, longtemps envieux de la réussite de ses deux frères, Johann et Josef, fait froidement et délibérément disparaître tout l'héritage artistique (manuscrit) de la famille, contemplant, cinq heures durant, hiératique, impénétrable, assis dans son fauteuil, les innombrables partitions, correspondances, œuvres et arrangements inédits dévorés par les flammes. Cette fin n'a aucun égal dans toute l'histoire de la musique.

1905 : Fondation, à Vienne, par Klimt, du mouvement de la Kunstschau dont les disciples seront Egon Schiele et Oskar Kokoschka.

1907 : Adoption du suffrage universel (masculin) en Cisléithanie.

1908 : La présence à Belgrade, depuis 1903, d'une nouvelle dynastie, celle des Karageorgevitch, farouchement hostile aux Habsbourg, pousse les dirigeants austro-hongrois à décider, unilatéralement, l'annexion pure et simple de la Bosnie-Herzégovine, ouvrant ainsi une crise européenne qui est perçue comme une humiliation de la Russie. A Vienne, à l'heure où la médecine acquiert une réputation internationale avec Semmelweis ou le chirurgien Billroth, Sigmund Freud fonde, grâce à sa méthode clinique de la psychanalyse, qui fait de lui l'homme le plus célèbre de la « Vienne 1900 », la Société viennoise de psychanalyse.

1912 : Adoption dans l'empire austro-hongrois du service militaire porté à deux ans tandis que l'armée d'active (impériale et royale) est désormais renforcée d'unités de réservistes (Landwehr en Autriche et Honved en Hongrie). Les officiers d'active, au nombre de 27 000, sont pour l'essentiel formés à l'Académie militaire Marie-Thérèse de Wiener-Neustadt, à proximité de Vienne. Ils donnent leurs ordres en allemand mais doivent apprendre la langue vernaculaire de leurs soldats, utilisée pour le service courant. Commandées par le général Conrad von Hoetzendorf, le meilleur stratège de l'empire, les forces austro-hongroises alignent désormais 48 divisions d'infanterie et 11 de cavalerie. S'y ajoute une artillerie en voie de modernisation. Enfin, l'armée austro-hongroise dispose d'un excellent service de renseignements, l'Evidenzbureau, qui permettra pendant toute la durée du premier conflit mondial de compenser l'infériorité numérique et matérielle de ses effectifs. Sur le plan naval, enfin, la flotte des SMS (Seiner Majestät Schiff) atteint un tonnage honorable de 264 000 tonnes (le quart de la Marine impériale allemande). Elle comprend 12 cuirassés, 7 croiseurs, 55 torpilleurs et 6 sous-marins. Ajoutons qu'une force aéronavale autrichienne sera tout juste créée en 1914 et basée à Pola en Croatie.

1913 : Face aux guerres balkaniques, malgré une mobilisation partielle, le parti belliciste de Vienne reste dans une position d'attente et d'observation. Il n'en sera pas de même, un an plus tard, lors de la crise de Sarajevo où la volonté d'en découdre sera, cette fois, la plus forte.

1914 : Assassinat, à Sarajevo, le 28 juin, de l'archiduc héritier François-Ferdinand et de son épouse Sophie Chotek par un jeune nationaliste serbe. A la suite d'un ultimatum adressé le 23 juillet à Belgrade, l'Autriche-Hongrie entre, le 28 juillet, en guerre contre la Serbie. Parfaitement informé des intentions de la chancellerie de Berlin et de l'état-major allemand, François-Joseph s'adresse alors à ses peuples dans une proclamation que le Wiener Zeitung publie le 29 juillet : « J'ai tout examiné et tout pesé. C'est la conscience tranquille que je m'engage sur le chemin que m'indique mon devoir. » N'ayant, alors, absolument pas saisi les potentialités nouvelles et inépuisables du matériel industriel mis au service de la guerre moderne, le vieil empereur Habsbourg apparaît comme un souverain du XIXe siècle qui entretient l'illusion de corriger la Serbie en déclenchant, contre elle, une campagne-éclair comparable à celles qui avaient assuré en 1848-1849 les victoires de Windischgrätz et de Radetzky. François-Joseph a, il est vrai, été fortement influencé par le parti de la guerre qu'incarnent, à Vienne, des hommes comme le général von Hoetzendorf ou le ministre de la guerre Krobatin, sans parler du ministre des Affaires étrangères, Berchtold. Comme partout en Europe, le parti belliciste s'est appuyé sur des opinions publiques chauffées à blanc. Fin juillet, le jeu des alliances fait le reste et déclenche en quelques jours l'embrasement de l'Europe. Pour l'Autriche-Hongrie, la guerre se fait sur deux fronts. Face aux Russes, les forces austro-hongroises vont se battre à un contre quatre et se voient contraintes d'opérer des replis jusqu'à l'arrivée des renforts allemands qui permettent la grande victoire de Limanowa-Lapanov, en décembre, sur le front de l'Est. Simultanément, sur l'autre front, après une résistance plus âpre que prévue des Serbes, les Autrichiens finissent par s'emparer de Belgrade, le 2 décembre 1914. Immédiatement reprise, la capitale serbe sera à nouveau réoccupée en 1915, mais, cette fois, grâce à l'intervention des forces bulgares entrées en guerre aux côtés des Empires centraux. Contrairement aux estimations des ennemis de l'Autriche-Hongrie, lesquels pronostiquaient une désagrégation de l'armée impériale autrichienne dès les premiers chocs, les hommes de toutes les nationalités ont fait leur devoir. Les pertes sont extrêmement lourdes : alors qu'à l'été 1914, l'armée austro-hongroise comportait après mobilisation 3 350 000 hommes sous les armes, elle en a perdu plus d'un million, quatre mois plus tard !

1915 : L'année 1915 correspond, pour l'Autriche-Hongrie, à un incontestable redressement militaire. Tout d'abord, l'offensive des Carpates se solde par un grand succès puisque les Russes reculent sur plusieurs centaines de kilomètres et que la Hongrie n'est plus menacée. La reprise par les Autrichiens de la Galicie et de la Bukovine, suivie, le 15 août, de l'occupation de Varsovie, provoquent à Vienne un enthousiasme qui laisse augurer une fin rapide et prochaine de la guerre. Entre-temps, l'entrée en guerre, en mai, de l'Italie aux côtés de l'Entente, a modifié la donne en ouvrant un troisième front qui contraint le général von Hoetzendorf à prélever des divisions sur les deux fronts russe et serbe, où sont déjà engagées les armées austro-hongroises. Les Italiens commettent toutefois l'erreur de ne pas attaquer immédiatement et laissent passer leur chance. C'est enfin le succès de la campagne de Serbie qui aboutit à l'occupation du pays puis à la mise hors de combat du Monténégro suite à l'entrée en guerre de la Bulgarie aux côtés des Empires centraux, à l'automne. Alors que cette série de succès permet aux dirigeants de l'Empire d'Autriche-Hongrie de voir l'avenir sous un meilleur jour, c'est depuis la Suisse, que le Tchèque Masaryk lance publiquement son projet de destruction de l'empire bicéphale austro-hongrois tandis qu'Edvard Benes, autre adversaire de toujours des Habsbourg, publie, à Paris, un ouvrage intitulé Détruisez l'Autriche-Hongrie !

1916 : Les Autrichiens encaissent le choc de l'offensive russe du général Broussilov, déclenchée le 4 juin. Les pertes sont colossales : en 12 jours, les 4e et 7e armées perdent 50 % de leur effectif ! Une nouvelle fois, les renforts allemands vont permettre d'enrayer l'avance russe. Alors que la Roumanie est entrée en guerre, le 27 août, aux côtés de l'Entente, le général von Hoetzendorf, en liaison avec le général allemand Falkenhayn, organise une campagne fulgurante qui aboutit après six semaines de combat à la prise de Bucarest et à l'occupation quasi-intégrale du pays. Le 21 novembre, l'empereur François-Joseph s'éteint à Vienne après un règne d'une longueur exceptionnelle (68 ans de règne). Il est remplacé par son petit-neveu, Charles Ier de Habsbourg-Lorraine, qui prend le commandement en chef de l'armée et s'installe au GQG. Le jeune souverain semble par ailleurs répondre aux espoirs de ceux qui, en Autriche-Hongrie, souhaitent une union de tous les Slaves du Sud, dans le cadre d'un empire rénové.

1916-1918 : Règne de l'empereur Charles Ier de Habsbourg-Lorraine.

1917 : Alors que l'Empire austro-hongrois, après trois années de guerre, fait la rude expérience de la guerre totale avec le blocus mis en place par les puissances de l'Entente, un vent d'espoir semble paradoxalement souffler sur fond de nouvelle Pax austriaca. Dès son avènement, l'empereur Charles Ier manifeste clairement son intention, pour sauver la Double Monarchie, de rechercher une solution pacifique au conflit. Un certain nombre d'éléments l'expliquent. D'abord, il apparaît évident, aux yeux du souverain Habsbourg, quand bien même la situation militaire serait-elle favorable, que toute prolongation du conflit risquerait, à terme, de placer l'Autriche-Hongrie sous la tutelle absolue de l'Allemagne. Ensuite, l'empereur Charles est parfaitement conscient que le rapport des forces et la durée du conflit jouent en faveur de l'Entente, surtout depuis l'entrée en guerre des Etats-Unis, le 2 avril. Enfin, le monarque autrichien n'ignore pas non plus qu'une prolongation de la guerre, avec son cortège de souffrances civiles et de privations liées au blocus, ne pourrait qu'attiser les troubles et les secousses révolutionnaires du type de celles qui ont éclaté en Russie, en février. « Nous avons à combattre un nouvel adversaire beaucoup plus dangereux que l'Entente : la révolution internationale ! » écrit Charles Ier à Guillaume II, en avril. C'est dans cette perspective qu'il faut replacer les deux tentatives de paix séparée proposées au printemps par le souverain Habsbourg à l'Entente et, notamment, à la France, par l'entremise de Sixte et Xavier de Bourbon-Parme, frères de l'impératrice Zita et officiers dans l'armée belge. D'autant qu'à ce moment-là, le gouvernement français est alors dirigé par Aristide Briand qui n'apparaît pas comme un ennemi irréductible des Habsbourg. Dans une lettre du 24 mars, l'empereur Charles s'engage même à appuyer « les justes revendications françaises relatives à l'Alsace-Lorraine », le rétablissement de la Belgique comme Etat souverain avec le maintien de son empire colonial et le rétablissement d'une Serbie indépendante avec un accès à la mer. Mais c'est sans compter sur les ennemis irréductibles de l'Autriche-Hongrie qui entendaient maintenir comme but de guerre la disparition de la Double Monarchie. En France, Alexandre Ribot, connu pour son hostilité aux Habsbourg, vient de succéder à Aristide Briand et les négociations sont court-circuitées d'autant que l'Italie ne peut supporter un rabaissement des promesses territoriales qui lui ont été faites lors du traité de Londres de 1915. Quant à l'Allemagne, elle ne semble guère disposée à accepter l'initiative de son allié autrichien. De toute façon, le plan de paix est contrarié à Vienne même. Devant une conjoncture favorable aux Autrichiens (cuisante défaite italienne à Caporetto le 24 octobre, décomposition du front russe suite au renversement du régime tsariste en octobre), le clan des partisans de la poursuite de la guerre, à Vienne, se trouve renforcé. Ces derniers sont alors convaincus qu'un ultime effort peut rendre la victoire encore possible.

1918 : Alors que la monarchie austro-hongroise est entièrement tombée sous la coupe de l'Allemagne et que son destin est suspendu au sort des armes sur le front de l'Ouest, la situation militaire semble, jusqu'au début de l'été 1918, assez favorable. La paix de Brest-Litovsk, signée le 3 mars 1918, libère les Empires centraux de la guerre russe tandis que celle conclue à Bucarest, le 16 mars, met fin à la guerre avec la Roumanie. Simultanément, les fronts italien et serbe sont solidement tenus par les armées austro-hongroises. Sur le front, l'armée demeure loyale. A l'intérieur, malgré les grèves et les difficultés d'approvisionnement, le loyalisme des populations est patent. La situation se renverse à partir du 8 août, « jour de deuil de l'armée allemande » sur le front de l'Ouest, tandis que tout le front oriental cède en quelques semaines (offensives des Serbes et de l'armée d'Orient contre les positions turques et bulgares). Pour les forces austro-hongroises, la fin du conflit intervient à l'automne 1918, lorsqu'à la suite de la victoire italienne de Vittorio Veneto, un armistice est conclu à Villa Giusti, près de Padoue, le 3 novembre. L'Autriche-Hongrie bascule officiellement dans le camp des vaincus. Le bilan humain de la guerre est très lourd. L'Autriche-Hongrie déplore 1 200 000 morts auxquels il faut ajouter 478 000 hommes morts dans les camps de prisonniers, dans les Balkans et à l'Est. Trois millions d'hommes sont rentrés blessés dans leurs foyers. Trois jours après celle qui vient d'être proclamée en Allemagne, la république voit le jour en Autriche, le 12 novembre 1918. Pour la première fois depuis 1526, les Allemands d'Autriche constituent un Etat autonome. Le 11 novembre, l'empereur Charles Ier de Habsbourg-Lorraine, pressé par ses ministres, a signé l'abdication qui signifie la fin de la monarchie des Habsbourg. L'un des buts de guerre de l'Entente a ainsi été atteint.

Du traumatisme de la fin de l'empire à l'intégration dans l'Union européenne

1919 : Karl Seitz (SDAP, le parti social-démocrate des travailleurs) est élu, le 5 mars, comme premier président de la république fédérale d'Autriche. Deux mois après celui imposé à l'Allemagne lors du traité de Versailles, le traité de Saint-Germain-en-Laye, signé le 19 septembre, règle le sort de l'Autriche. Pour la première fois dans l'histoire moderne et contemporaine, la paix est dictée du vainqueur au vaincu. L'ordre westphalien, issu du XVIIe siècle, a vécu : aucune délégation autrichienne, pas plus qu'allemande ou hongroise n'est admise à participer à l'élaboration des traités. Après avoir gouverné un empire de 50 millions d'âmes, Vienne devient la capitale d'un petit Etat enclavé de 83 000 kilomètres carrés et peuplé de 6,5 millions d'habitants. Héritière d'une partie de la Cisleithanie, la république autrichienne est sommée de renoncer à ses territoires non allemands et se trouve ainsi territorialement réduite à l'ancienne Ostmark (marche de l'Est) de l'époque de Charlemagne. Les vainqueurs de 1918, ne souhaitant par ailleurs faire aucun cadeau au Reich allemand vaincu, les articles 80 et 88 du traité de Versailles interdisent explicitement toute réunion (Anschluss) de l'Autriche avec l'Allemagne, alors même que la revendication était émise par une partie notable des Autrichiens eux-mêmes. De mars 1919 à octobre 1921, la famille impériale des Habsbourg se retrouve en exil en Suisse. Il faut garder à l'esprit que c'est à l'extérieur de ses propres frontières que s'est joué le sort de l'empire et de la dynastie des Habsbourg (en France, notamment, où a pesé, dès les débuts de la guerre, l'influence conjuguée des slavisants et germanophones de la Sorbonne et du Collège de France d'une part, les hommes de l'émigration tchèque, leaders autoproclamés comme Benes ou Masaryk d'autre part, lesquels ont pu s'appuyer sur une intelligentsia occidentale idéologiquement acquise à la destruction de l'édifice austro-hongrois). En échafaudant la cartographie nouvelle de l'Europe centrale et orientale, le Comité d'études, fondé en 1917 et présidé par Ernest Lavisse, regroupant les « meilleurs » historiens et géographes français du temps, a fait preuve d'irréalisme en bâtissant sur les décombres de la Double monarchie austro-hongroise des Etats totalement artificiels tels que la Tchécoslovaquie ou la Yougoslavie, qui n'ont fait que reconstituer des Autriche-Hongrie en miniature. Une formidable boîte de Pandore concernant la question des minorités nationales est ouverte.

1920 : Élection, le 9 décembre, de Michael Hainisch (sans parti) comme deuxième président de la république fédérale d'Autriche. Inauguration, la même année, du festival de Salzbourg, conçu, dès 1917, par l'écrivain Hugo von Hofmannstahl, en collaboration avec le metteur en scène de théâtre Max Reinhardt ainsi que le compositeur allemand Richard Strauss. Dans un contexte de prise de conscience du déclin de l'Europe, consécutif au grand suicide de 1914-1918, la ville natale de Mozart est choisie pour jouer et reproduire, sur scène, des œuvres musicales ou pièces de théâtre qui honorent les fondements classiques de la culture européenne.

1921 : Après l'échec de deux tentatives de restauration monarchique en Hongrie, la famille impériale des Habsbourg trouve refuge, en novembre, à Madère. En Autriche, où il n'entend nullement accepter une restauration monarchique, le gouvernement socialiste, dominé par la figure de Karl Renner, peut compter sur les syndicats et surtout sur les ligues paramilitaires comme le Republikanischer Schutzbund (ligue de défense républicaine), mise sur pied en 1920, ou encore sur les milices ouvrières de la Garde rouge, intégrées à la nouvelle armée, la Volksheer, d'où l'on avait exclu les anciens officiers de l'armée impériale. A l'est de l'Autriche, création officielle du Burgenland, après que les germanophones locaux ont décidé, en 1918, de rester autrichiens (suite à la séparation d'avec la Hongrie voisine).

1922 : Charles Ier de Habsbourg-Lorraine, dernier souverain d'une très longue et prestigieuse dynastie européenne, très malade, s'éteint en exil à Madère. Les obsèques de Funchal montrent trois couronnes placées autour du cercueil, l'une pour l'Autriche, l'autre pour la Hongrie et une dernière représentant les symboles de l'armée impériale et royale. A Vienne, où la Neue Freie Presse se veut laudative, un service funèbre est célébré en la cathédrale Saint-Etienne, en présence du chancelier Schöber.

1924 : Dans le cadre d'une politique d'assainissement monétaire est créée, en Autriche, une nouvelle monnaie, le schilling, en remplacement de la couronne. Surnommé l'Alpendollar, le schilling devient pour une décennie la devise forte de l'Europe danubienne.

1927 : Après une phase d'instabilité politique, au début des années vingt, due aux déchirements entre sociaux-démocrates, nationalistes agrariens et chrétiens-démocrates, le parti catholique de Monseigneur Seipel devient le parti dominant en Autriche. C'est alors que se renforce la Heimwehr, la « milice patriotique » née en 1919 et dirigée par le prince Ernest Starhemberg. A dominante chrétienne-sociale, cette ligue regroupe les sociétés de gymnastique et associations d'anciens combattants ainsi que les organisations paramilitaires des pays alpestres. Leur objectif est de défendre l'ordre traditionnel tout en luttant contre le marxisme rampant des sociaux-démocrates autrichiens.

1928 : Election, le 10 décembre, de Wilhelm Miklas (CSP, parti social-chrétien) comme troisième président de la république fédérale d'Autriche.

1931 : A Vienne, la faillite du Kredit-Anstalt (cessation de paiement d'une banque qui avait acquis une situation monopolistique) constitue le point de départ d'une crise économique et financière qui va se propager dans toute l'Europe centrale. Tous les progrès accomplis depuis 1924 se trouvent anéantis en quelques mois. Production et consommation autrichiennes retombent à un niveau inférieur à celui de 1913. Le nombre de chômeurs double pour atteindre le chiffre record de 400 000, au printemps 1931, cependant que le schilling s'effondre en perdant 25 % de sa valeur. Déjà demandé en 1919, sous une forme directe par Vienne et Berlin, le rattachement de l'Autriche à l'Allemagne fait cette fois l'objet d'une proposition indirecte, sous forme d'une Union douanière. Londres, Paris et Prague opposent une fin de non-recevoir.

1932 : C'est en pleine crise économique, à un moment où la droite autrichienne cherchait « un homme fort », qu'Engelbert Dollfuss devient, en mai, le nouveau chancelier d'Autriche. Comme pour la Hongrie de l'amiral Horthy, on peut, à propos de l'Autriche, parler d'un Etat autoritaire national-catholique, foncièrement antibolchévique et qui fait preuve de méfiance aussi bien à l'égard des grandes démocraties occidentales qu'à l'égard du national-socialisme en Allemagne, après 1933. Au lendemain de l'arrivée d'Hitler au pouvoir en Allemagne, Dollfuss fera immédiatement interdire les activités des nationaux-socialistes autrichiens.

1934 : Redoutée depuis tant d'années, circonscrite en 1927, la guerre civile finit par éclater, en février, à Vienne, au lendemain de l'insurrection du Parti social-démocrate autrichien qui est mis hors la loi. Le Karl Marx Hof, cité ouvrière modèle en même temps qu'emblématique bastion du prolétariat en lutte, sert de théâtre à de violents affrontements entre les hommes armés du Schutzbund et l'armée, laquelle reçoit l'ordre de tirer au canon. Après avoir espéré réitérer les sacrifices héroïques de 1848, le Schutzbund et le SPÖ finissent par être dissous. Le 1er mai, une nouvelle Constitution catholique et corporatiste est promulguée, qui contribue à faire de l'Autriche un « Etat chrétien allemand », conforme aux principes proclamés par Pie XI dans l'encyclique Quadragesimo Anno. Tentant un coup d’Etat national-socialiste visant à prendre le contrôle de l'Autriche, Hitler fait assassiner Dollfuss en juillet. Adversaire résolu d'Hitler, le chancelier défunt pouvait compter sur le soutien diplomatique de l'Italie pour contrer toute tentative d'Anschluss orchestrée par Berlin. Nourrissant encore à cette époque l'espoir d'une grande politique danubienne appuyée sur les aspirations de l'Autriche et de la Hongrie, mécontentes des traités de 1919-1920, et mobilisant ses divisions d'élite sur le Brenner, Mussolini est le seul, de tous les dirigeants européens, à l'été 1934, qui s'oppose au projet hitlérien d'annexion de l'Autriche au Reich. Kurt von Schuschnigg remplace Engelbert Dollfuss comme chancelier et va s'efforcer de poursuivre avec énergie et fermeté la politique nationale catholique de son prédécesseur. 

1935 : Le chancelier Schuschnigg autorise l'abolition partielle des décrets « anti-Habsbourg » (loi d'exil dite Habsburgergesetz) de 1919.

1937 : Le chancelier Schuschnigg fait appel à l'archiduc Otto de Habsbourg, fils de l'empereur Charles Ier, avant de comprendre rapidement, devant le veto formel d'Hitler, de l'Italie et de la Petite Entente, le caractère illusoire de tout projet d'une restauration monarchique en Autriche. On connaît le mot célèbre et plein de morgue de Benes, déclarant, à la veille de l'Anschluss, qu'il « valait mieux avoir Hitler à Vienne que les Habsbourg ».

1938 : L'Autriche ne pouvant plus compter sur le soutien diplomatique de l'Italie, cependant que l'Angleterre, en pleine politique d'appeasement, considère de plus en plus ouvertement la perspective d'Anschluss comme une affaire intérieure allemande, Hitler comprend rapidement qu'il a les mains libres pour réaliser son projet d'annexion de l'Autriche dans le cadre du Grand Reich, à condition toutefois d'agir en douceur. Le 11 mars, Schuschnigg démissionne. Sans aucune base légale, Arthur Seyss-Inquart le remplace à la Chancellerie. Le lendemain, aux premières heures du jour, la Wehrmacht pénètre sur le territoire autrichien sans rencontrer de résistance armée. Trois jours plus tard, Hitler fait une entrée triomphale à Vienne sur la Heldenplatz, « la place des Héros », où 200 000 personnes l'accueillent en libérateur. Sans cesse réclamé par l'opinion autrichienne depuis 1919, l'Anschluss répond alors au vœu de la très grande majorité des Autrichiens. En 1926, une revue était même apparue qui s'intitulait der Anschluss. Le plébiscite du 20 avril (97 % des électeurs ont voté « oui » à l'Anschluss) confirme l'adhésion massive des Autrichiens à l'intégration dans le Grand Reich. A cette occasion, le socialiste Karl Renner, futur président fédéral de la IIe république d'Autriche après 1945, s'est ouvertement prononcé en faveur du « oui ». Dans toute l'Autriche, des timbres sont aussitôt émis à l'effigie d'Hitler, portant tous la mention deutsches Reich. L'Hôtel impérial de Vienne devient une annexe de la Wilhelmstrasse de Berlin. Les Länder autrichiens sont transformés en Gaue, districts administratifs dirigés par des Gauleiter. La première république d'Autriche a vécu. L'Anschluss ouvre à l'Allemagne les portes du monde danubien. La population juive de Vienne qui représente 10 % des habitants de la capitale subit un sort allant de l'arrestation ou incarcération (10 000 personnes) à l'émigration (60 000). Le plus célèbre émigrant viennois est alors le docteur Freud qui meurt en exil à Londres en 1939. Lors de la « Nuit de cristal », le 9 novembre 1938, Vienne subit la destruction de quarante-deux synagogues.

1945 : Après avoir supporté un violent bombardement le 12 mars, Vienne est, du 5 au 13 avril, le théâtre d'une terrible bataille de six jours qui oppose les soldats soviétiques aux Allemands dans les rues éventrées de l'ancienne capitale des Habsbourg. La cathédrale Saint-Etienne est détruite à 45 % dont la célèbre Pummerin, le bourdon de 22,5 tonnes qui, symboliquement, avait été coulé en 1711 avec les boulets de canons abandonnés par les Turcs. L'Autriche n'a nullement été épargnée par la guerre. Au total, 380 000 Autrichiens ont été tués dans les rangs de la Wehrmacht. A cela s'ajoutent 12 000 Viennois morts dans les bombardements de 1945 et 130 000 juifs disparus dans les camps de concentration. Le territoire autrichien a lui-même abrité le camp de Mauthausen, situé à quelques kilomètres à l'est de Linz et où sont morts plus de 110 000 victimes. Au lendemain de la capitulation du 8 mai, l'Autriche est soumise à une occupation quadripartite. La zone d'occupation soviétique comprend le Burgenland, la Basse-Autriche (qui facilite les communications entre la Tchécoslovaquie et la Hongrie) et Vienne. Le statut de la capitale autrichienne est comparable à celui de Berlin avec quatre zones d'occupation soviétique, américaine, britannique et française. Si les Soviétiques se livrent, comme partout ailleurs en Europe orientale, à un démantèlement des usines considérées comme « biens allemands », la normalisation politique intervient assez rapidement. Le 20 décembre, Karl Renner (SPÖ) est élu premier président de la IIe république fédérale d'Autriche. Son gouvernement socialiste remet notamment en vigueur les lois « anti-Habsbourg » de 1919.

1947 : La IIe république fédérale d'Autriche adopte le Land Der Berge, Land Am Strome comme nouvel hymne national autrichien.

1951 : Theodor Körner (SPÖ) est élu, le 21 juin, (deuxième) président de la IIe république fédérale d'Autriche.

1953 : Création, à Vienne, par le chef d'orchestre Nikolaus Harnoncourt, du Concentus Musicus, une pratique nouvelle de la musique baroque des XVIIe-XVIIIe siècle.

1954 : Mort du grand chef allemand, Wilhelm Furtwängler, qui a régné vingt-cinq ans en maître sur les destinées du Wiener Philarmoniker. Lui succéderont d'autres chefs prestigieux comme Karl Böhm, Herbert von Karajan, Leonard Bernstein, Lorin Maazel ou Claudio Abbado.

1955 : Offrant des gages de neutralité et de renoncement à tout nouvel Anschluss, le chancelier Raab se rend à Moscou pour préparer le traité du Belvédère, signé à Vienne le 15 mai. En vertu de ce traité, l'Autriche est officiellement reconnue, quelques mois plus tard par l'ONU comme un Etat souverain. Le retour à la normale est symboliquement marqué par la réouverture solennelle de l'opéra de Vienne, partiellement détruit par les bombardements de 1945.

1957 : Fondation, à Vienne, sous l'égide de l'ONU, du siège de l'AIEA (l'Agence internationale de l'énergie atomique) pour promouvoir l'usage pacifique et limité de l'arme nucléaire. La même année, tandis qu'Adolf Schärf (SPÖ) est élu, le 2 mai, (troisième) président de la IIe république fédérale d'Autriche, Otto de Habsbourg obtient la nationalité autrichienne sans toutefois avoir le droit de revenir dans son pays natal. La persistance de la dévotion populaire, le culte des Habsbourg pour la Vierge de Mariazell permettent, par ailleurs, au sanctuaire catholique de Styrie, de fêter son huitième centenaire.

1959 : L'Autriche intègre, avec six autres pays, l'AELE (l'Association européenne de libre échange). Ces pays constituent, entre eux, une zone de libre échange pour contrebalancer la Communauté économique européenne créée par le traité de Rome (signé deux ans plus tôt).

1961 : Rencontre Kennedy-Khroutchev à Vienne. Cette conférence internationale illustre la conception de « Suisse danubienne » définie par Karl Renner en 1947. Une nouvelle conférence dans la capitale autrichienne aura lieu, sept ans plus tard, au lendemain du Printemps de Prague.

1965 : Franz Jonas (SPÖ) est élu, le 9 juin, (quatrième) président de la IIe république fédérale d'Autriche. Installation, la même année, à Vienne du siège de l'OPEP, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole.

1974 : Rudolf Kirchschläger (sans parti) est élu, le 8 juillet, (cinquième) président de la IIe république fédérale d'Autriche.

1966 : Ayant officiellement renoncé, en 1962, à ses prétentions sur le trône, l'archiduc Otto de Habsbourg est autorisé à fouler le sol autrichien.

1982 : Retour triomphal à Vienne, après soixante-trois ans d'exil, de l'impératrice Zita.

1986 : Kurt Waldheim (ÖVP) est élu, le 8 juillet, (sixième) président de la IIe république fédérale d'Autriche.

1989 : Décision historique du ministre des Affaires étrangères hongrois, Gyula Horn, de démanteler le rideau de fer entre la Hongrie et l'Autriche. Reçu à Budapest, qui venait de remettre en place la statue de son arrière-grand-tante, l'impératrice Sissi, l'archiduc Otto de Habsbourg récupère à cette occasion la nationalité hongroise. L'Autriche rend un vibrant et solennel hommage à son ancienne impératrice, morte en Suisse, à 97 ans, et inhumée à Vienne dans la crypte des Capucins. Selon le protocole traditionnel des Habsbourg-Lorraine, on a sorti de la Hofburg le carrosse funéraire qui avait porté, en 1916, le cercueil de François-Joseph Ier.

1992 : Thomas Klestil (ÖVP) est élu, le 8 juillet, (septième) président de la IIe république fédérale d'Autriche.

1995 : L'Autriche, en même temps que la Suède et la Finlande, intègre l'Union européenne, qui passe alors de 12 à 15 Etats-membres. La même année, l'Autriche est, au même titre que la République tchèque, la Slovaquie et la Hongrie, admise à l'OMC (Organisation mondiale du commerce).

1996 : Le château de Schönbrunn, à Vienne, est classé au patrimoine mondial de l'UNESCO.

2000 : Percée du FPÖ (Parti autrichien de la liberté) de Jörg Haider qui remporte 26,9 % des voix lors des élections législatives en Autriche. Ce succès pousse Haider, gouverneur de Carinthie, à négocier l'entrée de son parti dans le gouvernement conservateur de Wolfgang Schüssel. L'Autriche devient, l'espace de quelques semaines, un Etat diplomatiquement en « quarantaine », jusqu'à ce qu'une Commission de sages dépêchée par l'Union européenne décrète que le pays est gouverné par une coalition ne remettant nullement en cause le fonctionnement de la démocratie autrichienne.

2002 : Le 1er janvier, les billets et pièces en euros se substituent au schilling autrichien, créé en 1924.

2004 : Béatification, à l'initiative du pape Jean-Paul II, du dernier souverain Habsbourg, Charles Ier d'Autriche. Heinz Fischer (SPÖ) est élu, le 8 juillet, (huitième) président de la IIe république d'Autriche.

2005 : Après avoir été responsable du FPÖ (Freiheitliche Partei Österreichs) pour le Land et la ville de Vienne, Heinz-Christian Strache devient, le 23 avril, président du FPÖ, en remplacement d'Ursula Haubner, partie adhérer au BZÖ (Bündnis Zukunft Österreichs), fondé début avril par son frère, Jörg Haider, ancien chef du FPÖ. Ce dernier disparaîtra dans un accident de voiture le 11 novembre 2008.

2007 : En septembre, le Saint Père Benoît XVI se rend à Heiligenkreuz ainsi qu'à Mariazell, à l'occasion du 850e anniversaire de la fondation de ce haut-lieu de piété mariale.

2008 : L'Autriche, qui avait fourni jusqu'en 2001 un bataillon aux forces de maintien de la paix dirigées par l'OTAN en Bosnie-Herzégovine, prend le commandement de la Force opérationnelle multinationale - Sud de la KFOR.

2009 : Ouverture du procès en béatification de Zita, la « Servante de Dieu » par l'évêque du Mans, Monseigneur Le Saux.

2011 : Mort de l’archiduc Otto de Habsbourg, âgé de 98 ans, dans sa résidence de Pöcking en Bavière. Vibrant au souvenir d'une histoire pluriséculaire, Vienne se pare d'une forêt d'étendards aux couleurs des provinces de l'ancien empire. C'est dans la crypte des Capucins, à Vienne, que repose le corps d'Otto de Habsbourg, au côté de son épouse, l'archiduchesse Regina, disparue en 2010.

2013 : A l'occasion des élections législatives, tenues le 29 septembre, pour élire les 183 députés de la 25e législature du Conseil national autrichien (pour un mandat de 5 ans), le FPÖ effectue une percée en obtenant 20,5 % des voix, améliorant son score des élections législatives précédentes de 2008, où le parti de Heinz-Chritian Srache avait enregistré 17,5 % des suffrages. Dans le même temps, la droite classique du Parti populaire autrichien (ÖVP) obtient son pire résultat à un scrutin législatif avec 24,1 %, tout comme les sociaux-démocrates (le SPÖ, longtemps le plus grand parti du pays), qui enregistrent un score historiquement faible avec 26,8 % des suffrages, restant toutefois la première formation du pays avec 52 députés sur 183.

2015 : Les élections régionales, tenues le 31 mai, en Styrie (l'un des neuf Länder d'Autriche) constituent un triomphe pour le Parti autrichien de la liberté (FPÖ), lequel progresse de seize points par rapport aux élections régionales de 2010. Le FPÖ, avec 26,8 % des voix, soit 14 députés, obtient le meilleur score électoral de son histoire, tandis que les formations traditionnelles de droite (ÖVP) et de gauche (SPÖ) enregistrent, quant à elles, leur plus mauvais score depuis 1945, à savoir, respectivement, 28,5 % et 29,3 % des voix. Les résultats dans le Burgenland voisin traduisent la même tendance et confirment la percée, comme du reste partout ailleurs en Europe, des forces dites « populistes » face aux partis de gouvernement traditionnels, à bout de souffle. Comme c'est le cas en France, on assiste en Autriche à la fin du bipartisme et à l'avènement d'un tripartisme appelé à durer et à bouleverser l'échiquier politique. Une tendance confirmée par la « crise des réfugiés » de 2015, l’Autriche se trouvant directement confrontée aux flux migratoires en provenance des Balkans. 

2016 : Les élections présidentielles ont vu Alexander van der Bellen, candidat indépendant soutenu par les écologistes, l’emporter sur le candidat d’extrême-droite du FPÖ, Norbert Hofer. Une première élection a été annulée au vu du faible écart séparant le deux candidats mais Alexander van der Bellen l’a finalement emporté avec 53,79 % des suffrages. La poussée nationaliste est évidemment liée à l’afflux régulier d’immigrants, notamment musulmans, dont l’intégration est manifestement en panne.

2017 : Les élections législatives du 15 octobre ont vu le jeune ministre des affaires étrangères, Sebastian Kurz, arriver en tête à l’issue du scrutin avec 31,5 % des suffrages. Il s’est entendu avec le FPÖ d’extrême-droite pour bâtir une coalition gouvernementale qui a renvoyé dans l’opposition les sociaux démocrates du SPO (26,9 % des voix). Heinz Christian Strache, le leader du FPÖ, est devenu vice-chancelier et ses amis ont pris les portefeuilles de l’Intérieur, de la Défense et des Affaires étrangères.. Dix-sept ans après l’expérience de Jorg Haider, cette arrivée de la droite « populiste » aux affaires n’a pas suscité en Europe la même mobilisation et le même rejet. Les résultats économiques sont tout à fait encourageants, avec un chômage au plus bas un tourisme très dynamique et un tissu de petites et moyennes entreprises particulièrement performantes. Le jeune Sebastian Kurz s’est imposé en Europe et manifeste sa proximité avec la Hongrie, l’Italie et la Russie, de quoi le ranger parmi les « populistes » dénoncés par les médias occidentaux. La situation de l’Autriche n’en apparaît pas moins tout à fait favorable en 2018.