Le plus
vaste Etat d’Amérique du Sud (8 515 000 km2) et le plus peuplé avec plus de 200
millions d’habitants, le Brésil, est un pays essentiellement
tropical et d’altitude moyenne. Il se caractérise par un relief de
plateaux où les horizons plats dominent, hormis sur la façade
atlantique et au sud où l'on découvre un paysage de moyenne montagne.Plusieurs
grands ensembles se distinguent, tant d’un point de vue
morphologique que climatique.
L’Amazonie
correspond à une grande plaine qui recouvre la presque totalité du
Nord du Brésil, sur 3 500 kilomètres de long et 600 à 1 200
kilomètres de large, selon les lieux. Il s’agit d’une zone de
cuvette où s'écoulent l’Amazone et ses affluents qui sont bordés
par une zone inondable, la Varzea.
Sur ses bords, on trouve des terrasses, des collines et de bas-plateaux. Au sud de la grande plaine amazonienne, s’étend le
plateau intérieur, vaste espace plan incliné où s’écoulent de
multiples fleuves dont le principal est le Parana.Le
Nordeste se caractérise par ses plateaux qui se terminent sur la côte atlantique en plages profondes ou en falaises. Les paysages de l’Est correspondent à des zones de moyenne montagne. La région est drainée par de
nombreuses rivières qui s’écoulent vers l’intérieur.
Le
Sudeste est une région montagneuse formée de hautes crêtes
comprises entre le fleuve São Francisco et le littoral. Les fleuves,
parmi lesquels le Rio Grande, les rios Tietê et Iguaçu, pour ne
nommer que les plus célèbres, drainent les hautes terres et
s’écoulent vers la mer. C’est dans cette région que l’on
trouve la pontão da Bandeira, point culminant du pays avec ses 2 890
mètres.Enfin,
le Brésil méridional correspond à l’espace collinéen du Rio
Grande do Sul.Le
climat est équatorial en Amazonie et tropical dans le reste du
pays : les températures annuelles sont supérieures à 22°C,
sauf au sud où elles sont de 18°C, avec des étés chauds et des
hivers parfois froids. Certaines régions sont très arrosées,
notamment l’Amazonie et les plaines littorales atlantiques, la
pluviosité est moyenne à l’intérieur et faible dans le Nordeste.
A cette variété climatique correspond une végétation tout aussi variée. La
très vaste et profonde forêt équatoriale est couverte d’arbres à
feuilles permanentes que l’on nomme la mata. Dans le plateau
intérieur et sur les hautes terres, de l’Etat de Bahia jusqu’à
celui de São Paulo, les paysages forestiers sont remplacés par des
savanes ou campos qui dominent au Mato Grosso et dans le Goias. Les
sols ferrugineux y sont rouges et peu fertiles.
Dans
l’intérieur du Nordeste, la végétation est adaptée à la
sécheresse, avec une prédominance de buissons d’épineux et de
cactées. C’est la caatinga.
Enfin,
les plaines littorales de l’Atlantique abritent, de São Paulo au Natal, une forêt tropicale tandis que la végétation des Etats les plus méridionaux est de type subtropical « chinois ».
L'ethnographie du Brésil
C’est Pero Vaz de Caminha, chroniqueur de la flotte d’Alvares
Cabral, qui nous a donné les premières informations concernant les
indigènes qui peuplaient la terre du Brésil au moment de sa
découverte. Les divers groupes de langue tupi établis sur les côtes
étaient en état de guerre permanente et les prisonniers capturés
lors de ces combats étaient sacrifiés et mangés rituellement.
D’emblée, on associa le cannibalisme aux populations indigènes du
Brésil qui furent en contact avec les Portugais, puis avec les Français, mais disparurent rapidement du littoral. On possède – grâce au
témoignage d’Hans Staden, un arquebusier allemand engagé au
service du Portugal – de précieuses informations sur les rites
anthropophages des Tupinambas. D’autres témoignages, ceux de Jean
de Léry ou d’André de Thevet, sont également utiles. Il semble
que les découvreurs du pays aient surestimé le volume des
populations sur la côte ou au long de l’Amazone. La réduction en
esclavage des autochtones entraîna leur fuite vers l’intérieur.
La colonisation portugaise et la recherche de l’or contribuèrent
encore davantage à leur refoulement. C’est au XIXe siècle que
furent entreprises les premières enquêtes ethnographiques relatives
aux Indiens du Brésil, notamment par le prince autrichien Maximilien
de Wied-Neuwied et par le savant allemand Carl Friedrich Philip von
Martius. Le premier fut un pionnier des études indianistes avec sa
publication consacrée aux Botocudos. Karl von den Steinen et
Paul Ehrenreich purent ensuite identifier les quatre principaux
groupes linguistiques indigènes : le tupi, le caraïbe,
l’arawak et le jé. Gonçalves Tocantins réalisa ensuite un
travail majeur sur les Indiens chasseurs de têtes Munduruku. Ricardo
Franco de Almeida Serra étudia pour sa part les tribus du Mato
Grosso et de l’Etat de Rondonia. Au sud du pays, dans les Etats
du Parana et de Santa Catarina, les colons allemands arrivés au
XIXe siècle durent se débarrasser des populations Xokleng qui
défendaient leurs territoires, alors qu’en Amazonie, les
seringueiros engagés dans la récolte du caoutchouc, chassaient
toujours plus loin les indigènes. Dans la
région de Sao Paulo, ce sont les Indiens Oti qui disparurent face
à la pression des éleveurs européens. Tout un
mouvement s’organisa cependant en faveur de la protection des
Indiens, autour de Candido da Silva Rondon. On fonda en 1910 le
Service de protection des Indiens qui fut à l’origine de plusieurs
campagnes réussies de pacification. Les études se poursuivaient en
parallèle, celle des Nambikwara découverts dans le Nord du Mato
Grosso ou celle des Bororos approchés par un missionnaire italien.
Les années de l’entre-deux-guerres virent de nombreux savants
étrangers – dont Roger Bastide et Claude Levi Strauss – se pencher
sur les groupes indigènes. Les heurts directs entre colons et
Indiens appartinrent bientôt au passé et la FUNAI (Fundaçao
Nacional do Indio qui a remplacé le Serviço de Proteçao
aos Indios) veille, mais le défrichement de la forêt et les grands
travaux d’infrastructure qui se développent font que l’extinction
des groupes indigènes menacés par des maladies nouvelles se
poursuit inexorablement malgré les politiques de protection.
Le
Brésil colonial : de la découverte à l’exploitation
On convient généralement que le Brésil a été « découvert » par Pedro Alvares Cabral en 1500, mais de nombreux auteurs se sont interrogés à propos d'éventuelles reconnaissances antérieures à cette date.
1460-1462 :
Installation des
Portugais au Cap-Vert et, en 1472, à São Tomé. A partir de cette
date, ils multiplient les expéditions de reconnaissance vers
l’ouest.
Décennie
1490 : Le roi
Jean II envoie des caravelles en reconnaissance vers l’ouest après
sa rencontre avec Christophe Colomb.
1494 : Le traité hispano-portugais de
Tordesillas reporte très loin vers l’ouest la ligne de
démarcation proposée par le pape Alexandre VI dans sa bulle Inter Coetera promulguée l'année précédente, entre les terres de
souveraineté espagnole et portugaise. Il est possible que les
Portugais aient dès cette date découvert le Brésil ou en aient au moins soupçonné la réalité, et qu’ils en
aient gardé le secret. La partie la plus orientale de l'Amérique du Sud devient ainsi portugaise alors que l'on n'en connaît pas encore officiellement l'existence. L'attitude des Portugais semble confirmer cette ignorance. Ils essaient en effet d'obtenir, lors des négociations de Tordesillas, que les 370 lieues à hauteur desquelles doit s'établir la séparation entre les deux empires soient comptées à partir de l’extrémité orientale de l'archipel du Cap Vert, mais pas à partir de l’extrémité occidentale car ils veulent éviter qu'aux Indes orientales, les Moluques ne tombent dans la part réservée à l'Espagne. L'existence éventuelle de ce qui deviendra le Brésil est alors le moindre de leurs soucis...Il n'en reste pas moins que l'existence du Brésil était peut être connue en amont. En 1524, L'Hydrographie de Georges Fournier affirme que les marins dieppois ont atteint avant les Portugais la côte du Brésil et sont parvenus à un grand fleuve dans lequel certains ont cru ensuite reconnaître l'Amazone... On a attribué la découverte du pays à Jean Cousin et à Martin Behaim, mais ces hypothèses sont aujourd'hui rejetées. En 1499, le navigateur Vicente Yanez Pinzon a quitté Palos avec quatre caravelles. Passé par les Canaries et les îles du Cap-Vert, il aurait atteint au début de 1500 un cap situé au sud de l'Equateur, baptisé du nom de Sainte-Marie-de-la-Consolation (le cap Saint-Augustin des Portugais). Une reconnaissance à propos de laquelle les spécialistes se divisent toujours. L'interprétation d'un texte de Duarte Pacheco, son Esmeraldo de situ orbis, publié en 1505, conduit de plus à penser que l'intéressé aurait découvert une grande terre étendue au-delà de l'équateur, dans la région où s'étirent les côtes du Nord du Brésil... Le débat reste ouvert, mais il est en tout cas certain que tout voilier se dirigeant vers le cap de Bonne Espérance et poussé vers le sud-ouest par les alizés du nord-est avant de venir profiter des vents d'ouest dans les latitudes subtropicales de l'hémisphère sud, était naturellement conduit à toucher les côtes les plus orientales du Brésil.
22
avril 1500 :
Une flotte portugaise de douze navires (un autre a été perdu en route), commandée par Pedro Alvares Cabral, aborde
une côte inconnue, le futur Brésil. La flotte rassemble à bord de ses caravelles 1 200 à 1 500 hommes
pensant voyager vers l’Inde, sur les
traces de Vasco de Gama, parvenu à Calicut le 20 mai 1498.
L’expédition est commerciale : Cabral entend prendre
possession du marché asiatique des épices reconnu par Gama. La
découverte de cette nouvelle terre est jugée suffisamment
importante pour que la nouvelle en soit apportée au souverain
portugais. Cette date du 22 avril donne lieu par la suite à une
certaine sacralisation, d’autant que la découverte a été marquée, sur le lieu de l'abordage, par la célébration d'une messe et par l’érection d’une
grande croix. Pensant avoir affaire à une île, Cabral l'a baptisée – on approchait la date de la fête de l'Invention de la Croix – « terre de Vera Cruz ou de Santa Cruz ». La présence de bois de brazil, déjà connu aux Indes orientales et utilisé pour extraire une teinture rouge, fait que le pays est rapidement surnommé « terre du Brésil ».
1er
mai 1500 :
Après cette courte escale, Cabral reprend la mer pour Calicut où il
accoste au mois de septembre.
1501 :
Voyage de João da Nova vers le Brésil.
Mai
1501 à septembre 1502 :
Voyage d’une petite flotte commandée par Gonçalo Coelho. Il est
possible qu’Amerigo Vespucci en ait fait partie. Ces expéditions,
avec celles de Cabral et de João da Nova permettent de forger le
concept d’Amérique, fondé sur la certitude croissante que ces
terres sont celles d’un continent et non d’une île. Cette idée
s’impose définitivement en 1507 en Europe, grâce aux Quatre
Navigations de
Vespucci. Le voyage de 1501-1502 comporte, en plus de sa dimension
géographique et politique, un caractère économique et commercial :
le roi Manuel souhaite que soient explorées les possibilités
commerciales de la terre nouvelle. Il s’agit d’évaluer les
possibilités d’entrer en relation avec les indigènes et de savoir
notamment si le territoire recèle des métaux précieux. Les
résultats sont, a priori, décevants car les autochtones ne semblent
pas disposés à commercer.
Août
ou septembre 1502 :
La Couronne portugaise adjuge à des marchands de Lisbonne le
monopole de l’exploration de la côte brésilienne pour trois ans
renouvelables. Fernão de Noronha, qui mène l’expédition,
s’engage à armer une flotte chaque année pour explorer trois
cents lieues de côte. En échange, il bénéficie du privilège
exclusif du commerce et, notamment, de celui des bois de teinture, tels
que le pau-brasil, bientôt régulièrement exploité. Ce dernier est à
l’origine de la création du premier comptoir, à Porto Seguro,
avant que deux autres soient établis à Cabo Frio (Pernambouc) et
Bahia.
1503 :
Des Français abordent au Brésil d’où ils ramènent des
bois-brésil et des esclaves.
1508 :
Bulle Universalis
Ecclesia qui reste
en vigueur jusqu’en 1889. La mise en place d’un quadrillage
ecclésiastique se fait tardivement du fait de la réticence de la
Couronne et des colons à voir s’établir des missionnaires qui
condamnent la société esclavagiste mise en place.
Dès
1511 : la terre de
Santa Cruz est nommée de plus en plus couramment terre du brasil.
1514 :
La côte du Brésil est reconnue en totalité, des bouches de
l’Amazone au Rio de La Plata.
1529 :
Le roi Jean III confie à Martim Afonso de Sousa, capitaine général
de la flotte et de toutes les terres à découvrir, la mission de
fixer les frontières du Brésil. Une grande expédition est alors
menée dans cette perspective.
1530 :
Martim Afonso de Sousa est envoyé au Brésil avec, pour mission, de
détruire le comptoir français établi à Pernambouc. Les occupants
en sont chassés ou tués. Trente ans après sa découverte, le
Brésil ne dispose toujours d’aucune organisation administrative. Le
territoire est alors considéré comme dépourvu de métaux précieux
et autres produits de valeur. Sa colonisation, qui n’a pas encore
commencé, apparaît comme un défi.
1532 :
Martim Afonso de Sousa, qui a reçu en 1530 les pouvoirs pour créer
des établissements permanents et pour les peupler, fonde une
première ville dans l’île de São Vicente, non loin de l’actuel
Santos. Une seconde suit rapidement à l’intérieur des terres. On
ignore qui furent véritablement les premiers habitants, car les
nobles qui l’accompagnaient ne s’établirent pas définitivement
dans ces fondations. Il s’agit probablement d’hommes venus seuls
qui s’unirent à des Indiennes dont le pouvoir de séduction est
souligné par de nombreux témoins.
1532 :
Création du premier engenho,
c'est-à-dire de la première plantation sucrière par une société
commerciale qui en assure à la fois la construction et la gestion.
Les investisseurs sont des Portugais et le Flamand Johann Van Hielst,
représentant des Schetz, grands négociants et banquiers anversois
qui se retrouvent bientôt propriétaires exclusifs de cet engenho.
Les étrangers sont très intéressés par les engenhos
et l’on retrouve notamment un agent des Fugger au Pernambouc. Les
esclaves, qui effectuent la coupe de la canne, représentent la
majorité de la main-d’œuvre.
1533-1534 :
L’existence de plusieurs villes est mentionnée au Brésil. ( Lesquelles ? ne faut-il pas une carte ? )
Septembre
1534 : Jean
III offre la capitainerie de Pernambouc, dans le Nordeste brésilien,
à Duarte Coelho, fils de Gonçalo Coelho, l’un des découvreurs du
Brésil. Ayant fait fortune dans le commerce à Canton, il dispose
des capitaux nécessaires au développement du territoire qui lui est
confié. Il s’y établit avec sa femme, ses enfants, certains
membres de sa famille ainsi que des colons recrutés au Portugal,
parmi lesquels de nombreux nobles.
1537 :
Duarte Coelho construit la ville d’Olinda, sur une colline proche
de la mer, où il développe une économie équilibrée qui lui
permet de prospérer, d’autant que la capitainerie demeure
régulièrement approvisionnée en produits venant du Portugal. En
1550, on compte cinq moulins à sucre en activité à Pernambouc.
Duarte interdit de maltraiter les Indiens et monnaye leur travail
contre des outils en fer que ces derniers apprécient. Pour compléter
ses besoins, il fait appel aux marchands d’esclaves venus
d’Afrique.
1540 :
Les attaques répétées des Indiens effacent la présence portugaise
à Bahia, São Tomé, Espirito Santo et Porto Seguro. L’établissement
au Brésil s’avère difficile et de nombreuses fondations échouent
en raison de la faiblesse de leur population et de leur isolement.
Trop éloignées les unes des autres, elles ne permettent pas de
s’appuyer mutuellement face à la menace indigène.
1548 :
L’établissement de São Vicente compte 600 habitants et plus de
3 000 esclaves qui semblent avoir été obtenus par troc avec les
Indiens. Ils travaillent dans des moulins à sucre et dans de grandes
plantations de canne. A partir de cette zone, la culture de la canne
à sucre se diffuse vers le nord, jusqu’à Bahia et Pernambouc.
7
janvier 1549 :
Le roi nomme Tomé de Sousa, gouverneur général et capitaine au
Brésil. Il reste en fonction jusqu’en 1553. Les donataires
de capitaineries sont placés sous l’autorité du roi et sous le
contrôle du gouverneur général, dans un souci d’ordre et de
sécurité susceptibles de créer les conditions favorables à un
véritable peuplement. Le règlement prévoit la création d’une
capitale, pourvue d’un port et défendue par un bastion, dans la
capitainerie de Bahia. Le gouverneur est libre de distribuer les
terres aux colons qui doivent résider dans la ville ou sur leur
tenure pendant au moins trois ans avant de pouvoir la vendre. La
culture de la canne à sucre est recommandée. Le document interdit
en outre l’esclavage des indigènes tout en recommandant de mener
des expéditions punitives contre les Indiens rebelles. La conversion
des Indiens est souhaitée et il faudrait apprendre à lire et écrire
aux convertis. Enfin, la Couronne encourage l’émigration de
Portugais vers le Brésil.
29
mars 1549 :
Arrivée des premiers jésuites, sous la conduite de Manuel da
Nobrega. Seulement six au départ, les pères sont 110 en 1574. A
partir de 1549, une émigration portugaise s’organise vers le
Brésil, encouragée par la Couronne. Elle demeure cependant limitée
et largement inférieure à celle qui se dirige vers l’Inde
portugaise. On favorise l’émigration des femmes trop peu
nombreuses et les artisans portugais trouvent au Brésil une terre
favorable à leurs entreprises.
Vers
1550 : Le
Brésil portugais ne représente encore qu’un ensemble fragmenté
et parcellaire.
Entre
1550 et 1650 : L’exploitation de la canne et la fabrication du sucre bénéficient
de nombreux progrès. La culture sucrière qui domine l’économie
du Brésil jusqu’au milieu du XVIIe
siècle est à l’origine de la création d’une société
esclavagiste qui façonne l’identité du pays.
1551 :
Création du premier diocèse brésilien. Le choix du premier évêque
est un échec, car Fernandes Sardinha s’avère peu intéressé par
le sort et la conversion des Indiens. Deux pères jésuites arrivent
dans la capitainerie de Pernambouc. Les jésuites s’efforcent de
rassembler les Indiens réduits en esclavage dans des aldeias
où ils sont à la
fois protégés et catéchisés tandis que leur travail est rémunéré.
25
janvier 1554 :
Fondation par des pères jésuites du collège de São Paulo de
Piratininga, à l’emplacement de l’actuelle ville de São Paulo,
elle-même créée en 1560.
1555-1560 :
Courte période de présence française au Brésil sous l’influence
de Villegagnon. Cependant, lorsqu’il tente d’imposer le
calvinisme à ses compatriotes et d’interdire le concubinage avec
des indigènes, il provoque une révolte. La colonie est fort
divisée, ce qui l’affaiblit considérablement et les Français
sont réduits par une expédition portugaise menée en 1560.
Dans
la seconde moitié du XVIe
siècle : La culture
du tabac est introduite. Elle complète celle de la canne à
sucre. La plante, principalement cultivée par les esclaves,
concurrence les cultures vivrières telles que celles du manioc et des haricots.
1558-1572 :
Mem de Sa est gouverneur général de la colonie du Brésil. Comme
Tomé de Sousa, il cherche à faire régner l’ordre et la justice,
d’autant que la société compte de nombreux condamnés de droit
commun en son sein.
1560 :
Expédition dirigée par Bras de Cubas dans l’intérieur des
terres, conformément à la requête du roi qui cherche à contenir
l’avance castillane. L’expédition atteint les sources du São
Francisco et ses membres rapportent des échantillons d’or qui sont
envoyés au roi. Le principal problème qui se pose lors de la
pénétration est celui des relations conflictuelles avec les
indigènes.
1561 :
La présence jésuite à Pernambouc se confirme. Des pères sont
envoyés en mission tandis que João de Melo est nommé supérieur de
Pernambouc, avec l’assistance d’un jésuite interprète. Avec eux
commence l’évangélisation dans la région : l’activité
des jésuites se développe ainsi au sud.
1567 :
L’église de Pernambouc est achevée.
1570 :
Plusieurs familles appelées à jouer un rôle fondamental dans
l’histoire du Brésil colonial sont déjà installées à
Pernambouc : les Melo, Pais Barreto, Holanda, Cavalcanti de
Albuquerque. On compte alors soixante engenhos,
c'est-à-dire plantations de canne à sucre, principalement
concentrés dans les régions de Pernambouc et de Bahia.
Dans
la décennie 1570,
l’expédition dirigée par Bastião Alvares dans le bassin du São
Francisco n’est guère concluante.
20
mars 1570 :
Une loi réglemente la capture des indigènes aux termes de laquelle seuls peuvent
être réduits en esclavage ceux qui ont été pris en « juste
guerre » et ceux qui ont été rachetés alors qu’ils étaient
destinés aux festins cannibalesques. Face à la réduction en
esclavage pratiquée par les colons, les Indiens réagissent avec
violence, réduisant à néant les établissements portugais, ou bien
choisissent la fuite dans le sertão. Cette loi de 1570 provoque la
colère des colons qui obtiennent une lettre royale en 1573 qui la
vide de son contenu.
Vers
1570 : Les
conditions semblent réunies pour le développement de la colonie
brésilienne qui compte alors désormais deux à trois mille esclaves
africains. Le « boom » de l’industrie sucrière entraîne une forte
demande en main-d’œuvre.
Dès
1570 : Une série
d’ordonnances organise la défense du territoire de la colonie
grâce à la présence de soldats et à la construction de
forteresses.
En
1572 puis en 1607 : Le Brésil est divisé en deux entités ayant pour capitales
distinctes Salvador au nord et Rio de Janeiro au sud. Les deux Etats
sont eux-mêmes subdivisés en capitaineries.
1572 :
Expédition menée par le capitaine Antonio Dias Adorno. Si elle est
décevante, comme trois autres qui la suivent, elle permet
d’esquisser peu à peu une géographie du Brésil. Ces entradas,
comme on les nomme, permettent également de refouler ou de capturer
des Indiens, selon les besoins. La plupart sont menées dans la
région de Salvador de Bahia, alors capitale du Brésil.
Vers
1575 : On
évalue le nombre d’esclaves africains à dix mille environ, pour
la plupart employés dans les moulins à sucre. Longtemps, les
Portugais n’ont pas considéré le Brésil comme une colonie de
peuplement, et lorsque cette conception change, ils se considèrent
comme les maîtres, détenteurs de l’autorité et refusant
d’exercer un travail salarié. La colonisation du Brésil est donc
fondée sur la création d’une société esclavagiste.
1578 :
Francisco Barbosa da Silva explore le bassin inférieur du São
Francisco. Au sud, la pénétration vers l’intérieur se fait grâce
à l’initiative des jésuites dont le rôle est déterminant dans
la fondation d’établissements permanents et dans l’exploration
du continent.
Vers
1580 : D’importants
défrichements sont entrepris. Des habitants de São Paulo créent
alors des fazendas
consacrées à la culture du blé et promises à un grand avenir et
où travaillent de nombreux Indiens.
1585 :
Le Brésil aurait compté environ 30 000 Portugais, pour la
plupart établis dans la zone littorale. Faute de Portugaises, ces
hommes épousent des Indiennes ou des métisses.
1585 :
Incursion des colons contre les Indiens Carijos. Les
contre-offensives indiennes contre les entradas
sont fréquentes.
22
août 1587 :
Grâce à l’intervention des jésuites, une loi autorise les
Indiens à quitter les plantations dans lesquelles ils travaillent.
Ces dispositions sont réaffirmées et renforcées par la loi du 11
novembre 1595, puis par celles de 1605, 1609 et 1611 qui soumettent
en outre la définition de la « juste guerre » à la
décision du roi. L’éducation et la protection des Indiens sont
confiées aux jésuites. En réalité, ces lois sont peu appliquées
bien qu’elles engendrent une baisse relative des entradas,
incursions dans l’intérieur des terres, qui fournissent encore tout
de même, en 1590, une grande partie de la main-d’œuvre des
engenhos.
9
juillet 1591 :
Le premier visiteur inquisitorial arrive à Bahia pour visiter les
capitaineries de Bahia et de Pernambouc. De nouvelles visites ont
lieu dans les décennies suivantes dans l’ensemble du territoire.
Les dénonciations sont relativement peu nombreuses puisqu’elles ne
dépassent pas le millier. Les jésuites collaborent avec le
Saint-Office.
1591-1595 :
Expédition punitive contre des Indiens qui se sont rebellés contre
les entradas.
Dans un rayon de soixante kilomètres autour de São Paulo, les
Indiens sont tués ou réduits en esclavage. Ces expéditions
marquent le début de celles qui, au XVIIe
siècle, procurent des dizaines de milliers de captifs indiens aux
exploitations brésiliennes (dans les engenhos
sucriers et les fazendas
céréalières). Les Guaranis, considérés comme les plus
productifs, sont les plus touchés. Ces agriculteurs sédentaires
savent en effet mieux cultiver la terre que les nomades tupis. Jusque
dans la décennie 1620, les Paulistes n’entrent pas en conflit
ouvert avec les jésuites, défenseurs des indigènes, car la
population indienne est suffisamment importante pour leur fournir de
la main-d’œuvre.
Vers
la fin du XVIe
siècle, le roi du
Portugal cherche à vérifier l’exploitation et le commerce du
bois qui s’étaient faits jusqu’alors sans véritable contrôle.
L’essor de l’industrie sucrière qui consomme du bois en grande
quantité et l’arrivée d’une main-d’œuvre servile sont à
l’origine de ces changements. Le souverain impose désormais des
contrats annuels qui permettent d’expédier vers la métropole
10 000 quintaux de bois environ contre une somme de 40 000
cruzados.
Les navires assurant la liaison entre le Brésil et la métropole
sont la cible de corsaires anglais et hollandais notamment.
1591 : Plusieurs
établissements côtiers sont mis à sac par des Anglais.
Fin du XVIe - début XVII siècle : Des révoltes collectives d’esclaves venus
d’Afrique éclatent, car beaucoup refusent de se soumettre à leurs
conditions de travail et à leur déracinement culturel et
géographique. Des esclaves en fuite se regroupent parfois dans des
villages éloignés des zones de plantation, les quilombos
ou mocambos,
dont l’un des plus connus est celui de Palmares, dans l’Alagoas
actuel, emblématique de la résistance des esclaves face à leur
exploitation. Le village s’agrandit peu à peu, grâce à l’arrivée
de nouveaux esclaves en fuite qui développent une économie de
subsistance, fondée sur l’agriculture, la pêche, la chasse et
l’exploitation d’un minerai présent sur place. La capitale est
Macaco, entourée de plusieurs enceintes fortifiées, et Palmares
rassemble, à son apogée, un millier de personnes environ. A la
faveur de la déstabilisation engendrée par l’invasion hollandaise
de 1640, de nombreux esclaves s’enfuient des plantations et
s’installent dans des villages dans les environs de Palmares.
Au
début du XVIIe
siècle,
l’émigration portugaise vers le Brésil augmente de manière
notable et de nouvelles villes, telles que Belem, São Luis,
Fortaleza, Santos, apparaissent. Les Français reviennent également
au Brésil, bénéficiant de l’appui des indigènes qu’ils ne
réduisent pas en esclavage, utilisant leurs services pour
l’exploitation du bois tout en les laissant libres.
1604 :
Mise à sac du port de Salvador par les Hollandais.
1605 :
L’exploitation du bois est telle que le roi redoute le déboisement
du Brésil. Pour lutter contre cette menace, il promulgue un
règlement sévère qui subordonne les coupes à des concessions de
licences qui fixent les quantités de bois autorisées. Cela
s’accompagne d’inspections des forêts.
1610 :
La production de sucre atteint son pic, avec 4 millions d’arobas
exportés.
1612 :
Le gouvernement portugais renonce au système de contrat pour celui
de la régie dans le commerce de bois. L’exploitation du bois est
provisoirement suspendue dans le Pernambouc, afin d’endiguer le
déboisement.
1612 :
Le Brésil compte 192 engenhos
dont le nombre s’élève à 350 en 1629. L’expansion est continue
jusqu’aux agressions hollandaises de 1624 et de 1630.
1613 :
La présence française au Brésil est une nouvelle fois anéantie
par une expédition portugaise qui aboutit, en 1615, à la prise de
Saint-Louis du Maragnan ainsi qu’à l’expulsion des Français.
Poussant un peu plus loin leur expédition, les Portugais éliminent
les comptoirs hollandais et anglais établis sur la côte nord du
Brésil.
Décennie 1620 : L’installation de jésuites dans le Guaira, une des régions de
plus forte population guaranie, est à l’origine d’un véritable
conflit avec les colons. Les « réductions » jésuites
deviennent des viviers de population pour les colons avides de
main-d’œuvre. A la même période, quatre mille esclaves parviennent
chaque année au Brésil, le chiffre s’accroissant de 1650 à 1700
pour atteindre le nombre de sept mille par an. Les premiers esclaves
proviennent presque tous de Sénégambie et des régions du golfe de
Guinée, puis d’Angola à la suite de sa conquête par les
Portugais en 1575.
1624 :
Sac de Bahia par les Hollandais dont le projet de conquête du Brésil
sucrier est né au sein de la Compagnie hollandaise des Indes
occidentales. Des expéditions de secours sont menées pour protéger
d’autres villes qui pourraient faire l’objet d’agressions
hollandaises.
1625 :
Le monopole de la coupe, du transport et du stockage du bois est
attribué à la Compagnie de Jésus, toujours dans la perspective
d’empêcher la déforestation. Le bois est ensuite remis à un
contratador
qui détient pour sa part le monopole de l’exportation. Le marché
est ainsi régulé par le roi, les jésuites et le contratador.
Ce système ne fonctionne que jusqu’en 1630, date de l’invasion
hollandaise. De 1570 à 1625, le bois représente une ressource
substantielle qui génère de très importants profits. Après cette
date, l’exploitation se poursuit, mais le bois-brésil n’est plus
le moteur de l’économie coloniale.
1628-1641 :
Période des grandes bandeiras
organisées par des Paulistes contre les populations guaranies libres
et contre les missions jésuites dont les pères dénoncent la
cruauté des assaillants. Ces bandeiras
successives détruisirent l’ensemble des missions jésuites du
Guaira : les guaranis sont transférés par milliers (peut-être
soixante mille) vers les fazendas
de la région pauliste afin d’y travailler. Les missions du
Paraguay subissent le même sort.
Dans la décennie 1630 : Près de 80 % du sucre vendu à Londres provient du Brésil. C’est
dire l’importance de cette production qui poursuit son expansion
jusque dans les années 1660-1670.
Pendant
la décennie 1630,
les attaques hollandaises se poursuivent. Les Hollandais font porter
leurs efforts sur la zone la plus prospère du Brésil, la région de
Pernambouc, dont ils parviennent à se rendre maîtres vers 1634. Ils
continuent à étendre leur domination sous l’impulsion de
Jean-Maurice de Nassau de 1637 à 1640.
De
1640 à 1644 : Le
Brésil hollandais est à son apogée et compte 120 engenhos
actifs qui produisent une grande quantité de sucre.
A
partir de 1640 : Les
jésuites appuient la résistance contre les bandeiras
et obtiennent leur ferme condamnation par le pape. En réaction à
cela, les pères jésuites sont expulsés de São Paulo, de Rio de
Janeiro et de Santos. Ils partent alors fonder de nouvelles
réductions bien plus au sud où ils forment militairement les
Indiens à la résistance, ce qui leur permet de mettre en déroute
une bandeira
composée de près d’un millier d’hommes en 1641.
Dans
les années 1640,
l’Angola envoie environ 12 000 esclaves par an au Brésil qui
aurait importé au total près de 560 000 esclaves au XVIIe
siècle. Seule la moitié des esclaves parviennent vivants en Amérique,
du fait des conditions de transport exécrables.
1644 :
Les Hollandais mènent une expédition contre Palmares, sans plus de
succès que celle menée l’année suivante par les Portugais. A
cette époque, la zone de Palmares couvre 350 kilomètres de long et
abrite 11 villages et 20 000 habitants.
1648-1649 :
Les victoires portugaises des Guararapes signent la reconquête
progressive du Brésil hollandais qui disparaît en 1654, avec la
capitulation de Recife.
1649 :
Création de la Compagnie générale du commerce du Brésil qui
hérite du monopole de la coupe et du commerce du bois jusqu’alors
accordés aux jésuites. Elle permet en outre d’organiser des
convois sous la protection de navires de guerre à destination de
l’Europe.
Décennie 1660 : Ces années marquent la fin de la prépondérance sucrière du Brésil,
concurrencé par les productions hollandaises, anglaises et
françaises aux Antilles. La production de sucre diminue
régulièrement dès 1650.
1676 :
Création de l’archevêché de Salvador.
Fin du XVIIe
siècle : On compte
1,3 millions de bovins qui servent à la fois au transport des cannes
coupées, à la traction des trapiches
dans les moulins et à l’alimentation humaine. L’économie du
sucre a ainsi favorisé la pénétration des terres intérieures pour
l’élevage et la formation des latifundios,
grandes propriétés terriennes. A la même époque, plusieurs pôles
de peuplement émergent : le Reconcavo autour de Salvador, la
Varzea
de Pernambouc, la Baixada
Fluminense autour
de Rio de Janeiro et le Planalto
autour de São Paulo. Une société hiérarchisée se met en place,
avec de grandes familles qui s’imposent dans chacune de ces
régions et concluent des alliances matrimoniales les unes avec les
autres.
1693 :
Le gouverneur de Pernambouc mène une expédition de 9 000 hommes
contre Palmares dont les habitants sont tués ou capturés.
19
mars 1693 :
Lettre royale qui répartit les territoires de missions entre les
divers ordres religieux, notamment les franciscains et leurs
concurrents jésuites.
1697 :
Les deux tiers de la population du Brésil sont composés d’Indiens
et de Noirs originaires d’Afrique qui servent de main-d’œuvre
aux colons.
Vers
1700 : On estime la
population à environ 300 000 personnes. Dès cette époque, on
construit des routes afin de faciliter les communications entre les
régions aurifères et les grandes villes de la colonie. Le Brésil
connaît alors une transformation rapide de ses axes de circulation.
1719,
1725 et 1756 :
Révoltes d’esclaves dans le Minas Gerais.
1730-1760 :
En seulement trente ans, près de la moitié de l’or brésilien est
produite. La découverte de l’or provoque des déplacements massifs de
population, à tel point que les autres régions manquent désormais
de main-d’œuvre. Elle donne lieu à une migration importante
et durable depuis le Portugal entre 1697 et 1760. De même, le prix
des esclaves augmente considérablement dans le Minas Gerais où se
trouvent les gisements.
Décennie 1720 : Les chercheurs d’or du Minas Gerais découvrent des diamants que
seule l’Inde produisait alors, de surcroît en petite quantité.
1739 :
Création du premier séminaire diocésain à Rio de Janeiro. Celui
de Belem est créé en 1749 et celui de Mariana en 1750. Le grand
problème est celui de l’ignorance des prêtres à laquelle s’ajoute celui d'une morale parfois défaillante.
Vers
1750 : Déclin
de la production aurifère qui s’accélère vers 1770. Le Minas
Gerais est alors plongé dans une véritable crise économique puis
politique.
Vers
1760 : Les
migrations de Portugais atteignent leur pic, avec 8 000 à 10 000
arrivants par an durant la décennie. Les autorités portugaises
tentent d’enrayer cette vague, car la population du pays connaît
pour sa part un léger déclin.
1761 :
Introduction du café dans la région de Rio. La culture ne cesse de
se développer par la suite et le café est massivement exporté dès
la fin du siècle.
1760-1800 :
La production de coton connaît une croissance exponentielle dans le
Maranhão. Toute l’Europe est désormais alimentée en coton
brésilien. Pour cela, la province a recours à de nombreux esclaves
qui viennent la peupler progressivement.
1763 :
Rio de Janeiro remplace Salvador de Bahia comme capitale du Brésil.
En 1807, la ville compte environ 50 000 habitants.
1776 :
Premier recensement au Brésil qui estime la population à 1,5
million de personnes.
1782-1789 :
L’évêque de Para, le franciscain dom Frei Caetano Brandão, est
très actif. Il multiplie les visites épiscopales dans son diocèse.
Ces visites s’apparentent à de véritables expéditions et sont
fondées sur la prédication, l’enseignement et l’apprentissage
des bonnes mœurs à des populations quasi exclusivement
analphabètes.
Dans
les dernières décennies du XVIIIe
siècle, le Brésil
connaît trois conspirations successives dont deux peuvent être
considérées comme des mouvements précurseurs de l’émancipation
politique. En effet, avec le déclin de la production aurifère, le
Minas Gerais est plongé dans une grave crise. Or, le marquis de
Pombal a fixé le quinto annuel à 100 arrobas d’or. Si cette somme
n’est pas atteinte, les producteurs doivent verser une contribution
complémentaire, la derrama,
ce qui engendre inévitablement un fort mécontentement.
1788 :
Un nouveau gouverneur est envoyé pour percevoir les arriérés. Une
conspiration se prépare sous l’influence d’un certain Joaquim
José de Silva Xavier (surnommé « Tiradentes », pour avoir exercé l'activité de dentiste) ainsi que de personnages importants, des grands propriétaires, qui le soutiennent discrètement. Tous ces
personnages sont fortement endettés à l’égard du Trésor royal.
Leur programme envisage une sécession de la capitainerie du Minas
Gerais qu’ils veulent ériger en république, avec un parlement et
des assemblées parlementaires dans chaque ville. Le gouvernement
aurait été confié pendant trois ans à Tomas de Gonzaga, puis des
élections auraient eu lieu annuellement. Les esclaves nés dans le
Minas seraient libérés. Des liens ont probablement été établis
avec les capitaineries de São Paulo et de Rio de Janeiro.
Février
1789 : Le
gouverneur suspend la collecte de la derrama
et l’un des conjurés trahit ses compagnons en dévoilant toute
l’affaire.
10
mai 1789 :
Tiradentes
est arrêté et
les autres conjurés le sont également. Tous sont transférés dans
les prisons de Rio. Tiradentes est condamné à mort et exécuté en
1792 à la suite d’un long procès.
1794 :
Conspiration de Rio de Janeiro, d’une ampleur bien moindre que la
précédente. Il s’agit d’une agitation d’intellectuels dont
les préoccupations demeurent globalement scientifiques. La même
année a lieu la sédition bahianaise, appelée « révolution
des tailleurs » car elle est organisée par des artisans qui se
rebellent contre la suppression du contrôle des prix sur la farine
de manioc et la viande dont le prix augmente soudainement très
fortement. La sédition est menée par un tailleur mulâtre, Jean de
Dieu, et animée par des artisans mulâtres et noirs ainsi que par des
soldats sans emploi et des agriculteurs sans terre. Ils appellent les
habitants à la révolution, à éliminer les personnes publiques, à
attaquer les monastères, à ouvrir les prisons, à supprimer les
différences dues à la couleur de peau et, enfin, à abolir
l’esclavage. La réaction est rapide et quatre des principaux
meneurs sont exécutés.
Les
recherches ont montré que les meneurs des diverses conjurations
possédaient de nombreux ouvrages de philosophes des Lumières qui
les avaient probablement inspirés. Il y a donc, au final, un
mécontentement politique de la part des hommes d’affaires las de
subir ce que leur impose le Portugal et le système de l’exclusif
ainsi que des menaces d’explosion sociale dues aux différences de
traitement selon les origines.
De
1796 à 1811 : La
part des produits brésiliens dans les importations coloniales de la
métropole est supérieure à 80 %. C’est grâce aux produits
brésiliens que le commerce portugais avec l’Angleterre se
maintient. Cependant, la France napoléonienne victorieuse en Europe
fait pression sur le Portugal pour qu’il cesse d’approvisionner
l’Angleterre, dans une logique de blocus continental.
Novembre
1807 : Devant
le refus portugais de cesser son commerce avec l’Angleterre, la
France envahit le Portugal. La Cour, menée par le prince-régent
Jean de Portugal, ainsi que les services administratifs du royaume
fuient vers Rio de Janeiro. Ce sont 10 à 15 000 personnes qui
embarquent à bord d’une vingtaine de navires. Rio devient alors la
capitale de l’empire. La Cour est chaleureusement accueillie par
les Portugais et les créoles brésiliens. L’appareil de l’Etat
central est reconstitué au Brésil tel qu’il l’était au
Portugal et avec les mêmes institutions.
Mars
1808 : Début
de négociations avec l’Angleterre sous l’influence de Dom
Rodrigo de Souza Coutinho, fervent partisan de l’alliance anglaise.
Elles aboutissent à la conclusion de traités de commerce et
d’alliance signés en février 1810 et très favorables à
l’Angleterre. Le traité de commerce prévoit l’entrée libre des
produits britanniques dans cinq ports brésiliens. Les produits
brésiliens sont, quant à eux, favorisés par rapport à ceux des
autres nations, notamment le coton. Ce traité suppose une diminution
considérable des recettes douanières du Brésil et, par conséquent,
une révision de la fiscalité. Toutefois, la colonie conserve la
maîtrise du trafic négrier. Les négociations sont menées par
Rodrigo de Souza Coutinho qui assure la direction des affaires
brésiliennes jusqu’à sa mort en janvier 1812. Ce système ouvre
ainsi considérablement le Brésil auquel il sera désormais très
difficile d’imposer à nouveau un statut colonial. Après la
défaite de Napoléon, rien ne s’oppose plus désormais au retour
du régent à Lisbonne, mais ce dernier demeure au Brésil. A la mort
de sa mère, la reine Marie, il devient roi, sous le nom de Jean VI,
et se proclame roi du Portugal et du Brésil. Rien n’est aisé car, dans la mesure où leurs intérêts divergent, Portugais et Brésiliens s’opposent sur de nombreux points.
1811 :
Les Anglais font pression sur le Portugal et le Brésil pour mettre
fin à la traite esclavagiste et ils arraisonnent des navires
portugais au large de la côte africaine. Pour les Brésiliens,
l’abolition de la traite signifierait la ruine économique du pays.
Janvier
1815 : Dans le
contexte du congrès de Vienne, une convention et un traité sont
signés entre le Portugal et la Grande-Bretagne. La convention
prévoit le versement par les Britanniques d’une indemnité de
300 000 livres pour les arraisonnements illégaux de navires
portugais tandis que le traité institue l’interdiction de la
pratique négrière au nord de l’équateur. Enfin, le traité de
1810 est aboli. Ces décisions sont contraires aux intérêts des
Brésiliens qui tiennent avant tout à pouvoir s’approvisionner en
esclaves.
Au
début du XIXe
siècle, le Brésil
compte environ trois millions d’habitants, soit une population qui
avoisine celle du Portugal. Les peuples y sont nombreux, qu’il
s’agisse d’Européens, d’Indiens, d’Africains ou
d’Asiatiques, et souvent métissés. Le mariage n’est pas la
règle et il est même un privilège réservé à une petite élite.
La société brésilienne est d’ailleurs extrêmement permissive.
La société du Nordeste est la plus élaborée, fondée sur un
modèle portugais, tandis que celle de São Paulo est calquée sur le
mode de vie indien et la pauvreté y règne. Quant au Sud du Brésil,
il est formé de zones pionnières.
Dans
la décennie 1820,
une industrie cotonnière s'installe dans le Maranhão où la
culture du riz se développe également. Pour la première fois de
son histoire, l’économie brésilienne n’est plus dépendante
d’un seul produit. Plusieurs régions participent à l’activité
exportatrice : le Nord avec le sucre et le riz, le Nordeste avec
le coton et le sucre, le Centre et le Sudeste avec le sucre, le café
et les cuirs. La courte durée des cycles commerciaux secondaires
s’explique par la faible qualité des produits fournis par le
Brésil.
De
la révolution à la naissance d’une nation indépendante
De 1820 à 1830, on estime à 720 000 le nombre d’esclaves parvenus sur le sol brésilien.
24
août 1820 :
La révolution portugaise naît à Porto, relayée à Lisbonne dès
le 15 septembre. Depuis au moins 1818, certains milieux œuvrent en
faveur d’une constitution libérale. La métropole se sent
désormais humiliée et négligée au sein de l’empire. Il s’agit
de mettre fin à la dépendance du Portugal à l’égard de la Cour
de Rio de Janeiro.
6
octobre 1820 :
Le gouvernement provisoire qui vient d’être mis en place s’adresse
au roi afin de le sommer de revenir au Portugal. La portée des
événements portugais est tout d’abord minimisée.
20
décembre 1820 :
Arrivée à Rio du comte de Palmela, diplomate qui apporte des
renseignements précis sur la nature de la rébellion. Il recommande
à Dom Pedro, héritier de la couronne, de partir pour le Portugal
afin de mener les négociations avec les révolutionnaires : il
s’agit de faire des concessions qui demeurent dans la limite du
raisonnable et d’éviter ainsi l’extension de la révolte au
Brésil. Cependant, le roi ne tient pas compte des conseils de
Palmela, préférant écouter le point de vue de Tomas Antonio de
Vilanova qui sous-estime l’ampleur de la révolution au Portugal.
1er
janvier 1821 :
Comme l’avait prévu Palmela, la révolution libérale se déclenche
au Para, puis, le 10 février, à Bahia et, enfin, à Rio le 26 février.
Sous la pression de la troupe révoltée, Jean VI s’engage à reconnaître la Constitution qui se ferait au Portugal.
3
juillet 1821 :
Retour du roi Jean VI au Portugal pour des raisons de santé. A son
départ, il institue un conseil de régence placé sous l’autorité
de son fils, Dom Pedro.
1821 :
La ville de Rio compte environ 80 000 habitants dont le nombre
ne cesse de croître tout au long du XIXe
siècle.
Juillet 1821 :
La Division auxiliaire portugaise oblige Dom Pedro à recomposer le
Conseil de régence dans un sens libéral. Le jeune prince entreprend
un tour du Brésil et annonce qu’il y restera. Il allie tout
d’abord avec aisance la tradition monarchique et le message
libéral. En parallèle, s’organise l’élection d’un conseil des
députés des provinces ainsi qu’une convocation aux élections
d’une Assemblée générale constituante et législative, ce qui
signifie, de fait, une rupture avec le Portugal.
7
septembre 1822 :
Lorsqu’il apprend que les Cortes portugaises entendent mettre fin à
ses pouvoirs, il prononce la fameuse phrase : « L’indépendance
ou la mort. » C’est l’indépendance et la naissance de
l’empire du Brésil. L’état de grâce entre Pedro Ier
et la classe politique brésilienne en formation est de courte durée.
Les cinquante-trois députés de l’Assemblée constituante, presque
tous des juristes, sont imprégnés des idées des Lumières ainsi
que de l’influence de la franc-maçonnerie. Ils sont défavorables
à l’absolutisme tout en se méfiant du peuple. Surtout, ils sont
très hostiles aux Portugais, ce qui explique leur défiance à
l’égard de Pedro Ier.
1823 :
Le Brésil compte,
sur une population légèrement inférieure à 4 millions
d’habitants, 1,2 millions d’esclaves, ce qui est considérable. Ces derniers sont principalement concentrés dans le
Nordeste, dans le Minas Gerais et dans la province de Rio où ils sont plus nombreux que les hommes libres.
1823 :
Elaboration d’un projet constitutionnel.
12
novembre 1823 :
Pedro Ier
fait fermer l’Assemblée par la troupe, mécontent des critiques
qui lui reprochent l’enrôlement d’officiers portugais dans
l’armée brésilienne.
1822 :
Le Brésil ne compte qu’un archevêché, six diocèses, deux
prélatures et une trentaine de paroisses, ce qui est fort peu au
regard de l’étendue du pays. Souvent, les sièges épiscopaux
étaient demeurés vacants car les prélats n’étaient guère
enthousiastes à l’idée d’obtenir un bénéfice au Brésil. La
plupart des évêques étaient Portugais, ce qui faisait d’eux des
relais du pouvoir royal. L’évêque était d’ailleurs le
substitut du capitaine général et même, à Bahia, du vice-roi en
cas d’incapacité. Il s’agissait d’être à la fois bon
chrétien et bon vassal, et la fonction politique des évêques
éclipsait leur vocation religieuse. En outre, les grands domaines
sucriers ou céréaliers échappaient à l’encadrement paroissial
et disposaient parfois de leur propre chapelain, sans que cela revêtît un caractère systématique. Dans le Minas, à la fin du XVIIIe
siècle, on ne recensait que huit chapelains pour cent domaines.
1824 :
Pedro Ier
fait promulguer une charte qui constitue la base légale de l’empire.
L’empereur nomme le gouvernement et peut également dissoudre la
Chambre des députés. Les conditions de vote sont très
restrictives.
1824 :
Création de la colonie allemande de São Leopoldo qui compte 12 000
habitants en 1855.
1824-1834 :
Les épisodes de révoltes se multiplient, avec, parfois, des velléités
sécessionnistes.
1826 :
Election de la Chambre des députés avec laquelle Pedro ne parvient
pas à s’entendre. L’empereur doit également faire face à
divers mouvements séparatistes. En outre, à la mort de Jean VI en
1826, la Chambre oblige Pedro à renoncer à la couronne portugaise
au bénéfice de sa fille Maria da Gloria.
Vers
1830 : Des sociétés
secrètes apparues dans la décennie précédente préparent un
mouvement révolutionnaire.
7
avril 1831 :
Face au danger représenté par ces sociétés secrètes, Pedro Ier
abdique soudainement. Il semble que cette abdication ait déconcerté
les révolutionnaires en provoquant une déradicalisation de
l’opposition. Cela n’empêche pas les émeutes qui témoignent
des vives tensions sociales au Brésil. Une Régence est alors
instituée puisque le futur Pedro II n’a alors que cinq ans.
De
1831 à 1850 : Le
Brésil importe en moyenne 24 000 esclaves africains par an, en
dépit des pressions internationales, soit un demi-million de
personnes sur les deux décennies.
1834 :
L’Acte additionnel instaure une régence unique dont l’élu est
le père Feijo, jusqu’alors ministre de la Justice. Ce partisan de
l’abolition progressive de l’esclavage doit affronter à la fois
les abolitionnistes les plus exaltés et les ultraconservateurs.
1835 :
Guerre sociale, appelée la cabanagem,
dans la région du Para, menée par des populations métissées
d’Indiens et de Noirs. Les cabanos
se rebellent et se rendent rapidement maîtres d’une partie de la
province et de la capitale, Belem, qu’ils conquièrent en 1835. Ils
envahissent ensuite les fazendas
et les villages. L’indépendance du Para est même proclamée. La
guérilla se maintient jusqu’en 1840 et la guerre civile fait
environ 30 000 morts. D’autres révoltes émergent à la même
époque au Maranhão ou à Pernambouc. Les révoltes sont extrêmement
nombreuses, mais sont toutes vouées à l’échec en raison de
l’impossible entente entre créoles et
Africains, métis et Noirs, affranchis noirs ou mulâtres libres.
1835 :
Dans la région de Bahia, révolte des malês
menée par des esclaves musulmans, connaissant pour certains l’arabe
et originaires du Nigéria. Elle est conduite par des Haoussas et des
Nagôs et exclut les esclaves brésiliens.
1836 :
Un conflit éclate dans la région du Rio Grande do Sul et s’envenime
à tel point que les rebelles proclament la république le 6 novembre
1836.
1837 :
Démission de Feijo en raison des multiples révoltes qu’il ne
parvient pas à apaiser. Il est remplacé par le premier ministère
conservateur du marquis d’Olinda.
1840 :
Proclamation de la majorité de Pedro II.
1838 :
Lors d’une révolte au Maranhão, un esclave emprisonné, Cosme
Bento, s’enfuit et fonde un quilombo
qui regroupe bientôt près de 2 500 personnes. Avec la troupe qu’il
organise, il met en coupe réglée les villages et les fazendas
de la région. Au XIXe
siècle, aucun quilombo
n’atteint cependant les dimensions de celui de Palmares.
Dans
la décennie 1840 : L’économie brésilienne retombe dans la dépendance d’un seul
produit, le café, qui se développe dans la province de Rio, à
laquelle il assure ainsi une prépondérance politique et économique.
Les terres rouges sont très fertiles, bien arrosées et peu exposées
au vent et au froid. Les fazendas
caféières de Rio utilisent une main-d’œuvre servile et certains
grands propriétaires possèdent jusqu’à un millier d’esclaves.
A
partir de 1840 : Le
mouvement de fondation de colonies (allemandes notamment)
s’intensifie dans le Sud du pays. Aux Allemands s’ajoutent
bientôt des Italiens du Trentin. On n’y trouve aucun esclave et
ces colonies fournissent la preuve de la possibilité d’un
développement économique sans recours à l’esclavage. Ces colons
sont, pour la plupart, de petits propriétaires. Ailleurs au Brésil,
la question de la possession de la terre se pose : si l’on
veut susciter un mouvement d’immigration depuis l’Europe, il faut
mettre des terres sur le marché, ce qui n’est pas chose aisée. En
dépit d’une loi de 1851 sur les terres qui ne fut guère
appliquée, ces dernières demeurent difficiles d’accès pour des
migrants qui préfèrent les Etats-Unis où il est bien plus facile
d’en obtenir.
1846-1849 :
La quantité d’esclaves importés chaque année double voire triple
par rapport aux années précédentes, pour atteindre le chiffre de
60 000 en 1848. Les planteurs de café de la région de Rio se
hâtent de faire venir de la main-d’œuvre servile dans la
perspective de l’interdiction de la traite, ce qui explique la
flambée des prix des esclaves sur cette période.
A
partir de 1848, le
rôle de Pedro II s’affirme, il fait alterner les ministères
libéraux et conservateurs, afin d’éviter qu’ils ne prennent
véritablement de l’influence dans le pays. L’empereur accorde
beaucoup d’importance au Conseil d’Etat qu’il consulte
fréquemment. Les conseillers sont les dépositaires d’une
certaine autorité morale et politique.
Après
les années 1850 : Les capitaux considérables autrefois utilisés pour le financement
de la traite négrière sont utilisés pour l’industrialisation du
Brésil, notamment dans le Sudeste. En dix ans, des industries, des banques, des compagnies maritimes et de transport apparaissent tandis
que l’on avance dans la colonisation du pays et dans la
construction du réseau ferré. C’est également l’époque de la
ruée vers l’Amazonie pour la récolte du latex contenu dans
l’hevea
brasiliensis, à
l’époque du développement du caoutchouc.
4
septembre 1850 :
Par une loi, le Brésil met un terme à la traite tout en demeurant une
grande nation esclavagiste. Cependant, les esclaves continuent à entrer sur
le territoire grâce à la contrebande. Des débarquements
clandestins ont lieu jusqu’en 1856 au moins. C’est la
détermination du gouvernement qui met fin progressivement à la
traite : les contrebandiers sont sévèrement punis et les
esclaves confisqués. La traite est remplacée par un intense trafic
interne. C’est ainsi que les provinces du Nordeste, de Bahia, du
Pernambouc et du Maranhão, deviennent pourvoyeuses d’esclaves pour
les régions caféières de Rio et de São Paulo. Cette situation
engendre de fait un déséquilibre pour les zones qui perdent leurs
esclaves par dizaines de milliers. De ce fait, de 1850 à 1880,
la répartition de la population servile se modifie : les
provinces de Rio, du Minas et de São Paulo en totalisent plus de la
moitié.
Au
milieu du siècle : Avec l’abolition de la traite, la proportion d’esclaves dans la
population diminue. On compte désormais 15 % d’esclaves tandis
qu’en chiffres absolus, leur nombre a augmenté de 350 000.
Dans
la décennie 1860 : La culture du café se déplace vers la région de São Paulo. En
effet, elle a été touchée de plein fouet par la hausse du prix des
esclaves dans la décennie 1850 puis par l’abolition de la traite.
Les Paulistes introduisent une technologie plus performante et une
organisation du travail plus rationnelle. Surtout, ils commencent à
utiliser une main-d’œuvre salariée qui provient soit du Nordeste,
sujet à de grandes sécheresses, soit d’Italie. L’essor de la
production caféière suscite une prospérité durable et favorise
l’essor du réseau ferré qui désenclave l’intérieur du pays.
Surtout, dès 1860 et grâce au café, la situation du commerce
extérieur s’inverse et le solde exportations-importations devient
positif.
1867 :
La guerre dans laquelle le Brésil est engagé pour des raisons
territoriales contre le Paraguay vire au génocide : le peuple
guarani est victime d’une politique d’extermination.
1867 :
Le discours du trône de Pedro II, dans lequel il condamne
l’esclavage, provoque l’indignation à la Chambre, au Sénat et
au Conseil d’Etat, preuve que les antiabolitionnistes sont très
nombreux. Jusqu’alors, les projets de loi abolitionnistes avaient
été écartés avant même d’être discutés.
1870 :
Le Paraguay est amputé de vastes territoires au nord-ouest, au
profit du Brésil.
Dans
la décennie 1870 : Le Brésil connaît une prospérité inégalée. Le marché intérieur
prend de l’importance tandis que le travail salarié se développe
et que de nouvelles vagues d’immigrants arrivent. En parallèle,
le pays s’urbanise et la population des villes ne cesse de croître.
7
mars 1871 :
Présentation d’un projet de loi qui vise à affranchir dès la
naissance les enfants d’esclaves. Il provoque la scission du parti
conservateur. Il s’agit d’aller vers une abolition progressive
tout en conservant « la propriété servile comme élément
indispensable de travail ». En dépit de très vives
oppositions, le projet est adopté par 61 contre 35 voix. La loi du
28 septembre 1871 porte le nom de loi du « Ventre libre ».
1874-1875 :
Révolte « quebra-quilos »
(casse-kilos), à caractère antifiscal, dans les provinces du
Nordeste. L’insurrection se répand rapidement, en raison de la
faiblesse de la police. Les rebelles détruisent les poids et mesures
nécessaires au calcul de la taxe contre laquelle ils se révoltent.
1877-1882 :
Le pays connaît une grave sécheresse et des révoltes.
La
décennie 1880 : Début de l’émigration italienne. Ils ne sont alors que
quelques milliers de paysans italiens à traverser l’Atlantique, mais le phénomène est appelé à s’accroître de manière
durable. La population servile est d’environ 1,5 millions, ce qui
prouve qu’en dépit de la fin de la traite, le Brésil continue à
utiliser la main-d’œuvre servile comme force de travail. La
tension sociale est palpable dans l’ensemble du pays et les fuites
et révoltes d’esclaves se multiplient. La cause abolitionniste
compte de plus en plus de partisans tandis que certains propriétaires
organisent pour leur part la traque des esclaves fugitifs de plus en
plus nombreux.
1883 :
La Confédération abolitionniste voit le jour et regroupe plusieurs
sociétés favorables à l’émancipation. Elle est soutenue par
l’empereur et son épouse.
A partir de 1884 : Les provinces
de l’Amazonas et du Ceara qui ne comptent que peu d’esclaves se
prononcent en faveur de l’affranchissement afin de rétablir le
calme.
Tout
au long du siècle,
le pays est traversé par des missions d’exploration menées par
l’ensemble des pays européens ainsi que par des Brésiliens. Elles
ont pour conséquence le développement d’une navigation à vapeur
vers l’intérieur des terres, du fait de l’impossibilité
d’établir un réseau ferré dans le bassin de l’Amazone. Vers
1880, la navigation fluviale offre près de 50 000 kilomètres
de lignes, contre seulement 9 000 pour le réseau ferré.
1887 :
L’empereur malade doit suivre un traitement en Europe et sa femme
Isabelle assure la régence. Il fait un retour triomphal en juillet
1888.
Mai
1888 : La loi
d’abolition, dite « loi d’Or », est enfin votée. Les
barons, c’est-à-dire l’aristocratie foncière qui domine les
institutions représentatives, entrent alors en dissidence et rompent
avec l’empereur. Ce dernier tente de jouer sur leurs divisions
internes, mais cela entraîne une instabilité ministérielle qui
aboutit à la chute du régime. En outre, du fait de sa maladie,
Pedro II ne gouverne plus comme autrefois.
Les
débuts de la République
15
novembre 1889 :
Un coup d’Etat militaire emporte le régime et aboutit à la
proclamation de la République. Pedro II de Bragance est alors
destitué. Le maréchal Deodora da Fonseca, qui a pris la tête du
mouvement, proclame, sous la pression des républicains, la
« république des états-Unis du Brésil » tandis que la
foule entonne la Marseillaise. Ce sont principalement des
républicains modérés qui intègrent le gouvernement de Deodora da
Fonseca. Personne n’y représente les intérêts du peuple qui
reste à l’écart de l’idéal républicain.
1889-1891 :
Présidence de Deodoro da Fonseca, contraint à la démission le 23
novembre 1891.
17
janvier 1890 :
Le gouvernement provisoire fait droit à la revendication de
séparation des Eglises et de l’Etat, instaurant la liberté de
culte et le mariage civil. Pour l’Eglise, qui déplore la
naissance d’un Etat athée, c’est aussi la libération de la
tutelle de l’Etat : les évêchés fleurissent et les
congrégations originaires d’Europe arrivent massivement. Les
séminaires passent également sous l’influence de congrégations
étrangères, afin de renforcer le niveau intellectuel et d’affermir
la morale des futurs prêtres.
1890 :
Rio, la capitale, compte plus de 520 000 habitants. Les banques
et les sociétés de commerce dominent l’économie de la capitale
tandis que l’activité industrielle est moindre. La population du
pays est alors de 14 millions d’habitants, contre seulement 4
millions en 1823 et 10 millions en 1872. La forte hausse est
principalement due à l’accroissement naturel. La population du
Nordeste est également très importante tandis que le Nord, le
Centre et le Sud représentent des zones pionnières pour les colons
venus d’Europe et les émigrés du Nordeste.
1891-1894 :
Présidence du maréchal Floriano Peixoto, véritable despote qui
combat la révolution fédéraliste du Rio Grande do Sul qui menace
l’unité de la nation.
24
février 1891 :
Promulgation d’une nouvelle constitution, approuvée par le Congrès
et inspirée du modèle des Etats-Unis d'Amérique. Les Etats
disposent d’une grande autonomie économique, administrative et
politique. Ils choisissent leur président et leur assemblée
législative. A priori démocratique, la constitution exclut les
analphabètes du droit de vote.
De
1890 à 1900 : 1,2
millions d’immigrants entrent sur le sol brésilien. De nombreux
Italiens arrivent (1,1 million pendant la Première République) et
sont employés dans les fazendas
caféières où ils remplacent la main-d’œuvre servile. Une
véritable politique d’immigration est mise en place avec des
systèmes d’accueil et de tri. Les Italiens et les Espagnols
travaillent dans la culture du café et dans l’industrie, tandis que
les Portugais sont présents dans le commerce et les services. Et il
faudrait aussi citer les Russes, les Allemands, les Hongrois, les
Tchèques, les Polonais, les juifs et les Syro-Libanais de l’Empire
ottoman qui viennent peupler le pays.
28
juin 1890 :
L’entrée des populations asiatiques et africaines est soumise à
l’autorisation du Congrès. Quelques années plus tard, certains
tentent même d’interdire l’entrée sur le territoire aux Noirs,
initiative repoussée, mais qui témoigne de la volonté de
s’identifier aux origines européennes des premiers colons. Jusqu’à
la première guerre mondiale, on escompte le « blanchiment » de la
population, grâce à l’arrivée massive d’Européens :
certains pensent que la population redeviendra très majoritairement
blanche en l’espace d’un siècle.
1891 :
Constitution républicaine qui réserve la citoyenneté active aux
hommes alphabétisés, soit moins de 30 % des hommes. En 1889, la
République des fazendeiros,
propriétaires de plantations caféières, voit ainsi le jour.
15
novembre 1894 :
L’avocat Prudente de Morais accède à la présidence de la
République. Ce premier président civil élu au suffrage
« universel » demeure au pouvoir jusqu’en 1898.
1898-1902 :
Présidence du Pauliste Campos Sales. Il met en place un système
d’entente entre Rio et les gouvernements de la fédération qui
favorise le maintien au pouvoir des élites. L’Etat
s’engage à réprimer les éventuelles dissidences locales, d’où
le nom de colonélisme
attribué à ce système de la politique des gouverneurs. Les
colonels sont en effet les chefs locaux de l’intérieur. La
République confère ainsi au colonélisme
une importance qu’il n’avait pas jusque-là, en donnant du
pouvoir au municipe. Le colonel, propriétaire foncier, commerçant
ou industriel, est un chef de clan, à la tête d’un vaste réseau
de parentèle et de fidélités. Il accorde protection et faveur en
échange de l'obéissance. L’autre figure
du pouvoir local est le doutor,
avocat ou médecin, qui détient le prestige lié à l’instruction.
Les colonels sont les garants de la stabilité de l’Etat en
maintenant le calme dans les provinces et, le cas échéant, en
réprimant les rébellions. En échange, ils attendent de leur Etat
des emplois et des crédits pour leur municipe.
Vers
1902-1904 : Les
Etats-Unis d'Amérique remplacent la Grande-Bretagne comme premier importateur de produits brésiliens et ils sont bientôt les principaux
partenaires commerciaux de Rio.
1902 :
Dès son arrivée au pouvoir, Rodrigues Alves fait de
l’assainissement et de la modernisation de Rio, la capitale, une
priorité. En effet, la population s’y entasse dans des conditions
sanitaires déplorables et elle y est sujette à de nombreuses
épidémies. On entreprend de rénover la ville, on vaccine les
habitants, on éclaire les rues. C’est à la même époque que la
samba apparaît, que les premiers clubs de football émergent, que la
baignade se généralise.
1906 :
Les trois quarts de la production mondiale de café sont brésiliens.
Les colons, salariés agricoles munis d’un contrat de travail
annuel, vivent dans des maisons sur le domaine de la fazenda
et disposent d’un lopin de terre destiné à leurs cultures
vivrières. La structure caféière repose sur d’immenses
plantations qui appartiennent à de grandes familles de fazendeiros
et sont gérées par des intendants. Les planteurs de São Paulo sont
en relation avec les banquiers et ce sont des maisons de commerce
anglaises qui commercialisent le café vendu aux Etats-Unis et
transporté par des compagnies de chemin de fer et des navires
également britanniques. La production de coton et de sucre ne cesse
de décroître alors que la culture du cacao redonne un peu de
vigueur à l’économie bahianaise.
Entre
1908 et 1912 : Le
pic de la production de caoutchouc est atteint avec 80 millions
d’hévéas exploités sur trois millions de kilomètres carrés.
Près de la moitié de la production mondiale est produite en
Amazonie dont la population s’accroît considérablement. Manaus
devient alors la capitale du caoutchouc. Cependant, un Britannique
dérobe des graines d’hévéas qu’il plante en Asie : c’est
le début de la prospérité du caoutchouc asiatique qui provoque
rapidement la banqueroute des maisons de production brésiliennes.
1908 :
Création du premier syndicat, la Confédération ouvrière
brésilienne. Le mouvement ouvrier est très influencé par
l’anarcho-syndicalisme venu du Portugal, d’Italie et d’Espagne.
Les programmes des syndicats se caractérisent par leur
anticléricalisme, par leur antimilitarisme et le refus de participer
aux élections. La grève est présentée comme la solution aux
problèmes des ouvriers. La lutte des classes est particulièrement
intense dans la région de São Paulo.
1910 :
Création du Service de protection de l’Indien afin de défendre ces derniers d’une éventuelle volonté d’extermination.
Vers
1910, alors que
l’influence de la région pauliste décline, celle du Rio Grande do
Sul ne cesse de s’affirmer, ce qui se ressent dans l’occupation
des divers ministères.
1911 :
Révolte millénariste menée par un certain José Maria, laïc
illuminé, dans la région du Contestado, zone frontière disputée
entre le Paraná et le Santa Catarina. Plusieurs villes saintes se
forment, regroupant 20 000 fidèles environ. Il faut
l’intervention de l’armée fédérale pour venir à bout du
Contestado : les communautés sont détruites une à une à
partir de septembre 1914.
Entre
1912 et 1929 : Plus
de trente compagnies des Etats-Unis d'Amérique s’installent au Brésil en
pleine industrialisation.
1917 :
Grève générale à São Paulo. Les ouvriers revendiquent de
meilleurs salaires. Certains quartiers s’organisent en pôles de
résistance. Cependant, du fait du faible poids des ouvriers, la
République n’élabore aucune législation du travail.
1920 :
Le pays compte 275 000 ouvriers, signe de son industrialisation.
1922 :
Le mouvement des lieutenants ou tenentismo
apparaît, sous l’influence de jeunes officiers qui se tiennent
pour les dépositaires du patriotisme et de la moralité publique.
Ils aspirent à voir brisée la toute puissance de São Paulo et du
Minas. Leur mouvement exige une double rupture : avec les
élites dominantes d’une part et la hiérarchie militaire d’autre
part.
5
juillet 1922 :
Révolte des militaires du fort de Copacabana à Rio contre l’arrivée
au pouvoir du nouveau président Artur Bernardes. Bombardés, les
insurgés doivent se rendre dès le lendemain, mais le mouvement de
rébellion est lancé pour une décennie.
1924 :
Création d’un Institut du café à São Paulo qui doit, à
l’origine, réguler les mises sur le marché. Le krach de 1929
entraîne la chute des cours du café et la ruine de ce secteur.
L’ère
du populisme
1er
mars 1930 :
Les élections présidentielles se tiennent dans un climat de tension
entre les deux partis en présence. Les fraudes sont massives. La
victoire de Julio Prestes, président de l’Etat bandeirante (Sao Paulo),
est entérinée. Les vaincus, partisans du candidat gaucho Getulio
Vargas (ainsi surnommé car il représente les grands propriétaires du Sud), n’acceptent pas la défaite.
23
octobre 1930 :
Les troupes sudistes occupent Rio, avec Getulio Vargas à leur tête.
Le président Washington Luis est déposé quelques jours avant la
fin de son mandat par les états-majors unis de l’armée de terre
et de la marine. Avec la révolution, le Brésil entre dans une ère
troublée et instable, d’autant qu’il subit de plein fouet la
crise économique engendrée par le krach de 1929.
3
novembre 1930 :
Getulio Vargas prend ses fonctions à la tête du gouvernement
provisoire. L’oligarchie pauliste du café apparaît comme la
grande perdante de la révolution. Quant aux révolutionnaires, ils
ne sont pas unis idéologiquement. L’ère Vargas s’ouvre pour une
quinzaine d’années. C’est une sorte de populisme qui se met en
place, fondé sur une personnalisation du pouvoir et l’existence
d’un lien affectif entre le chef et le peuple brésilien.Né
en 1883 dans une famille de grands propriétaires terriens du Rio
Grande do Sul, Vargas gravit progressivement les échelons
politiques et devient député fédéral en 1922. Il se fait
remarquer en 1923 lors de la guerre civile qui embrase le Rio Grande
do Sul par ses talents de conciliateur. En 1924, il prend la tête du
mouvement républicain gaucho à l’assemblée de Rio et devient
ministre des Finances du président Washington Luis en 1926. Dès
1930, il associe les lieutenants au pouvoir : ces derniers sont
donc favorables à une prolongation des pouvoirs d’exception du
chef du gouvernement provisoire. Le leader gaucho exerce ainsi une
dictature de fait, d’autant que le Congrès national, les
assemblées des Etats et les conseils municipaux ont été dissous.
Des interventores,
nommés par Vargas, remplacent les gouverneurs des Etats du pays.
Vargas s’appuie sur les lieutenants, en lutte contre les
oligarchies locales, jusqu’en 1932 au moins, mais ne néglige pas
les autres forces sociales du pays et évite de se couper des
anciennes élites. Le président assigne à l’Etat la tâche de
mettre en œuvre la modernisation industrielle et de conduire le
changement social. A partir de 1937, il exalte le nationalisme et
l’indépendance nationale. Le pays connaît alors de profondes
transformations.
1932 :
Révolution constitutionnaliste à São Paulo, lancée par les
groupes paulistes qui tentent d’en finir avec le tenentismo
et de reprendre la
main sur le gouvernement. Les anciennes élites s’allient en
dénonçant l’autonomie bafouée de São Paulo et l’autoritarisme
des lieutenants ainsi que la dictature de Vargas. Ce dernier,
conscient du danger, annonce une série de concessions : il
propose un nouveau code électoral, promet la préparation d’une
nouvelle constitution et nomme un pauliste comme interventor
dans l’Etat.
9
juillet 1932 :
Les Paulistes, pensant pouvoir compter sur l’appui du Minas Gerais
et du Rio Grande do Sul, déclenchent une insurrection contre le
gouvernement fédéral. Or, c’est sans compter sur la peur des
oligarchies de Porto Alegre et de Belo Horizonte d’affronter
militairement le pouvoir central. Après trois mois de durs combats,
les Paulistes doivent se rendre le 1er
octobre 1932. C’est alors que Vargas prend ses distances avec les
lieutenants et tente de se concilier les vaincus paulistes auxquels
il accorde des ministères.
3
mai 1933 :
Premières élections à l’assemblée constituante et victoire des
vieilles élites régionales, au détriment des lieutenants. La
modernisation de l’Etat se met en place, avec, notamment, des
nouveautés sociales et la naissance d’un ministère de l’Education
et de la Santé. Un ministère du Travail, de l’Industrie et du
Commerce est également créé. Il est confié à un admirateur de
l’encyclique Rerum
Novarum de Léon
XIII et prévoit la création de caisses de retraite, la mise en
place d’un système de sécurité sociale, la réglementation du
travail des femmes et des enfants.
14
juillet 1934 :
Promulgation de la nouvelle constitution. Les analphabètes demeurent
exclus du droit de vote. Cependant, elle prévoit la mise en place
d’un salaire minimum, le repos hebdomadaire, des congés annuels
rémunérés et l’enseignement primaire gratuit et obligatoire.
15
juillet 1934 :
L’Assemblée nationale constituante porte Getulio Vargas à la
présidence de la République. Tout ceci n’empêche pas la
radicalisation politique et l’agitation sociale : le président
apparaît ainsi comme le garant de l’unité et de l’ordre social.
1934 :
Fondation de l’université de São Paulo.
1932 :
Naissance du groupe fascisant Action intégraliste brésilienne (AIB)
qui compte déjà 20 000 militants actifs et des centaines de
milliers de sympathisants à son apogée en 1936. Le mouvement a été
lancé par un certain Plinio Salgado, avec, pour devise, « Dieu,
Patrie, Famille ». En réaction, le Parti communiste
s’organise : le mouvement prend le nom d’Alliance nationale
libératrice (ANL), avec Luis Carlos Prestes pour président
d’honneur. Il compte probablement 100 000 adhérents en 1936.
L’organisation est dissoute par Vargas après avoir réclamé
« tout le pouvoir » : elle se lance alors dans des
actions clandestines, espérant soulever la population dans une
révolution qui renverserait le régime en place. C’est un échec.
25
novembre 1935 :
Après des tentatives d’insurrection déjouées de l’ANL, le
Congrès accepte la mise en place de l’état de siège. On
multiplie les arrestations et l’on s’unit autour du président
Vargas contre le péril communiste.
30
septembre 1937 :
Le ministre de la Guerre, le général Dutra, annonce la prétendue
découverte d’une conspiration communiste, dite « plan Cohen », qui n’a
en fait jamais existé. Elle permet d’imposer une nouvelle
constitution, l’Estado
Novo, qui interdit
notamment l’ensemble des partis politiques. Une marche a une
nouvelle fois été franchie vers l’établissement d’un gouvernement fort. Cette constitution s’inspire du régime mis en place par
Salazar en 1933 à Lisbonne. Tout le pouvoir découle ainsi du
président qui nomme les ministres et choisit les interventores
qui gouverneront les Etats en son nom. Désormais, les opposants
sont poursuivis. Peu à peu, le pays resserre les liens avec le
Troisième Reich, et l’Allemagne devient son premier fournisseur,
supplantant ainsi les Etats-Unis. Jusqu’en 1941, Vargas oscille,
dans sa politique, entre démocratie et fascisme et demeure neutre
face aux puissances entrées en guerre, entendant conserver de bonnes
relations avec les divers partenaires commerciaux du Brésil. Au sein
même du gouvernement, plusieurs tendances s’opposent, favorables
aux nazis pour les uns, aux Américains pour les autres. Jamais le
Brésil ne s’engage officiellement aux côtés de l’Axe et il
refuse d’adhérer au pacte anti-Komintern.
Mars 1938 : Le
ministre des Relations extérieures, Osvaldo Aranha, est un
pro-américain.
1941 :
L’attaque japonaise de Pearl Harbor, suivie de l’entrée en
guerre des Etats-Unis, entraîne la rupture diplomatique avec les
pays de l’Axe.
Entre
février et août 1942 : 21 navires marchands brésiliens sont torpillés par la Kriegsmarine,
provoquant la colère populaire.
31
août 1942 :
Le Brésil entre en guerre contre l’Allemagne et l’Italie.
A
partir de 1943 : La
désagrégation du régime s’accélère. L’industrie est affectée
par la guerre et les difficultés commerciales qu’elle génère.
3
octobre 1943 :
Manifestation en faveur de l’instauration d’un régime
démocratique.
9
novembre 1943 :
Manifestation contre la censure à São Paulo.
Août
1944 :
Démission du ministre Osvaldo Aranha, en réaction à la fermeture
de la Société des amis de l’Amérique, tandis qu’un autre pilier
du régime, Gois Monteiro, démissionne également de son poste.
22-27
janvier 1945 :
Premier congrès brésilien des écrivains, rassemblant plus de 200
intellectuels aux côtés de Jorge Amado et Mario de Andrade. Ils
demandent la liberté d’expression et la tenue d’élections.
28
février 1945 :
Un acte additionnel à la constitution annonce la tenue d’élections
générales. Vargas renonce à concourir et lance dans la course à
la présidence son ministre de la Guerre, le général Dutra, soutenu
par l’armée, ce qui nuit au leader de l’opposition libérale,
Eduardo Gomes, issu du mouvement des lieutenants et également proche
des militaires.
Entre
avril et septembre 1945 : Emergence des trois principaux partis brésiliens. Le Parti social
démocratique (PSD) est soutenu par les interventores :
il rassemble les politiciens traditionnels, au service de l’Estado
Novo, et qui
entendent demeurer au pouvoir. Le Parti travailliste brésilien
(PTB), dont Vargas devient président, entend, pour sa part, mobiliser
une base populaire urbaine attachée aux réalisations sociales du
régime. Face à ces deux partis nés sous l’influence de Vargas,
l’Union démocratique nationale (UDN), parti libéral, voit le
jour. Il s’agit, pour ses membres, d’évincer à tout prix Vargas
du pouvoir.
Avril
1945 : Vargas
renoue les relations diplomatiques avec l’URSS et opère un virage
populiste et nationaliste. Sa loi anti-trust lui permet d’obtenir
le soutien des communistes.
3
octobre 1945 :
Vargas assure dans un meeting que le peuple peut compter sur lui.
29
octobre 1945 :
Putsch de Gois Monteiro, commandant en chef des forces armées.
Vargas se retire du pouvoir.
2
décembre 1945 :
Dutra, candidat de Vargas, est élu avec 55 % des voix. Le PSD emporte
la majorité des sièges à l’Assemblée et au Sénat. Quant à
Vargas, il est lui-même élu sénateur dans deux Etats et député
dans cinq. A la fin de l’ère Vargas, le Brésil s’est fortement
industrialisé.
1946-1951 :
Présidence de Dutra.
18
septembre 1946 :
Une constitution à caractère démocratique est promulguée. Le chef
d’Etat est élu pour cinq ans. Le droit de vote est accordé aux
hommes et aux femmes de plus de 18 ans et sachant lire et écrire. Le
droit de grève reste très réglementé. Avec la fin de la guerre,
l’Etat s’efface des affaires économiques, laissant place à un
certain libéralisme économique.
1946 :
Grèves ouvrières importantes, soutenues par le Parti communiste brésilien. Le gouvernement
place alors 143 syndicats sous la tutelle de l’Etat fédéral.
Mai
1947 : Le PCB,
qui compte près de 200 000 militants, est interdit.
2
septembre 1947 :
Le Brésil adhère au Traité interaméricain d’assistance
réciproque et instaure un système régional de défense destiné à
lutter contre le communisme.
Octobre
1947 : Les
relations diplomatiques sont rompues avec l’URSS.
Mai
1949 : Eurico
Dutra est le premier président brésilien à se rendre en visite
officielle aux Etats-Unis.
Juin
1950 : Vargas
annonce officiellement sa candidature à la présidence, en vue des
élections d’octobre. Il développe les thèmes populistes de
réforme sociale et de reprise d’une politique d’industrialisation
indépendante.
Octobre
1950 : Vargas
l’emporte largement aux élections, avec 48,7 % des suffrages. Il
revient au pouvoir avec un esprit de conciliation dont témoigne la
constitution de son premier gouvernement et entre en
fonctions le 31 janvier 1951. Le PSD domine, mais le PTB est également
présent tandis que l’UDN demeure hostile à Vargas, en dépit de
ses efforts de rapprochement. Le président demeure neutre vis-à-vis
des Etats-Unis. D’un point de vue économique, l’Etat reprend
l’initiative : des établissements publics voient le jour, le
domaine de l’énergie est notamment privilégié (avec
l’électricité, le charbon et le pétrole).
A
partir de 1953 : L’opposition gagne du terrain, à la faveur des difficultés
économiques que rencontre le pays. Les producteurs de café
manifestent tandis que l’inflation s’aggrave.
Mars
1953 : La
grève générale de São Paulo rassemble près de 300 000
personnes. En juin, 100 000 dockers cessent le travail à Rio,
Santos et Belem. Le président nomme alors João Goulart, président
du PTB, à la tête du ministère du Travail.
1953 :
Les relations avec les Etats-Unis se dégradent à la suite de
l’élection d’Eisenhower.
22
février 1954 :
Vargas doit renvoyer Goulart, sous la pression de l’armée qui
l’accuse de servir les intérêts des communistes. Les militaires
sont notamment opposés au doublement du salaire minimum.
1er
mai 1954 : Le
doublement du salaire minimum entre tout de même en vigueur. Vargas
appelle les ouvriers à soutenir ce coup de force.
5
août 1954 :
Tentative d’assassinat de Carlos Lacerda, journaliste et chef de
file de l’opposition. L’enquête montre que le chef de la garde
présidentielle est à l’origine du complot, à l’insu de Vargas.
Elle révèle aussi la corruption de l’entourage présidentiel.
22
août 1954 :
De nombreux officiers supérieurs réclament la démission de Vargas.
24
août 1954 : A
la suite d’un conseil des ministres très tendu, Vargas se suicide.
Dans une lettre-testament, il se présente comme la victime d’un
complot et de calomnies. Sa mort suscite l’émotion dans tout le
pays et engendre de gigantesques manifestations en sa faveur et
hostiles aux intérêts américains.
25
août 1954 : A
Rio, ce sont des centaines de milliers de personnes qui accompagnent
la dépouille de Vargas jusqu’à l’aéroport. Des heurts se
produisent avec les troupes des forces aériennes. Le vice-président,
devenu chef de l’Etat, Café Filho, s’engage à maintenir les
élections présidentielles d’octobre 1955.
3
octobre 1955 :
Juscelino Kubitschek, candidat du PDS et originaire du Minas
Gerais dont il est gouverneur, l’emporte de justesse face au
candidat de l’UDN.
1956-1961 :
Présidence de Juscelino Kubitschek, qui paraît pour les
Brésiliens une sorte d’âge d’or. Il affirme le destin de
grande puissance du Brésil auquel il offre une nouvelle capitale :
Brasilia. C’est aussi le temps d’une grande avancée en matière
industrielle : il est partisan d’une industrialisation
accélérée, seule susceptible à ses yeux de rattraper le retard du
Brésil. L’Etat reste prépondérant dans les secteurs considérés
comme stratégiques et se veut l’allié des Etats-Unis avec
lesquels il tente une coopération.
1957-1961 :
Le taux de croissance du Brésil est de 8,3 %, soit le plus élevé
d’Amérique latine. L’essor de l’industrie automobile est
particulièrement frappant : les industries s’installent dans
la région de São Paulo.
21
avril 1960 :
Inauguration de la nouvelle capitale Brasilia, construite à partir
du plan de l’urbaniste Lucio Costa. Les bâtiments sont conçus par
l’architecte Oscar Niemeyer. Le projet est extrêmement dispendieux
et témoigne du caractère peu équilibré de ce
système politique où la richesse et les activités se concentrent
dans le Sudeste. Ce modèle de développement inflationniste est en
partie à l’origine de la crise finale du système populiste.
3
octobre 1960 :
Janio Quadros, candidat de l’UDN, remporte les élections
présidentielles, avec 48,2 % des suffrages. Il s’affirme comme le
défenseur d’un ordre social plus juste et comme le partisan d’une
stabilisation des dépenses. Il est également favorable à une
politique étrangère indépendante et reconnaît notamment l’URSS.
25
août 1961 :
Quadros annonce sa démission, à la stupeur générale. Le
vice-président João Goulart est alors en visite à Pékin. Des
oppositions font jour pour l’empêcher d’accéder au pouvoir
et c’est dans un climat d’extrême tension qu’une partie de
l’armée parvient à imposer Goulart, le 7 septembre 1961. Ce riche
éleveur gaucho est depuis longtemps dans l’entourage de Vargas. Il
entend mettre en œuvre des réformes de base dont certaines sont
particulièrement controversées. Il s’agit notamment de la réforme
agraire dans ce pays où 1 % des propriétés concentrent près de la
moitié des terres, souvent sous-exploitées de surcroît. Goulart
doit gouverner avec de nombreux opposants et parvient difficilement à
obtenir la confiance des élites économiques avec lesquelles il
entendait travailler. Une partie de la gauche défend son programme
et son action tandis que la gauche radicale dénonce la lenteur de
ses réformes. Sous l’influence du Commandement général des
travailleurs, elle n’hésite pas à appeler le peuple à la
mobilisation et à la grève contre le Parlement conservateur. Le
président doit compter avec une mobilisation populaire inédite,
tant au sein de la paysannerie que chez les ouvriers. Quant aux
organisations étudiantes, elles sont marquées par le marxisme et
les idées révolutionnaires.
Début
de la décennie 1960 :
Face aux ligues paysannes nées dans les années cinquante et à
l’agitation qu’elles suscitent dans les campagnes, l’Eglise
réagit afin de proposer un réformisme social qui semble seul
capable de conjurer la révolution. Elle choisit le Nordeste pour
lancer la syndicalisation et l’alphabétisation, en partant du
diocèse de Natal en 1960. En quatre ans, l’Eglise devient le
principal agent de la syndicalisation réformiste chez les paysans.
Cependant, elle connaît une concurrence dès 1962 avec les
organisations de gauche. Le projet de l’Eglise est développé sur
place par des membres de l’Action catholique, fervents partisans de
la lutte et de la révolution dont ils enseignent les fondements aux
paysans grâce à un livret d’alphabétisation, Savoir
pour suivre, suivi
de Vivre, c’est
lutter.
6
janvier 1963 :
Lors d’un plébiscite qu’il est parvenu à imposer, Goulart est
rétabli dans la plénitude des pouvoirs présidentiels par une
majorité de la population. Il entreprend alors sa politique
économique qui échoue au bout de quelques mois. Mal conseillé, le
président choisit de donner des gages à l’aile radicale, se
coupant ainsi du soutien des modérés.
1963 :
On compte 172 grèves dans le pays, contre 31 en 1958. Les tensions
sociales sont particulièrement vives.
1964 :
Le Livret d’alphabétisation est saisi chez l’imprimeur et le
cardinal de Rio se désolidarise publiquement du mouvement.
13
mars 1964 : Le
président Goulart signe deux décrets devant plus de 150 000
personnes et une marée de drapeaux rouges. Il s’agit de
nationaliser les raffineries de pétrole et d’exproprier les
exploitations de plus de 100 hectares proches des grandes voies de
communication. Cela donne l’impression que Goulart ne gouverne plus
et qu’il a été dépassé par la faction radicale de gauche. On
s’inquiète donc de la « cubanisation » du Brésil.
1964 :
Les catholiques conservateurs se mobilisent de leur côté et
organisent dès le mois de mars des « Marches de la famille »,
rosaire et drapeau brésilien à la main. Elles rassemblent de
grandes foules qui, peu à peu,
contestent la légitimité du président.
31
mars 1964 : A
Juiz de Fora, dans le Minas Gerais, le général Olympio Mourão
Filho commande à ses troupes de marcher contre Rio. Il obtient le
soutien de nombreux gouverneurs et le ralliement d’une grande
partie de l’armée.
2
avril 1964 :
Goulart, qui refuse la résistance armée, fuit en Uruguay. Le
Congrès proclame la vacance du pouvoir.
11
avril 1964 :
Le Parlement désigne le général Castelo Branco, chef d’état-major
de l’armée de terre, président de la République. Le nouveau
régime est immédiatement reconnu par les Etats-Unis qui ont œuvré
financièrement à la déstabilisation de Goulart.
1964-1985 :
Pendant ces deux décennies, les Brésiliens vivent sous le
gouvernement des militaires. Au moment de l’arrivée de l'un d'eux au pouvoir, le peuple pense qu’il s’agit d’un court
moment de transition nécessaire au redressement du pays et que le
pouvoir reviendra ensuite aux civils. Les militaires sont désormais
inspirés de la « doctrine de la sécurité nationale »
qui s’articule autour des concepts de sécurité et de
développement et qui a été systématisée par le général
Golbéry. Elle se fonde sur quatre grands principes. Tout d’abord,
l’idée d’un affrontement entre l’Orient communiste et
matérialiste et l’Occident de tradition chrétienne auquel se
rattache le Brésil. L’Etat est considéré comme l’ultime
rempart des intérêts nationaux, avec le soutien de l’armée. Les
idéologues revendiquent une place à part du Brésil, du fait de son
immensité : la diplomatie de Brasilia s’écarte de
Washington. Enfin, seul le développement est à même de garantir la
sécurité du pays. Cependant, les militaires n’ont jamais établi
une dictature totale car ils ont supprimé les partis politiques tout en instaurant en même temps un bipartisme qui permet à
l’opposition de se regrouper et d’exister. Les historiens
évoquent une « dictature inachevée » qui a pourtant mis
en place un processus répressif conséquent contre les opposants.
1964 :
Dans les premières semaines qui suivent le putsch, une chasse aux
sorcières est organisée. C’est l’« Opération nettoyage »
qui touche environ 50 000 personnes, incarcérées pendant des
périodes plus moins longues. 10 000 sont arrêtées la première
semaine, notamment à Rio et dans le Nordeste. Des centaines
d’enquêtes sont menées un peu partout contre ceux qui menacent la
sécurité du pays. De nombreux hommes politiques sont déchus de
leurs fonctions et privés de leurs droits civiques. En deux ans, 20 %
des députés d’opposition perdent ainsi leur mandat.
Mai
1964 : Rupture
des relations diplomatiques avec Cuba. Le président Castelo Branco
est ouvertement pro-américain, ce qui provoque la déception de
nombreux militaires et responsables civils conservateurs.
Juillet
1964 : Le
mandat de Castelo Branco est prorogé jusqu’en 1967, entraînant une rupture définitive avec l’UDN qui pensait présenter
un candidat aux élections prévues en 1965.
Octobre
1965 : Dans
cinq des onze Etats où se déroulent des élections, l’opposition
l’emporte. Le pouvoir répond avec l’acte institutionnel n°2 qui
instaure l’élection indirecte du président et autorise ce dernier
à proclamer l’état de siège sans l’aval du Congrès. En outre,
les treize partis sont supprimés et le bipartisme institué. Il
s’agit de constituer un parti officiel et un semblant d’opposition
et de démocratie. L’Alliance rénovatrice nationale (ARENA) voit
ainsi le jour, en même temps que le Mouvement démocratique
brésilien (MDB) qui va, peu à peu, fédérer l’ensemble des forces
d’opposition.
Dès
l’automne 1966 : L’opposition commence à s’organiser au sein d’une vaste
coalition qui prend le nom de Front large, interdite par le pouvoir
en avril 1968.
Janvier
1967 : Une
nouvelle constitution est promulguée. C’est désormais le haut
commandement des forces armées qui choisit son candidat.
15
mars 1967 :
Entrée en fonction du général Costa e Silva, nouveau président du
Brésil.
25
juin 1968 :
Une manifestation de plus de 100 000 personnes parcourt Rio, à
la suite de la mort d’un étudiant, tué par la police.
1967 :
Le plan d’assainissement économique entrepris par le gouvernement
est un succès, entraînant la baisse de l’inflation de 1964 à
1967 et celle du déficit annuel. En revanche, le pays connaît la
récession. L’économiste Delfim Neto arrive au ministère des
Finances et entreprend la relance de l’économie : le Brésil
entre alors dans la plus forte période de croissance de son
histoire. De 1968 à 1974, la croissance annuelle du PIB est de près
de 11 %. Désormais, le Brésil vend des produits manufacturés. Les
investissements étrangers sont, quant à eux, très importants.
Fin
août 1968 :
L’université du Minas Gerais est fermée, celle de Brasilia
envahie par la police qui procède à de nombreuses arrestations. La
même année, plusieurs prêtres sont arrêtés en raison de leur
engagement social et sont emprisonnés. Les relations entre l’Eglise
et l’Etat se dégradent : des voix opposées au régime se
font entendre à l’assemblée générale des évêques pendant le
même été.
13
décembre 1968 :
Promulgation de l’Acte institutionnel n°5 qui autorise le
président à fermer toutes les assemblées législatives, à casser
les mandats électifs et à suspendre les droits politiques des
citoyens jugés dangereux pour le régime pour une durée de dix ans.
A
partir de 1969 : Les
militaires sont les principales figures de la lutte contre « le
terrorisme et la guerre subversive », dans un contexte de
résistance armée en plein essor. L’opération Bandeirantes (OBAN)
est mise en place : il s’agit d’une première tentative de
coordination des forces civiles et militaires de répression,
couronnée de succès.
Août
1969 : Le
président Costa e Silva, malade, est remplacé par Emilio Garrastazu
Médici, à la suite d’âpres luttes. Il appuie son pouvoir sur
trois hommes, Delfim Neto qui demeure aux finances, Orlando Geisel
qui prend en main le ministère des Armées et Leitão de Abreu,
secrétaire général de la Présidence, avec lequel la propagande se
développe avec une efficacité inédite grâce, notamment, à la
télévision. Un climat de nationalisme se développe en même temps,
renforcé par les victoires de l’équipe nationale de football.
L’opposition, alors très réduite, grandit dans la
clandestinité. Elle est le fait de jeunes partisans du Che Guevara
ou de Mao qui s’illustrent par des actions terroristes, organisant
une guérilla.
1969-1970 :
Quatre diplomates étrangers sont enlevés par la guérilla et
relâchés en échange de la libération de détenus politiques. La
guérilla est fortement combattue.
Novembre
1969 : Carlos
Marighela, fondateur de l’Action libératrice nationale (ALN),
principale organisation de la guérilla, est abattu à São Paulo.
D’autres leaders sont éliminés de la même manière dans les
années suivantes. La guérilla est incapable de faire vaciller le
régime.
1970 :
Création des DOI-OBAN (Détachements des opérations internes-opération Bandeirantes) qui, dirigés par l’armée, coordonnent les actions des forces civiles et militaires affectées à la
répression de l’opposition.
Octobre
1970 :
Victoire électorale du parti officiel qui emporte 21 des 22
gouvernements. Le mois suivant, il remporte les élections partielles
au Sénat et à la Chambre des députés.
Novembre
1972 :
Nouvelle victoire écrasante de l’ARENA, aux élections municipales
cette fois.
1974-1979 :
Présidence d’Ernesto Geisel.
1974 :
Des relations diplomatiques sont nouées avec la république
populaire de Chine. L’année suivante, le Brésil reconnaît les
gouvernements marxistes d’Angola et du Mozambique, au grand dépit
des Etats-Unis qui le voient s’affirmer comme grande puissance
tiers-mondiste.
1974-1978 :
L’Eglise catholique représente la principale menace pour la
survie du régime, car elle est l’une des plus progressistes au
monde, ayant fait sienne la « théologie de la libération ».
La résistance s’organise autour de la Conférence nationale des
évêques du Brésil (CNEB) et de Monseigneur Evaristo Arns,
cardinal-archevêque de São Paulo qui joue un rôle fondamental. La
CNEB réclame la fin de la torture et de la loi de sécurité
nationale ainsi que l’annulation de l’acte constitutionnel I5 et une amnistie
générale.
1975-1976 :
Des militaires ultras déclenchent une campagne de répression contre
le PCB, ce qui donne lieu à des arrestations violentes.
L’archidiocèse de São Paulo prend la tête de la résistance
pacifique, organisant l’aide aux familles des disparus et des
prisonniers. Devant une telle situation, le président Geisel est
contraint d’agir contre la ligne dure de son parti.
1975 :
Une étude réalisée à São Paulo par l’Eglise catholique montre
que la situation sanitaire et sociale est dramatique dans les grandes
métropoles, par exemple en ce qui concerne les raccordements aux
égouts, à l’électricité et à l’eau courante, souvent
inexistants.
1975 :
Accord de coopération nucléaire entre l’Allemagne et le Brésil.
Il prévoit la construction de huit centrales nucléaires.
1975 :
Lancement du programme Proalcool, qui favorise la production
d’éthanol à partir de canne à sucre afin d’alimenter les
moteurs classiques.
1975 :
Luis Ignacio da Silva, dit «Lula », devient le fer de lance de
l’opposition syndicaliste. Il acquiert une renommée nationale et
prend la tête du syndicat des métallurgistes de São Bernardo do
Campo.
1977 :
Avec l’arrivée de Jimmy Carter à la présidence des Etats-Unis,
les relations entre les deux pays se dégradent.
Avril
1977 : Après
avoir congédié le Parlement, le président utilise l’acte constitutionnel I5 pour
porter le mandat présidentiel à six ans et établir une nouvelle
carte électorale, plus favorable aux Etats du Nordeste où l’ALENA
a ses plus fervents soutiens. Le parti d’opposition MDB est alors
très populaire et remporte plusieurs élections qui effraient la
présidence. En même temps, la société civile commence à se
régénérer et diverses associations voient le jour, qu’elles
soient formées d’avocats ou de journalistes.
Octobre
1977 : Renvoi
du ministre de l’Armée de terre, Silvio Frota, appartenant à la
ligne dure du gouvernement.
1978-1980 :
Série de grandes grèves. En 1979, plus de trois millions de
salariés cessent le travail. Des secteurs entiers de l’économie
sont ainsi paralysés. Elles touchent également le secteur de la
canne à sucre. En outre, la Confédération des travailleurs de
l’agriculture (CONTAG) soutient le combat des paysans sans terre.
En avril 1980, 150 000 ouvriers de l’industrie automobile
demeurent en grève pendant un mois et demi.
Octobre
1978 : La
présidence fait une concession d’importance en faisant approuver
par le Congrès un amendement constitutionnel qui révoque l’AI5.
1979-1984 :
Présidence du général João Batisto Figueiredo. Lors de sa prise
de pouvoir, il fait le serment d’instaurer la démocratie. Peu
intéressé par la gouvernance, il poursuit l’ouverture politique.
Il entend maintenir le développement économique et le rythme de
forte croissance ; cependant, le Brésil est touché par le
second choc pétrolier qui entraîne le triplement du prix des
hydrocarbures en deux ans seulement.
Août
1979 : Le
Congrès approuve le projet d’amnistie politique. De nombreuses
personnes sont réintégrées dans leurs droits et dans leurs
fonctions tandis que les derniers prisonniers politiques sont
libérés.
Novembre
1979 : Retour
du multipartisme. En quelques mois, six partis sont fondés : le
Parti travailliste brésilien (PTB), le Parti démocratique
travailliste (PDT), le Parti populaire (PP), le Parti démocratique
social (PDS), nouveau parti du gouvernement, et le Parti du mouvement
démocratique brésilien (PMDB). Enfin, le Parti des travailleurs
(PT) de Luis Inacio da Silva se structure autour du combat social
et syndical.
1979 :
Accord tripartite entre le Brésil, le Paraguay et l’Argentine au
sujet de l’utilisation du fleuve Paraná où les deux premiers
Etats ont construit l’immense centrale hydroélectrique d’Itaipu,
à l’origine d’un différend entre le Brésil et l’Argentine.
1980 :
Pour faire face à la crise, mise en œuvre d’une politique
d’austérité qui engendre une crise de stagflation de 1981 à
1983. Sur la même période, le revenu par tête chute d’environ
10 %.
Début des années 1980 : Le Brésil connaît une grave crise économique. Une certaine
libéralisation est alors entreprise.
1981 :
Selon une estimation, 20 % de la population en âge de travailler
serait au chômage ou sous-employée.
15
novembre 1982 :
Aux élections générales, l’opposition progresse et se retrouve
presque majoritaire à la Chambre des députés.
Avril
1983 : Emeutes
de la faim à São Paulo. Des magasins sont pillés.
Juin
1983 : Une
campagne nationale est lancée pour l’élection directe du
président, mais elle échoue. Cependant, le candidat du parti
gouvernemental, Paulo Maluf, provoque des dissensions internes qui
aboutissent à une scission. Des grandes figures du parti passent
alors à l’opposition.
Fin
1984 : Le
Brésil renoue avec la croissance, en raison des efforts entrepris
par le président Figueiredo, mais l’inflation demeure énorme (de
l’ordre de 200 %) et la dette extérieure a doublé depuis son
arrivée. Grâce à sa politique économique volontariste, le Brésil
est passé du 43e
au 8e
rang des puissances économiques.
Le
Brésil contemporain : l’émergence d’une grande puissance
15
janvier 1985 :
C’est finalement Tancredo Neves, figure importante de l’opposition,
qui est élu président, grâce aux voix d’une partie des membres
du PDS. Cependant, il meurt le 21 avril et est remplacé par l’ancien
dirigeant du parti des militaires, José Sarney, qui se retrouve au
pouvoir presque par hasard et sans légitimité.
Février
1986 : Mise en
place du plan
Cruzado qui associe
l’introduction d’une nouvelle monnaie, le cruzado, à un gel des
prix. Le plan échoue rapidement.
Novembre
1986 : Le
PMDB, allié au président, remporte les élections, obtenant la
majorité au Congrès et la quasi-totalité des sièges de
gouverneurs.
Juin
1987 : Par le
plan Bresser, le Brésil tente un nouveau gel des prix.
5
octobre 1988 :
Promulgation d’une nouvelle constitution qui met un terme à la
législation d’exception du régime militaire. Elle contient de
nombreuses avancées en matière de libertés publiques et de droits
sociaux. La grève est autorisée et les syndicats sont libérés de
la tutelle de l’Etat. Le principe de réforme agraire est lui-même
légalisé. La diversité ethnique de la nation est reconnue pour la
première fois. Le pouvoir judiciaire voit son indépendance
garantie.
Novembre
1988 : Le PMDB
perd de nombreuses villes aux élections municipales. Le Parti des
travailleurs obtient, quant à lui, ses premiers succès et conquiert
Porto Alegre et São Paulo. Le président est accusé d’être
responsable de la situation économique catastrophique du pays.
Janvier
1989 : Le plan
Eté crée un nouveau cruzado et bloque provisoirement les prix.
Cependant, l’inflation atteint cette année-là 1 765 %.
15
novembre 1989 :
Pour la première fois, l’ensemble des Brésiliens est appelé à
élire son président au suffrage universel. Fernando Collor de Mello
arrive largement en tête, suivi de Lula (PT) qui devance Leonel
Brizola (PDT).
17
décembre 1989 :
Collor l’emporte sur Lula avec 4 millions de voix d’avance. La
réforme de l’Etat fait partie de ses priorités, mais elle est
difficile à mettre en œuvre. Il doit faire face à une
hyperinflation, à l’explosion de la dette extérieure, au souvenir
des scandales : les attentes sont immenses à l’égard du
nouveau président qui tente d'engager une réforme
économique qui n’a guère de succès. La réforme de l’Etat
n’est guère plus aisée à instaurer et le programme de
désétatisation demeure limité. L’économie brésilienne s’ouvre
à la concurrence.
26
mars 1991 :
Signature du traité d’Asunción qui donne naissance au Mercosul,
entre le Brésil, l’Argentine, l’Uruguay et le Paraguay et rompt
avec des décennies de protectionnisme.
1992 :
Les scandales se succèdent. Le président est mis en cause en mai
par son propre frère. On découvre notamment un très grand
réseau de corruption et de trafic d’influence dans son entourage.
24
août 1992 :
Le rapport de la commission d’enquête du Congrès incrimine
directement le président, accusé de corruption passive et de
forfaiture. Dans les semaines qui suivent, une procédure de
destitution est lancée.
29
décembre 1992 :
Le président Collor présente sa démission. Ce même jour, Itamar
Franco devient président du Brésil. Par sa modestie et son
austérité, il contraste avec son prédécesseur. Toutefois, il ne
saura pas se montrer à la hauteur de sa charge. Son gouvernement ne
compte que peu de personnalités et, en dépit de ses efforts
d’union, il ne parvient pas à rallier le PT. Au sein de ce
gouvernement inexpérimenté, la figure de Fernando Henrique Cardoso
se détache, aux Affaires étrangères tout d’abord, puis aux
Finances.
Décembre
1993 : Cardoso
lance le plan Real afin de tenter de stabiliser la monnaie.
1er
juillet 1994 :
Création d’une nouvelle monnaie, le real, à parité avec le
dollar. En quelques mois, les différentes mesures financières
aboutissent à une baisse spectaculaire de l’inflation.
3
octobre 1994 :
Cardoso remporte les élections présidentielles, avec 54,3 % des
suffrages, contre Lula. Son programme économique est fondé sur
trois principes : empêcher le retour de l’inflation grâce à
une stricte politique monétariste, insérer le Brésil dans la
mondialisation et l’ouvrir aux investissements étrangers ;
enfin, il faut moderniser l’Etat en le rendant plus efficace. Pour
cela, il passe de larges alliances, y compris avec les anciennes
oligarchies politiques et sociales. Des privatisations sont
entreprises, suscitant l’opposition du PT.
Mai
1995 : Grève
d’un mois de la Petrobras, afin de conserver le monopole de
l’exploitation, de l’importation et du raffinage du pétrole et
du gaz.
Dans
la décennie 1990 : La déforestation connaît son apogée, avec le recul incessant du
front pionnier. Elle diminue par la suite.
4
octobre 1998 :
Cardoso remporte pour la seconde fois les élections présidentielles,
devançant une fois de plus Lula.
Décembre
1998 : Remise
à plat du régime des retraites afin de rééquilibrer les comptes.
De
1998 à 2002 : La
dette publique a explosé. La balance commerciale est sans cesse
déficitaire, le chômage a atteint les 7 % et les salariés employés
dans le secteur informel, c'est-à-dire sans protection sociale,
représentent 27 % des travailleurs. Quand Cardoso quitte le pouvoir
en 2002, sa popularité est très faible. Le Brésil n’en demeure
pas moins une grande puissance industrielle et économique grâce,
notamment, à la Petrobras et au Banco do Brasil. En outre, un réseau
de solidarité sociale s’est également mis en place sous le second
mandat de Cardoso, avec, par exemple, la distribution de bourses pour
que les enfants fréquentent l’école ou encore un système de
bourses alimentaires pour les enfants et les femmes enceintes qui
bénéficient en même temps d’une protection sanitaire. Un
programme a également tenté d’éradiquer le travail des enfants
de 7 à 16 ans, sans succès. Enfin, les plus pauvres ont désormais
accès aux soins. Même dans le domaine de la politique foncière,
certains réajustements ont eu lieu. Grâce à la mise en place de la
réforme agraire, de 1995 à 2002, 635 000 familles ont reçu un
lot de terre : beaucoup reste cependant à faire.
2000 :
Adoption de la loi de Responsabilité budgétaire.
27
octobre 2002 :
Victoire de Lula à la présidentielle, il l’emporte au second tour
avec 61 % des voix contre José Serra, candidat du PSDB. C’est aussi
la victoire du Parti des travailleurs qui apparaît, dans un climat
de corruption ambiant, comme un parti différent et mu par l’idée
du bien commun. Lula, pendant sa campagne, cherche à rassurer les
électeurs, en s’efforçant de faire oublier la radicalité du PT
d’autrefois. Il donne également des gages au FMI et doit faire des
concessions car le PT est très minoritaire au Congrès. Lula accorde
ainsi des ministères à ses alliés, sans toujours tenir compte de
leur efficacité et de leurs compétences. Le président tente par
ailleurs d’allier libéralisme économique (les privatisations sont
stoppées) et intervention publique dans le domaine social. Il évite
tant que faire se peut d’avoir recours à la mobilisation sociale :
sous sa présidence, les grèves sont d’ailleurs très rares.
Sous
la présidence de Lula, le Brésil s’affirme comme puissance
diplomatique, ouvrant en l’espace d’une décennie quarante nouvelles
ambassades tandis que le président accomplit près de 300 voyages
diplomatiques. Le pays noue aussi des relations privilégiées avec
différents pays du tiers-monde et émergents. Au titre de puissance
et de son influence dans le monde, le Brésil revendique un siège de
membre permanent au Conseil de sécurité de l’ONU.
Décembre
2003 :
L’adoption de la réforme des retraites représente un signe de la
présidence vis-à-vis des marchés financiers et entraîne une
scission au sein du PT car l’aile radicale du parti le refuse.
Plusieurs parlementaires fondent alors le parti Socialisme et Liberté
(PSOL).
Juin
2005 : Le
scandale des « grosses mensualités » éclate, dévoilant
le système de financement du PT par des détournements d’argent
public. L’image du parti est bien sûr ternie.
29
octobre 2006 :
Lula remporte une nouvelle fois les élections présidentielles au
second tour, avec 61 % des suffrages.
2006
et 2009 : Deux
sommets Afrique-Amérique du Sud se tiennent.
2007-2010 :
L’Etat s’engage dans la lutte contre la pauvreté Les
salaires augmentent très substantiellement et le programme
Bourse-Famille reprend. En 2013, il concerne 13,7 millions de
famille, soit près de 40 millions de personnes. De nombreux progrès
économiques ont été accomplis sous la présidence de Lula et le
Brésil est parvenu à sortir rapidement de la crise des années
2008-2009. La dette n’est cependant pas effacée et le Brésil est
l’un des pays émergents les plus endettés.
2008 :
Naissance de l’Union des nations sud-américaines (UNASUR),
composée des Etats du Mercosul et de la Communauté andine, les
deux unions douanières sud-américaines. Elle s’inspire du modèle
de l’Union européenne, avec pour ambition de construire une
identité sud-américaine et un espace régional intégré.
2010 :
Le recensement fait apparaître une population urbaine à 85 %. Le
pays compte 16 villes millionnaires dont deux mégapoles (Rio et São
Paulo avec, respectivement, 12 et 21 millions d’habitants). En
outre, le poids du Sudeste s’amoindrit en faveur des régions
pionnières du Nord et du Centre-Ouest qui attirent les migrants.
Selon un recensement, le pays compte 47,7 % de Blancs, 43,1 % de métis,
7,6 % de Noirs, 1 % de Jaunes et 0,4 % d’indigènes. En fait, une
grande majorité de la population est métisse, les Blancs ayant
souvent des femmes noires ou indigènes et les Noirs des hommes
blancs parmi leurs ancêtres.
A
cette même date, le pays compte, selon la FAO, 13 millions de
personnes sous-alimentées et 22.4 % de la population serait
vulnérable. 3,7 millions d’enfants de 5 à 17 ans travaillent. Les
habitants des favelas sont encore très nombreux à ne pas avoir
accès à l’eau, à l’électricité et à l’hygiène. Ces
favelas comptent de nombreux travailleurs employés dans les
quartiers aisés. Les inégalités ethniques sont également
importantes : les Noirs et les métis sont les plus touchés par
la pauvreté et l’analphabétisme. Le Brésil est aussi l’un des
pays les plus violents au monde, du fait de son histoire, du
narcotrafic, des grandes inégalités sociales et de la possession
généralisée d’armes à feu. De 1980 à 2010, 800 000
personnes ont été tuées par arme à feu.
Alors
qu’en 1980, le pays comptait 90 % de catholiques, ils ne
représentent plus que 65 % de la population en 2010. Les églises
évangéliques attirent de nombreux fidèles, passés de 26 à 42
millions de 2000 à 2010.
31
octobre 2010 :
Du fait de la grande popularité de Lula, Dilma Rousseff, qu’il a
choisie pour lui succéder, l’emporte sans difficulté au second
tour de la présidentielle, face à José Serra, candidat du PSDB.
Première femme à accéder à de telles fonctions, elle mène une
politique de maintien des grands équilibres. Elle poursuit la mise en œuvre des
grands projets de création d'infrastructures et l'organisation de la Bourse-Famille, qui voient leurs
moyens s’accroître. Elle inaugure le programme « Brésil sans misère » qui s’adresse aux 16 millions de Brésiliens
les plus pauvres. Cependant, le Brésil est touché par la crise
mondiale.
Décennie 2010 : Le Brésil s’affirme comme grande puissance agricole, au premier
rang pour les exportations de café, de sucre, de volaille,
d’éthanol, de tabac notamment. Un puissant complexe
agro-industriel, une industrie alimentaire et un important secteur de
la distribution se sont constitués autour de ces cultures. Les
grandes firmes internationales sont présentes sur le territoire
brésilien. Le lobby agro-industriel est très puissant et a réussi
à imposer la culture de plants OGM. Le Brésil est aussi la 10e
puissance industrielle du monde, excellant notamment dans les
domaines de l’aéronautique (Embraer) et du nucléaire civil. Le
Sudeste, et particulièrement la région de São Paulo, demeure
prépondérant dans la production industrielle.
2010 :
La Chine devient la première destination des produits brésiliens.
2011 : Dilma
Rousseff renvoie plusieurs ministres de Lula pour corruption et
malversations, témoignant ainsi de son indépendance et de son souci
d’intégrité. Par sa fermeté, notamment à l’égard des
fonctionnaires en grève, elle parvient à se rallier une partie de
l’électorat conservateur.
Juin
2013 : Le pays
est marqué par d’importantes protestations contre l’augmentation
des tarifs des transports publics. L’initiative provient des
étudiants de São Paulo et se transforme en manifestations massives
qui s’étendent à toutes les villes du pays. Parmi ces
manifestants, on compte de nombreux jeunes issus des classes moyennes
et ayant reçu une éducation poussée, dont beaucoup n’ont
jamais manifesté. Ils réclament une amélioration de la qualité
des services publics, une lutte plus résolue contre la corruption et
dénoncent les investissements excessifs engagés pour la Coupe du
monde. Le gouvernement cède et annule ces mesures d’augmentation.
11
juillet 2013 :
Journée de luttes, le mouvement ayant été repris par les
syndicats. La popularité de Dilma Rousseff a considérablement
baissé et cette dernière doit envisager une réforme profonde pour
diminuer les inégalités sociales.
Juin-juillet
2014 : Les
manifestations reprennent au moment de la Coupe du monde de football, qui voit, suprême humiliation, l'élimination de l'équipe nationale.
26
octobre 2014 :
Dilma Rousseff est réélue avec seulement 51,6 % des voix face au
candidat du PSDB, Aecio Neves. En même temps, le PT recule à la
Chambre et au Sénat. Deux défis s’imposent à la présidente :
la relance de l’économie et la lutte contre la corruptionA peine réélue, Dilma Rousseff doit faire face au scandale qui éclabousse la firme pétrolière Petrobras et une bonne partie de la classe politique, notamment certains de ses amis du Parti des travailleurs. La présidente a affirmé ne pas être au courant des ces dérives et a annoncé l'engagement d'une lutte sans merci contre la corruption. Cela n'a pas suffi à stopper sa chute vertigineuse dans les sondages au cours des mois suivants. Au-delà de cet épisode très médiatisé, le Brésil, longtemps considéré comme l'un des pays les plus dynamiques et les plus prometteurs des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) a révélé des faiblesses structurelles qui handicapent sérieusement ses perspectives de développement et de croissance (celle-ci est passée de 7,5 % au moment où D. Roussseff a succédé à Lula en 2010 à 1 % en 2012, puis à 2,3% en 2013, avant que le pays n'entre en récession).
Ces résultats ont conduit au remplacement du ministre des Finances, Guido Mantega, par un économiste « orthodoxe » inspiré par l'école de Chicago, Joaquim Levy. Après dix années de forte croissance, l'augmentation spectaculaire des effectifs de la classe moyenne et un progrès des normes sociales, le « modèle brésilien » s'est essoufflé. La production industrielle et les investissements ont enregistré un net recul. L'inflation est demeurée élevée et la consommation a baissé, les marchés ont commencé à se méfier du Brésil et plusieurs agences de notation ont diminué sa note. La baisse du coût des matières premières et le ralentissement du commerce avec la Chine et l'Europe ont confirmé cette tendance négative, aggravée par le fort endettement des ménages. Taux d'intérêt élevé, pesanteurs bureaucratiques et permanence de la corruption viennent aggraver le tableau et la politique interventionniste de Dilma Rousseff n'a rien pu faire face à ces tendances lourdes, alors que le déficit budgétaire atteint 5 % du PIB en 2014. L'organisation de la Coupe du monde de football n'y a rien changé et il y a fort à parier qu'il en ira de même pour les jeux Olympiques de 2016. Fort de potentialités considérables, le Brésil doit encore définir une voie de développement originale, capable de mobiliser le consensus social nécessaire et de garantir son indépendance dans un processus de mondialisation de plus en plus contesté.Fin 2013: Le pays a connu une croissance de 2,3% et une croissance des investissements de 6%, ce qui incline à l'optimisme le ministre des finances Guido Mantega, au moment où va s'ouvrir l'année 2014; Ces prévisions ne se sont pas confirmées car le pays est entré en récession au premier semestre pur ne retrouver que 0,1% de croissance au troisième trimestre. L'inflation (à 6,6% en novembre) est demeurée trop élevée, ce qui a entraîné un baisse de la consommation. Il apparaît que le Brésil dont la croissance avait impressionné avant la crise de 2008, afit désormais partie du groupe des "Cinq fragiles" au sein duquel il se retrouve avec la Turquie, l'Inde, l'Afrique du sud et l'Indonésie.. La priorité a été donnée par Dilma Rousseff à l'assainissement des comptes publics et à la stabilisation de l'inflation. Le remplacement aux finances de Guido Mantega par Joaquin Levy confirme le choix de la rigueur, à l'opposé des promesses formulées durant la campagne électorale. Une volonté saluée par les marchés ciers mais qui risque, à l'inverse, de décourager les électeurs du Parti des Travailleurs. D'autant que, pendant le même temps, Dilma Rousseff, réélue de justesse présidente en octobre 2014, s'est trouvée confrontée à un scandale de corruption concernant la firme publique Petrobras. Les malversations révélées atteignent un milliard d'euros. Près de 70 élus et de nombreux entrepreneurs sont concernés. Malgré ses dénégations, la présidente n'inspire plus confiance à 70% des Brésiliens.2015: La crise s'aggrave au point qu'une demande de destitution est lancée contre la présidente en décembre, à l'issue d'une année marquée ar une récession de 3%. Durant l'été, la popularité de la présidente tombe à 8%. L'âge d'or de Lula, qui bénéficiait de la hausse des matères premières, de la découverte de gisements de pétrole et de 'émergence d'une classe moyenne paraît désormais révolu. Ce qui crée de profondes frustrations dans une population qui avait imaginé que les progrès obtenus étaient définitivement acquis. Les manifestations où l'on entend crier "Fora Dilma" ( Dilma dehors) se multiplient et témoignent de l'ampleur de la crise, alors que la gauche apparaît pour longtemps discréditée. Seule Marina Silva,porte-voix des écologistes, semble épargnée par le rejet que manifestent les électeurs brésiliens. 2016: Deux ans après la Coupe du Monde de football, l'organisation des Jeux Olympiques de Rio laissait augurer une relance de l'économie. L a déception a été de taille et certains économistes ont comparé la situation du Brésil à celle qu'a connue la Grèce après les jeux d'Athènes. de 2004. Le déséquilibre budgétaire et la corruption sont en effet au rendez-vous. La destitution, en août 2015, de la présidente Dilma Rousseff a porté au pouvoir Michel Temer, un centriste bénéficiant du soutien des milieux d'affaires mais incapable d'entraîner l'adhésion de l'opinion. Les résultats économiques espérés ne sont pas là et le Brésil a renoué avec le chômage d e masse, avec plus de douze millions de demandeurs d'emploi. Sur le plan judiciaire, tous les partis sont éclaboussés par l'enquête anti corruption baptisée "Lava jato".2017: La croissance (annoncée à 1% pour l'année) est de retour dès janvier, après les récessions spectaculaires de 2015 (- 3,8%) et 2016( - 3,6%).. Le climat politique, marqué par une perte de confiance majeure vis à vis des grands partis, n'est cependant guère favorable aux investissements.L'augmentation de la production et le ralentissement de l'inflation sont toutefois encourageants. Soupçonné d'être lié aux corrompus, le président Temer ne parvient pas cependant à s'imposer aux yeux de l'opinion, dans un contexte de mécontentement très largement partagé, lié la persistance du chômage, à l'insécurité de plus en plus insupportable et aux déficiences de l'éducation et du système de santé.2018: L'année marque une rupture majeure dans l'histoire récente du pays. Elle a vu en effet, en octobre, l'élection inattendue à la présidence d'un candidat "populiste", Jair Bolsonaro, un ancien officier nostalgique de la dictature militaire , qui a vigoureusement fait campagne sur l'insécurité et sur la corruption incarnée par Lula, le "père des pauvres", rendu responsable de la mauvaise situation économique alors qu'il est en prison et dans l'impossibilité de s e présenter à des élections présidentielles pour lesquelles il était initialement donné gagnant.Bolsonaro l'a emporté au deuxième tour, avec 55, 1% des voix, face à Fernando Haddad, le représentant du Parti des Travailleurs (44,9%) Sans surprise, c'est dans le Nordeste pauvre que Haddad a fait ses meilleurs scores alors que Bolsonaro s'imposait largement dans les Etats "gauchos" du sud. L'action du juge Sergio Moro, qui a conduit l'enquête "Lava Jato" est sévèrement jugée par les observateurs qui lui reprochent d'avoir ouvert la voie au "populiste" Bolsonaro. Celui-ci entend mener une politique économique libérale, rétablir l'ordre et la sécurité, lutter contre la corruption et mettre en oeuevre une ambitieuse politique de développement des infrastructures. Il se voit accusé de vouloir revenir sur les droits accordés aux minorités amérindiennes et ne manifeste guère d'intérêt pour les questions écologiques, au nom du développement jugé nécessaire d l'Amazonie.
Dans la longue durée sud-américaine, Bolsonaro apparaît comme un "homme fort" animé d'une volonté réformatrice (certains ont pu évoquer à son sujet les expériences antérieures de Getulio Vargas au Brésil et de Juan Peron en Argentine) mais qui pourrait être tenté par l'autoritarisme, en un temps où la démocratie parlementaire suscite un grand désenchantement dans une Amérique du Sud où les opinions paraissent tout à fait désabusées après l'échec des recettes libérales et des tentatives "bolivariennes" engagées au Venezuela.