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La Pologne
Un millénaire d’une histoire tourmentée

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Étrange destin que celui de la Pologne, cette nation dont Voltaire écrivait, dans son Histoire de Charles XII, qu’elle était « bien plus jalouse de maintenir sa liberté qu’empressée à attaquer ses voisins. La discipline et l’expérience lui manquent, mais l’amour de la liberté qui l’anime la rend toujours formidable. On peut la vaincre ou la dissiper ou la tenir même pour un temps en esclavage, mais elle secoue bientôt le joug… » Le grand philosophe des Lumières résume en quelques lignes ce que fut l’aventure de ce peuple slave entré dans l’histoire autour de l’an mil et contraint de batailler très souvent pour affirmer son existence face au Drang nach Osten germanique et aux entreprises moscovites, suédoises ou prussiennes. Une situation géographique défavorable a de tout temps rendu difficile la lutte polonaise pour l’indépendance et la liberté mais, attachée à sa langue et à sa religion catholique, cette nation trouvera dans les espoirs nés de la Révolution française sa vocation de nation martyre appelée à régénérer l’Europe qu’exaltera Adam Mickiewicz. En ce sens elle apparaîtra comme l’un de ces « peuples nécessaires » chers à Michelet et les sacrifices consentis au XXe siècle, sous la domination hitlérienne et au cours de l’interminable nuit communiste, ont confirmé la vigueur d’un esprit de résistance qui se confond avec une histoire millénaire. L’extension territoriale de la Pologne a considérablement varié au cours de l’histoire et l’on a vu, à l’issue de la seconde guerre mondiale, les frontières du pays largement déplacées d’est en ouest, sa superficie passant de 390 000 km2 en 1939 à 312 000 km2 en 1945. La Pologne a alors perdu les territoires situés à l’est du Bug mais récupéré la partie méridionale de la Prusse orientale et, avec la ville libre de Gdansk (Dantzig), les territoires allemands allant de la Poméranie à la Silésie et à la Poznanie. Ces frontières, notamment la frontière Oder-Neisse germano-polonaise, ont été reconnues à la faveur de la détente Est-Ouest, lors de la conférence d’Helsinki en 1975, et confirmées quand a été réalisée la réunification allemande en 1990. La géographie physique de la Pologne apparaît d’une grande simplicité. Les neuf-dixièmes du territoire actuel de la Pologne s’élèvent à moins de 200 m d’altitude. Les zones de collines du nord correspondent aux « croupes baltiques » formées par les moraines frontales de l’inlandsis scandinave. Il s’agit de régions forestières aux sols pauvres où les lacs et les étendues marécageuses sont nombreux – Poméranie à l’ouest, Mazurie à l’est. C’est dans la plaine centrale que s’est formé le cœur historique de la Pologne, traversé par la Vistule qui sépare la Mazovie à l’est de la Grande Pologne à l’ouest. Le tiers méridional du pays est caractérisé par la présence de reliefs montagneux importants. À l’ouest, les monts des Géants forment le côté nord du quadrilatère bohémien ; à l’est, les Beskides participent au versant septentrional de l’arc des Carpates. Les piémonts de ces ensembles montagneux correspondent aux riches régions de Silésie à l’ouest et de Petite Pologne et de Lublin à l’est. L’Oder et la Vistule – ainsi que leurs grands affluents respectifs, la Warta et la Pilica – sont des cours d’eau réguliers et utiles s’écoulant du sud vers le nord et la trouée de la haute Vistule permet des communications aisées avec l’espace danubien. Alors qu’elle dispose aujourd’hui sur la Baltique d’une façade littorale longue de 500 km, la Pologne eut pendant longtemps, faute d’un débouché suffisant sur la mer, une destinée exclusivement continentale. Privé de frontières naturelles clairement identifiables dans la grande plaine d’Europe du Nord, le pays dut faire face dès le Moyen Âge à la poussée germanique à l’ouest avant d’être menacé par la pression russe à l’est. Cette situation inconfortable – qui connut son paroxysme à la fin du XVIIIe siècle, à l’issue des partages successifs qui rayèrent pour cent vingt-quatre ans l’État polonais de la carte de l’Europe – a naturellement conduit ce peuple à rechercher vers l’est, vers les régions baltes, la Biélorussie ou l’Ukraine, un espace territorial suffisamment étendu pour garantir la sécurité de la « Pologne ethnique » mais cette extension était aussi une source de faiblesse, dans la mesure où elle intégrait à l’État polonais de nombreuses minorités qui ne se reconnaissaient pas en lui – près de la moitié de la population en 1939. Les contraintes géographiques ne peuvent cependant suffire à expliquer les difficultés qu’a connues la Pologne au cours de son histoire. Riche en hommes et en ressources, ce pays a surtout souffert de la nature d’un État condamné à l’impuissance par un régime de « démocratie nobiliaire » qui, à partir du XVIIe siècle, ne fut jamais en mesure de le protéger des ambitions de ses voisins.

Des origines à la formation de l’unité polonaise

On fait généralement commencer l’histoire de la Pologne en 963 avec le règne de Mieszko mais il n’est pas possible d’ignorer les périodes plus anciennes que nous révèle l’archéologie. C’est au sein de la vaste famille des peuples indo-européens que se cristallise l’élément slave. Les Proto-Slaves apparaissent bien individualisés vers le XVe siècle avant J.-C. et donnent naissance à plusieurs cultures successives. Celle qui se développe en Lusace se caractérise par la pratique de l’agriculture et de l’élevage, par la maîtrise de la métallurgie non ferreuse et par des constructions en bois, notamment d’enceintes impressionnantes comme celle dont les restes ont été découverts à Biskupin. La civilisation poméranienne prend le relais dans la seconde moitié du premier millénaire avant J.-C. en Poméranie, en Grande Pologne, en Petite Pologne et dans une partie de la Silésie. Enfin, la civilisation dite des « tombes à fosse » dure du premier siècle avant J.-C. au VIe siècle après. Le choc des invasions successives vient bouleverser l’Europe orientale et entraîne la distinction progressive entre Slaves orientaux et Slaves occidentaux. C’est entre la Vistule et l’Oder (Odra) que se forment alors les groupes qui donneront naissance aux diverses tribus polonaises. On distingue parmi celles-ci les Goplanes, les Polanes, les Vislanes et les Masoviens. Ce sont les Polanes qui parviennent à s’imposer et qui établissent autour de Kruszwica, Gniezno et Poznan le noyau principal de l’ensemble polonais dont l’unité est favorisée par les menaces que font peser sur lui Magyars, Scandinaves et surtout Germains. C’est également à cette époque que s’établit la tradition légendaire qui fait de la famille des Piast l’origine de l’État polonais. Le passage du mythe à l’histoire se réalise avec Ziemomysl, fils de Leszek et père de Mieszko qui sera le premier véritable souverain « historique » de la Pologne. C’est avec lui que commence véritablement la dynastie des Piast, qui régnera sur le pays de 963 à 1370. 959 : Offensive germanique contre la Pologne. Mieszko est vaincu par le margrave Gero. 963 : Mieszko traite avec l’Empereur Othon Ier qui reconnaît officiellement le royaume polonais. 965 : Mieszko épouse Dubravka, une princesse bohémienne et s’allie ainsi à un voisin slave et chrétien. 966 : Conversion de Mieszko et de son peuple au christianisme. 973 : Convoqué à Quedlimburg par l’empereur, Mieszko accepte de payer tribut pour les territoires étendus à l’ouest de la Warta. 981 : Le souverain de Kiev, Wladimir le Grand, attaque la frontière du Bug et du San. 992 : Mort de Mieszko. Il a été le rassembleur des terres polonaises et, avec la conquête de Gdansk et de la Poméranie occidentale, il a donné au royaume une ouverture sur la Baltique. 992-1025 : Règne de Boleslas Ier, fils aîné de Mieszko. Son père a prévu de partager son royaume entre ses quatre fils mais il s’impose comme seul successeur. 1000 : L’empereur Othon III est reçu à l’Assemblée de Gniezno. La fille d’Othon est mariée au fils de Boleslas et les charges imposées à Mieszko sont supprimées, ce qui signifie la reconnaissance de l’indépendance polonaise. Le pays est organisé en province ecclésiastique autonome avec un archevêché à Gniezno et trois évêchés à Cracovie, Wroclaw et Kolobrzeg. Boleslas reprend à l’empereur le droit d’investiture et de nomination des évêques, garantissant ainsi l’émancipation de l’Église polonaise. 1005 : L’empereur Henri de Bavière entreprend contre la Pologne une guerre qui se terminera en 1018 avec le traité de Bautzen qui laisse la Lusace et la Moravie à la Pologne, qui s’étend alors jusqu’au Dniestr. 1025 : Couronnement de Boleslas à Gniezno. Il se couronne lui-même avec l’assentiment du Saint-Siège. 1025-1034 : Règne de Mieszko II, qui ruine l’œuvre de son père en perdant la Lusace, en reconnaissant la suzeraineté de l’empereur et en acceptant la suspension de l’archevêché de Gniezno. 1040-1058 : Règne de Casimir Ier. Après la régence de Ryxa, veuve de Mieszko II, son fils rentre en Pologne avec l’appui des Allemands et reconquiert le royaume menacé par les Tchèques, les révoltes populaires et les ambitions de la noblesse. Il doit reconnaître la suzeraineté des empereurs Conrad II et Henri III. Casimir n’est que duc de Pologne et ne ceint pas la couronne royale. Il a assuré la renaissance de l’État mais accepté d’être dépendant de l’empire. 1058-1080 : Règne de Boleslas II. Fils de Casimir Ier, il occupe Kiev en 1069 et se range aux côtés du pape Grégoire VII quand éclate avec l’empereur Henri IV la querelle des Investitures. 1076 : Boleslas est couronné avec le soutien de Grégoire VII mais l’empereur Henri IV tente de susciter des révoltes contre lui. C’est dans ce contexte que le roi fait assassiner l’évêque de Cracovie Stanislas qui l’a excommunié. La victime deviendra ensuite le saint patron de la Pologne. Boleslas est alors obligé de s’exiler en Hongrie. 1080-1102 : Règne de Ladislas Ier Hermann, frère cadet de Boleslas II. Sous son règne, la Pologne se rapproche de l’empire. 1102-1138 : Règne de Boleslas III Bouche-Torse. Ladislas Ier a souhaité partager son royaume entre lui et ses fils, ce qui déchaîne à sa mort la guerre entre Zbigniew et Boleslas. Le premier s’appuie sur l’empereur dont les troupes sont vaincues en Silésie à Glogau et Wroclaw. Boleslas fait exécuter son frère et rétablit l’unité polonaise. Il tente de mettre en place un système dit de « seniorat » qui permet de partager le royaume entre ses fils, tout en réservant à l’aîné une fonction de suzerain par rapport à ses frères cadets. Cette situation va en réalité favoriser le morcellement féodal. Le XIIe siècle voit le développement en Pologne d’une importante colonisation allemande qui se confirme au siècle suivant. Les Allemands s’installent surtout dans les villes et sont à l’origine de l’essor de bon nombre de centres urbains. Le droit allemand de Magdebourg est appliqué pour la première fois dans la ville de Chelmno en 1233 et se répand ensuite rapidement dans la mesure où il est mieux adapté à l’économie d’échanges que les coutumes polonaises (Wroclaw en 1242, Poznan en 1253, Cracovie en 1257). 1139-1146 : Règne de Ladislas II, qui a le titre de grand-duc. Fils aîné de Boleslas III, il doit lutter contre ses cadets soutenus par la noblesse qui cherche à affaiblir le pouvoir royal. Il est finalement vaincu et contraint à l’exil. 1145-1173 : Règne de Boleslas IV Il doit reconnaître en 1157 la suzeraineté de l’empereur Frédéric Barberousse. 1174-1177 : Règne de Mieszko III. Troisième fils de Boleslas III, il est chassé par l’aristocratie et mourra en 1202. 1177-1194 : Règne de Casimir II, dernier fils de Boleslas III. Il est élu par les Grands au synode de Lecz. Le testament de Boleslas est de fait aboli, ce que confirme en 1180 l’Assemblée de Lenczyca. 1202-1206 : Règne de Ladislas III, dernier fils de Mieszko III. Vaincu par Leszek, le fils aîné de Casimir II, il est chassé du trône. 1206-1227 : Règne de Leszek, qui place la Pologne sous la protection du Saint-Siège. Il est finalement tué par un prince poméranien rebelle. 1227-1279 : Règne de Boleslas IV, un fils de Leszek qui n’est encore qu’un petit enfant à la mort de son père. Son oncle Conrad de Mazovie et Henri de Silésie – de la branche aînée des Piast – se disputent le pouvoir et Conrad fait appel aux chevaliers teutoniques. 1237-1241 : Les Polonais sont vaincus à deux reprises par les Mongols qui dévastent le pays et massacrent une part importante de la population. Le cauchemar mongol ne se termine qu’en 1241. 1243 : Boleslas peut enfin exercer le pouvoir mais il doit compter avec la noblesse et avec les empiétements germaniques en Silésie et en Grande Pologne. 1264 : Le privilège de Kalisz assure un certain nombre de garanties aux juifs. 1279-1288 : Règne de Leszek le Noir, auquel succède, de 1288 à 1290, Henri IV de Breslau. 1283 : Les chevaliers Teutoniques s’installent en Prusse. 1289 : Varsovie apparaît pour la première fois comme un centre urbain important. 1290-1295 : Règne de Przemysl II, qui est couronné à Gniezno et pas à Cracovie en 1295, avant d’être assassiné l’année suivante. 1300-1305 : Venceslas II de Bohême règne sur la Pologne. Il bénéficie du soutien des bourgeoisies urbaines allemandes. Son fils et successeur Venceslas III est assassiné en 1306. 1306-1333 : Règne de Ladislas Ier le Bref, arrière-petit-fils de Casimir II. 1308 : L’ordre Teutonique occupe Gdansk. 1320 : Ladislas se fait couronner roi de Pologne à Cracovie. 1327-1329 : Jean de Luxembourg, roi de Bohême, se fait prêter hommage par les princes silésiens et un duc de Mazovie. 1331 : Les Polonais battent les Teutoniques à Plowce mais les chevaliers s’emparent de la Cujavie l’année suivante. 1334-1370 : Règne de Casimir III le Grand, fils de Ladislas Ier. 1335 : Entrevue de Visegrad ; Jean de Luxembourg renonce à toute prétention sur le trône de Pologne. 1343 : Une « paix perpétuelle » est signée entre la Pologne et l’ordre Teutonique qui garde la Poméranie orientale. 1347 : L’Assemblée de Piotrkow fait de la noblesse un corps fermé astreint au service militaire et établit les conditions du servage. 1355 : Accord de Buda avec Louis d’Anjou, roi de Hongrie. Si Casimir meurt sans héritier, c’est Louis d’Anjou qui doit lui succéder sur le trône de Pologne. 1364 : Création de l’Université de Cracovie par le roi Casimir III le Grand. C’est la deuxième fondée en Europe centrale après celle de Prague mais elle entre en déclin après sa mort. 1368 : Conclusion du traité de Kalisz entre la Pologne et les Teutoniques qui précisent leurs visées sur la Lituanie. 1370 : Louis d’Anjou, neveu de Casimir et roi de Hongrie monte sur le trône de Pologne. Il fait d’importantes concessions à la noblesse dont il réduit les impôts lors de l’assemblée de Koszyce (1374). Après la mort de Louis d’Anjou, les nobles polonais rompent l’union personnelle avec la Hongrie mais appellent au trône Hedwige, la seconde fille du roi, l’aînée, Marie, étant déjà mariée à Sigismond de Luxembourg. 1382 : Le duc de Lituanie Jagellon doit abandonner une partie de la Samogitie aux Teutoniques.

Le royaume des Jagellons (1384-1572)

Automne 1384 : Hedwige, fille de Louis d’Anjou, vient en Pologne pour se faire couronner à Cracovie « roi de Pologne ». 1385 : Jagellon, grand-duc de Lituanie, signe avec l’ambassade polonaise envoyée à Krewa (en Lituanie) un accord promettant, contre la main d’Hedwige, le rattachement de la Lituanie à la Pologne. 1386 : Jagellon est baptisé à Cracovie, reçoit le nom chrétien de Vladislas II et épouse la reine Hedwige le 15 février. 1387 : Christianisation massive de la Lituanie. La Ruthénie rouge est rattachée à la Pologne tandis que la Moldavie et la Valachie entrent sous la dépendance féodale de la Pologne, qui gagne ainsi un accès à la mer Noire. 1390-1395 : Jagellon défend son pouvoir en Lituanie contre les chevaliers Teutoniques qui soutiennent les prétentions du prince Witold, cousin germain de Jagellon mais, en 1392, Witold se réconcilie avec le roi. 1397 : La rencontre de la reine Hedwige et du grand-maître de l’ordre Teutonique ne permet pas un règlement pacifique de l’antagonisme entre la Pologne et l’Ordre. 1398 : Witold signe la paix avec les chevaliers Teutoniques. 1399 : La reine Hedwige meurt à l’âge de vingt-six ans. Les forces lituaniennes et ruthènes commandées par Witold sont écrasées par les Tartares sur la rivière Worskla. 1400 : Renouveau de l’Université de Cracovie qui apparaît comme l’une des plus brillantes d’Europe dans les domaines du droit et des mathématiques. 1401 : Union dite de Wilna-Radom entre la Pologne et la Lituanie dont l’autonomie est garantie. Witold obtient le titre de grand-duc de Lituanie. L’attaque des chevaliers Teutoniques contre la Lituanie ouvre une guerre qui dure jusqu’en 1404 et se conclut avec la paix de Raciaz, qui voit la victoire de l’Ordre. 1406-1408 : Guerre lituano-moscovite. 1409 : Soulèvement de la Samogitie contre la domination teutonique. L’Ordre déclare la guerre à la Pologne. 15 juillet 1410 : Les Teutoniques sont vaincus à la bataille de Grunwald (dite aussi de Tannenberg). Le grand-maître Ulrich von Jungingen compte parmi les tués mais les Polono-Lituaniens ne peuvent s’emparer de Malbork (Marienburg), le siège de l’Ordre. 1411 : Le traité de Torun met un terme à la guerre et permet aux Teutoniques de limiter les effets de leur défaite militaire de l’année précédente. 1413 : L’Union de Horodlo renforce les liens entre Pologne et Lituanie. 1414-1416 : La guerre dite de la famine entre la Pologne et l’ordre Teutonique épuise sans résultats les deux adversaires, qui portent leur litige devant le concile de Constance. 1420 : Les Hussites révoltés offrent à Jagellon et, après son refus, à Witold la couronne tchèque ; Sigismond Korybutowicz, représentant de Witold, se rend en Bohême en 1422 mais le projet n’aboutit pas. 1422 : Nouvelle guerre entre Polonais et Teutoniques, terminée par la paix de Melno. La même année, la noblesse polonaise obtient à Czerwinsk des privilèges qui limitent l’autorité royale en matière de justice et de frappe monétaire. 1423 : Le Statut de Warta confirme et élargit les privilèges reconnus à la noblesse à Czerwinsk l’année précédente. En 1425 la noblesse polonaise n’accepte de reconnaître comme successeur de Jagellon son fils Vladislas, né de sa quatrième épouse, qu’au prix de l’octroi de nouveaux privilèges. 1428 : 1433 : Soulèvement hussite en Silésie. 1429 : L’empereur Sigismond, le roi Jagellon et le grand-duc Witold se rencontrent à Luck, en présence du nonce apostolique, en vue de définir une attitude commune face à la Bohême hussite. 1430 : Le privilège de Jedlno accorde à la noblesse de nouveaux droits en échange de la promesse d’élire au trône le fils du souverain. La même année voit la mort du grand-duc Witold. 1432 : Nouvelle union, conclue à Grodno, entre la Pologne et la Lituanie. Sigismond Kiejstocowicz devient grand-duc de Lituanie. 1er juin 1434 : Mort de Vladislas II Jagellon. Vladislas III Jagellon, qui a dix ans, est couronné roi de Pologne le 25 juillet. 1439 : Guerre civile. Formation de la confédération hussite de Spytko de Melsztyn. Elle est vaincue à la bataille de Grotniki. 1440 : Vladislas III Jagellon devient roi de Hongrie et les deux pays se retrouvent unis dans la lutte contre l’envahisseur ottoman. Casimir, frère du roi, est élu grand-duc de Lituanie. Formation de la confédération prussienne qui deviendra une force d’opposition au sein de l’État teutonique. 10 novembre 1444 : Vladislas est tué à Varna en combattant contre les Turcs. 1447 : Après trois ans d’interrègne, Casimir IV Jagellon est couronné roi de Pologne. 1454 : Soulèvement général en Prusse contre la domination de l’ordre Teutonique. La Prusse, à la demande des représentants des États, est incorporée à la Pologne le 6 mars, ce qui entraîne une guerre contre l’ordre Teutonique qui va durer treize ans. Novembre 1454 : Octroi des privilèges dits de Nieszawa à la noblesse. 1455 : Mort du cardinal Zbigniew Olesnicki, évêque de Cracovie, l’homme politique le plus puissant au temps des premiers Jagellons. Seconde moitié du XVe siècle : La Pologne est touchée par l’esprit nouveau importé d’Italie. À Leopol (Lwow), l’archevêque Grégoire de Sanok réunit autour de lui un cercle d’humanistes et, en 1490, l’Italien Philippe Buonacorsi Callimach fait de même à Cracovie. 1466 : Paix de Torun entre la Pologne et l’ordre Teutonique. La Poméranie est rattachée à la Pologne. Les territoires laissés à l’Ordre, dont la capitale est Koenigsberg, deviennent un fief de la couronne polonaise. 1471 : Vladislas Jagellon, fils de Casimir, est couronné roi de Bohême. 1474 : Un premier livre est imprimé en Pologne, à Cracovie. Au cours du siècle suivant, des écrivains polonais comme Nicolas Rey de Naglowice (1505-1569) ou Jean Kochanowski (1530-1584) abandonnent l’usage du latin et utilisent la langue vulgaire. 1475 : Le comptoir génois de Caffa, sur la côte de la mer Noire, est pris par les Turcs. 1484 : Kilia et Akerman tombent aux mains des Ottomans. 1490 : Vladislas, roi de Bohême, accède au trône de Hongrie après la mort de Mathias Corvin. À ce moment, les Jagellons se trouvent à la tête de quatre pays d’Europe centrale et orientale : Pologne, Hongrie, Bohême et Lituanie. 7 juin 1492 : Mort du roi Casimir IV Jagellon. Ses fils recueillent la succession : Alexandre devient grand-duc de Lituanie, Jean Olbracht roi de Pologne jusqu’à sa mort en 1501, date à laquelle il est remplacé sur ce trône par Alexandre qui mourra en 1506. 1494 : Rencontre des Jagellons à Lewocza pour faire face en commun au danger turc. 1496 : Diète de Piotrkow. La noblesse obtient la confirmation de tous ses privilèges. Le droit des paysans de quitter leur village est limité. La prépondérance politique et sociale de la noblesse dans l’État est consacrée. Les habitants des villes se voient interdire la possession des terres. 1497 : Échec de l’expédition conduite en Moldavie contre les Turcs par Jean Olbracht. 1499 : Alliance entre la Pologne et la Lituanie dite Union de Vilna. 1500-1503 : Guerre entre la Lituanie et la Moscovie qui parvient à annexer de larges territoires en Ruthénie. 17 juin 1501 : Mort de Jean Olbracht et élection d’Alexandre Jagellon comme roi de Pologne. 1505 : Constitution Nihil novi promulguée par Alexandre, fixant les bases du parlementarisme polonais et selon laquelle « rien de nouveau ne pourra être décrété par nous et par nos successeurs, en ce qui concerne le droit privé et la liberté publique, sans le consentement commun des représentants du pays ». 20 août 1506 : Mort d’Alexandre Jagellon. Sigismond Jagellon, son frère qui est déjà grand-duc de Lituanie, est élu roi de Pologne. Il régnera jusqu’en 1548. 1507-1537 : Transformation du château royal du Wawel. 1507-1508 : Première guerre moscovite. 1512 : Défaite des Tartares à Wisnowiec. 1512-1522 : Deuxième guerre moscovite. Les forces russes sont vaincues à Orsza en 1514 mais s’emparent de Smolensk. 1515 : Rencontre à Vienne entre les rois Jagellons Sigismond et Vladislas et l’empereur Maximilien de Habsbourg, en vue d’une union matrimoniale entre les Jagellons et les Habsbourg. 1519-1521 : Guerre contre la Prusse terminée par un armistice de quatre ans. 1520 : Les Diètes de Torun et de Bydgoszcz décrètent la corvée paysanne obligatoire un jour par semaine. 1522 : Sigismond-Auguste, fils du roi, est élu au trône lituanien. 1525 : Albert de Hohenzollern sécularise l’État de l’ordre Teutonique et passe au protestantisme. Le 10 avril, en tant que duc de Prusse, il rend hommage, à Cracovie, au roi de Pologne. 1525-1526 : Soulèvements paysans en Prusse ducale et révoltes sociales et religieuses à Gdansk écrasées par Sigismond Ier. 1529 : Incorporation de la Mazovie à la Pologne. Sigismond II Auguste est élu au trône polonais. 1534-1537 : Troisième guerre moscovite. 1543 : Mort du chanoine Nicolas Copernic, qui a formulé la théorie héliocentrique. C’est la même année qu’est publié son De revolutionibus Orbium Caelestium. 1er avril 1548 : Mort du roi Sigismond Ier. 1550-1555 : Offensive de la Réforme en Pologne. Elle rencontre un écho dans la noblesse avide de s’emparer des biens du clergé et désireuse de s’opposer au monarque et dans la bourgeoisie mais aucun dans les masses paysannes. 1551 : Publication à Cracovie du Commentarium de republica emendanda libri quinque d’André Frycz-Modrzewski qui condamne la prépondérance de la noblesse dans l’État et dénonce l’injustice sociale dont sont victimes les paysans. La même année, Stanislas Hosius, évêque de Warmie, qui participa comme cardinal légat à la troisième assemblée du concile de Trente publie la Confession de foi catholique. Il sera l’un des artisans de l’arrivée en Pologne des jésuites. 1558-1582 : Guerre pour la Livonie. 1561 : Le grand-maître de l’ordre livonien des Porte-Glaives, Gottfried Ketler, sécularise l’Ordre et soumet son État à la couronne polonaise. 1563 : Ivan IV le Terrible occupe Polotsk. 1564 : Arrivée des jésuites en Pologne. 1566 : Réunion de la première Diète de Lituanie. 1er juillet 1569 : Union de Lublin entre la Lituanie et la Pologne. Un roi commun sera élu par les noblesses des deux pays. Chacun des deux États conservait ses lois et ses tribunaux mais les habitants de chacun pouvaient librement acquérir des biens dans l’autre et y accéder à tous les emplois. Pologne et Lituanie seraient gouvernées par une Diète commune. Le terme de République désigna dès lors l’union des deux nations polonaise et lituanienne, et la forme de gouvernement sous un prince élu librement. Les Polonais ne représentent que 40 % de la population de ce nouvel État : outre les Lituaniens, il faut compter avec les Biélorussiens, les Ruthènes ou les Allemands. En 1582 L’État polono-lituanien s’étend sur 815 000 km2 et compte environ 8 millions d’habitants alors que la Pologne de Vladislas Jagellon s’étendait au XVe siècle sur 270 000 km2 peuplés de 2 500 000 habitants. Cette extension territoriale, qui permet le rassemblement de populations diverses, sera en fait une source de faiblesse. 1570 : Accord de Sandomierz entre les Églises réformées de Pologne – luthériens, calvinistes et frères tchèques. Il tient à l’écart les antitrinitaires, dits Frères polonais, dont le programme social révolutionnaire inquiète. Les Frères polonais se veulent pacifistes et communistes. Ces antitrinitaires se grouperont autour de Leilo Sozzini, un Italien établi à Cracovie de 1579 à sa mort survenue en 1604, et prendront alors le nom de sociniens dont le Catéchisme de Rakow – du nom de leur principal centre, proche de Sandomierz – intéressera Grotius et le père Mersenne. 1570 : Congrès de paix de Szczecin ; il met un terme à la guerre de Sept Ans qui a opposé Pologne et Suède pour le partage des territoires de l’ordre Livonien. 7 juillet 1572 : Mort de Sigismond II Auguste, le dernier des Jagellons.

La Pologne de 1572 au troisième partage de 1795

C’est avec le dernier des Jagellons que se termine ce qu’il est convenu d’appeler « l’Âge d’Or » de la Pologne. La dynastie qui s’éteint en 1572 avait poursuivi l’œuvre des Piast en réalisant l’unité polonaise et contenu la poussée germanique en brisant à Grunwald (Tannenberg) la volonté de domination des Teutoniques mais l’extension de la Pologne, associée à la Lituanie, a déplacé vers l’est le centre de gravité de l’État polonais qui occupe, à la fin du XVIe siècle, la plus grande partie de l’immense espace que constitue l’isthme entre Baltique et mer Noire, englobe tout le bassin du Dniepr jusqu’à Toula et celui de la Duna jusqu’aux grands lacs russes mais compte dans ses frontières de très fortes minorités slaves. L’impression de puissance donnée par l’extension territoriale et le volume de la population – à peu près équivalente à celle de l’Espagne et supérieure à celle de l’Angleterre d’alors – n’est qu’illusoire et cet État va devoir compter avec les ambitions de ses voisins – Russes, Suédois, Allemands – et avec des forces de dissociation internes redoutables. Outre la diversité ethnique, il sera sérieusement affaibli par un système politique dans lequel la noblesse dispose d’une quasi omnipotence. Dans cette « démocratie nobiliaire » – le terme est évidemment des plus discutables – le roi est élu et les votes de la Diète doivent être acquis à l’unanimité, faute de quoi l’assemblée est « rompue » jusqu’à la réunion suivante. Conçue au temps des premiers Piast, comme dans toute l’Europe d’alors, comme l’élément militaire indispensable à la défense du territoire polonais contre les envahisseurs, la szlachta – la noblesse, dont le nom s’apparente à l’allemand das Geschlecht, la race – était en réalité fort diverse. Elle comprenait les grands magnats mais aussi une foule de petits nobles qui avaient accédé à ce statut à la faveur des guerres, les rois distribuant généreusement des titres de noblesse à tous ceux qui avaient combattu et que leur pauvreté initiale rendait d’autant plus avides et soucieux d’arracher et de défendre de nouveaux privilèges. À la différence du reste de l’Europe, l’entrée dans l’époque moderne ne correspond pas en Pologne à l’essor des bourgeoisies urbaines et commerçantes et au renforcement du rôle de l’État aux dépens des anciens pouvoirs. Une telle situation ne peut qu’être génératrice d’anarchie. Comme le constate Louis Léger, l’un de ses historiens : « Cet État qui, à ne considérer que la carte, apparaît au XVIIe siècle comme l’un des plus grands États de l’Europe, touche à de nombreux pays voisins mais n’a pas de places fortes. Il touche à la mer mais n’a pas de marins. Il a une noblesse vaillante mais il n’entretient qu’une faible armée… » En fait, la Pologne se trompait de siècle et, comme le constate un autre de ses historiens, Henri Grappin, « elle commettait un splendide et lamentable anachronisme ». Juin 1573 : Le trône polonais étant électif, la Diète choisit entre cinq candidats le duc d’Anjou Henri de Valois – le futur roi de France Henri III –, en souvenir des relations établies avec Louis XII et François Ier. Ce règne sera extrêmement bref puisque l’annonce de la mort de Charles IX (1574) conduit Henri de Valois à rentrer précipitamment en France pour venir y succéder à son frère défunt. 1573 : La « Confédération de Varsovie » déclare la paix éternelle entre les différentes confessions religieuses mais ce programme demeurera sans lendemain quand s’affirmera la reconquête catholique. La même année voit, en Lituanie, le début de l’apostolat du jésuite Pierre Skarga qui s’insurge dans ses prêches contre l’extension du servage. 1575-1587 : Règne d’Étienne Bathory qui gouverne avec son ministre Jean Zamoyski et favorise les entreprises des jésuites. Il élève notamment au rang d’université leur Académie de Wilno. 1582 : Paix victorieuse avec la Russie. 1587-1632 : Règne de Sigismond III Wasa. La première moitié du XVIIe siècle voit le règne d’une dynastie suédoise dont le principal représentant est Sigismond III, fils du roi de Suède et d’une Jagellon. 1592 : Le roi doit renoncer, face à la Diète, à ses tentations absolutistes. 1596 : Synode de Brest-Litovsk. Création de la communauté uniate de rite grec pour intégrer à l’Église catholique les fidèles de tradition grecque qui souhaitent conserver leurs coutumes et liturgie propres. 1606-1609 : Période de troubles et d’agitation nobiliaire contre le souverain, qui doit finalement s’incliner. 1610-1611 : Les troupes de Sigismond III occupent Moscou. Ladislas, fils de Sigismond, est élu tsar par les boyards puis chassé. 1618 : Nouveau siège de Moscou. La Pologne récupère lors de la trêve de Déoulino Smolensk et Tchernigov perdus précédemment. 1629 : Traité d’Altmark. Le roi de Suède Gustave-Adolphe prend la Livonie maritime. 1632-1648 : Règne de Ladislas IV qui impose la paix à la Moscovie. 1632 : La noblesse se dispense de toute charge fiscale, s’exempte des droits de douane et décide de prélever directement le sel dans les mines du roi. 1638 : L’évêque de Cracovie obtient la fermeture des établissements sociniens de Rakow. 1645 : Une ambassade vient chercher en France la duchesse de Nevers, qui sera successivement l’épouse du roi Ladislas puis de Jean-Casimir. Cette délégation ramène également à Varsovie une enfant de cinq ans, Marie d’Arquien de Gonzague, qui sera plus tard l’épouse du roi Jean Sobieski, celui qui sera le vainqueur des Turcs devant Vienne. 1648-1668 : Règne de Jean II Casimir. 1648-1651 : La grande insurrection cosaque de Bohdien Chmielnicki met fin à la domination des magnats polonais sur l’Ukraine. En 1651, Jean II Casimir bat les Cosaques à Berestechko. 1652 : Établissement du liberum veto imposant que les décisions prises à la Diète le soient à l’unanimité. 1654 : Les Moscovites prennent Smolensk, Vitebsk et la Lituanie. 1655 : La Pologne est menacée d’une invasion suédoise et d’un partage entre Suède, Brandebourg et Russie. Les moines de Czestochowa montrent l’exemple de la résistance. 1656 : Les Suédois prennent Cracovie mais Jean Casimir libère Varsovie. 1657 : La Pologne renonce à la suzeraineté sur le duché de Prusse orientale. 1658 : Proscription des sociniens. 1660 : Paix d’Oliva. La Livonie intérieure revient à la Suède et la Pologne sort ruinée de la guerre. 1665 : Jean II Casimir ne peut abolir le liberum veto. 1667 : Trêve d’Androussovo. Smolensk, Kiev et l’Ukraine de la rive gauche du Dniepr reviennent à la Russie. 1668 : Jean II Casimir renonce au trône. 1669-1673 : Règne de Michel Wisniowecki. 1672 : Les Turcs du sultan Mehmed IV attaquent la Pologne et viennent assiéger Leopol. 1673: Jean Sobieski est vainqueur des Turcs à Khotin. 1674-1696 : Règne de Jean III Sobieski. 1683 : Jean Sobieski prend une part décisive à la victoire obtenue devant Vienne face aux Ottomans. 1696 : La diplomatie de Louis XIV réussit à faire élire roi de Pologne le prince de Conti mais quand celui-ci arrive à Gdansk un clan opposé a déjà installé sur le trône polonais l’Électeur de Saxe. 1697-1733 : Règne d’Auguste II, Électeur de Saxe. Le trône polonais revient pour la première fois à un prince allemand. 1700-1721 : Guerre du Nord. La Pologne est l’alliée de Pierre le Grand et du Danemark contre le roi de Suède Charles XII. À la suite des victoires suédoises, Auguste II se réfugie en Saxe. Les troupes suédoises, saxonnes et russes transforment la Pologne en champ de bataille. 1701 : Fondation à Koenigsberg du royaume de Prusse. 1704-1709 : Règne de Stanislas Leszczynski, élu avec l’appui de Charles XII de Suède. 1709 : Retour d’Auguste II après la défaite suédoise de Poltava. 1709 : Une grande épidémie de peste affecte la Pologne. 1709 : Retour d’Auguste II après la défaite suédoise de Poltava. 1717 : La « Diète muette » accepte, sous la pression russe, la réduction de l’Armée nationale à 12 000 hommes. 1720 : La Prusse signe avec la Russie de Pierre le Grand la convention de Potsdam qui, suivie de neuf accords analogues échelonnés de 1726 à 1780, prévoit les moyens « de maintenir le liberum veto et de protéger les droits des dissidents polonais, à l’effet de sauvegarder la libre élection au trône ». Les deux puissances voisines de la Pologne entendaient ainsi y maintenir l’anarchie propice à la satisfaction de leurs convoitises et à partir de 1736 aucune Diète n’aboutit. 1724 : Le bourgmestre et neuf bourgeois luthériens de Torun sont pendus pour profanation. À la mort du roi Auguste II, les adeptes des confessions minoritaires se verront interdire l’accès à la Diète et aux charges de l’État. 1733-1763 : Règne d’Auguste III. À la mort d’Auguste II, le parti « patriote » conduit par Stanislas Leszczynski cherche à imposer des réformes. Louis XV soutient la candidature au trône de Pologne de son beau-père qui est élu roi en 1733 mais cette élection entraîne la guerre de Succession de Pologne, qui voit les armées russes imposer le roi saxon Auguste III. La France n’engage pas dans cette guerre suffisamment de moyens et c’est le comte de Plélo, ambassadeur de France à Copenhague, qui sauve l’honneur en trouvant la mort lors de la modeste expédition de Dantzig où s’était réfugié Stanislas. Le traité de Vienne de 1738 conclut la guerre au bénéfice d’Auguste III dont le rival, Stanislas Leszczynski, reçoit à titre viager le duché de Lorraine. 1740-1748 : La guerre de Succession d’Autriche est l’occasion pour le roi de Prusse Frédéric II d’enlever la Silésie polonaise à l’impératrice Marie-Thérèse. Déjà maître de la Prusse orientale, du Brandebourg et de la Poméranie occidentale, l’État prussien complète l’encerclement de la Pologne alors que la Russie intervient directement dans les affaires polonaises en entretenant dans la noblesse des clientèles qui lui sont acquises. « Léthargie saxonne » et protectorat des tsars correspondent à une période d’effacement et d’affaiblissement de l’État polonais. Le diagnostic que porte alors Voltaire sur la situation de la Pologne paraît sans appel : « […] Chaque gentilhomme a le droit de donner sa voix dans l’élection d’un roi et le pouvoir de l’être lui-même. Ce plus beau des droits est joint au plus grand des abus ; le trône est presque toujours à l’enchère, et comme un Polonais a été rarement assez riche pour l’acheter, il a été vendu souvent aux étrangers. La noblesse et le clergé défendent leur liberté contre leur roi et l’ôtent au reste de la nation… Ce pays arrosé des plus belles rivières, riche en pâturages, en mines de sel et couvert de moissons, reste pauvre malgré son abondance parce que le peuple est esclave et que la noblesse est fière et oisive. » 1757 : Le roi saxon Auguste III évoque à Berlin un éventuel partage de son royaume de Pologne. 1761 : Le père Stanislas Konarski, l’un des animateurs des Écoles Pies (ou Piaristes) publie son traité intitulé De la manière efficace de délibérer qui condamne le système de la Diète polonaise. 1764 : Traité de Saint-Pétersbourg entre Frédéric II et Catherine II. Les deux souverains s’accordent sur l’élection de Stanislas Poniatowski. 1764-1795 : Règne de Stanislas-Auguste Poniatowski, élu par une Diète réduite influencée par des agents de Catherine II dont le nouveau roi avait été l’un des nombreux amants. Ce souverain sera effectivement soumis aux volontés de la tsarine mais se préoccupera en même temps du développement de l’agriculture, de l’amélioration du sort des paysans et de la diffusion de l’instruction ; il affranchira ses propres serfs et leur distribuera des terres. La commission de l’éducation nationale qu’il crée en 1773, après le premier partage de son royaume, est le premier organisme de ce type en Europe. Placée sous la direction d’Hugo Kollontaj, elle vise, selon son secrétaire français Dupont de Nemours, à « créer une nation par l’instruction publique ». La seconde moitié du XVIIIe siècle voit plus généralement se développer l’influence des Lumières et la Pologne, qui connaît alors un essor économique encourageant et s’ouvre aux influences culturelles venues de France, d’Angleterre ou d’Italie. 1765 : Création à Varsovie de l’École des Cadets, qui compte parmi ses élèves Tadeusz Kosciuzko, le futur héros de l’indépendance polonaise. 1767 : Les nobles de la Confédération de Radom font appel aux Russes. Février 1768 : Formation de la Confédération de Bar hostile à la Russie qui vient d’imposer la réintroduction du liberum veto. 1768 : Grande jacquerie dans le sud-est de la Pologne ; les révoltes paysannes sont nombreuses au XVIIIe siècle. Elles sont le fruit du sort misérable réservé aux neuf-dixièmes de la population ; la question paysanne sera étroitement liée, au siècle suivant, à celle de l’indépendance car c’est dans les masses rurales que se recruteront les « faucheurs » qui seront les combattants des insurrections nationales. 17 février et 5 août 1772 : Le premier partage de la Pologne prive celle-ci des deux-cinquièmes de son territoire. Elle conserve le port de Gdansk mais celui-ci se trouve coupé du reste du pays. L’Autriche obtient la Galicie. 1782 : Publication à Londres des Considérations sur le gouvernement de la Pologne de Jean-Jacques Rousseau. 3 mai 1791 : Vote d’une constitution polonaise inspirée des travaux de la Constituante française. La nouvelle monarchie constitutionnelle devait être désormais héréditaire et non plus élective, ce qui ne pouvait qu’inquiéter les puissances copartageantes du pays. Le liberum veto source d’une impuissance permanente pour la Diète était aboli et la bourgeoisie se voyait reconnaître des droits étendus. 1792 : Une confédération de Targowice, formée en mai à l’instigation de Catherine II et prétendant défendre les privilèges nobles s’oppose au nouveau régime et favorise les entreprises des puissances copartageantes. La Pologne se défend mais elle est finalement écrasée, malgré la résistance du prince Poniatowski et du général Kosciuzko. 23 septembre 1793 : Deuxième partage de la Pologne. L’Autriche n’est pas partie prenante à ce deuxième partage. La Prusse récupère toute la Mazovie, Gdansk et Torun. La Russie obtient l’est de l’ancien duché de Lituanie, le reste de l’Ukraine, la Podolie et une partie de la Volhynie, territoires où les Polonais étaient minoritaires. La Diète de Gdansk refuse de ratifier ce nouveau partage et, en mars 1794, le pays se soulève, l’insurrection est proclamée à Cracovie et les Polonais remportent la victoire de Raclawice. Avril 1794 : L’insurrection gagne Varsovie et Kosciuzko, qui était exilé à Dresde, vient en prendre la tête. Le 7 mai, il publie le manifeste de Polaniec qui libère du servage tous les paysans qui ont pris les armes mais, le 10 octobre, les insurgés sont vaincus le 10 octobre par les Russes à Maciejowice et Kosciuszko, blessé, est fait prisonnier. Varsovie succombe en novembre après avoir opposé une farouche résistance, conduite par Jacob Jasinski, alors que le général Dombrowski inquiète les Prussiens à l’ouest. 24 octobre 1795 : Troisième partage de la Pologne entre Prusse, Autriche et Russie. Abdication de Stanislas II Auguste. Varsovie est dans la zone accordée à la Prusse et Cracovie revient à l’Autriche. Un ultime traité conclu le 28 janvier 1797 affirme « la nécessité d’abolir tout ce qui peut rappeler le souvenir de l’existence du royaume de Pologne, dont la dénomination demeurera dès à présent et pour toujours supprimée ». L’État polonais est rayé de la carte de l’Europe mais le peuple polonais demeure et, encouragé par les succès de la Révolution française, il aspire toujours à la liberté. Il pourra compter sur le soutien de tous les tenants des idées nouvelles, ce que résume en France, quelques décennies plus tard, les lignes consacrées par Michelet à Kosciuzko, ancien combattant de la guerre d’indépendance américaine, héros de la guerre de 1792 et de l’insurrection de 1794: « [...] Le jour où cet homme de foi menant ses bandes novices contre l’Armée russe aguerrie et victorieuse laissa là toutes les routines et l’orgueil antique, laissa la noble cavalerie, mit pied à terre et prit place parmi les faucheurs polonais, un grand pas fut fait pour la Pologne et pour le monde. La Pologne n’était jusque-là qu’une noblesse héroïque : dès lors ce fut une nation, une grande nation et indestructible. L’impérissable étincelle de la vitalité nationale enfouie si longtemps éclata, elle rentra au cœur du peuple et y resta avec le souvenir de Kosciuzko. »

De la mort à la résurrection de l’État polonais (1795-1921)

Les partages successifs de 1772, 1792 et 1795 niaient l’existence d’une nation polonaise en lui enlevant toute base territoriale mais c’était perdre de vue qu’à la différence d’un pays comme l’Italie – dont Metternich dira qu’elle « n’est qu’une simple expression géographique » – les Polonais avaient constitué pendant plusieurs siècles un État régi par des institutions spécifiquement polonaises, agissant et légiférant en tant qu’État indépendant, expression politique d’un peuple possédant son histoire, sa langue, sa tradition religieuse et son génie national particulier. Il était impossible aux trois puissances qui venaient de se la partager de faire comme si la Pologne n’avait jamais existé face à un peuple qui n’avait, pour assurer sa survie, d’autre choix que la remise en cause radicale de l’ordre ainsi établi. 1796-1797 : Une Légion polonaise commandée par le général Dombrowski participe à la campagne d’Italie conduite par Bonaparte. mais la paix de Campo Formio conclue entre la France et l’Autriche ne fait nulle mention de la Pologne. Les 6 000 volontaires polonais sont ensuite engagés dans la conquête de Rome puis de Naples. Les légions polonaises seront dissoutes en 1801 avec la paix franco-autrichienne de Lunéville. 1800 : Organisation à Varsovie d’une Société des amis des sciences qui se donne pour vocation d’entretenir la flamme de la culture polonaise alors que l’Autriche et la Prusse mettent en œuvre une politique de germanisation marquée notamment par la création de l’Université germanique de Cracovie, qui remplace l’École principale antérieure. 1801 : Le nouveau tsar, Alexandre Ier, se pose en ami de la cause polonaise et associe le prince Czartoryski à la réforme de l’instruction publique mais l’alliance qu’il conclut ensuite avec l’Autriche, puis la Prusse, contre Napoléon ruine les espoirs des patriotes polonais. 28 novembre 1806 : Après les victoires remportées en octobre sur la Prusse à Iéna et à Auerstaedt, les troupes napoléoniennes font leur entrée dans Varsovie. Napoléon crée une commission provisoire de gouvernement. 1807 : Le traité de Tilsitt, conclu entre Napoléon et le tsar Alexandre Ier ne remet pas en cause le statut de la Pologne sous domination russe. Napoléon constitue par ailleurs un grand-duché de Varsovie représentant 40 000 km2 et 2 600 000 habitants, confié initialement à l’administration du roi Frédéric-Auguste de Saxe. Le servage est aboli mais la noblesse maintient sa domination sur les masses paysannes. Le Code civil français est introduit dans le nouvel État. De nombreux Polonais rejoignent l’armée impériale et s’illustrent à Somosierra en 1808 en ouvrant à l’empereur la route de Madrid ; au total, près de 200 000 Polonais auront combattu dans les armées de la Révolution et de l’Empire, parmi lesquels le plus célèbre d’entre eux, le prince Joseph Poniatowski tué en octobre 1813 à l’issue de la bataille de Leipzig. 1809 : À la faveur de la reprise de la lutte entre Napoléon et l’Autriche, le grand-duché de Varsovie s’accroît de nouveaux territoires avec Lublin et Cracovie et passe à 4 millions d’habitants. 1812 : Une Diète extraordinaire décide la formation d’une Confédération générale du Royaume de Pologne et de Lituanie mais Napoléon l’ignore et se contente d’utiliser les forces polonaises dans la campagne de Russie. 1815 : Au Congrès de Vienne, personne ne songe à rendre son indépendance à la Pologne. La Poznanie revient à la Prusse, l’empereur de Russie obtient à titre personnel le royaume de Pologne, c’est-à-dire le reste du grand-duché de Varsovie, avec la capitale. L’Autriche récupère la Galicie mais Cracovie est proclamée ville libre à perpétuité, indépendante et strictement neutre. C’est donc sur le minuscule territoire de cette république de Cracovie que survit la Pologne mais l’acte final du Congrès de Vienne précise que « les Polonais, sujets respectifs de la Russie, de l’Autriche et de la Prusse, obtiendront une représentation et des institutions nationales […] », les traités laissant aux trois puissances le choix du « mode d’existence politique qu’elles jugeraient utile et convenable d’accorder à leurs sujets polonais ». 1815 : Premier statthalter prussien, le prince Radziwill entreprend la germanisation de la Pologne prussienne et remplace le Code Napoléon par le code prussien. On enseigne désormais en langue allemande dans les écoles. Alexandre Ier accorde une Charte constitutionnelle qui rattache le pays à la Russie par un simple lien dynastique et il se fait couronner en Pologne. Une Diète polonaise devait être élue et une armée polonaise de 30 000 hommes est constituée mais le vice-roi, le grand-duc Constantin, frère du tsar, établit un régime policier. 1823 : L’historien nationaliste Joachim Lelewel est chassé de sa chaire de l’Université de Wilno qui apparaît alors comme l’un des principaux foyers de la résistance nationale. 1825 : La répression se durcit avec l’avènement du tsar Nicolas Ier. Des sociétés secrètes nationalistes se développent, telle celle des Philomathes dont Adam Mickiewicz a été, dès 1817, l’un des dirigeants. La plus importante de ces organisations, fondée en 1821, est la Société patriotique nationale qui noue en 1823 des relations avec les décembristes russes. L’échec de ceux-ci, en décembre 1825, aggrave la méfiance du pouvoir vis-à-vis des Polonais. 1828 : Formation d’une conjuration dirigée par Piotr Wysocki à l’École des officiers de Varsovie. 29 novembre 1830 : Les insurgés attaquent le Belvedere de Varsovie, résidence du grand-duc. Varsovie est libérée mais les princes Drucki-Lubecki et Czartoryski s’emparent du pouvoir et lancent, au nom de Nicolas Ier un « manifeste à la nation » réclamant la cessation des combats. Placé à la tête de l’insurrection, le général Chlopicki, un ancien des campagnes de 1794, d’Espagne et de Russie, ne fait rien pour disperser les troupes russes. Il faut la pression de la Société patriotique et de l’opinion publique pour que la Diète vote le 26 janvier 1831 la déchéance de Nicolas Ier et constitue un gouvernement national de cinq membres. 25 février 1831 : Chlopicki arrête les Russes à Grochow mais est grièvement blessé. Ses troupes sont ensuite vaincues à Ostrolenka et échouent le 19 juin devant Wilno. 6 septembre 1831 : Les forces russes du général Paskievitch s’emparent de Varsovie. La répression est très violente. L’Université de Wilno et le lycée de Krzemieniec sont fermés. La langue russe est rendue obligatoire dans les écoles et les tribunaux. Des mills de Polonais émigrent alors, dont beaucoup en France, perçue comme la « patrie de la liberté ». La charte de 1815 est abolie et, en 1833, le royaume de Pologne – dont Paskievitch est nommé gouverneur – est rattaché à la Russie comme « partie inséparable de cet Empire ». Alors que la noblesse, soucieuse de préserver sa situation dominante, est prête à tous les compromis avec le régime tsariste, les masses paysannes comprennent que leur émancipation ne peut naître que de la lutte contre les Russes et les grands propriétaires. Comme ils s’étaient mobilisés en faveur de la Grèce quelques années plus tôt, écrivains et intellectuels – Musset, Hugo, Montalembert, Vigny, Béranger – se déclarent favorables à la cause polonaise et, quand le général Sébastiani constate à la Chambre que « l’ordre règne à Varsovie », La Fayette lui répond que « toute la France est polonaise ».On accueille triomphalement les proscrits, on chante partout La Varsovienne de Casimir Delavigne et l’on critique la passivité du gouvernement de Louis-Philippe. En Angleterre, un groupe d’exilés installé à Portsmouth et à Saint Hél, dans l’île de Jersey, fonde les Communes du peuple polonais dont l’activité est importante jusqu’en 1840. 26 février 1832 : Nicolas Ier considère que les Polonais, en se rebellant, ont d’eux-mêmes aboli la constitution du royaume mais il leur accorde un « statut organique » reconnaissant l’autonomie des communes mais ouvrant l’administration polonaise aux Russes. 1832 : Création à Paris de la Société démocratique polonaise. Contre le groupe d’émigrés de l’hôtel Lambert réuni autour du prince Adam Czartoryski – qui compte sur l’action diplomatique et sur une guerre européenne pour créer les conditions d’une résurrection de la Pologne, sans se préoccuper de la condition paysanne – la Société démocratique, dirigée par l’historien Lelewel, Palaski et Janowski, lie l’indépendance à une révolution sociale. 1833 : Adam Mickiewicz publie en France ses Livres de la nation et du pèlerinage polonais, suivis en 1834 de Messire Thadée. Ami de Michelet et d’Edgard Quinet, chargé de cours au Collège de France, il incarne alors les espoirs de la Pologne écrasée. 1842 : Le pape Grégoire XVI qui, par zèle absolutiste, a condamné l’insurrection de 1831, dénonce les persécutions infligées par le régime tsariste aux catholiques polonais. 1843 : Constitution, en Posnanie prussienne, à l’initiative de Ludvik Mieroslavski, d’un comité central qui conçoit un plan d’insurrection générale pour les trois Pologne mais les conjurés sont arrêtés. À la même époque, une Union du peuple polonais dirigée par Édouard Dembowski et Henri Kamienski entend préparer la révolution sociale, de même qu’un mouvement paysan qui, dirigé par l’abbé Piotr Sciegenny, déclenche une jacquerie à l’automne de 1844. 21 février 1846 : Insurrection de Cracovie. Constitution d’un gouvernement national sous la présidence de Jean Tyssovski, bientôt rejoint par Jean Dembowski, tué au cours d’une attaque menée par les Russes et les Autrichiens. La République de Cracovie avait appelé à l’insurrection toute la Pologne, annoncé la réforme agraire et conféré les droits civiques aux juifs ; mais son existence fut éphémère et la répression entraîne son annexion à l’Autriche. 20 mars 1848 : Mieroslavski est libéré de sa prison par les Berlinois insurgés. Un Comité national de libération est créé à Poznan, dirigé par Jacob Krotowski. 5 avril 1848 : Le comte de Bismarck affirme devant le Landtag de Prusse que « la reconstitution de l’État polonais dans ses frontières de 1772 est impossible ». Au Parlement de Francfort, le député démocrate allemand Jordan affirme quelque temps après que « le premier jour de l’indépendance de la Pologne serait le premier jour d’une lutte à mort avec l’Allemagne ». 11 avril 1848 : Désireux de gagner du temps, le gouvernement prussien fait mine de rechercher une solution pacifique, promet l’autonomie du grand duché de Poznan et négocie avec « la vermine polonaise » l’accord de Jaroslawiec par lequel les Polonais acceptent de renvoyer dans leurs foyers les 15 000 combattants qui se sont mobilisés pour la cause de l’indépendance. 15 mai 1848 : Grande manifestation parisienne en faveur de la Pologne. Novembre 1848 : Les Autrichiens reprennent le contrôle de la Galicie où l’avocat Smolka avait constitué à Leopol un Conseil national qui avait obtenu l’abolition des corvées. Mars 1849 : La dissolution de l’Assemblée constituante autrichienne met un terme aux espoirs d’autonomie des Polonais de Galicie. De nombreux Polonais combattent encore dans les rangs des insurgés hongrois mais ceux-ci sont écrasés par les forces autrichiennes et russes. 1855 : La mort de Nicolas Ier fait naître des espoirs car Alexandre II est présenté comme un tsar réformateur mais il n’accorde qu’une amnistie partielle et déclare à Varsovie qu’il « entend maintenir l’ordre établi par son père ». 1856 : La question polonaise n’est pas posée lors du Congrès de Paris qui conclut la guerre de Crimée. 1861 : La Galicie autrichienne obtient un statut d’autonomie. Le polonais remplace l’allemand dans l’administration. Un chancelier polonais, le comte Goluchowski, est même placé à la tête du gouvernement impérial en 1860 et les Polonais de Galicie manifestent alors leur loyalisme à l’empire Habsbourg qui ne les prive pas de leurs droits nationaux. Les universités de Cracovie et de Léopol sont polonisées en 1870 et 1874 et c’est la Galicie qui devient à cette époque le foyer principal de l’identité polonaise. 22 janvier 1863 : Formation d’un gouvernement provisoire polonais, issu du Comité national insurrectionnel constitué au cours des mois précédents. Le soulèvement national, consécutif à la volonté de recruter les jeunes Polonais dans l’Armée russe, a commencé dès 1862 La guérilla se généralise dans toute la Pologne russe mais Bismarck et le tsar, en signant la convention d’Alvensleben, ont imposé un blocus total des régions insurgées. Commandés par Traugutt, les rebelles reçoivent de nombreux soutiens extérieurs, tels l’instituteur français Roquebrune ou l’institutrice alsacienne Antoinette Lix. Le comité national dirigé par Iaroslaw Dombrowski établit des relations avec les organisations révolutionnaires russes. avec lesquelles un accord est conclu pour fixer au cours du Bug les futures frontières de la Pologne – ce qui constituait, pour les Polonais, un renoncement aux frontières de 1772. Après que Dombrowski a été arrêté par la police tsariste, c’est le général Mieroslavski qui reçoit le haut commandement mais la défaite est inéluctable et entraîne une nouvelle répression : 18 000 déportations en Sibérie, les « pays de la Vistule » divisés en dix gouvernements remplacent le « royaume de Pologne » et forment une province russe. Avril 1864 : Traugutt est arrêté et pendu à Varsovie, avec quatre membres du gouvernement insurrectionnel. 1869 : Russification de l’Université de Varsovie. 1871 : Après avoir été nombreux à combattre au sein des forces françaises contre l’ennemi prussien, environ 600 d’entre les volontaires polonais participent également à la Commune de Paris dont Dombrowski sera le dernier chef militaire. Après avoir protesté contre l’intégration du grand duché de Poznan à la Confédération d’Allemagne du Nord, les patriotes polonais s’indignent de son intégration au Reich allemand né à Versailles. Durant le Kulturkampf, les catholiques polonais font bloc avec les catholiques allemands. La résistance polonaise est alors conduite, à Poznan, par l’archevêque Ledochowski. 1875 : Le dernier diocèse grec catholique de Chelm est donné par les Russes à l’Église orthodoxe. Tout rapport de l’Église catholique polonaise avec le Vatican est interdit depuis 1870. Plus de cent monastères ont été fermés au lendemain de l’insurrection de 1863. 1880-1914 : Plus de 600 000 Polonais émigrent durant cette période vers les États-Unis. Ils sont aussi nombreux à chercher du travail en Allemagne alors que le Canada et le Brésil accueillent eux aussi de nombreux immigrants d’origine polonaise. Ce sont surtout des intellectuels, des émigrés « politiques » qui se rendent alors en France. C’est notamment le cas de Marie Sklodowka, la future Marie Curie. 1862-1910 : La proportion des illettrés passe de 64 à 82 % de la population de la Pologne russe en raison des obstacles opposés à l’enseignement en polonais. Le clergé polonais se voit interdire d’enseigner la religion catholique dans les écoles primaires. Des peines sont édictées contre l’enseignement clandestin du polonais. 1881 : Création à Lwow du Parti ouvrier galicien, suivie en 1893 de celle du Parti ouvrier polonais. 1886 : Une commission de colonisation est instituée pour favoriser l’implantation allemande en Poznanie et des lois d’expropriation sont promulguées – et renouvelées en 1904 et 1908 – mais la création en 1888 de la Banque Foncière de Poznan permet aux propriétaires et aux paysans polonais de réagir contre la politique allemande d’achat des terres polonaises. 1886 : Fondation à Varsovie de la Ligue nationale polonaise puis, en 1897, du Parti national démocrate. 1892 : Fondation à Paris du Parti socialiste polonais présidé par Limanowski. 1901 : Henryk Sienkiewicz, le célèbre romancier auteur de Quo Vadis, révèle l’affaire de Wresznia : en 1895, des écoliers polonais qui refusaient de dire la prière en allemand ont vu leurs parents condamnés à des peines de prison et à des amendes. 1902 : En Galicie autrichienne, les étudiants ukrainiens qui réclamaient une université où l’enseignement serait dispensé dans leur langue mettent à sac celle de Léopol. En 1908, un étudiant ukrainien assassine le gouverneur de Galicie. Avec 3 350 000 Ruthènes (ou Ukrainiens) 870 000 juifs et 3 750 000 Polonais, l’identité de la région soulève un problème, même si le suffrage universel restreint garantit une majorité polonaise à la Diète galicienne de Léopol. Les Polonais sous domination russe accusent par ailleurs le régime tsariste de soutenir contre eux l’éveil national des Lituaniens et des Biélorussiens. Janvier-juin 1905 : Début de la grève des écoliers en Pologne russe pour réclamer la polonisation de l’enseignement. Le mouvement gagne ensuite la Poznanie, la Poméranie et la Silésie allemandes où il se poursuit jusqu’en 1906 malgré les menaces et les sanctions. 26 janvier 1905 : Début de la grève générale en Pologne sous domination russe, en liaison avec la crise révolutionnaire que connaît la Russie pendant plusieurs mois. Avril 1906 : Les élections à la Douma sont un triomphe pour le parti national démocrate, qui enlève les 36 sièges des « pays de la Vistule », auxquels s’ajoutent 20 sièges en Lituanie et dans les provinces ruthènes, mais l’Assemblée est dissoute en juillet. Les députés polonais demeurent nombreux dans la deuxième Douma de 1907 mais ils ne seront que 18 dans la troisième Douma issue d’une réforme du code électoral. Août 1914 : La Pologne devient le théâtre du conflit qui oppose la Russie aux empires centraux. Joseph Pilsudski prend initialement le parti de l’Allemagne et de l’Autriche-Hongrie contre la Russie mais il s’en éloigne en abandonnant son commandement en octobre 1916 et en faisant mener à ses « légionnaires polonais » une guerre de partisans contre les armées des puissances centrales. Il est interné en 1917 à Magdebourg où il demeure prisonnier jusqu’en novembre 1918. 28 mars 1917 : Au lendemain de l’effondrement du tsarisme, le gouvernement provisoire russe reconnaît le droit à l’indépendance des minorités nationales de l’empire. 3 novembre 1917 : Les bolcheviks promulguent un décret confirmant le droit des peuples de l’ancien Empire russe à disposer d’eux-mêmes, y compris le droit « de se constituer un État indépendant ». 8 janvier 1918 : Dans ses Quatorze points le président américain Wilson inclut l’indépendance et l’accès à la mer de la Pologne. 3 mars 1918 : Le traité de Brest-Litovsk met fin à la guerre à l’est. 3 juin 1918 : Les gouvernements de France, de Grande-Bretagne, des États-Unis et d’Italie publient une déclaration commune dans laquelle ils soulignent la nécessité de créer un État polonais. 29 août 1918 : Les bolcheviks dénoncent tous les traités de partage conclus par la Russie tsariste avec la Prusse et l’Autriche. 7 novembre 1918 : Constitution, dans la ville de Lublin, d’un gouvernement populaire provisoire de la République polonaise. Il réunit des représentants des partis ouvriers (PPS et PPSD) et paysans (mouvement Libération et Piast) ainsi que de l’Organisation militaire polonaise de Pilsudski. Formation du gouvernement Moraczewski, remplacé bientôt par celui d’Ignace Paderewski. Le 28 novembre un décret prévoit l’élection d’une Diète constituante. Janvier 1919 : Les premières élections à la Diète polonaise voient la victoire des partis de droite avec 107 nationaux démocrates sur 337 députés, qui fixent à 400 hectares la limite inférieure de la superficie des exploitations soumises au partage des terres, contre 50 prévus initialement. 20 février 1919 : La Diète élit Pilsudski chef de l’État et vote la « petite Constitution ». Théoriquement responsable devant l’Assemblée, Pilsudski jouit en fait d’une liberté à peu près totale. 28 juin 1919 : Le traité de Versailles confirme la renaissance de la Pologne, qui aura avec l’Allemagne 1900 km de frontières. La question de Silésie, qui aurait dû être réglée par le plébiscite du 20 juin 1921, celle du district d’Allenstein en Prusse orientale, réglée au profit de l’Allemagne par le plébiscite de juillet 1919, le statut de ville libre attribué à Dantzig (Gdansk), le tracé du « corridor » garantissant l’accès à la Baltique et l’existence de minorités allemandes et polonaises dans les deux États créaient les conditions des difficultés futures. 1919 : Pilsudski engage la guerre contre la Russie soviétique. Les Polonais s’avancent jusqu’à Kiev le 7 mai 1920 mais sont contraints de se replier devant la puissante contre-offensive de l’Armée rouge. Un comité révolutionnaire polonais provisoire est constitué à Bialystok à l’initiative des bolcheviks et lance le 30 juillet 1920 un « manifeste aux masses laborieuses polonaises » en vue de l’établissement d’un régime socialiste. L’intervention d’une mission militaire française commandée par le général Weygand et dont fait partie le capitaine De Gaulle permet à l’armée polonaise de remporter la victoire sur l’Armée rouge de Toukhatchevski et de Boudienny et ce « miracle de la Vistule » (15 août 1920) conduit les Polonais à refouler les Soviétiques à 400 km plus à l’est. En 1919, l’annulation par la Conférence de la Paix réunie à Paris du traité germano-russe de Brest-Litovsk a contraint les Alliés à tracer la ligne Curzon – du nom du ministre britannique des Affaires étrangères – fixant la limite orientale des « régions à majorité polonaise ». Fixée sur le Bug, elle passe par Grodno et Brest-Litovsk et aboutit aux Carpates à l’est de Przemysl. Le Conseil suprême de l’Entente a confirmé la fixation de cette frontière le 4 décembre 1919 et la conférence de Spa réunie en juillet 1920 l’a confirmée de nouveau. 15 juillet 1920 : Vote d’une loi agraire qui exproprie une partie des grands domaines contre indemnité mais la petite paysannerie ne dispose toujours que d’exploitations trop réduites. 74 % des Polonais vivent alors de l’agriculture et 11 % de l’industrie. 21 février 1921 : Signature d’une convention militaire franco-polonaise garantissant les frontières du nouvel État contre l’Allemagne et la Russie. Pour la France, il s’agit d’une alliance de revers classique contre l’Allemagne – mais la Pologne ne se joindra pas à la Petite Entente réunissant Tchécoslovaquie, Roumanie et Yougoslavie – en même temps que de la formation du « cordon sanitaire » face à une Russie soviétique qui espère alors exporter la révolution dans toute l’Europe. 17 mars 1921 : Vote de la nouvelle constitution : un système bicamériste avec une Diète et un Sénat élus au suffrage universel qui, réunis, élisent le président de la République. Celui-ci a le pouvoir de dissoudre la Diète, avec l’accord des trois quarts du Sénat. La constitution introduit le droit aux assurances sociales et à la journée de travail de huit heures. Les droits nationaux des minorités sont reconnus. 18 mars 1921 : Alors que les combats russo-polonais se sont conclus avec l’armistice du 12 octobre 1920, le traité de Riga fixe la frontière polono-soviétique selon le projet « jagellonien » de Pilsudski. La Pologne retrouve sa frontière de 1793 et justifie les annexions réalisées à l’est de la ligne Curzon par la présence de majorités catholiques dans ces régions. La Pologne dispose désormais d’une frontière de 1400 km avec la Russie soviétique. 20 octobre 1921 : Le Conseil des ambassadeurs de la Société des Nations partage la Silésie entre Allemands et Polonais. Quand les frontières polonaises sont définitivement fixées, le pays compte 389 000 km2, avec seulement 70 km de littoral, correspondant à l’extrémité du « corridor de Dantzig ».

De l’indépendance retrouvée à la seconde guerre mondiale (1921-1945)

5 novembre 1922 : Élections générales dans l’ensemble de la Pologne. 16 décembre 1922 : Une semaine après son élection, le président de la République Narutowicz est assassiné. Il est remplacé par Stanislas Wojciechewski qui occupera cette fonction jusqu’en mai 1926. Mai 1923 : Joseph Pilsudski, qui était chef d’état-major général se retire de la vie politique quand s’installe le ministère dirigé par Vincent Witos. Octobre 1925 : L’accord de Locarno inquiète la Pologne. L’Allemagne reconnaît en effet ses frontières occidentales mais ne s’engage pas sur ses frontières orientales. 28 décembre 1925 : Vote d’une nouvelle loi de réforme agraire qui ne sera qu’incomplètement appliquée. 12 mai 1926 : Un coup d’État militaire porte Pilsudski au pouvoir. Celui qui fait figure de héros national s’est insurgé contre un gouvernement de centre-droit ; il est soutenu initialement par la gauche, y compris par le parti communiste fondé en 1918. Pilsudski n’est officiellement que ministre de la Guerre mais il est de fait « l’homme fort » du pays. Le pouvoir exécutif est renforcé et les pleins pouvoirs accordés au gouvernement jusqu’au terme de la législature. 1928 : Lors des élections législatives, le « Bloc hors-parti de collaboration avec le gouvernement » obtient 122 députés. Il est le premier parti du pays, talonné par les partis de gauche, alors que les partis de droite s’effondrent. Mars 1930 : Le docteur Bartel – qui souhaitait le respect du régime parlementaire – est congédié et c’est le colonel Slawek, partisan d’un pouvoir autoritaire, qui l’emporte au sein du Bloc et devient premier ministre. Août 1930 : Pilsudski devient président du Conseil, c’est-à-dire Premier ministre, et fait arrêter les leaders de l’opposition de gauche. Aux élections de novembre 1930, le Bloc l’emporte et obtient la majorité absolue. 1930 : La crise mondiale frappe la Pologne où l’indice de production passe de 100 en 1928 à 46,5 en 1933. La crise ruine les efforts de stabilisation du zloty et le programme d’industrialisation lancé au milieu des années trente sera interrompu par le déclenchement de la guerre. 1931 : La Pologne renouvelle le traité d’alliance conclu avec la Roumanie dix ans plus tôt et confirmé en 1926. Janvier 1932 : Signature d’un pacte de non agression polono-russe. Janvier 1934 : Signature d’un pacte de non agression entre la Pologne et l’Allemagne hitlérienne. Avril 1935 :Vote d’une nouvelle constitution renforçant les pouvoirs du chef de l’État. Mai 1935 : Mort du maréchal Pilsudski. Le poids des militaires s’accroît face à l’agitation de gauche qui grandit. Octobre 1938 : À la faveur des accords de Munich qui officialisent le retour au Reich des minorités allemandes des Sudètes, la Pologne reprend à la Tchécoslovaquie la région de Teschen. 6 novembre 1938 : De nouvelles élections confirment les résultats de celles de 1935. Les nationalistes dominent la vie politique. 15 mars 1939 : La disparition de l’État tchécoslovaque entraîne au sud de la Pologne la naissance d’une Slovaquie indépendante laissée à l’Allemagne, ce qui constitue une menace pour la Pologne, entourée désormais d’États hostiles.Le régime militaire dit « des colonels » – dans lequel le maréchal Rydz-Smigly et le colonel Beck jouent un rôle prépondérant – est farouchement anticommuniste. Il a approuvé l’intervention de l’Allemagne dans la guerre civile espagnole et craint autant le péril soviétique que les tentations expansionnistes de Hitler. 27 mars 1939 : Ribbentrop signifie à l’ambassadeur polonais Lipski que l’Allemagne revendique le retour de Dantzig au Reich, ainsi que l’octroi d’une voie ferrée et d’une autoroute bénéficiant d’un statut d’extraterritorialité à l’intérieur du « corridor », pour relier l’Allemagne à la Prusse orientale. Le 31 mars, le premier ministre anglais Neville Chamberlain donne sa « garantie » à la Pologne. Un traité d’alliance polono-anglais vient compléter le 25 août l’alliance franco-polonaise remontant à 1921. 23 août 1939 : Le pacte germano-soviétique de non-agression est signé à Moscou. Il augure mal du sort de la Pologne, d’autant que ses clauses secrètes prévoient son partage entre les deux signataires. 1er septembre 1939 : Prétextant des massacres dont serait victime la minorité allemande de Pologne et de l’attaque – une provocation montée en fait par les services allemands – d’une station radio proche de la frontière, l’Allemagne attaque la Pologne. Ce qui entraîne le 3 septembre la déclaration de guerre de l’Angleterre et de la France à l’Allemagne et, le 17 septembre, l’invasion de l’est du pays par l’Armée rouge. La Blitzkrieg allemande révèle vite sa terrible efficacité et la Pologne, attaquée sur toutes ses frontières, succombe en trois semaines de combat. Varsovie capitule le 26 septembre. Un gouvernement polonais en exil vient s’installer en France, à Angers, puis à Londres après la défaite française de mai-juin 1940. Partagée entre Hitler et Staline, la Pologne est de nouveau rayée de la carte mais la résistance s’organise dès 1940. 8 octobre 1939 : Hitler annexe au Reich la moitié du territoire conquis par la Wehrmacht. Un Gouvernement général de Pologne est créé par ailleurs pour administrer les régions comprenant Varsovie et Cracovie. Avril 1940 : Le NKVD – la police politique soviétique héritière de la Tchéka et du GPU – organise à Katyn, près de Smolensk, le massacre méthodique de 4 000 officiers polonais. D’autres seront exécutés en d’autres régions d’URSS, ce qui portera à plus de dix mille le nombre des victimes. L’Allemagne nazie n’est pas en reste et ses Einsatzgruppen liquident une bonne partie des élites polonaises. Avril-mai 1943 : Soulèvement du ghetto de Varsovie contre les occupants allemands. Ceux-ci ont perpétré en Pologne de grands massacres dont furent victimes les Polonais – le pays compte six millions de victimes à l’issue de la guerre – et plus particulièrement les juifs dont beaucoup ont été déportés vers les camps de concentration nombreux sur le territoire polonais : Auschwitz, Birkenau, Belsec… Avril 1943 : Formation de l’Armée populaire communiste qui résiste contre la seule Allemagne alors que l’Armée de l’intérieur dépendant du gouvernement en exil à Londres voit dans l’URSS un pays ennemi au même titre que l’Allemagne. Juillet 1943 : Mort accidentelle du général Sikorski qui était l’âme de la résistance polonaise à l’extérieur ; les Polonais qui poursuivent la lutte à l’étranger prennent une part non négligeable, en Italie et à Arnhem notamment, aux combats engagés par les Alliés anglo-américains pour la reconquête de l’Europe. 21 juillet 1944 : Formation du Comité polonais de libération nationale d’inspiration communiste connu sous le nom de Comité de Lublin. Appuyé par Staline, il entend contester la légitimité du gouvernement en exil établi à Londres. 1er août-2 octobre 1944 : Varsovie s’insurge contre l’occupant allemand mais l’Armée rouge arrivée sur la Vistule attend l’arme au pied que les Allemands écrasent la résistance nationaliste polonaise. 17 janvier 1945 : Les Soviétiques entrent dans Varsovie et y installent le Comité de Lublin. Les Allemands auront évacué l’ensemble de la Pologne en février. Wroclaw (Breslau), en Silésie allemande, résiste jusqu’au 7 mai. 29 juin 1945 : Un gouvernement d’union nationale est constitué à Varsovie, comme cela avait été prévu en février à la conférence de Yalta, mais les Occidentaux s’inquiètent de la mainmise communiste sur le pouvoir. Juillet-août 1945 : La conférence de Potsdam fixe les frontières définitives de la Pologne avec, à l’ouest, la frontière Oder-Neisse (Odra-Nysa), ce qui implique le départ vers l’ouest de plusieurs millions de réfugiés allemands.

La Pologne sous le joug communiste

Décembre 1945 : Premier congrès du Parti ouvrier polonais. Janvier 1946 : Premières transformations du régime économique. Nationalisation de plusieurs milliers d’entreprises. 30 juin 1946 : Les Polonais acceptent aux deux tiers, lors d’un référendum, les réformes économiques et sociales engagées par le nouveau pouvoir. Janvier 1947 : Premières élections à la Diète. Elles voient une large victoire des communistes et de leurs alliés mais on doute en Occident de la régularité du scrutin. 7 février 1947 : Formation du gouvernement Cyrankiewicz. Boleslav Bierut devient président de la République populaire de Pologne. 19 février 1947 : Vote de la « Petite constitution ». Septembre 1947 : C’est à Szwarkla Poreba, en Pologne, qu’est créé le Kominform organe de consultation des différents partis communistes, et que Jdanov définit, au nom de Staline, les grandes tendances de la guerre idéologique désormais engagée avec l’Occident. Automne 1947 : Mikolajczyk, chef du parti paysan d’opposition, prend le chemin de l’exil. 1947 : Le nouveau régime lance le plan triennal nécessaire à la reconstruction du pays ; l’indice de production est passé de 100 en 1938 à 15 en avril 1945. Août 1948 : Destitution de Wladislaw Gomulka, l’une des figures les plus marquantes de la résistance communiste. Elle intervient dans le cadre de la normalisation voulue par Staline des différents partis communistes, invités désormais à s’aligner inconditionnellement sur Moscou. Bierut devient premier secrétaire du Parti ouvrier et le restera jusqu’à sa mort, en 1956. 15 décembre 1948 : « Fusion » du Parti socialiste polonais et du Parti ouvrier polonais. Le nouveau Parti ouvrier polonais unifié a pour doctrine le marxisme-léninisme. Le Parti paysan unifié et le Parti démocrate qui « appuient le programme d’édification du socialisme » ne sont que des alibis pour le Parti ouvrier polonais unifié qui gouverne le pays. 20 mars 1950 : Les biens fonciers et immobiliers des communautés religieuses passent sous le contrôle de l’État. 14 avril 1950 : L’accord conclu entre le régime et l’épiscopat laisse à l’Église catholique la liberté d’enseigner. Elle s’engage pour sa part à soutenir la « construction du socialisme », mais le cardinal Wyszynski est arrêté en septembre 1953. 22 juillet 1952 : Vote de la nouvelle constitution. Mars 1953 : Mort de Staline. Mars 1954 : Deuxième congrès du Parti ouvrier Polonais unifié. 14 mai 1955 : Traité créant le Pacte de Varsovie, organisation militaire intégrée regroupant l’URSS et ses satellites est-européens. Février 1956 : Le XXe Congrès du Parti communiste d’URSS voit Khrouchtchev dénoncer les crimes de Staline. La mort de Bierut permet le retour au premier plan de Gomulka, rappelé en octobre à la tête du Parti. Les émeutes de Poznan (juin) inquiètent les Soviétiques mais sont réprimées par le pouvoir polonais – 54 morts et 300 blessés – alors que l’Armée rouge intervient à Budapest pour écraser en novembre la révolution hongroise. Commandant de l’armée polonaise, le maréchal soviétique Rokossovski est renvoyé en URSS et le cardinal Wyszynski est libéré. 1960 : La Pologne, élue l’année précédente au Conseil de sécurité, soumet à l’ONU le plan Rapacki de dénucléarisation de l’Europe centrale. 1968 : Gomulka, l’ancien « communiste national » de 1948, le « libéral » de 1956, prend position contre le « Printemps de Prague » et joue un rôle déterminant, avec l’Allemand de l’Est Ulbricht, pour encourager les Soviétiques à intervenir le 21 août en Tchécoslovaquie. Décembre 1970 : Début des grèves et des émeutes ouvrières de Gdansk, Gdynia et Szczecin. La répression fait des dizaines de morts. Gomulka est écarté du pouvoir et remplacé par Édouard Gierek qui endette considérablement le pays en empruntant en Occident. Décembre 1970 : Voyage en Pologne du chancelier allemand Willy Brandt qui, dans le cadre de son Ostpolitik, est venu reconnaître les frontières germano-polonaises issues de la seconde guerre mondiale. Il se rend également sur les lieux où se trouvait le ghetto de Varsovie. 1975 : La conférence d’Helsinki, qui marque l’apogée de la « détente » ouvre de nouveaux espoirs aux dissidents polonais. 1976 : Une nouvelle Constitution proclame toujours le « rôle dirigeant du Parti » et l’alliance indéfectible avec l’URSS. Novembre 1978 : Le cardinal Wojtyla, archevêque de Cracovie, est élu pape sous le nom de Jean Paul II. 1979 : Voyage triomphal du pape en Pologne. Juillet 1980 : Nouvelles révoltes ouvrières dans les chantiers de la Baltique après la décision du pouvoir d’augmenter les prix alimentaires. Le mouvement s’étend en août. Conduit par Lech Walesa, il parvient à faire plier le pouvoir qui doit concéder les accords de Gdansk. Gierek est écarté et remplacé par Stanislas Kania. Création en septembre du syndicat indépendant Solidarnosc (Solidarité) finalement reconnu par les autorités. Février 1981 : Le général Jaruzelski, ministre de la Défense, devient Premier ministre. Le premier congrès de Solidarité a lieu en septembre à Gdansk. 13 décembre 1981 : Le général Jaruzelski décrète « l’état de guerre » et engage la répression contre Solidarité, sous la pression de dirigeants soviétiques de plus en plus inquiets. 1983 : Lech Walesa reçoit le prix Nobel de la Paix.

De la libération à l’entrée dans l’Europe

Juin 1989 : Premières élections semi-démocratiques depuis la fin de la seconde guerre mondiale. En août, c’est un proche de Solidarité, le catholique Tadeusz Mazowiecki, qui devient Premier ministre. Les démocraties populaires disparaissent les unes après les autres au cours de l’été et de l’automne de 1989 qui voit, le 9 novembre, la chute du mur de Berlin.

Novembre 1990 : Signature à Varsovie du traité germano-polonais garantissant l’inviolabilité de la frontière Oder-Neisse.

Décembre 1990 :  Lech Walesa est élu président de la République avec 74 % des suffrages exprimés. Il succède ainsi au général Jaruzelski.

Avril 1991 : Début du retrait des troupes soviétiques stationnées en Pologne depuis la fin de la seconde guerre mondiale.

Décembre 1991 : Fin de l’URSS. L'année 1991 a vu la mise en place du "Triangle de Weimar" réunissant l'Allemagne, la France et la Pologne

Novembre 1995 : Alexandre Kwasniewski, un ancien communiste, devance Lech Walesa lors des élections présidentielles, avec 51,7 % des voix.

Juillet 1996 : La Pologne adhère à L’OCDE.

1997 : La constitution de 1997 fait de la Pologne une république parlementaire. Le pouvoir exécutif est détenu par le président de la République, élu au suffrage universel pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois . Le premier ministre est choisi par le président avec l'approbation de la Diète (Parlement national polonais, 460 députés élus au suffrage universel), qui partage le pouvoir législatif avec le Sénat, composé de cent sénateurs. Députés et sénateurs sont élus pour un mandat de quatre ans.

Juillet 1997 : La Pologne est admise dans l’OTAN, avec la Hongrie et la République tchèque ; l’adhésion de ces trois pays est effective en mars 1999.

2001 : Disparition de l'Alliance électorale de Solidarité. Fondation du parti Droit et Justice des frères Lech et Jaroslav Kaczynski. Le parti libéral de centre-droit la Plate Forme Civique est le parti de Donald Tusk. L'Alliance de la Gauche Démocratique est un parti social-démocrate.

2002 : Fondation de la Ligue des familles polonaises qui représente la droite nationaliste.

2002 : Le sommet de Copenhague débouche sur l'accord prévoyant l'admission de la Pologne et de neuf autres pays au sein de l'Union Européenne en mai 2004.

2003 : La Pologne se solidarise avec les États-Unis à propos de la crise irakienne, au point qu'elle accueillera sur son sol des prisons clandestines de la CIA. La même année, le gouvernement polonais fait le choix d'acheter 48 avions américains F16 pour équiper ses forces aériennes plutôt que l'avion suédois Jas-39 Grippen de SAAB et l'avion français Mirage 2000 - 5 de Dassault, un choix qui semble acter le fait que la défense européenne sera pour l'essentiel assurée par des matériels américains.

Décembre 2003 : Au sommet européen de Bruxelles la Pologne exige le maintien au sein de l'Union de la règle de l'unanimité.

2004 : La Pologne rejoint, avec dix autres États d’Europe orientale et méditerranéenne l’Union européenne.

2007 : Lors des élections d'octobre, Donald Tusk l'emporte avec 41% des voix sur les conservateurs de Droit et Justice. Jaroslav Kaczynski, au pouvoir depuis deux ans, cède sa place de premier ministre à D. Tusk. Ce résultat est confirmé lors des élections européennes de juin 2009.

2007-2013 : Les aides communautaires apportées par l'Europe à la Pologne se sont élevées à près de treize milliards d'euros (1,8% du PIB du pays) entre 2004 et 2006 c'est à dire la moitié des aides allouées sur la période 2004-2006 aux dix nouveaux Etats entrés dans l'Union en 2004. Pour la période 2007-2013, les chiffres s'élèvent à 60 milliards d'euros auxquels s'ajoutent 27 milliards au titre de la Politique Agricole Commune, 4 milliards pour la mise en oeuvre du traité de Lisbonne et près de 600 millions d 'euros pour le pôle Justice et affaires intérieures. Ces aides ont contribué à la forte croissance que connaît la Pologne dans une Europe en crise mais le pays doit toujours faire face aux problèmes de corruption.

2008 : Varsovie rapatrie les soldats polonais engagés en Irak aux côtés des Américains.

2009 : Le président américain Obama renonce à développer en Pologne et en République tchèque un système anti-missiles prétendument tourné contre l'Iran mais dont les Russes considèrent qu'il est en fait tourné contre eux.

2010 : L'avion présidentiel transportant le président de la République Lech Kaczynski et de nombreux dirigeants polonais (en tout 96 passagers) s'écrase près de Smolensk, en Russie, alors que le président et sa suite se rendaient à la célébration du soixante-dixième anniversaire du massacre de Katyn, perpétré en 1940 par les Soviétiques.

2011 : La Pologne accède à l'été à la présidence pour six mois du Conseil de l'Union Européenne. Le fait qu'elle n'appartienne pas à la zone euro limite cependant ses capacités d'intervention.Elle compte en revanche faire avancer le partenariat oriental visant à développer l'action et l'influence de l'UE dans les anciennes républiques soviétiques telles que la Moldavie, l'Ukraine, la Biélorussie ou la Géorgie.

2013 : Le sommet du Partenariat oriental de Vilnius, a réuni en novembre les 28 pays de l'Union Européenne et les six pays de l'espace ex soviétique et s'est conclu sur un échec, suite au refus de l'Ukraine de signer un accord d'association avec l'UE pour préférer l'Union douanière eurasiatique mise en place par la Russie.
En décembre la Russie déploie dans l'enclave de Kaliningrad des missiles Iskander.

2014 : L'OTAN met en place une mission de surveillance aérienne censée rassurer les pays baltes et la Pologne, dans le contexte de la crise ukrainienne. Des Rafale français sont stationnés à partir du 28 avril sur la base polonaise de Malbork. Mais l'année 2014 est surtout marquée par le développement de al crise ukrainienne. Alors qu'un compromis avait été trouvé entre le président ukrainien Janoukovitch et ceux qui lui reprochaient de préférer l'Union eurasienne souhaitée par Vladimir Poutine à l'association commerciale avec l'Union Européenne, le coup de force des émeutiers de la place Maïdan a mis en place à Kiev un pouvoir insurrectionnel immédiatement reconnu par les Etats-Unis et leurs alliés européens qui avaient pourtant cautionné le compromis établi quelques jours plus tôt. La Russie réagit en occupant la Crimée et en y organisant un référendum qui aboutit au rattachement de la région à la mère-patrie russe , en même temps que des républiques dissidentes sont proclamées dans l'est ukrainien russophone. Dans ce contexte, la Pologne, inquiète des visées expansionnistes russes apparaît en pointe pour réclamer une puissante réaction américaine et européenne. Une position cohérente avec son attitude vis à vis du Partenariat oriental et avec le soutien qu'elle a accordé à la révolution ukrainienne, une partie des émeutiers de Maïdan ayant été formés sur son sol.