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La Birmanie
De Pagan au Myanmar

Généralement réduites à la chronique des difficultés rencontrées par une célèbre dissidente, les informations relatives à la Birmanie diffusées par les grands médias n'ont guère été en mesure, pendant longtemps, de rendre compte de la complexité d’un pays qui, soumis à l’autorité d’une junte militaire dont le comportement pouvait apparaître parfaitement autiste, n’en constitue pas moins un acteur important dans l’espace de l’Asie du sud-est et un enjeu géopolitique de premier ordre pour un allié chinois auquel la Birmanie offre, dans une certaine mesure, une façade d’importance majeure sur les côtes orientales du Golfe du Bengale. Dotée d’une superficie de 678 000 km2, étiré sur 1900 kms du nord au sud, le pays a hérité d’une riche Histoire trop souvent méconnue aujourd’hui. Son unité, à peine réalisée quand est intervenue la conquête britannique au cours du XIXème siècle, apparaît à la fois récente et fragile et les forces centrifuges qui s’exercent aux périphéries du territoire expliquent pour une bonne part la persistance des solutions politiques autoritaires. Devenu le Myanmar, la Birmanie d'aujourd'hui tire encore de l’agriculture 40% de son produit intérieur brut et les organisations internationales la rangent parmi les pays les plus défavorisés de la planète en termes de développement humain. Une situation qu’a aggravée en 2007 le terrible typhon Nargis, venu ravager le grenier à riz du delta de l’Irraouaddy en tuant 138 000 de ses habitants. Les ressources garanties par les exportations d‘hydrocarbures et le dynamisme des activités liées à la construction – favorisées par la volonté de la junte de bâtir à l’intérieur du pays une nouvelle capitale, Naypiydaw qui a remplacé Rangoon - ne suffiront sans doute pas à la Birmanie pour réaliser un décollage devenu plus que jamais nécessaire mais la simple condamnation des dérives du régime militaire, la compassion pour le clergé bouddhique naguère persécuté ou, sur fond de bons sentiments, un regard exclusif sur le sous-développement du pays ne peuvent permettre une véritable intelligence de cette société asiatique trop mal connue des Occidentaux. C’est à l’inverse dans son Histoire qu’il convient d’aller chercher les clés d’interprétation de son présent et les éléments qui permettront d’envisager plus précisément son avenir.

Fleuves, jungles et montagnes

Étendue sur 676 000 km2 de 10 à 28° de latitude nord, la Birmanie, devenue le Myanmar depuis 1989. Outre un littoral ouvert sur le golfe du Bengale et le golfe de Martaba, le pays est aujourd’hui voisin du Bangladesh, de l’Inde, de la Chine, du Laos et de la Thaïlande. Étiré dans sa plus grande longueur sur 1 900 km du nord au sud et de 900 km dans sa plus grande largeur d’ouest en est, le Myanmar présente un relief très accidenté. Au nord du pays, dans les monts Kachin, à la frontière avec le Tibet, le Hakakabo Razi, la montagne la plus élevée de l’Asie du Sud-Est culmine à 5 889 m alors que le Gamlang Razi voisin atteint 5 835 m. À l’ouest, les Paktai Hills et les Naga Hills séparent le pays de l’Assam. Plus au sud, les Chin Hills s’élèvent au mont Victoria à 3 674 m alors que les monts de l’Arakan Yoma séparent la côte du golfe du Bengale (qui abrite le port d’Akyab) de la plaine centrale où coule l’Irraouaddy, le principal fleuve du pays. D’autres formations montagneuses s’étendent à l’est et au sud : le plateau Shan et la chaîne du Tenasserim qui sépare l’étroite bande méridionale du pays de la Thaïlande voisine. Le plateau Shan, et la chaîne du Tenasserim dominent la dépression centrale birmane – formée de la Basse Birmanie (correspondant au delta de l’Irraouaddy où s’élève Rangoon) et de la Haute Birmanie (région de Mandalay) – par un escarpement de faille présentant une dénivellation de 1 000 m. Située au contact de ce puissant accident tectonique, la vallée du Sittang demeure, au sud de la Birmanie centrale, une région potentiellement sismique. Formé de deux plates-formes, le plateau Shan qui s’élève à l’est jusqu’à 1 400 m d’altitude est dominé par des chaînes longitudinales s’élevant à plus de 2 600 m, régions calcaires où la Salouen a creusé l’un des plus longs canyons du monde. Le climat est caractérisé par une chaleur constante, si l’on excepte les hautes montagnes du nord, et par des pluies abondantes, marquées par le phénomène de mousson mais inégalement réparties sur le territoire puisqu’elles sont diluviennes en été sur les monts du Tenasserim ou de l’Arakan alors que la région de Mandalay apparaît beaucoup plus sèche. Abondamment alimentés en eau, les grands fleuves birmans sont l’Irraouaddy qui, long de 2 000 km, prend sa source dans le nord du pays et en descend vers le sud pour y former un vaste delta qui constitue l’un des greniers à riz de l’Asie du sud. Il se jette dans le golfe de Martaban au sud de Rangoon. Navigable toute l‘année sur près de 1 500 km, il a constitué l’axe autour duquel s’est structuré le pays au cours de son histoire. Les autres fleuves importants sont le Chindwin, navigable sur près de 800 km, qui rejoint l’Irraouaddy entre Mandalay et Pagan ; le Kaladan qui traverse, à l’ouest, l’État de Chin jusqu’au golfe du Bengale où il débouche à hauteur d’Akyab ; enfin le Sittang qui se jette comme l’Irraouaddy dans le golfe de Martaban mais plus à l’est, entre Pégou et Thaton. Encore plus à l’est, le Salouen, qui prend sa source en Chine et sépare le Myanmar de la Thaïlande sur toute une partie de son cours, atteint la mer à Moulmein. Enfin, sur une partie de son cours, le Mékong dessine la frontière entre le Myanmar et le Laos. Les caractéristiques géographiques du pays commandent dans une large mesure son évolution historique et ce jusqu’aux événements les plus récents. Le cœur historique de la Birmanie demeure le bassin de l’Irraouaddy, cette plaine centrale où les dynasties successives s’imposèrent, selon les époques, au nord ou au sud du bassin tout en cherchant à contrôler les périphéries montagneuses, domaine des minorités. La lutte contre l’ennemi héréditaire siamois a constitué également une constante de l’histoire birmane mais le pays s’est surtout trouvé confronté à l’expansionnisme anglo-indien à partir de la fin du XVIIe siècle. Alors que la Birmanie était traditionnellement vassale de l’empire du Milieu, elle s’est trouvée incorporée à l’empire des Indes, ce qui a stimulé un nationalisme antibritannique et anti-indien encouragé durant la seconde guerre mondiale par l’occupation japonaise. Devenue indépendante, la Birmanie fut rapidement confrontée aux forces centrifuges que représentent les périphéries occupées par des minorités ethniques, périphéries dont la nature montagneuse ne facilite guère l’établissement d’une autorité centrale. Le poids de ce défi géopolitique intérieur – la lutte des périphéries contre le centre – explique pour une bonne part le neutralisme affiché du pays durant la guerre froide et son retrait jusqu’à aujourd’hui de la scène géopolitique internationale. Longtemps inquiétée par une menace chinoise qui se concrétisait dans le soutien apporté aux maquis communistes et à certaines minorités, la Birmanie s’appuyait alors sur l’URSS pour contrer la pression chinoise et pour tenir à distance les Américains, étroitement liés à la Thaïlande, héritière du Siam et donc son ennemie héréditaire. La situation s’est ensuite largement inversée, Pékin normalisant ses relations avec Rangoon et devenant même son protecteur et son fournisseur d’armes, en échange de facilités navales dans les ports de la côte d’Andaman, ce qui constitue pour la Chine une précieuse possibilité d’accès à l’océan Indien. La Birmanie s’est en outre rapprochée de ses voisins d’Asie du Sud-Est en rejoignant l’ASEAN, ce qui a mis un terme à la traditionnelle hostilité vis-à-vis de la Thaïlande, devenue au contraire un partenaire indispensable. Détournée un temps de son espace géopolitique traditionnel par la colonisation britannique qui l’avait intégrée à l’espace indien, la Birmanie a retrouvé aujourd’hui son espace historique et culturel traditionnel, plus proche de l’Asie du Sud-Est et de l’Est que de l’Asie du Sud.  

Les Birmans et les autres

Représentant 68 % des cinquante millions d’habitants que compte aujourd’hui le pays, les Birmans ont depuis plus d’un millénaire constitué la masse principale de la population installée dans le bassin de l’Irraouaddy, même si les Môn ont été en mesure de bâtir au sud de puissantes constructions politiques. À l’inverse, les « régions frontières » couvrent les trois quarts du pays, même si elles abritent moins d’un tiers de la population. Les Karen (7 % des habitants du pays) constituent la minorité la plus connue, en raison surtout de la longue résistance opposée depuis un demi-siècle aux différents pouvoirs qui se sont succédé à Rangoon. Ils sont installés dans le delta de l’Irraouaddy, dans les monts du Tenasserim et au sud-ouest du plateau Shan. Ils sont divisés en huit ethnies différentes dont plusieurs ont été christianisées, ce qui a contribué à l’écho rencontré par la cause karen en Occident. Les Kayah forment une branche particulière des Karen et c’est à proximité de leur territoire que l’on pouvait rencontrer naguère les célèbres « femmes girafes » (de l’ethnie des Padaung) au cou déformé dès leur plus jeune âge par une série d’anneaux de cuivre. Au nord-est de l’État des Kayah s’ouvre le pays shan. Les habitants (9 % de la population) sont proches des Lao et des Siamois leurs voisins et leurs cousins puisqu’ils sont venus comme eux de Chine du Sud. Ils profitèrent du reflux de la vague mongole pour s’imposer à une Birmanie épuisée du XIVe au XVIe siècle. Installés au nord du pays, les Kachin sont issus de l’ultime vague d’immigrés arrivés de Chine au XVIIIe siècle. Une langue et des coutumes originales leur permettent d’affirmer une forte identité face aux Birmans. Aux limites de l’Assam, à l’ouest de la Chindwin, sont installés les Nagas – peuple inaccessible réputé coupeur de têtes – qui vivent dans une totale autonomie. Les peuples qui occupent les régions frontalières du Bangladesh et de l’Inde sont désignés sous le nom de Chin. Au sud des régions chin, le long du golfe du Bengale, l’étroite bande de terre de l’Arakan abrite un peuple de pêcheurs et de cultivateurs parlant un dialecte birman qui, malgré son adhésion au bouddhisme, demeure plus proche de l’Inde que de la Birmanie, fût-ce dans le cadre des razzias d’esclaves réalisées dans le passé sur les deux rives du golfe du Bengale. Ces Arakanais (ou Rakhines) représentent 4 % de la population. La langue distingue nettement les Môn des Birmans. Les premiers, considérés comme des parents des Khmers cambodgiens, sont surtout installés dans le sud du pays, dans le Tenasserim ou les régions de Moulmein ou de Pégou, centre principal de leur puissance passée. Le relief et la jungle ont permis à de nombreux autres groupes minoritaires de perdurer aux périphéries de l’espace birman, un espace dont l’unité politique fut réalisée à plusieurs reprises mais s’est révélée souvent fragile ou éphémère.

Des origines à l’établissement de la domination birmane

La Préhistoire de la Birmanie demeure mal connue mais certains sites ont livré un matériel archéologique significatif. Dans la vallée de l’Irraouaddy, des industries « anyathiennes » caractérisées par des choppers (coups-de-poing) et des bifaces correspondant au Paléolithique inférieur sont contemporains de la période interglaciaire Riss-Würm et de la glaciation de Würm. Ces vestiges furent découverts en 1937 par Allan L. Movius qui leur donna le nom vernaculaire des habitants de la Haute Birmanie (an-ya-tha). L’est du pays connaît, à la fin du Paléolithique, des industries bacsoniennes ou hoabiniennes qui tirent leurs noms de deux sites importants du nord du Vietnam. Elles correspondent au passage d’une société de chasseurs collecteurs à une société de producteurs. La fouille du site de Spirit Cave, à la frontière entre Birmanie et nord de la Thaïlande, a révélé une industrie hoabinienne associée à des restes de plantes domestiques ou semi-domestiques datées du VIIIe millénaire avant J.-C. C’est au IIIe millénaire avant J.-C. que s’établissent les premiers habitats permanents reposant sur une économie de subsistance avec culture de céréales et de fruits (sites de Kyaukpadaung, Minbu, Yenangyaung et Magwé dans la vallée de l’Irraouaddy). Milieu du Ier millénaire avant J.-C. : Les Môn pénètrent depuis l’est en Basse Birmanie alors que les tribus tibéto-birmanes précédées par les Pyu entrent peu à peu en Birmanie par le nord. Selon les traditions môn et birmanes, la pagode Schwedagon est contemporaine de la vie du Bouddha qui aurait donné quelques-uns de ses cheveux à deux marchands môn qui s’étaient rendus auprès de lui en Inde du Nord avant d’enchâsser à leur retour ces précieuses reliques dans le stupa de Schwedagon. IIIe siècle avant J.-C. : Des missionnaires envoyés par l’empereur indien Açoka répandent le bouddhisme dans le royaume môn de Thaton. Début de l’ère chrétienne : Fondation des royaumes pyu de Beikthano, de Hanlin et de Srikshetra (Prome). Des routes commerciales terrestres reliant l’Inde à la Chine traversent la Haute Birmanie. Développement des voies d’échange dans la péninsule du Tenasserim ; contrôlées par les Môn, elles permettent la liaison entre les espaces maritimes du golfe du Bengale, qui relèvent de l’espace indien, et ceux du golfe du Siam à partir duquel on peut accéder aux routes conduisant vers la Chine. Vers le début du Ve siècle : Les Pyu imposent leur domination aux Môn. La première capitale fut probablement Srikshetra sur le cours inférieur de l’Irraouaddy, la moderne Hmazwa. VIe siècle : Les Môn originaires de l’Inde orientale ou de l’intérieur des terres de l’Asie du Sud-Est s’installent dans les plaines côtières fertiles du delta de l’Irraouaddy en Thaïlande et jusqu’à l’ouest du Cambodge. Les inscriptions qu’ils ont laissées désignent cette région sous le nom de Suvannabhumi ou « pays d’or ». Leur capitale aurait été située aux abords de Thaton, dans l’actuelle Birmanie, mais certains pensent que Suvannabhumi se trouvait dans la région actuellement thaïlandaise de Nakhon Pathom. Début du VIIe siècle : Déclin du royaume de Srikshetra. Les Pyu se replient sur la Birmanie centrale. Émergence du pouvoir birman qui s’impose aux Pyu de Birmanie centrale qui sont dans le même temps dominés par les Môn. Les Birmans forment une population mongoloïde originaire de l’est de l’Himalaya et vont progressivement supplanter les Pyu au cœur du Myanmar (la Birmanie) appelé à devenir le centre politique et culturel principal du pays. 638 : Les Birmans créent leur propre ère qui fournit la base de leur chronologie. 800 : Incursions, en provenance du royaume Lo-lo de Nan Chao (dans le Yunnan) jusqu’à la vallée de l’Irraouaddy. 832 : Destruction du royaume pyu de Halin, dont la prospérité était liée au commerce du sel avec le Yunnan. 849 : Construction, sous le règne du roi Pyinbiya, des murailles de la forteresse de Pagan (Araimaddanapura), la dernière cité-État des Pyu. Le stupa-reliquaire de Bupéya est édifié à Pagan l’année suivante. Vers 950 : Construction, toujours à Pagan, du stupa-reliquaire de Ngakywénadaung.  

L’âge d’or de Pagan

1044 : Les Birmans imposent leur autorité sur la confédération des villages pyu de la plaine de Pagan. Anôratha tue son demi-frère Sokkate et devient roi de Pagan, fondant ainsi une dynastie. Antérieurement animistes, les Birmans adhèrent à un bouddhisme combinant l’héritage du bouddhisme mahayana et des éléments issus du tantrisme. Le pâli, langue sacerdotale du bouddhisme, et le môn deviennent les premières langues de culture du premier Empire birman. 1057 : Conquête de Thaton par Anôratha (Anawrahta). Il réduit en esclavage trente mille habitants qui contribuent à l’évolution de la culture birmane en y greffant l’héritage môn. Il soumet ensuite les Môn de Pégou. Les murailes de Srikshestra sont détruites et les stupas vidés de leurs reliques. Anôratha protège les cultes traditionnels des génies mais encourage aussi le bouddhisme theravâda. Il fait adopter l’alphabet môn. 1058 : Le règne d’Anôratha voit la construction de nombreux stupas à proximité de la cité royale de Pagan. Il entreprend également de développer un système d’irrigation et installe de nombreuses garnisons sur les frontières du Yunnan et du pays shan. Le souverain pratique une politique extérieure active. Il se rend à Dali, la capitale du Yunnan, à Chittagong, au Bengale, et soutient le roi de Ceylan Vijayabâhu Ier dans sa lutte contre les Cholas de Madras. 1077 : Blessé par un buffle au cours d’une chasse, Anôratha meurt et c’est son fils Sôlou qui lui succède. 1083 : Dirigés par le gouverneur Nga Ramankan, les Môn de Pégou se soulèvent contre la domination birmane. Une flotte rebelle remonte l’Irraouaddy jusqu’à Minhla, bat les Birmans et assiège Pagan. Sôlou est assassiné mais, sous le commandement de Kyanzittha, les Paganais résistent et les Môn sont contraints à la retraite après les combats de Myinkaba et de Popa. Nga Ramankan est tué au cours de ce repli. 1084 : Kyanzittha devient roi de Pagan et épouse une princesse môn pour sceller l’alliance entre Môn et Birmans. Il doit ensuite lutter contre les Arakanais révoltés. 1089 : Inauguration de la pagode-reliquaire de Shwézigon que n’avait pu achever Anôratha et qui était destinée à abriter une dent du Bouddha remise à Anôratha par les Cinghalais à la suite de son intervention en leur faveur. 1090 : Encouragé par des moines indiens chassés de leur pays par la conquête musulmane, Kyanzittha entreprend, avec l’aide d’architectes et d’artistes indiens, la construction du temple Ananda qui, achevé en 1105, sera le chef-d’œuvre de l’art birman. 1101-1102 : Kyanzittha fait édifier un nouveau palais, inauguré selon les rituels brahmaniques mais avec des hommages aux cultes des Nagas et en présence de Shin Arahan, le chef spirituel des bouddhistes theravâda. 1112 : Rédaction du premier texte littéraire en langue birmane. Il s’agit d’une inscription quadrilingue (en pyu, môn, pâli et birman) placée sur une stèle qui rend compte de la donation faite à un temple de Myinkaba d’une statue en or du Bouddha et de trois villages, offerts par le prince Râjakuma, un fils de Kyanzittha. 1113 : C’est son petit-fils, Alaungsithou, qui succède à Kyanzittha pour régner jusqu’en 1155. Il conduit de nombreuses expéditions militaires et entreprend d’installer des esclaves comme colons dans les régions situées au nord de l’actuelle Mandalay. 1131 : Le souverain est attentif à l’amélioration du système d’irrigation dans les zones sèches. Il entreprend la réforme des poids et mesures, ainsi que la construction de nombreux temples et pagodes. Il brise la révolte des Tavoyan dans le Tenasserim et déporte les populations vaincues vers la Birmanie centrale pour y contenir la poussée des Shan. Années 1160 : Un conflit éclate avec Ceylan pour des raisons commerciales – les prix des éléphants exportés vers l’île par les marchands birmans sont trop élévés. Les Cinghalais lancent même une attaque contre le port de Pusim-Cosima dans le delta de l’Irraouaddy. 1163 : Narathou assassine Alaungsithou, son frère qui devait lui succéder, sa première femme, son fils et son oncle, et épouse, pour s’emparer du trône, sa belle-sœur, la princesse bengalie de Pataikkaya, qu’il n’hésite pas à tuer ensuite. Il fait construire deux ans plus tard, pour se faire pardonner ses crimes, le temple Dhammayangyi, l’un des plus beaux de Pagan, mais en ruinant ainsi les finances royales. 1167 : Narathou est assassiné à son tour, soit par des agents du roi de Pataikkaya désireux de venger sa fille, soit par des Cinghalais qui auraient, dans le cadre de leur différend commercial, lancé une expédition punitive jusqu’à Pagan. 1167-1170 : Règne de Naratheinka (Narathu). 1173-121 : Règne de Narapatisithou. Il renforce l’armée et les garnisons des zones frontalières pour assurer la sécurité du royaume. 1180 : Normalisation des relations avec Ceylan. Des Cinghalais peuvent même établir un comptoir permanent à Cosima. Les relations religieuses se développent aussi. C’est ainsi qu’un novice birman, Chapata, revient à Pagan, après un séjour de douze années à Ceylan, pour y créer une nouvelle secte bouddhiste. Années 1180 : La langue birmane supplante la langue môn comme langue de cour.Construction de nombreux temples et stupas à Pagan et dans tout l’empire. 1211 : Le plus jeune fils de Narapatisithou monte sur le trône sous le nom de Nadaungmya. Il sera lui aussi un souverain bâtisseur. C’est sous son règne qu’est achevée la construction du temple Gôdôpalin et qu’est commencée celle du temple Mahabodhi. 1215 : Nadaungmya constitue un conseil royal avec ses quatre frères et gouverne avec eux. Pendant ce temps, les Shan fondent la principauté de Mogaung puis celle de Monhyin en 1223, enfin le royaume Ahom de l’Assam en 1229. 1234 : Mort de Nadaungmya. Son fils Kyaswa lui succède. C’est un roi philosophe qui se consacre uniquement aux affaires religieuses et laisse la direction du royaume à son fils Uzanâ. 1249-1254 : Règne d’Uzanâ qui meurt au cours d’une chasse, piétiné par un éléphant. 1254 : L’héritier désigné d’Uzanâ est son fils Thihathou mais sa réputation de cruauté fait que les ministres, à l’initiative de Yazathingan, le plus influent d’entre eux, soutiennent le fils cadet de Kyaswa, Narathihapati, qui monte sur le trône. 1260 : Les Shan s’installent dans les plaines de Birmanie centrale, à Myinsaing. 1271 : Les Mongols, qui se sont installés en Chine à partir de 1253 pour y établir la dynastie Yuan et ont ensuite occupé le Nan Chao – territoire situé au nord-est de la Birmanie et vassal de Pagan depuis le temps d’Anôratha –, exigent que le royaume de « Mien » (nom sous lequel ils désignent Pagan) leur verse un tribut mais Narathihapati refuse de recevoir leurs ambassadeurs. Mars 1273 : Un ambassadeur mongol envoyé de Khubilaï Khan ne respecte pas le protocole birman en refusant d’enlever ses chaussures pendant l’audience que lui accorde le roi : il est exécuté avec les quatre membres de sa suite. 1277 : Narathihapati attaque les groupes shan de la frontière nord-est du royaume qui ont accepté de se reconnaître vassaux de la dynastie sino-mongole de Pékin. Khubilaï ordonne alors au gouverneur du Yunnan de repousser les Birmans, qui sont battus lors d’un combat que Marco Polo évoque dans le récit qu’il a fait de son voyage en Chine. 1280 : Les Môn de Martaban proclament leur indépendance. Décembre 1283 : Perte des postes-frontières birmans de Ngasaunggyan et Kaungsin, suivie de celle de Tagaung. 1284 : La puissance mongole se faisant de plus en plus menaçante, Narathihapati abandonne Pagan et se replie sur Cosima (Bassein), le port maritime du royaume de Pagan dans le delta de l’Irraouaddy. 1285 : Esen-Temûr, le petit-fils de Khubilaï, rassemble une armée pour envahir la Birmanie. 1287 : Narathihapati quitte Cosima pour remonter le fleuve vers Pagan mais il est assassiné par l’un de ses fils, gouverneur de Prome, qui tue aussi son frère aîné. Le dernier fils de Narathihapati, Kyôswa, se réfugie en pays môn. Informés de la mort du roi, les Mongols lancent leur armée sur Pagan que ses habitants ont évacuée mais qui est complètement pillée. À la faveur de ces événements, les Môn recouvrent leur indépendance. 1289 : Kyôswa revient à Pagan mais doit s’allier au chef shan de Myinsaing en attribuant plusieurs vice-royautés à ses fils. 1297 : Kyôswa a perdu le contrôle de la région de Kyauksé qui faisait figure de grenier à riz de l’empire mais qui est passée désormais aux mains des Shan. Attiré à Myinsaing, il est capturé et détrôné par les vice-rois shan sur lesquels il avait cherché à s’appuyer. Les Mongols quittent Pagan où c’est un jeune fils de Kyôswa, Sô Hnit, qui est placé sur le trône par la Cour. 1298 : Les Thaï-Shan, commandés par le prince de Myinsaing, entrent dans la ville qui est de nouveau pillée et incendiée. 1299 : Sô Hnit appelle à l’aide les Mongols. Les frères Shan, qui le détenaient, font mettre à mort Kyôswa. 1301 : Répondant à l’appel du jeune roi de Pagan, une armée mongole vient assiéger Myinsaing dont les princes doivent payer un lourd tribut pour obtenir son départ mais les Mongols reconnaissent le jeune Sô Hnit comme roi de Birmanie. 1303 : Les Mongols quittent définitivement la Birmanie après avoir été à l’origine de la ruine de la puissance de Pagan. Un royaume birman affaibli s’installe à Taungoo (à l’est de Prome). Les Môn établissent une nouvelle capitale à Mottama (Martaban) près de Moumein, à proximité de l’actuelle frontière avec la Thaïlande. Ils la déplacent ensuite à Pégou près de l’actuelle Rangoon (Yangon) et leur royaume prend le nom de Hanthawady.  

De la tempête mongole à la domination britannique

1309 : Thihathou, l’un des frères Shan, se proclame roi de Birmanie. 1312 : Fondation du royaume de Pinya par les Shan. 1315 : Les Shan fondent le royaume de Sagaing. 1347 : Fondation du petit royaume birman de Toungou. 1364 : Chute des royaumes de Pinya et de Sagaing. Fondation d’Ava par les Shan, à proximité de l’actuelle Mandalay. Ils s’efforcent de reconquérir le pays des Môn mais leurs tentatives en ce sens sont contrariées par les rébellions des Shan du Nord établis au nord d’Ava. Entre le royaume shan d’Ava et le royaume môn de Pégou, le petit royaume de Toungou sera le noyau fondateur de la reconstitution d’un futur royaume birman. 1368 : Swasôké devient roi d’Ava. 1385 : Razadarit devient roi de Pégou. Ava et Pégou se font la guerre. 1401 : Minkhaung devient roi d’Ava. 1404 : Le pays d’Arakan affirme son indépendance et devient une puissance redoutable sous la dynastie des Mrohaung. 1422 : Mort du roi Minkhaung. 1423 : Mort du roi Razadarit. 1427 : Mohnyinthado établit une dynastie birmane à Ava. 1453 : Shin Sôbou devient reine de Pégou. 1459 : L’Arakan acquiert Chittagong. 1471 : Dhammazédi devient roi de Pégou. 1531 : Tabinshwehti devient roi de Toungou. Création du second Empire birman. 1546 : Tabinshwehti est sacré roi de toute la Birmanie à Pagan. 1547 : Tabinshwehti impose sa suzeraineté au nord du Siam puis conquiert le royaume môn et installe sa capitale à Pégou. 1551 : La mort de Tabinshwehti entraîne la division de son empire et la révolte des Môn. Bayinnaung devient roi et réunifie tout le Myanmar. 1562 et 1565 : Bayinnaung s’empare d’Ayuthaya, la capitale siamoise. 1581 : Mort de Bayinnaung qui marque le début du déclin du second Empire birman. 1587 : Ayuthaya recouvre son indépendance. 1594 : L’armée d’Ayuthaya envahit le Pégou mais elle est repoussée. 1599 : Arakanais et Birmans de Toungou pillent Pégou. Les Arakanais emportent à Mrohaung les statues géantes khmères rapportées par les Môn à Pégou après la première prise d’Ayuthaya. Des œuvres que les Thaïs avaient eux-mêmes pillées à Angkor en 1430. 1599 : L’armée siamoise envahit la Birmanie. 1600 : Le Portugais De Brito devient roi de Syriam. 1605 : Anaukpetlun devient roi d’Ava. Il règne jusqu’en 1629. 1613 : Anaukpetlun prend Syriam où De Brito est empalé sur les remparts de la ville. L’empire birman est alors partiellement restauré. 1635 : Tharlun déplace la capitale de Pégou à Ava. 1650 : Le dernier empereur chinois de la dynastie des Ming, supplantée à partir de 1644 par les Mandchous, vient se réfugier en territoire birman. 1658 : L’empereur Ming déchu est renvoyé au Yunnan où il est exécuté. 1666 : Début du déclin de l’Arakan après la perte de Chittagong. 1709 : Les Anglais ouvrent un chantier naval à Syriam. Les Français en font autant vingt ans plus tard. 1738 : Des détachements venus de Manipur multiplient les incursions dans le royaume d’Ava 1740 : Rébellion des Môn de la Basse Birmanie. 1747 : Soulèvement du pays môn. Formation d’un nouveau royaume môn à Pégou dans la première moitié du XVIIIe siècle alors que les tribus montagnardes razzient régulièrement le centre du Myanmar. 1750 : Une ambassade môn se rend auprès de Dupleix qui représente alors les intérêts français en Inde. Un ambassadeur français, M. de Bruno, est envoyé à Syriam. Une ambassade britannique se rend la même année à Pégou où elle est fraîchement reçue par les Môn. 1752 : Les Môn s’emparent de la Haute Birmanie et d’Ava mais Alaungpaya, chef de Mokhsobo (Shwébo, à 80 km au nord d’Ava), se dresse contre la domination môn. Il sera le fondateur de la dernière dynastie birmane. 1753 : Passant outre au refus des Môn, les Anglais s’emparent de Negrais. 1753 : Fondation de Rangoon par Alaungpaya. 1756 : Alaungpaya conquiert Syriam et éxécute Bruno. Il s’empare l’année suivante de Pégou et domine désormais l’ensemble de la Birmanie. 1758 : Alaungpaya prend Manipur. 1759 : Alaungpaya détruit le comptoir anglais de Negrais. 1760 : Alaungpaya envahit le Siam mais meurt peu après, ce qui entraîne le repli de l’armée birmane. 1763 : Hsinbyushin monte sur le trône. 1766 : Invasion birmane du Siam. 1767 : Les Birmans de Hsinbyushin s’emparent d’Ayuthaya et la pillent. La mise à sac et la destruction de la ville furent d’une telle ampleur que les Siamois furent obligés d’installer une nouvelle capitale à Bangkok. Une partie de la famille royale du pays vaincu est faite prisonnière et est installée au nord d’Ava. Artistes et artisans sont ramenés en grand nombre avec les prisonniers. Leurs compétences vont contribuer au développement et à l’éclat de la civilisation birmane. 1766-1769 : Les armées de l’empereur mandchou tentent à quatre reprises d’envahir la Birmanie ; elles sont repoussées mais le pays sort très affaibli de ces guerres. 1769 : La paix est conclue entre la Chine des Qing et le royaume birman. 1770 : La révolte des Manipuris est brisée par les Birmans. 1776 : Les Birmans interviennent de nouveau au Siam pour y briser les mouvements de révolte qui s’y développent mais la mort d’Hsinbyushin entraîne l’évacuation du pays voisin qui recouvre alors son indépendance. 1782 : Dans un contexte d’intrigues et de luttes intestines pour le pouvoir, Bodôpaya, un autre fils d’Alaungpaya, devient roi. Il fonde en 1783 une nouvelle capitale à Amarapura, à une dizaine de kilomètres au nord d’Ava. Il régnera jusqu’en 1819. 1784 : Conquête de l’Arakan et pillage de sa capitale Mrohaung. Le passage de cette région côtière du Rakhine (Arakan) sous contrôle birman amène ses nouveaux maîtres au contact de l’Inde britannique, les Anglais administrant le Bengale depuis 1765. Les Indiens de la région se réfugient en effet dans les territoires de la Compagnie des Indes et tentent de poursuivre la lutte contre les Birmans, ce qui conduit ceux-ci à des raids de représailles qui vont naturellement mener à l’affrontement avec les Britanniques soucieux d’étendre leur influence à l’est du golfe du Bengale afin de devancer d’éventuelles tentatives d’implantations hollandaises ou françaises dans la région. 1785 : Quand ils tentent d’envahir de nouveau le Siam, les Birmans sont repoussés. 1794 : Nouvelle insurrection dans l’Arakan. 1795 : Première ambassade de l’Anglais Symes à la cour d’Ava. 1802 : Nouvelle ambassade de Symes à Ava. 1811 : Chinbyan, un Arakanais réfugié en territoire anglais, envahit l’Arakan. 1813 : Les Birmans reprennent le contrôle du Manipur 1817 : Les Birmans installent un prince qui leur est acquis sur le trône d’A.ssam. 1819 : Bagyidô devient roi du Myanmar. Il régnera jusqu’en 1837.  

La Birmanie dans l’empire des Indes

1824 : Première guerre anglo-birmane, consécutive à une incursion birmane au-delà de la frontière avec l’Assam. Le général birman Bandoula, qui a attaqué le Bengale, est surpris par un débarquement anglais près de Rangoon. 1826 : Traité de Yandabo et perte des provinces maritimes du pays. Les Anglais prennent le contrôle de l’Arakan et de la côte du Tenasserim (Taninthayi, au sud de la Birmanie et à l’ouest du territoire siamois). Le Myanmar renonce à l’Assam et au Manipur, doit payer une indemnité et accepter la présence d’un résident britannique à Ava. 1830 : Henry Burney devient le premier résident anglais à Ava. Au cours des années suivantes, les troubles se généralisent dans le royaume birman en raison des excès accomplis par les successeurs de Bagyidô, Tharwaddy Min et son fils Bagan Min, qui font massacrer par centaines tous les prétendants au trône ou supposés tels. 1838-1845 : Règne de Tharwaddy Min. Il dénonce le traité de Yandabo et renvoie le résident britannique de Mandalay mais il est remplacé par le prince Bagan Min à l’issue d’un coup d’État. 1852 : Des fonctionnaires birmans ayant tenté d’extorquer de l’argent à deux capitaines anglais à Rangoon, les Anglais – le gouverneur général de l’Inde, Dalhousie – en tirent le prétexte d’une seconde guerre anglo-birmane qui aboutira, pour le Myanmar, à la perte de la province de Pégou. Les envahisseurs s’emparent rapidement de Rangoon, de Mottama (Martaban) et de Pathein (Bassein) et marchent vers le nord jusqu’à Pyay (Prome). Quelques combats leur suffisent pour l’emporter et ils peuvent annexer la totalité de la Basse Birmanie dont ils font une province de l’empire des Indes. Rangoon est prise par les Britanniques et va devenir rapidement la ville la plus moderne d’Asie du Sud. 1853 : Bagan Min est destitué et Mindon Min devient, pour vingt-cinq ans, roi de ce qui reste de la Birmanie. Il entretient de bons rapports avec les Anglais mais s’efforce d’équilibrer leur influence en s’ouvrant aussi aux autres puissances européennes. Le sud du pays, riche en bois de teck et doté d’un potentiel important en matière de riziculture, est exploité par les Anglais et bénéficie d’une relative ouverture à la modernité. 1857 : Fondation de Mandalay par le roi Mindon. 1861 : Introduction des pièces de monnaie dans le royaume. 1862 : Les Anglais réunissent les territoires qu’ils ont conquis en une province de Basse Birmanie rattachée aux Indes. 1866 : Rébellion du prince Myingun. 1868 : Publication du premier journal en langue birmane, le Myanmar Thandawzin, traduit en anglais sous le titre de Burma Herald. 1870 : Première ambassade birmane en Grande-Bretagne et en Europe. Les Birmans font de discrètes avances à la France, présente dans l’Indochine voisine, mais les Anglais n’entendent pas laisser leurs rivaux les devancer dans la course qui les oppose pour l’accès à la Chine du Sud. De plus, la France est alors en plein « recueillement » et le ministère de Broglie ne peut donner suite. 1872 : Tenue d’un grand synode bouddhiste à Mandalay. 1875 : Les autorités britanniques ordonnent à leur résident à Mandalay de refuser de se déchausser devant le roi. 1878 : Thibô Min monte sur le trône à la mort de Mindon Min et réalise un « massacre de la parentèle » de grande ampleur qui soulève l’indignation des puissances extérieures. Souverain incapable, il laisse le pays plonger dans l’anarchie, au seul profit des bandes rebelles et des fonctionnaires prévaricateurs, ce qui pousse nombre de ses sujets à émigrer vers le sud, vers la Birmanie britannique demandeuse de main-d’œuvre. 1883 : Ambassade birmane de Kinwun Mingyi U Gaung en France. Les autorités birmanes cherchent à se procurer des armes pour faire face aux révoltes des Kachin et des Shan. Août 1885 : Le Conseil birman s’oppose à la Bombay Burma Trading Corporation qui a le soutien des commerçants britanniques de Rangoon. 28 novembre 1885 : À l’issue de la troisième guerre anglo-birmane, qui ne dure que deux semaines, les forces britanniques entrent dans Mandalay. 1er janvier 1886 : Annexion de la Birmanie qui devient une colonie britannique. Février 1886 : La Birmanie est rattachée à l’empire des Indes dont elle devient une province. 1886-1900 : Les Britanniques sont confrontés à la persistance de nombreux foyers de guerilla qui luttent contre leur présence mais ils parviennent à imposer leur autorité à la Haute Birmanie. L’immigration indienne, qui contribue à la mise en valeur agricole du delta de l’Irraouaddy, est très importante, ce qui suscite la colère des Birmans, traditionnellement hostiles aux Indiens. Les Britanniques n’établissent le gouvernement direct que dans les régions à majorité birmane, c’est-à-dire le centre du Myanmar, l’Arakan et le Tenasserim. Les « États montagnards » des Shan, Karen, Kachin et Kayah faisaient eux aussi partie de l’empire des Indes mais jouissaient en fait d’une très large autonomie. En Basse Birmanie, l’accroissement de la main-d’œuvre indienne à bon marché eut des effets déstabilisateurs et la présence de nombreux intermédiaires indiens et chinois interdit le développement d’une « bourgeoisie » indigène nombreuse. Favorable à l’essor économique, la domination anglaise se révèle en revanche destructrice sur le plan social et culturel. 1890 : Définition de la frontière avec le Siam, suivie d’une opération analogue avec le Laos en 1896. 1917 : L’Association des jeunes bouddhistes obtient l’obligation d’enlever ses chaussures pour pénétrer dans une pagode, ce qui apparaît comme une affirmation nationaliste. 1918 : Le Conseil général des associations bouddhistes prend position contre une éventuelle autonomie de l’Inde qui lui assujettirait la Birmanie. 1920 : Première grève des étudiants de l’université de Rangoon. 1921 : Réformes de la dyarchie. 1923 : Installation d’un Conseil législatif visant à établir une participation des Birmans à la vie politique. Des partis politiques se forment dans les années trente, tous hostiles à l’immigration indienne et favorables à une réforme agraire ; les plus importants sont le Sinyetah, dirigé par Ba Maw, et le parti des Thakin, favorable à un « socialisme bouddhique ». 1930-1932 : Révoltes paysannes dirigées par Séya San. 1933 : Un débat est ouvert quant à l’opportunité de mettre en œuvre un projet anglais de séparation de la Birmanie de l’Inde. 1934 : Développement du mouvement des Thakin. 1935 : L’India Act prévoit que la Birmanie sera séparée de l’Inde en 1937. Il instaure un régime parlementaire qui laisse au gouverneur britannique d’importants pouvoirs. 1936 : Seconde grève des étudiants de l’université de Rangoon. 1937 : La Birmanie est séparée de l’Inde. Ba Maw devient Premier ministre. Premières manifestations étudiantes anticolonialistes. 1938 : De violentes émeutes anti-indiennes conduisent de nombreux immigrés indiens à quitter le pays. 1939 : Organisation, par l’ex-Premier ministre Ba Maw, d’un Bloc de la liberté qui regroupe les différents mouvements anticolonialistes et demande l’indépendance en échange de la participation du pays à la guerre. 1940 : Le leader nationaliste et communiste Bogyoke Aung San, qui sera le héros de la lutte pour l’indépendance, se réfugie au Japon après avoir été emprisonné pour son adhésion au Parti communiste de Birmanie. Dans le pays, le ministre U Saw donne des garanties aux Anglais mais introduit des réformes significatives (birmanisation de la fonction publique, éducation primaire gratuite, suppression de l’anglais comme langue officielle à l’université de Rangoon, création d’une université bouddhiste. 1942 : Aidée par l’Armée birmane indépendante (BIA), l’armée japonaise pénètre en Birmanie quelques semaines après l’attaque de Pearl Harbour. Dès le milieu de l’année 1942, elle a chassé du pays les forces anglo-indiennes ainsi que celles du Kuomintang chinois de Shang Kaï Shek engagées à partir du Yunnan. Le Japon, qui se pose en libérateur des peuples asiatiques et obtient la collaboration de Ba Maw (qui déclare la guerre aux Alliés), proclame l’indépendance du Myanmar et autorise Aung San à créer une Armée nationale birmane (BNA). Aung San prend le titre de ministre de la Défense alors que Shu Maung, un Sino-Birman né à Pyay (Prome) et connu sous le nom de guerre de Ne Win (qui signifie « brillant comme le ciel »), exerce les fonctions de chef d’état-major de la BNA. Mais cette armée birmane supporte mal, tout comme la population, l’occupation japonaise et change de camp vers la fin du conflit pour se rallier aux Anglais au moment où se crée la Ligue antifasciste pour la liberté du peuple (AFPFL). Étendue de janvier 1942 à mai 1945, la campagne de Birmanie a revêtu une importance majeure pour les belligérants anglo-américains et japonais en raison de l’existence de la « route de Birmanie » permettant la liaison avec la Chine nationaliste de Shang Kaï Shek, réduite à la partie occidentale du pays après l’invasion japonaise de 1937. Dotée d’un relief compartimenté et dépourvue d’un réseau de communications moderne, la Birmanie constitue, avec son climat de mousson et sa végétation de jungle tropicale, un terrain très difficile pour la conduite des opérations dans une guerre de matériel. Débarqués au Siam et dans la péninsule de Tenasserim après Pearl Harbour, les Japonais du général Iida s’imposent rapidement et prennent Rangoon le 8 mars 1942. Les Chinois sont refoulés vers le Yunnan alors que les troupes anglo-indiennes, successivement commandées par les généraux Alexander et Slim, sont, en mai, contraintes à la retraite jusqu’à Imphal, au-delà de la frontière des Indes, les Japonais occupant alors toute la Birmanie dans ses frontières naturelles. Une offensive alliée lancée en Arakan échoue complètement en novembre 1942-mai 1943. L’amiral Louis Mountbatten devient, en août 1943, commandant en chef interallié, à la tête du South East Asia Command (SEAC) mis en place à la conférence de Québec, du théâtre d’opérations birman, après que le général Wingate a déjà expérimenté, sur les arrières japonais, des raids à longue distance qui ont obtenu, malgré les conditions naturelles difficiles, des résultats incontestables (février-avril 1943). À partir d’octobre-novembre 1943, les Alliés se heurtent à une très forte résistance des Japonais du général Tanaka. Stilwelle – le général américain commandant les troupes nationalistes chinoises – et Wingate ne peuvent s’emparer de Myitkyina qui commandait l’accès à la route de Birmanie, au nord-est du pays (elle ne sera rétablie que fin janvier 1945). C’est au centre que les Japonais produisent le gros de leur effort mais ils se heurtent à la résistance des troupes de Slim. C’est le prélude aux succès remportés en janvier-mars 1944 en Arakan et lors des opérations d’Imphal-Kohima en avril-juin. La résistance des garnisons anglaises et l’arrivée rapide de renforts aérotransportés vont alors permettre d’obtenir la décision. Le 23 juin 1944, la victoire des Britanniques est complète et ils peuvent, malgré la mousson, engager la poursuite. Les Japonais refusent le combat entre le Chindwin et l’Irraouaddy et concentrent leurs forces dans la région de Mandalay. L’habileté manœuvrière de Slim conduit, le 20 février 1945, à la chute de Mandalay. Le 2 mai 1945, une opération amphibie préparée par Mountbatten et combinée avec l’arrivée des forces de Slim venant du nord entraîne le 3 la chute de Rangoon. Le nettoyage de l’arrière-pays se poursuit au cours des semaines suivantes pendant que se prépare l’offensive contre la Malaisie, qui sera suspendue en raison de la capitulation japonaise. 1945 : Bogyoke Aung San, dont la Ligue antifasciste contrôle la majeure partie du territoire, réclame l’indépendance immédiate alors que les Britanniques souhaitent une phase transitoire avant l’octroi d’une indépendance complète. Le leader nationaliste veut associer celle-ci à un gouvernement civil et démocratique et formule à ce sujet des propos qui apparaissent aujourd’hui prophétiques : « Nous devons faire de la démocratie un credo populaire. Nous devons nous efforcer de construire une Birmanie libre en harmonie avec ce principe. Si nous échouions à le faire, notre peuple serait condamné à souffrir. Si la démocratie échouait, le monde ne pourrait que se tenir à l’écart en se contentant d’observer, si bien qu’un jour la Birmanie deviendrait un objet de mépris, à l’image du Japon ou de l’Allemagne. La démocratie est la seule idéologie qui soit compatible avec la liberté. C’est également une idéologie qui favorise et consolide la paix. C’est de ce fait la seule idéologie vers laquelle nous devons tendre… » 1946 : Aung San forme un gouvernement et réclame l’indépendance. 8-12 février 1947 : Accord de Panglong par lequel les diverses nationalités du pays s’entendent en vue de la création d’un État indépendant. La Ligue antifasciste d’Aung San gagne ensuite les élections à l’Assemblée constituante. 19 juillet 1947 : Assassinat de Bogyoke Aung San (âgé de 32 ans) et des six dirigeants les plus importants de la lutte indépendantiste. La responsabilité de ce meurtre fut attribuée à U Saw, un ancien leader politique emprisonné par les Britanniques durant la guerre pour avoir cherché à s’entendre avec les Japonais, mais il semble que ce soit le général Ne Win qui ait ordonné cet assassinat pour s’opposer à la marginalisation politique de l’armée, Aung San entendant réserver exclusivement le pouvoir aux civils.  

Les changements de noms (décidés après le soulèvement de 1988 « pour en finir avec le passé colonial ») :

Birmanie est devenu Myanmar Rangoon Yangon Akyab Sittwe Arakan Rakhine Bassein Pathein Mergui Myeik Moulmein Mawlamyine Myohaung Mrauk U Pagan Bagan Pégou Bago Prome Pyay Syriam Thanlyin Tavoy Dawei Yaunghwe Nyangshwe   Les fleuves : Irraouaddy Ayeyarwady Salween Thanlwin Sittang Sittoung  

La Birmanie indépendante

4 janvier 1948 : Proclamation d’une Union de Birmanie indépendante qui quitte le Commonwealth britannique. Le drapeau de la nouvelle République est rouge avec un canton bleu foncé, une grande étoile symbolisant l’Union birmane et cinq petites étoiles blanches représentant les minorités (Karen, Shan, Kachin, Chin et Kayah).

1948-1962 : La Birmanie connaît un régime parlementaire mais le gouvernement de U Nu (qui conservera le pouvoir jusqu’en 1958) est vite confronté à un processus de décomposition du pays dont l’unité est immédiatement menacée par de nombreuses dissidences ethniques (notamment celle des Karen) et par le développement de la subversion communiste. Ce n’est qu’en 1950-1951 que le pays est à peu près contrôlé par le pouvoir central. Celui-ci doit également compter avec la présence sur son territoire d’une partie des forces du Kuomintang chinois, qui s’y sont repliées après avoir été vaincues par les troupes de Mao Tsé-Toung et y survivent en s’adonnant à la culture du pavot.

1953 : La Birmanie annonce son refus de l’aide américaine tant que les forces nationalistes chinoises soutenues par les Américains occuperont son territoire.

1958-1959 : Gouvernement militaire du général Ne Win à qui U Nu a transmis le pouvoir en octobre 1958. Il dure quinze mois et permet de restaurer l’ordre et de tenir en respect les diverses rébellions.

1960 : Les élections ramènent U Nu au pouvoir avec une large majorité mais celle-ci se divise et les désordres reprennent. La même année, le bouddhisme est proclamé religion d’État.

2 mars 1962 : Coup d’État du général Ne Win. Il entend mettre fin au désordre général, conjurer les menaces de sécession des États chan et préserver l’unité de l’armée. Le Premier ministre U Nu est emprisonné avant de partir pour l’exil en 1966. Le nouveau régime proclame son intention d’emprunter une « voie birmane vers le socialisme », mise en œuvre par un Conseil révolutionnaire de dix-sept membres dont Ne Win est le président. En fait, le pays va conjuguer au cours des années suivantes la multiplication des rébellions armées des ethnies minoritaires (chan, karen, kachin et môn), la fermeture totale au monde extérieur et l’effondrement de son économie. Les militaires n’ont de fait jamais quitté le pouvoir depuis 1962.

1964 : Le parti au pouvoir, le Parti du programme socialiste birman (BSPP), devient parti unique.

1966 : La politique de nationalisations s’étend jusqu’au commerce de détail, ce qui favorise l’essor du marché noir et crée un chômage massif.

1967 : Émeutes antichinoises à Rangoon et dans plusieurs grandes villes. Elles ouvrent une période de tensions entre la Birmanie et la Chine. La politique économique du régime pousse au départ près de 250 000 personnes d’origine indienne ou chinoise au cours des années soixante.

1967 : Après une tentative de paix manquée, les rébellions se rallument dans tout le pays. Communistes birmans, Karen, Karennis, Kachin et Shan entretiennent des guerillas mais ne parviennent à aucun moment à s’unir. Les communistes sont des Birmans attachés à une unité nationale forte alors que les minorités ethniques luttent en faveur d’un système fédéraliste très large. Communistes et Kachin sont armés par la Chine voisine alors que les autres dissidences ne survivent qu’en profitant des ressources fournies par le trafic de drogue ou la contrebande.

1969 : U Nu crée à Bangkok le Parti pour la démocratie parlementaire.

1969 : Établissement d’un système de coopératives censées constituer les cellules élémentaires de la vie économique mais cette politique débouchera sur un échec complet.

1972 : Une visite de Ne Win à Pékin permet de normaliser les relations avec la Chine.

1973 : Une nouvelle Constitution est octroyée par le pouvoir en place et approuvée par 90 % des votants lors d’un référendum. Faite par et pour les militaires, elle pose comme principes l’unité du pays, l’adoption de la voie socialiste en matière économique, l’instauration du parti unique et une souveraineté du peuple purement formelle, l’Assemblée n’étant de fait qu’une chambre d’enregistrement.

3 janvier 1974 : La Birmanie prend le nom de République socialiste de l’Union birmane. Le drapeau national est transformé : quatorze étoiles identiques correspondant à de simples divisions administratives gravitent désormais autour d’un symbole « socialiste » – une gerbe de riz et une roue dentée signifiant l’union des paysans et des ouvriers –, ce qui correspond clairement à un déni de reconnaissance des minorités ethniques.

Juin 1974 : Émeutes ouvrières suivies d’attentats à Rangoon. Les incidents et les manifestations qui se multiplient dans les villes se transforment en un mouvement insurrectionnel violemment réprimé. À Akyab, sur le golfe du Bengale, les dockers refusent de charger du riz destiné à l’exportation alors que la population souffre de pénurie alimentaire.

Juillet-août 1974 : Des inondations catastrophiques font plusieurs milliers de victimes et laissent sans abri près d’un million et demi de paysans.

25 novembre 1974 : Mort de Sithu U Thant, ancien secrétaire général birman de l’ONU. Les manifestations qu’elle déclenche, notamment chez les étudiants, sont violemment réprimées à partir du 11 décembre, ce qui entraîne une situation insurrectionnelle à laquelle le pouvoir réplique par la proclamation de la loi martiale. De nouvelles manifestations seront brisées en juin 1975.

1974 : Le Japon investit 1,6 milliard de yens dans la prospection pétrolière offshore en Birmanie.

Mars 1975 : Le président et le secrétaire général du Parti communiste birman, Thakin Zit et Thakin Chit, sont tués par les forces de Ne Win, ce qui contribue à la tension avec la Chine de Mao

1975 : Les Karen et d’autres minorités se coalisent au sein du Front national démocratique (NDF) qui se donne pour objectif la création d’un État fédéral.

1980 : Les propositions de Ne Win en vue d’une amnistie et de négociations avec les rebelles se concluent sur un échec.

4-18 octobre 1981 : Élections pour le Parlement des 475 candidats du parti unique, le Parti du programme socialiste pour le progrès, qui doivent désigner en novembre un successeur au général Ne Win qui a annoncé en août son intention d’abandonner les fonctions qu’il exerce depuis 1962 en raison de son âge (71 ans). Le 9 novembre, c’est ainsi le général San Yu qui devient président de la République.

1985 : Les échecs militaires subis par les Karen font que la direction du NDF passe aux Kachin.

Mars-septembre 1988 : La majorité de la population rallie l’opposition au régime socialiste. Le général Ne Win démissionne le 25 juillet et se voit remplacé par Sein Lwin.

22 juillet 1988 : À la suite de six jours d’émeutes et de pillages à Prome, ville située à 270 km au nord-ouest de Rangoon, le gouvernement proclame la loi martiale. Le 26, le général Sein Lwin, partisan du président Ne Win, est nommé président du parti unique, le Parti du programme socialiste birman. Le 30, il fait arrêter plusieurs personnalités d’opposition, dont l’ancien général Aung Gyi. La loi martiale est décrétée le 3 août.

8 août 1988 : D’importantes manifestations sont brutalement réprimées à Rangoon et à Sagaing, ce qui vaut à Sein Lwin le surnom de « boucher de Rangoon ». Il doit démissionner le 12 août, seize jours après son entrée en fonction, pour céder sa place à Maung Maung, le ministre de la Justice, qui devient le 19 président de la République et chef du parti unique. Le 29, l’opposition se regroupe dans la Ligue pour la démocratie et la paix présidée par un ancien chef d’État, Mahn Win Maung, qui menace le 5 septembre le gouvernement d’une grève générale. D’imposantes manifestations se déroulent le 8, notamment à Mandalay. Le 10, le parti unique annonce des élections générales et la restauration du pluralisme politique.

15 septembre 1988 : Le Parti socialiste annonce son autodissolution.

18 septembre 1988 : Coup d’État du général Saw Maung, ministre de la Défense. Les combats font un millier de victimes et débouchent sur l’instauration d’un régime militaire pris en main par un Conseil d’État pour la restauration de l’ordre et de la loi (SLORC). Les nouveaux maîtres du pays décrètent l’état de siège mais annoncent la tenue prochaine d’élections libres et démocratiques et l’instauration du pluripartisme. Les nouveaux dirigeants décident également de convertir le pays à l’économie de marché.

Septembre 1988 : Fondation de la Ligue nationale pour la démocratie animée par Aung San Suu Kyi, fille du père de l’indépendance, Tin Oo et Aung Gyi.

1989 : La junte au pouvoir change le nom du pays, qui devient l’Union du Myanmar, le nom de Birmanie apparaissant comme un vestige du colonialisme européen. Myanmar était le terme utilisé dès l’époque de Marco Polo pour désigner le pays. Considéré dans son ensemble, celui-ci est bien le Myanmar alors que le Bamar, dont les Britanniques avaient fait Burma, désigne les régions proprement birmanes.

Premier semestre 1989 : Aung San Suu Kyi réalise une tournée de réunions dans l’ensemble du pays et se pose comme le leader de l’opposition mais elle est placée en résidence surveillée le 19 juillet et cette situation perdurera pendant six ans.

27 mai 1990 : Des élections démocratiques ont bien lieu, les premières depuis 1960, mais les résultats ne sont proclamés que six semaines plus tard et le régime militaire refuse de les accepter, car ils sont nettement favorables au courant démocratique (NLD, Ligue nationale pour la démocratie) qui, avec 60 % des voix, remporte plus des trois quarts des sièges (392 sur 485), le reste allant aux représentants des minorités ethniques alors que les partisans du pouvoir regroupés dans le National Unity Party ne sont qu’une poignée (une dizaine de députés). La junte reporte l’exercice du pouvoir par la majorité parlementaire après l’adoption par référendum d’une nouvelle Constitution approuvée par le gouvernement militaire en place.

28 mai 1990 : Les habitants de l’ancienne ville de Pagan sont déplacés de force vers une nouvelle agglomération, établie à quelques kilomètres au sud.

Août-octobre 1990 : L’opposition bouddhiste au régime s’organise à Mandalay.

Octobre 1990 : La junte fait arrêter les dirigeants et une centaine de députés de la NLD.

22 juillet 1991 : Le gouvernement américain décide d’appliquer des sanctions économiques au régime militaire birman pour protester contre sa politique de répression.

14 octobre 1991 : Toujours en résidence surveillée, Aung San Suu Kyi reçoit le prix Nobel de la paix (elle avait déjà reçu en janvier le prix Sakharov pour la liberté de pensée decerné par le Parlement européen, elle recevra également en juin 1992 le prix Simon-Bolivar attribué par l’Unesco pour sa contribution à « la liberté et à l’indépendance et à la dignité des peuples »). En réaction à ce qui constitue un désaveu très clair de la communauté internationale, les responsables du Conseil d’État pour la restauration de l’ordre et de la loi (SLORC) annoncent la réunion d’une Convention nationale chargée de la rédaction d’une Constitution mais dont les membres seront nommés par le pouvoir en place. Les pressions occidentales n’auront en réalité que peu d’effets sur la junte, d’autant que les dirigeants des pays de l’Association des nations du Sud-Est Asiatique (ASEAN : Thaïlande, Malaisie, Singapour, Bruneï, Indonésie et Philippines) rejettent les propositions américaines de sanctions contre la Birmanie.

5 janvier 1992 : Le gouvernement du Bangladesh met ses forces en état d’alerte face à la Birmanie qui a massé des troupes à la frontière depuis le 21 décembre précédent.

29 février 1992 : Treize musulmans sont tués lors d’une manifestation dans l’État d’Arakan. En mars, la Birmanie est condamnée par la Commission des droits de l’homme de l’ONU en raison de la violente répression des guérillas ethniques qui a poussé des dizaines de milliers de réfugiés karen et kachin notamment vers l’Inde, la Chine ou la Thaïlande. Le 4 avril suivant, l’ONU demande une aide pour les Rohingya, minorité musulmane persécutée par le régime militaire birman.

23 avril 1992 : Le général Saw Maung, qui a pris le pouvoir lors du coup d’État de 1988, est remplacé à la tête de la junte par le général Than Shwe. Deux jours plus tard, une vingtaine de prisonniers politiques sont libérés. L’ex-Premier ministre U Nu est libéré le 27 et Aung San Suu Kyi est autorisée à recevoir sa famille.

26 septembre 1992 : Levée de la loi martiale. Le nouvel homme fort du pays cherche à en donner une image plus libérale.

28 octobre 1992 : Un rapport d’Amnesty International révèle l’ampleur des exactions perpétrées par le gouvernement birman.

Janvier 1993 : Réunion de la Convention nationale, qui comprend sept cents membres, dont quatre-vingts députés élus en 1990.

20 juillet 1993 : Aung San Suu Kyi est assignée à résidence, mesure confirmée en février 1994 après la rencontre entre la dissidente et un parlementaire américain accompagné d’un journaliste du New York Times. Le leader de l’opposition refuse le marché que lui propose la junte militaire, prête à lui rendre sa liberté contre son départ du pays.

5 avril 1994 : La junte militaire accepte d’engager des négociations avec l’Union nationale karen. Ce mouvement de guérilla a repoussé, à la fin de décembre 1993, une violente offensive des forces gouvernementales non loin de la frontière thaïlandaise.

20 septembre 1994 : Des représentants de la junte rencontrent Aung San Suu Kyi. Il s’agit d’un geste en direction de l’ASEAN et de l’Europe, très critiques quant au respect des droits de l’homme en Birmanie.

1994 : Visite officielle du Premier ministre chinois Li Peng à Rangoon pour réaffirmer le soutien total de la Chine au régime birman.

Décembre 1994 : Affrontements religieux armés entre bouddhistes et adventistes

Février 1995 : Signature à Rangoon, entre la Birmanie et la Thaïlande, d’un contrat relatif à la construction d’un important gazoduc.

Février 1995 : Mort à Rangoon de U Nu, rentré d’exil en 1980 mais retiré de la vie politique après un bref engagement lors des événements de 1988.

21 février 1995 : L’armée birmane, qui s’était emparée le 26 janvier du QG karen de Manerplaw, investit Kawmoora près de la frontière thaïlandaise, le dernier bastion des rebelles qui déclarent désormais recourir à une « guerre mobile ».

10 juillet 1995 : Libération de Aung San Suu Kyi qui, le 24, lance à la junte un appel au dialogue. Elle avait reçu en mai le prix Nehru.

1995 : Des rapports relatifs au respect des droits de l’homme par le régime birman font état du fait que l’armée réquisitionne des populations pour la mise en place de grandes infrastructures, notamment le gazoduc construit en coopération par Total et Unocal.

Fin décembre 1995 : Reddition de Khun Sa, seigneur de l’opium et chef des rebelles shan frontaliers de la Thaïlande. L’armée occupe Ho Mong, le bastion de cette dissidence en janvier. Le seigneur de la guerre, maître du Triangle d’or, a négocié sa reddition contre l’impunité et le gouvernement de Rangoon a rejeté une demande américaine d’extradition le concernant. Son armée privée a par ailleurs été intégrée à l’armée birmane dont on peut soupçonner que certains de ses chefs vont reprendre à leur profit l’exploitation du pavot.

9 juin 1996 : Défiant le décret promulgué deux jours plus tôt par la junte et interdisant la Ligue nationale pour la démocratie de Aung San Suu Kyi qui avait tenu son congrès du 26 au 28 avril, des milliers de personnes se rassemblent devant le domicile du prix Nobel de la paix de 1991.

24 juin 1996 : J.L. Nichols, homme d’affaires anglo-birman proche de Aung San Suu Kyi et représentant de la Suisse, meurt en prison. Il avait été condamné le 18 mai sous le prétexte qu’il utilisait illégalement deux fax…

20 juillet 1996 : Les sept pays membres de l’ASEAN réunis pour deux jours à Djakarta accordent un statut d’observateur à la Birmanie.

24 octobre 1996 : La junte place Aung San Suu Kyi en résidence surveillée à Rangoon.

Février 1997 : Les succès remportés par l’armée contre les Karen poussent vers la Thaïlande des milliers de réfugiés.

1997 : Le SLORC change de nom et devient le Conseil d’État pour la paix et le développement (SPDC).

27 septembre 1997 : La LND de Aung San Suu Kyi tient son congrès à Rangoon. Deux mois plus tard, la junte autorise le leader de l’opposition à recevoir ses partisans et des diplomates étrangers.

L’année 1997 a été marquée par l’admission de la Birmanie au sein de l’ASEAN, la hausse des prix, la chute de l’activité touristique, l’effondrement de la monnaie nationale et le repli des investisseurs étrangers. Les dividendes de la relative ouverture des années précédentes ont été dilapidés par une gestion catastrophique, le renforcement en mai de l’embargo américain et la crise financière asiatique entamée en juillet. Avant la crise, le dollar s’échangeait contre 150 kyats, il en valait entre 360 et 400 à la fin de 1998. Le revenu annuel par habitant est évalué au tiers de ce qu’il est au Cambodge. L’aide étrangère ne représente que 0,8 % du budget mais les recettes tirées du trafic de drogue sont considérables.

24 août 1998 : Manifestations d’opposition à Rangoon.

6 septembre 1998 : La junte arrête 110 membres du parti (LND) de Aung San Suu Kyi pour éviter une réunion du Parlement élu en 1990 et dominé par l’opposition. La timide ouverture engagée en 1997 semble bien oubliée, malgré les mesures d’embargo américaines et la suspension de l’aide étrangère.

11 mai 1999 : Un rapport de l’Organisation internationale du travail affirme que huit cent mille Birmans sont soumis au travail forcé. En juin 2000, la conférence annuelle de l’OIT demande aux gouvernements, entreprises et syndicats de réexaminer leurs relations avec la Birmanie pour ne pas contribuer à la perpétuation du recours généralisé au travail forcé.

Septembre 2000 : Aung San Suu Kyi est placée de nouveau en résidence surveillée, avant de recouvrer sa liberté en mai 2002. Le régime autoritaire établi au cours des années 1990 garantit une stabilité qui encourage les investisseurs singapouriens, thaïlandais et japonais alors que la Chine demeure le principal partenaire politique d’un pays qui lui assure indirectement, par la route de Birmanie qui désenclave le Yunnan, un accès au golfe du Bengale.

26 janvier 2001 : La visite d’une mission d’information européenne conduit la junte à libérer 81 prisonniers politiques.

Novembre 2002 : Six mois après la libération de Aung San Suu Kyi, la junte annonce celle d’une centaine d’opposants.

30 mai 2003 : Aung San Suu Kyi et ses partisans sont en train d’effectuer un déplacement en province quand ils tombent – à Dipayin, en Birmanie centrale – dans une embuscade organisée par l’Association pour la solidarité et le céveloppement de l’Union (USDA) favorable à la junte militaire. Au moins une centaine des partisans de la LND sont tués. La dirigeante du parti est placée pour la troisième fois en résidence surveillée alors que son principal adjoint, Tin Oo, est emprisonné. Le gouvernement américain riposte en gelant les relations commerciales avec la Birmanie.

Août 2003 : Le général Khin Nyunt, premier secrétaire de la junte depuis le putsch de 1988, devient Premier ministre, tout en gardant la responsabilité des services secrets.

Mars 2004 : Le vice-Premier ministre chinois Wu Yi signe à Rangoon vingt-quatre accords de coopération technique et économique faisant suite à un prêt de 200 millions de dollars. Pékin soutient économiquement et militairement (par des ventes d’armes) le régime birman. Les Chinois disposent de deux moyens de pression sur Rangoon avec, d’une part, le mouvement nationaliste Wa (United Wa State Army) qui contrôle une région autonome le long de la frontière chinoise et, d’autre part, la fourniture de prêts à très bas taux d’intérêt.

Mai 2004 : La Convention nationale réunie onze ans plus tôt et chargée de rédiger une Constitution reprend ses travaux.

18 octobre 2004 : Le Premier ministre Khin Nyunt, qui avait en charge les relations avec l’ONU, est limogé par ses pairs de la junte pour s’être rendu coupable de corruption. Numéro trois du régime et ancien chef du renseignement militaire, il s’était en fait opposé à la stratégie d’enfermement diplomatique du chef de la junte, le général Than Shwe. Aung San Suu Kyi demeure pour sa part en résidence surveillée.

28 novembre 2004 : À la veille du sommet de l’ASEAN, la junte militaire décide la libération de plus de neuf mille prisonniers, dont une quarantaine seulement sont des politiques. Dans le même temps, l’opposante Daw San San réclame à Bruxelles des sanctions économiques ciblées sur les secteurs stratégiques (pétrole, gaz, bois, extraction minière, ressources marines) monopolisés par le régime et des initiatives diplomatiques en vue d’une intervention de l’ONU. La junte est accusée de consacrer 40 % des ressources du pays au budget de l’armée alors que la Birmanie apparaît comme l’un des tout derniers pays du monde en matière de dépenses de santé. Dans ces conditions, les opposants au régime dénoncent la politique dite d’« engagement constructif » adoptée par une bonne partie de la communauté internationale, politique qui sous-entend que le développement économique contribuera naturellement à l’ouverture du pays et à l’avènement de la démocratie.

Février 2005 : Condolezza Rice, secrétaire d’État américaine, place la Birmanie dans la liste des « avant-postes de la tyrannie » avec la Corée du Nord et Cuba. Plusieurs États de l’ASEAN se font très critiques vis-à-vis du régime birman mais la Thaïlande persiste à soutenir le pouvoir de Rangoon.

Mars 2005 : Développement d’une polémique en Europe à propos de la présence du groupe Total en Birmanie, condamnée par des ONG anglaises (dont Burma Campaign). Les défenseurs de la position du groupe français font valoir qu’un retrait de Total et de l’Américain Unocal ne pourrait que servir les intérêts des concurrents asiatiques – les groupes chinois (China National Petroleum Corporation et China National Offshore Oil Corporation), indiens (ONGC Videsh), sud-coréens (Daewoo et Korea Gas Corporation), thaïlandais (PTTEP), malais (Petronas) et japonais (Nippon Oil), sans affaiblir en quoi que ce soit la junte. Les pays asiatiques sont en effet hostiles à toute sanction ou pression économique à son égard, ce qu’a confirmé en février Mme Arroyo, présidente des Philippines, après ses entretiens avec le général Soe Win, Premier ministre birman. La Chine et la Russie sont également opposées à toute sanction et le commissaire aux Relations extérieures de l’Union européenne a déclaré le 10 mars au Financial Times qu’il préférait, contrairement à l’attitude adoptée par son prédécesseur Chris Patten, « avoir un dialogue constructif mais critique, clair et robuste » avec les responsables birmans.

31 mars 2005 : Les travaux de la Convention nationale réunie en février en vue de la préparation d’une nouvelle Constitution ont été suspendus jusqu’en novembre. Longtemps considéré comme un simple élément d’équilibre dans la rivalité opposant les généraux Khin Nyunt, chef des services de renseignement, et Maung Aye, commandant en chef de l’armée, le général Than Shwe a réussi à s’imposer comme président du Conseil d’État pour la paix et le développement (SPDC) qui a succédé en 1998 au Conseil d’État pour la restauration de l’ordre et de la loi (SLORC) formé à la suite du coup d’État militaire de 1988.

7 mai 2005 : Triple attentat à la bombe à Rangoon, qui fait officiellement 19 tués et 59 blessés, sans doute beaucoup plus. Le pouvoir accuse trois groupes de guerilla (l’Union nationale karen, l’armée de l’État shan et un groupe karenni) ainsi que le gouvernement birman en exil formé par des parlementaires élus en 1990 d’avoir perpétré cette action terroriste pour déstabiliser le pays. Cette interprétation suscite beaucoup de scepticisme car les guérillas ethniques ne sont actives que dans leurs régions et le gouvernement birman en exil a régulièrement confirmé le choix d’une action politique non violente. Certains pensent en revanche que ces attentats pourraient refléter les luttes internes au sein de l’institution militaire et pourraient être le fait de partisans de l’ancien Premier ministre Khin Nyunt, limogé pour corruption en octobre 2004. D’autres vont jusqu’à accuser la junte d’être à l’origine de ces attentats qui pourraient lui permettre de justifier le renforcement de son pouvoir au moment où elle subit de fortes pressions occidentales sur le terrain de la défense des droits de l’homme.

Octobre 2005 : L’ONG britannique Global Witness dénonce l’exploitation massive de la forêt birmane par les entreprises de déboisement chinoises, dans le nord-est du pays qui demeure hors de tout contrôle réel du gouvernement de Rangoon, et s’inquiète du saccage d’une région comptant parmi les plus riches en biodiversité du globe.

4 novembre 2005 : Annonce du transfert du gouvernement de Rangoon à Pyinmana, à plus de 300 km au nord de la capitale. Il est justifié par la position plus centrale du nouveau « quartier général du gouvernement » mais les observateurs pensent que le général Than Shwe, le véritable homme fort du régime, a pris cette décision pour être en mesure de mieux contrôler les dissidences minoritaires et de parer à une éventuelle intervention américaine contre Rangoon, très vulnérable à une action engagée depuis la mer. Les pressions américaines sur les Nations unies pour que l’organisation se saisisse du cas birman et la réception à la Maison Blanche, le 31 octobre, de Charm Tong, une représentante de la minorité shan, ont sans doute confirmé les craintes de la junte. Le transfert du siège du gouvernement s’inscrit également dans la tradition de méfiance des dirigeants militaires vis-à-vis d’une ville considérée trop ouverte sur l’extérieur depuis l’époque de la colonisation britannique.

28 novembre 2005 : Le maintien en résidence surveillée à son domicile de Aung San Suu Kyi est prolongé pour six mois. Cette décision intervient une semaine avant la tenue d’une session de la Convention nationale dont les délégués, choisis par le pouvoir militaire, devront poursuivre l’élaboration d’une Constitution appelée à être soumise ensuite à référendum, dans le cadre d’une « feuille de route » vers une « démocratie disciplinée ».

30 novembre 2005 : La firme pétrolière Total accepte d’indemniser plusieurs Birmans qui l’accusaient d’avoir profité des mesures de travail forcé que leur avait imposées la junte militaire en 1995, dans le cadre de la construction d’un gazoduc réalisé avec la firme américaine Unocal qui a précédé Total dans la voie de ce type d’indemnisation ; cela permet l’arrêt des poursuites engagées contre les deux compagnies.

2 décembre 2005 : Sur proposition des États-Unis, le Conseil de sécurité de l’ONU prévoit de discuter de la question des violations des droits de l’homme en Birmanie.

12 décembre 2005 : La réunion de l’ASEAN qui se tient en Malaisie est l’occasion pour l’Organisation de s’inquiéter du sort de Aung San Suu Kyi et d’exiger des dirigeants de Rangoon une évolution vers la démocratie. La Birmanie fait partie de l’ASEAN depuis 1997 et doit en prendre la présidence tournante en 2006, ce qui explique les inquiétudes des membres de l’Organisation quant à l’attitude de la junte qui dirige le pays.



2006 : Les généraux imposent une constitution qui légalise leur domination politique.

2010 : Des élections considérées comme "truquées" par les observateurs occidentaux donnent à la junte militaire 80% des sièges des deux assemblées. La situation apparaît bloquée car, selon l'article 12 de la constitution, sa modification n'est envisageable qu'avec l'accord préalable de 75% des députés et doit être entérinée par un référendum national avec un taux de participation de plus de 50% des électeurs.

Novembre 2010 : Libération d'Aung San Suu Kyi.

2011 : Lle généralissime Than Shwe se retire et le nouveau chef de l'Etat, Thein Sein, multiplie les annonces de réformes. En visite en Birmanie, Hillary Clinton, secrétaire d'Etat américaine, rencontre Aung San Suu Kyi. La junte a envoyé tout au long de l'année des signaux d'ouverture - le chef de l'Etat a rencontré Aung San Suu Kyi durant l'été - mais les militaires conservent le contrôle de la situation et certains opposants démocrates reprochent à Aung San Suu Kyi sa volonté de participer à de futures élections. La junte s'est autodissoute au printemps mais le gouvernement "civil" alors constitué est composé en majorité d'anciens militaires.

Janvier 2012 : Signature d'un accord de cessez le feu avec la guerilla karen. Il intervient après des accords similaires, décidés par le président Thein Sein, avec les ethnies kachin et shan.

Avril 2012 : Alors que la Ligue nationale pour la démocratie d'Aung San Suu Kyi avait boycotté les élections de 2010 (Le Parti pour la solidarité et du développement de l'Union, parti des militaires, avait raflé 76% des sièges des deux chambres) elle participe cette fois au scrutin et l'icône de la démocratie est élue.

Juin 2012 : Affrontements entre bouddhistes et musulmans dans le centre du pays. Emeutes hostiles aux Rohingyas musulmans venus du Bengale dans le nord ouest de l'Arakan.

Novembre 2012 : Visite historique de Barack Obama en Birmanie qui a levé l'embargo américain pesant depuis dix ans sur les importations birmanes.

2013 : L'année est marquée par des progrès considérables en matière de liberté d'expression, la quasi totalité des prisonniers politiques sont libérés

2014 : La Birmanie prend la présidence de l'ASEAN (l'Association des Nations du Sud-Est Asiatique). La popularité d'Aung San Suu Kyi s'effrite car elle accepte une coexistence de fait avec les militaires, dans la perspective de l'élection présidentielle de 2015. Une question demeure cependant: la loi interdit à un candidat dont le conjoint ou les enfants sont de nationalité étrangère d'accéder à la présidence. Or le mari de la "Dame de Rangoon", décédé en 1999, était britannique, tout comme ses deux fils... Soutenue par les Occidentaux, Aung San Suu Kyi doit compter cependant avec les ex-étudiants de Génération 88 et avec les moines bouddhistes qui entendent, tout autant qu'elle, incarner l'opposition au pouvoir militaire.

Novembre 2014 : Voyage du président Obama à Naipyidaw. Il encourage le gouvernement birman à poursuivre les réformes et soutient ouvertement Aung San Suu Kyi. Le contexte paraît favorable dans la mesure où la croissance atteint 8,5 % en 2014, fondée sur l'afflux des capitaux étrangers dont les détenteurs ont été rassurés par le transfert du pouvoir de la junte militaire à des dirigeants civils. Production du gaz naturel et essor du tourisme accompagnent ce mouvement général. Le poids persistant du pouvoir militaire (un quart des sièges du parlement sont réservés à l'Armée) et la corruption apparaissent toutefois comme des limites aux progrès en cours. 

8 novembre 2015 :  Les élections législatives voient la victoire triomphale de la Ligue nationale pour la démocratie dirigée par  Aung San Suu Kyi. La "dame de Rangoon", assignée à résidence pendant quinze ans par la junte militaire, est donc dès lors appelée à exercer le pouvoir  dans le cadre du premier gouvernement démocratique mis en place depuis le coup d'Etat de 1962. La liberté d'expression et  le droit syndical s'installent, alors que se développent rapidement les infrastructures.  Dans le gouvernement constitué en avril 2016, Aung San Suu Kyi exerce de fait les fonctions d'un premier ministre. Elle doit cependant compter avec les pouvoirs qu'a conservés l'Armée engagée contre diverses dissidences régionales. Les militaires mènent ainsi une répression sévère contre les insurgés musulmans Rohingyas de l'Arakan, au nord-est du pays, à proximité du Bengla Desh. Un programme de développement économique dit "des douze points" a été  été présenté à l'été 2016 mais il n'a pas convaincu les investisseurs internationaux, moins disposés qu'il y a quelques années à investir en Birmanie.

Les attaques lancées par les rebelles Rohingyas adossés à la frontière du Bengla Desh voisin ont porté de nouveau l'attention sur la Birmanie à l'été de 2017 et la "dame de Rangoon", prix Nobel de  la Paix, s'est vu reprocher sa passivité face aux initiatives des militaires. Son aura s'en est trouvée affaiblie dans les médias occidentaux qui ignorent superbement l'instrumentalisation par les islamistes des affrontements ethniques propres à la région de l'Arakan. Le maintien d'une croissance soutenue et les bons rapports entretenus avec la Chine laissent cependant penser que la Birmanie est engagée dans une phase de développement solide et prometteuse, dans une Asie du sud dont l'essor paraît bien assuré.