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La Nouvelle-Zélande, le pays du long nuage blanc

Marie-Noëlle Ottino-Garanger
Chercheur au CNRS

La Nouvelle-Zélande, dont la superficie totale représente 268 675 kilomètres carrés, est un archipel constitué de deux îles principales – l’île du nord qui a pour ville principale Auckland, et l’île du sud dont la ville principale est Christchurch (point culminant au Mont Cook, 3 764 mètres) – et de nombreuses îles nettement plus petites dont la plus importante, Stewart Island, ne couvre que 676 kilomètres carrés. Situé pratiquement à mi-distance entre l’Équateur et le pôle Sud, l’archipel connaît donc des saisons inversées par rapport à celle de l’hémisphère nord : le mois de février y correspond à la fin de l’été.

Une nature exceptionnelle

L’environnement naturel et les paysages de Nouvelle-Zélande sont à tous points de vue exceptionnels : les Néo-Zélandais, quelle que soit leur origine, s’accordent pour considérer l’archipel comme un « joyau divin ». Pays montagneux né des convulsions de la terre où le volcanisme est encore actif, constellé de pics enneigés, de lacs volcaniques, bordé de fjords, de falaises et de baies infiniment découpées, il est aussi abondamment arrosé ; son important réseau hydrographique est une chance pour la production d’énergie dans un pays aussi attaché au respect de la nature. La nature vivante y est aussi remarquable que le relief : les trois-quarts de la flore indigène sont endémiques, les oiseaux, tous plus extraordinaires les uns que les autres, y pullulent… En effet tant la flore que la faune y prospérèrent des siècles durant dans un univers isolé qui les mit à l’abri de nombreux prédateurs, d’où la subsistance de ces fossiles vivants que sont les lézards tuatara, l’un des symboles de la Nouvelle-Zélande. L’archipel est aussi remarquable par la présence de plusieurs espèces d’oiseaux aux ailes atrophiées. Certains, qui pouvaient atteindre près de quatre mètres, après avoir fait le régal des Polynésiens qui colonisèrent les îles, ont aujourd’hui disparu… Les seuls oiseaux de ce type qui subsistent sont les kiwis, de la taille environ d’un dindon, dont les activités sont essentiellement nocturnes.

et préservée…

La population néo-zélandaise comprend aujourd’hui quatre vint dix pour cent d’habitants d’origine européenne anglo-saxonne pour environ dix pour cent de Maoris ; tous furent très tôt attachés à la préservation de leur environnement, comme en témoigne la création des parcs naturels : l’un des tout premiers est ainsi né de la volonté d’un chef maori désireux de transmettre son amour de cette terre, et donc de la préserver, tant pour les Maoris que pour les étrangers. Cet attachement est attesté, lorsque l’on parcourt le pays, par la préservation des paysages, la diversité des modes d’exploitation agricoles – pâturages, vignes, vergers – et aussi par l’habitat, coquet, souvent fait de bois et fraîchement repeint. Le souci de protection de l’environnement se manifesta aussi rapidement par de sévères mesures de contrôle de la pollution. Cette volonté associée à un esprit novateur fit de l’agriculture néo-zélandaise le principal pilier économique du pays. On doit notamment aux Néo-Zélandais la mise en valeur et la commercialisation de fruits tels que le kiwi.

Le « pays du long nuage blanc »

Les Maoris, au nombre d’environ quatre cent mille, sont sept fois plus nombreux qu’en 1886. Pour eux, cette terre néo-zélandaise qu’ils nomment Aotearoa, le pays du « long nuage blanc » a surgi de Te Po, la nuit des temps, par la volonté de Tane, dieu des forêts, fils aîné de Rangi, le Ciel et de Papa, la Terre. La Terre et le Ciel jusqu’alors étroitement unis se virent un jour séparés. Pour calmer leur chagrin, Tane orna son père d’astres et d’étoiles et sa mère de plantes et d’animaux. Mais, lorsqu’il pleut, ce sont encore les larmes de Rangi, qui reste inconsolable… Aotearoa jouit en effet d’un climat océanique tempéré, dans son ensemble, avec une frange sub-tropicale, au nord, et un froid vif tout à fait au sud ; Wellington est à hauteur des « quarantièmes rugissants » et donc directement soumise à ces vents impitoyables. Les pluies se répartissent sur toute l’année, sans véritable « saison des pluies ». C’est pourquoi les Polynésiens, lorsqu’ils vinrent s’installer sur ces terres, ne purent réussir à préserver les cocotiers, ni les arbres à pain qu’ils avaient emportés dans leur formidable aventure maritime qui, du Pacifique sud jusqu’aux portes de l’Antarctique, leur permit de découvrir la Nouvelle-Zélande.

La colonisation maori

L’archipel fit tout d’abord l’objet d’expéditions exploratoires de la part de ces audacieux navigateurs venus « d’Hawaiki » (et non d’Hawai’i), nom donné à toute terre d’origine du peuple polynésien. La première expédition se situerait vers 950 après J.-C., dirigée par un certain Kupe, puis une seconde, conduite par Toï aurait exploré ces rivages vers 1150. Ce ne fut cependant qu’en 1350 que commença le peuplement : les récits légendaires ont conservé le nom des sept pirogues qui participèrent à la première colonisation : Tainui, Te Arawa, Aotea, Tokomaru, Takitimu, Mataatua, Kurahaupo. Une quarantaine de tribus seraient issues de ces premiers clans, qui se subdivisèrent encore par la suite. Lors de leur arrivée la terre néo-zélandaise n’était pas vide et ils combattirent ou assimilèrent leurs prédécesseurs, eux-mêmes d’origine polynésienne, les Moriori, dont, à part le fait qu’ils étaient réputés pacifiques – ou tout au moins plus pacifiques que les Maoris –, on ne sait que peu de chose bien qu’ils aient survécu, aux Chatham, dans des conditions très difficiles pour s’éteindre à l’aube des enquêtes ethnographiques. S’ils ne purent, en Nouvelle-Zélande, reconstituer la totalité de leur environnement familier, les Polynésiens introduisirent cependant dans cet univers les premiers mammifères – le rat frugivore, les chiens… – et la patate douce ou kumara.

La société traditionnelle

Dès l’origine, la société traditionnelle qui s’établit sur ces terres nouvelles fut fortement hiérarchisée, unie autour de chefs héréditaires, de guerriers et de prêtres très puissants. Les rivalités entre les groupes belliqueux les incitèrent à s’établir de préférence sur des hauteurs et dans des villages fortifiés : les pa. Cette structure se reflète dans celle des villages : au cœur des assemblées se développait, dans le voisinage de l’habitation du chef, un espace dégagé associé à la maison communautaire, le marae. Autour de celle-ci, dans un vaste espace entouré de palissades, se répartissaient les maisons où dormaient les familles et les lieux où l’on cuisinait ainsi que les hangars où étaient conservées, en particulier, les réserves de patates douces. Parmi les autres lieux essentiels figurent ceux où étaient déposés les morts et ceux où étaient honorés les ancêtres, en dehors de la maison commune construite à leur mémoire.

La vie, la guerre, l’art

Les jeux et affrontements guerriers rythmaient l’existence, au même titre que les récoltes et la pêche ; ils avaient leurs saisons et se caractérisaient par des corps à corps où dominait l’usage de lances et longs casse-tête maniés à deux mains, les taiaha, pouwhenua… ou d’autres nettement plus courts, les patu faits de bois, d’os de baleine ou, pour le prestige, parfois de pierre verte. La bataille ne commençait pas sans être précédée de provocations, de danses de guerre, les haka, véritables exercices d’échauffement et d’agilité musclée accompagnés d’innombrables injures. Dans la vie comme à la guerre, les Polynésiens attachèrent toujours une grande importance à la qualité de ce qu’ils réalisaient, « garantie » d’acceptation par les ancêtres et donc, dans une certaine mesure, d’efficacité. L’esthétique n’avait de valeur qu’en ce qu’elle évoquait, ou honorait, ce monde des ancêtres, le sacré. Les matières sur lesquelles s’exerçait leur technique étaient liées aux ressources du pays et l’art s’empara du bois, de l’os, de la pierre, avec des fibres ou plumes, et d’autres matériaux tirés de plantes ou de la mer. Cet art maori, celui d’aujourd’hui aussi bien que celui que les musées nous ont conservé – comme l’Institut d’État Maori Arts and crafts, de Rotorua – est remarquable par tant par sa qualité que par son esthétique qui s’appuie sur une ornementation symbolique complexe, toujours portée par des thèmes et faite de courbes. La gamme de couleurs utilise essentiellement le rouge, le blanc et le noir. Elle est plus étendue dans le tissage. Sont particulièrement connus le tatouage qui marquait le statut de la personne, notamment sur le visage, les maisons de réunion et les pirogues, principalement de guerre : dans les deux cas leurs structures rappellent celles de la tribu et font une part importante aux ancêtres. Il existe encore de beaux objets usuels, mais ceux qui sont conservés sont souvent liés aux cérémonies : parures, herminettes, casse-tête…

L’arrivée des Européens

Si la Nouvelle-Zélande fut aperçue pour la première fois en 1642 par le Hollandais Abel Tasman, il fallut attendre 1769 pour que les Européens ne s’approchent à nouveau de l’archipel : Jean-François-Marie de Surville y débarqua quelques jours et James Cook en fit le tour et en dessina les côtes. Dès les années 1790, l’archipel fut régulièrement visité par les navires baleiniers, puis ce furent les bateaux de commerce et enfin de petites implantations d’Européens se dispersent du nord au sud. Dans la compétition qui s’établit alors entre la France et la Grande-Bretagne, cette dernière prit de peu la main : les églises protestantes alliées aux intérêts économiques poussèrent énergiquement le mouvement de colonisation. Aotearoa passa sous contrôle britannique en 1840 par le traité de Waitangi. Le capitaine Hobson obtient en effet la reddition des quarante-cinq principaux chefs maoris le 6 février, contre la garantie de la possession de leurs terres. Le 22 janvier, les premiers colons anglais avaient déjà débarqué à Wellington (anciennement Port Nicholson, dans l’île du nord), cinq jours avant que les colons d’une entreprise française ne le fassent dans la Baie des îles, à Akaroa dans l’île du sud. Ce fut ensuite le tour de New Plymouth en 1841, dans le nord, puis Nelson (île du sud) en 1842.

La résistance maori

Le commerce des armes et de l’alcool, solidement établi, associé au non-respect de la disposition du traité à l’égard des terres ainsi que les nombreuses malversations et confiscations firent naître de nombreux mouvements de résistance. Ils culminèrent en de sanglantes escarmouches, créant un réel climat de guerres, entre 1840 et 1847 puis à nouveau de 1860 à 1872. Ces affrontements sanglants joints au développement de nouvelles maladies faillirent provoquer la disparition complète des Maoris.

Le développement économique

À partir de 1882, l’utilisation des techniques de réfrigération récemment découvertes à des fins de transport commercial allait donner un nouvel essor aux échanges avec l’Angleterre : la viande, le beurre et le fromage allait bien vite supplanter les exportations de bois et l’exploitation d’arbres remarquables, dont le kauri dont on extrait la gomme copal, a cessé. La découverte d’or en 1861 dans la région d’Otago, dans l’île du sud, ne joua également qu’un rôle éphémère.

et social…

En 1907 la Nouvelle-Zélande devient un Dominion et, progressivement, met en place une législation sociale très en avance ; le pays est alors pratiquement pionnier dans le domaine de la protection sociale, du régime de retraite, du service de santé… Au cours de la première guerre mondiale près de 10 % de la population s’engagea auprès des Britanniques, dont de nombreux Maoris chez qui la tradition guerrière reste prestigieuse. On verra à ce sujet le film « L’âme des guerriers » sur la question maori. C’est en toute logique que la Nouvelle-Zélande obtint son indépendance au sein du Commonwealth en 1931. Sa participation à la seconde guerre mondiale fut plus importante encore et le pays est un des membres fondateurs des Nations Unies.

La Nouvelle-Zélande aujourd’hui

En tant que membre du Commonwealth, la Nouvelle-Zélande dépend de la couronne d’Angleterre et la reine nomme le Premier ministre désigné par le parti majoritaire. Il s’agit d’un régime parlementaire à une chambre, The House of Representatives, qui compte quatre-vingt-douze membres, dont quelques Maoris. Le parti conservateur eut longtemps le pouvoir, avec des périodes d’interruptions travaillistes (1972 à 1975, 1984 à 1990) ; Helen Clark, travailliste, occupe le poste de Premier ministre depuis 1999. Dans le domaine religieux, c’est la religion protestante qui est toujours largement majoritaire. Si en 1919 ce fut un physicien né en Nouvelle Zélande, Lord Rutherford, qui fit la première expérience mettant en évidence la possibilité de fission de l’atome, le pays est farouchement hostile aux activités nucléaires dans le Pacifique. Dans le domaine intérieur, la Nouvelle-Zélande se caractérise, surtout depuis 1971, par sa lutte contre toute trace de discrimination raciale et travaille à une restitution partielle, mais significative, de terres aux tribus maories. Une réelle volonté de compréhension n’a cessé de grandir de part et d’autre entre Maoris, minoritaires dans leur propre pays et Occidentaux, ou pakeha. L’intégration reste pourtant difficile. Le renouveau de la langue et de la culture maori, sensible depuis les années 60, se heurte aux intérêts économiques et aux différences d’esprit des deux cultures, mais une même fierté nationale anime tous ses habitants. Une culture néo-zélandaise s’est développée originale, riche, incomparablement plus réussie, par cette intégration, que celle de son grand voisin, l’Australie dont la réussite économique est par contre plus éclatante. En effet, l’esprit dans lequel fut mené le développement récent des deux pays ne pas fut pas le même : si la Nouvelle-Zélande opta plutôt pour la recherche d’une progression socialement équilibrée de la société à travers le développement économique, l’Australie est restée essentiellement un pays de libre entreprise qui s’appuie sur la réussite individuelle. En dehors de l’attrait remarquable du pays lui-même, ce mariage social et culturel est un des attraits supplémentaires offerts par la découverte de la Nouvelle-Zélande.

Marie-Noëlle Ottino-Garanger
juin 2004
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