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Les origines de l’Éthiopie

Francis Anfray

Ancien directeur de la Mission française d'archéologie en Éthiopie Professeur émérite de l'université d'Addis-Abeba (1982-1991)

Parmi les plus peuplés d’Afrique, l’Éthiopie est un pays d’une grande diversité culturelle : gigantesques monolithes d’Axoum, églises rupestres de Lalibela, stèles de Tiya, châteaux de Gondar, tous ces sites et monuments sont aujourd’hui inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. Le pays plonge des racines dans un passé qui remonte aux âges les plus lointains de la préhistoire. Nous avons demandé à Francis Anfray, ancien directeur de la Mission française d’archéologie en Éthiopie et auteur de l’ouvrage Les anciens Éthiopiens (Armand Colin, 1990), de revenir sur les origines de l’Éthiopie, de sa préhistoire au royaume axoumite, berceau de la légende de la reine de Saba, mais surtout du christianisme éthiopien.

Le mégalithisme du sud

La nation éthiopienne s’est constituée sur un double héritage. L’un est représenté par un ensemble mégalithique qui s’étend dans le sud de l’Éthiopie ; l’autre, d’où le mégalithisme n’est pas absent, s’est formé dans le nord avec la culture d’Axoum au premier millénaire de notre ère.

II possède une grande ancienneté puisque des cistes dolméniques – ou sépultures mégalithiques – appartiennent au dixième millénaire avant notre ère. Près d’une centaine ont été répertoriés par Roger Joussaume qui a étudié certaines d’entre elles, dans le Harar. Des stèles de dates plus récentes, datant du premier millénaire de notre ère, dans le Shoa et le Sidamo, autres régions du sud, se comptent par milliers. Un explorateur des années vingt avançait le chiffre de dix mille. Encore convient-il de préciser qu’à cette époque une quantité importante de ces monuments avaient disparu, souvent utilisés comme matériau de construction par la population locale. C’est dans ces contrées que se trouve encore la plus grande concentration de mégalithes de tout le continent africain.

Ces monuments mégalithiques sont connus depuis la fin du XIXe siècle par le récit de voyageurs étrangers. En 1878, Antonio Cecchi remarque des « pierres de Gragne » – du nom d’un conquérant musulman du XVIe siècle – aux environs de Debra-Berhan, une bourgade à 135 kilomètres au nord-est d’Addis-Abeba. Dans un canton limitrophe, Paul Soleillet en 1882 voit des « pierres levées » au milieu des champs. Elles lui rappellent les menhirs de Bretagne. V. Barbini, peu après, au pays de Tiya dans le Soddo, observe des « pierres sépulcrales ». Il en fait des croquis, les premiers jamais réalisés de ces stèles. Mais c’est surtout à François Azais, dans les années 1920, qu’on doit les découvertes les plus importantes, publiées en 1931 sous le titre « Cinq années de recherches archéologiques en Éthiopie ». Aujourd’hui, Roger Joussaume poursuit méthodiquement ces recherches sur les hautes terres d’Éthiopie du Sud.

Une grande variété de formes et de figurations caractérise ce phénomène mégalithique. Plusieurs stèles sont marquées de signes gravés ou champlevés dont la signification échappe. Des personnages apparaissent au milieu de dessins géométriques et d’objets divers. L’homme tient en effet une place primordiale dans les représentations, et il advient que le monument lui-même revête forme humaine. Un classement rapide distingue des stèles anthropomorphes, des stèles à épées, des stèles à figuration composite, des stèles au masque, des monolithes phalloïdes, des pierres hémisphériques ou coniques, des stèles simples sans nulle figuration. D’à peu près tous, il est possible d’affirmer que ce sont des monuments funéraires, car le plus grand nombre sont érigés sur des sépultures groupées quelquefois en véritables cimetières.

La hauteur de ces pierres varie de moins d’un mètre à huit mètres – mais on est tenté de dire la longueur parce qu’aujourd’hui beaucoup sont couchées au sol. De nombreux traits, communs aux unes et aux autres, les font assigner au même ensemble culturel dont la datation est problématique.

Les populations locales, chrétiennes ou musulmanes de tradition, sont dans l’ignorance complète de leur origine. Nul signe de l’une ou l’autre religion n’est identifiable entre tous les symboles figurés. Quel peuple ancien a dressé ces stèles ? Les recherches conduisent à penser que ce furent des agriculteurs ; elles fournissent peu d’éléments d’identification : qui sait s’ils ne furent pas, ces agriculteurs, ceux qui domestiquèrent le caféier – car si l’on sait que le café est originaire d’Éthiopie, des incertitudes demeurent quant à la date de sa domestication ? Il est tentant de l’imaginer. Des vestiges de leur habitat ont été mis au jour qui ne les font pas pour autant émerger de l’obscurité protohistorique. Quant aux mythogrammes et autres symboles, ils demeurent à ce jour lettres mortes.

Tiya

Un site, par le nombre des stèles, leurs caractéristiques et leurs figurations, est particulièrement représentatif de cette culture protohistorique. Situé à quatre-vingt-sept kilomètres au sud d’Addis-Abeba. par la route, il est constitué d’une quarantaine de monuments, tous de tailles différentes : le plus grand, aujourd’hui brisé en morceaux, mesurait cinq mètres de hauteur.

Cette stèle est remarquable par la nature et la disposition des signes qui composent la figuration sculptée. La partie supérieure compte treize épées superposées sur deux rangées. La rangée supérieure de six épées est disposée obliquement ; les épées ont leur pointe en bas. La rangée inférieure présente aussi une légère obliquité, en sens inverse ; sept épées jointes par la garde ont leur pointe en haut. En dessous sont figurés des symboles énigmatiques : deux disques encadrent un signe ramifié. Un motif en forme d’X couché – en fait, un double chevron jointé – est placé sous le disque de gauche, à côté du signe ramifié. La partie inférieure de la stèle reproduit les mêmes emblèmes : six épées, pointe en haut, dessinées verticalement et, comme dans la partie supérieure, attachées par la garde. En dessous, deux disques encadrent le signe ramifié ; le double chevron apparaît sur la droite. Au pied, deux perforations.

Le motif ramifié – que l’on peut aussi nommer « bifurqué » – est le symbole le plus communément reproduit. On le rencontre sur la plupart des stèles du Soddo, mais il est, pareillement ou avec quelque différence, représenté sur les monolithes phalloïdes du Sidamo, plus au sud. Il est dessiné seul sur certains monuments, mais on le voit, notamment sur les stèles de Tiya et aux alentours, associé aux autres symboles que sont les disques et les chevrons pour composer un trigramme dont le sens est perdu.

Épées et trigrammes, d’une stèle à l’autre – elles sont une centaine dans le Soddo – les arrangements varient ; ils ne sont jamais identiquement figurés. Ces signes témoignent d’un symbolisme élaboré qui n’a pu être expliqué, bien que les hypothèses se soient multipliées au gré des imaginations. Il n’en est aucune à présenter suffisamment de vraisemblance pour l’emporter sur les autres. Que ces stèles aient été façonnées et dressées comme un défi à l’éphémère, c’est sans doute ce que sur un plan général il est possible d’énoncer. Élevées sur des tombes, on sait que ce sont des monuments funéraires. À Tiya, quarante-quatre de ces sépultures ont été étudiées qui ont permis nombre d’observations archéologiques et anthropologiques.

Dans la région de Butagira, vers le sud, des stèles historiées offrent une figuration très variée, en creux et en relief. Les hommes sont représentés avec des outils, des arcs et des flèches.

Ces stèles de Tiya et d’ailleurs sont d’un âge malaisé à déterminer avec précision. Des recoupements d’ordre archéologique auxquels des analyses de laboratoire ont apporté un début de confirmation suggèrent une datation entre le neuvième et le quatorzième siècle. L’origine de ces monuments est encore enveloppée d’incertitudes mais l’étude de ce mégalithisme qui fut l’œuvre de sociétés agricoles inconnues n’est encore que dans sa phase initiale.

Dans le Nord, un royaume antique

Axoum est le nom d’une ville du nord de l’Éthiopie. Elle fut au début de notre ère la capitale d’un royaume dont l’étendue couvrait approximativement l’aire géographique du Tigray et du nord de l’Erythrée voisine. Le site d’Axoum aujourd’hui porte la marque des vicissitudes de l’histoire. Les ravages du temps ont gravement altéré sa physionomie ancienne mais, à qui sait voir au-delà des dévastations, il peut réserver d’assez surprenantes révélations. Les grands édifices axoumites ont été détruits il y a longtemps ; il en subsiste pourtant des restes qui permettent de se faire une idée de ce qu’ils furent dans les temps antiques.

Une grande unité de caractère distingue cette architecture, carrée ou rectangulaire, aux assises massives. Les blocs de pierre qui composent la maçonnerie ont parfois de grandes dimensions. L’ordonnance des plans est d’une géométrie rigoureuse. Les murs de soubassement s’élèvent en gradins. Au pourtour alternent redents et rentrants. Une grande régularité générale caractérise tous les dispositifs architecturaux qui imposent une impression de puissance et de rudesse extérieure.

Comme de l’architecture, il en va de la sculpture – si on désigne de ce terme le travail de la pierre en général ; en effet, la statuaire paraît quasi absente de l’archéologie axoumite. Plusieurs bases de trônes, plates-formes de granit que douze hommes ont peine à soulever, manifestent cet aspect de puissance que présentaient les monuments axoumites.

Plusieurs stèles gigantesques ont été dressées au troisième siècle à la mémoire de grands rois qui ne sont pas autrement connus que par les monnaies qu’ils ont émises : Endybis, Aphilas, Wazebas, Ousanas. Ces stèles ont été taillées dans une sorte de granit dur. Une seule est encore debout au centre de la ville ; sa hauteur est de vingt et un mètres. La plus haute gît au sol, en morceaux ; elle mesurait trente-trois mètres. C’est probablement le plus grand monolithe taillé, transporté et élevé de main d’homme. Au nombre de six, sculptés avec précision, ces monuments imitent une architecture ; on discerne portes et fenêtres avec leur encadrement de bois imité, des têtes de poutres. Elles sont la reproduction d’édifices à multiples étages. Il faut y voir des monuments commémoratifs. Un mystère les entoure. Il n’existe aucun écrit à leur sujet ; aucun auteur ancien ne donne la moindre indication les concernant. Au pied de chacune, une table de pierre était disposée ; elle comporte des cavités, sans doute pour des offrandes funéraires. Ces stèles apportent un haut témoignage sur le savoir-faire et le degré d’organisation collective atteint à l’époque.

Là, comme pour l’architecture, l’absence de référence décisive à des exemples pris au monde extérieur montre qu’Axoum s’était libéré non d’une tutelle étrangère qui n’a jamais existé, mais de l’imitation même de modèles conservés en d’autres pays. Un style a été élaboré aux premiers temps de l’avènement axoumite. Il a été l’œuvre de générations qui, dans les hautes régions ont pris conscience de leurs ressources propres. Cet essor dont les monuments constituent le plus sûr des témoignages conféra au pays un prestige que note un texte du IIIe siècle attribué à Mani : « II y a en ce monde quatre grands royaumes. Le premier est celui de Babylone et de la Perse. Le deuxième est le royaume des Romains. Le troisième est celui des Axoumites. Le quatrième est le royaume de Silis [la Chine ?] ».

Au IVe siècle, sous l’empereur Ezana, s’éveille un monde nouveau : le christianisme se greffe sur le plant axoumite à la religion inspirée de celle qui florissait alors en Arabie du Sud. C’est pour Axoum une évolution décisive. Celle-ci cependant ne s’accentue qu’aux Ve et VIe siècles. Des moines, fuyant les querelles théologiques qui agitaient Byzance et sans doute mus par un zèle évangélique y viennent fonder des monastères sur le haut plateau. Ce faisant, ils jettent les bases d’une nouvelle culture. Quant survient le déclin aux derniers siècles du premier millénaire, ces monastères deviennent les conservatoires des traditions.

La christianisation d’Axoum

Rufin d’Aquilée, historien latin, écrit au début du Ve siècle. Dans son Histoire ecclésiastique, il raconte comment le pays axoumite se convertit au christianisme. Dans les premières années du IVe siècle, deux jeunes gens originaires de Tyr en Syrie sont enlevés par des trafiquants alors que le navire qui les transporte relâche dans un port de la mer Rouge. On les amène à la cour d’Axoum où ils font preuve de telles capacités que le roi fait de l’un son échanson et de l’autre l’intendant de ses biens. Edesius et Frumentius, ces deux jeunes gens, ont été élevés dans la religion chrétienne. Après plusieurs années dans la capitale axoumite, ils sont autorisés à partir. Frumentius se rend à Alexandrie auprès du patriarche Athanase qui lui confère l’épiscopat et « lui ordonne de retourner, avec la grâce de Dieu, à l’endroit d’où il est venu ». De retour à Axoum, Frumentius convertit le roi à la foi chrétienne.

À Axoum, une basilique bâtie au XVIIe siècle sur les fondations d’une église antérieure, elle-même édifiée sur les ruines d’une construction de l’époque axoumite, est dédiée à la Vierge Maryam-Syon. Dans ce vocable résonne l’écho de la cité biblique. Aux yeux des fidèles, elle est deux fois sainte puisqu’elle est placée sous le patronage de la mère du Christ et qu’elle abrite une insigne relique : l’Arche d’alliance apportée de Jérusalem, comme le veut la légende, il y a trois mille ans par Ménélik, fils de Salomon et de la reine de Saba. Axoum est ce haut lieu de spiritualité où prit naissance la chrétienté éthiopienne et se forma le mythe de la reine de Saba.

Le roman d’Axoum

Les origines de cette légende se perdent dans les ténèbres de l’histoire. Au XIVe siècle, un moine d’Axoum du nom d’Isaac, entreprend de rédiger en guéze – la langue d’usage ecclésiastique – les traditions anciennes. Il compose le Kebra Nagast ou La Gloire des Rois, une apologie de la dynastie royale où se lit le récit de la visite de la reine de Saba à Jérusalem et de sa rencontre avec le grand roi.

Une autre légende nourrit la mythologie du site. Au début du XXe siècle, un chroniqueur rapporte : « Au commencement, le Tigré était gouverné par le grand Serpent ». Aux temps de la légende, ce Serpent s’appelait Aroué et résidait sur un piton rocheux qu’on vous montre aujourd’hui à Axoum. Le peuple lui devait régulièrement un tribut de lait, de chèvres et de jeunes filles. Un homme du pays nommé Angabo tua le dragon, libérant ainsi le peuple de la sujétion. Angabo devint roi. Il eut une fille Makeda – la reine de Saba – qui donna le jour à Ménélik dont un descendant, Axoumay, fonda la cité royale.

Avant l’introduction du christianisme dans leur royaume, les Axoumites rendaient un culte aux divinités d’un panthéon multiforme où se côtoyaient dieux sudarabiques et dieux autochtones Astar, Beher et Meder, pour les principaux. Mahrem, divinité tutélaire de la dynastie régnante, était la figure centrale de ce panthéon. Quand Ezana, au IVe siècle, se convertit à la foi de Frumentius, un nom divin apparaît dans ses inscriptions : Egziabeher, « Seigneur de la terre ». Les chrétiens d’Éthiopie usent toujours de ce mot pour l’invocation de Dieu.

Premier millénaire avant notre ère : les fondements d’une création politique

Si la civilisation axoumite débute aux alentours du Ier siècle, elle a été précédée par une culture dont les plus anciens témoignages matériels remontent au VIIIe siècle avant notre ère. Dès cette époque s’observent des constructions en pierre, la pratique de la sculpture, l’usage du métal, une poterie aux formes et aux décors variés et une écriture en beaux caractères géométriques. L’emploi de l’araire était probablement usuel. Des inscriptions permettent de constater l’existence d’un royaume indépendant, Daamat, qui possède cependant sur le plan culturel et religieux des liens étroits avec l’Arabie du Sud.

Dans cette contrée de la péninsule, plusieurs royaumes connaissent alors un brillant développement. Ma’in, Saba, Qataban et Hadramawt sont les plus importants. Ils produisent et exportent diverses denrées que demande le monde méditerranéen. L’encens est la principale de ces marchandises. C’est aussi une région de transit pour des produits de l’Afrique et de l’Asie. Elle s’enrichit de ce trafic, et très vite des relations s’instaurent entre l’Arabie et les hauts plateaux africains. Un site particulier, Yeha, illustre cette parenté qui unit alors les deux territoires riverains de la mer Rouge. Yeha est au cœur des montagnes d’Adoua à cinquante kilomètres au nord-est d’Axoum.

Yeha

Au centre du village, sans doute le plus ancien d’Éthiopie, sur une éminence rocheuse, se dresse un édifice haut de onze mètres et large de quinze. Ce monument – un temple – fut dédié à une grande divinité du panthéon sudarabique. Son architecture d’une maçonnerie remarquable offre une grande ressemblance avec celle de maints édifices d’Arabie du Sud. Le lieu conserve d’autres ruines. Un matériel archéologique, en partie découvert dans des tombeaux, rassemble des sculptures, des poteries, des objets de bronze et de fer, un outillage agricole, des brûle-parfums et des inscriptions. Si manifeste que soit l’influence sudarabique, des dissemblances révèlent pourtant un caractère d’originalité. Dans ce site de Yeha et en plusieurs autres, des inscriptions ont fait connaître le nom de souverains : Waran Haywat, Radam, Rabah, Laman. Ces noms relèvent de l’onomastique sémitique d’Éthiopie que les inscriptions de l’Arabie du sud ignorent. Il en va de même pour des divinités dont seules les inscriptions d’Éthiopie attestent l’existence : Naraw, Sadaqan, Saman, Raba, Shayan.

Cet âge pré-axoumite a mis en place les conditions de développement qui vont constituer la culture axoumite.

Écriture

L’écriture éthiopienne proprement dite apparaît au IIe siècle de notre ère. Au IVe siècle, elle atteint sa forme quasi définitive avec l’introduction des marques vocaliques dans les inscriptions du roi Ezana. De consonantique qu’elle était jusque-là, l’écriture devient syllabique. La direction de lecture, qui était variable, se fixe et va désormais de gauche à droite.

En ce IVe siècle, avec le christianisme, les anciens cultes s’effacent peu à peu. La croix devient sur les monuments, les monnaies et les poteries le symbole unique, profusément reproduit. Si l’on ne peut encore repérer nulle ruine d’un sanctuaire de l’époque pré-chrétienne à Axoum, au contraire les églises ont laissé plusieurs vestiges architecturaux. Le soubassement de la basilique Maryam-Syon, entre autres, conserve des éléments d’un édifice religieux de l’antiquité. Certaines de ces églises furent construites sur des cryptes, certaines en rapport probable avec le culte commémoratif d’un saint personnage.

Vers la fin du premier millénaire, les monastères jouèrent un rôle primordial dans la transmission du legs axoumite, une des composantes essentielles de la culture éthiopienne. La tradition enseigne qu’au Ve siècle arrivèrent de Syrie des moines que le prosélytisme animait. Adeptes de la doctrine monophysite, ils jetèrent en Axoum les bases de la vie monastique. Certains, venus de la vallée du Nil, acclimatèrent sur les hauts plateaux une forme de cénobitisme dont Antoine et Pacôme avaient été les pionniers en Égypte. Ces propagateurs des préceptes évangéliques entreprirent avec leurs disciples de traduire en guèze la Bible et plusieurs écrits théologiques. Ces ouvrages ont de tout temps régit la vie de l’Église éthiopienne. Ils ont été des éléments fondamentaux de la carrière historiques de l’Éthiopie.

Francis Anfray
décembre 2002
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