Publié à l'occasion de l'exposition « Civilisations oubliées de l'Anatolie antique » présentée au musée d'Aquitaine de Bordeaux, cet ouvrage – rédigé par les archéologues Jacques des Courtils et Laurence Cavalier, respectivement directeur et directrice adjointe de la mission archéologique française à Xanthos-Letôon – se présente comme une excellente introduction à la découverte des cultures qui ont fleuri sur le plateau anatolien au cours de l'âge du bronze et aux débuts du premier millénaire, avant que l'hellénisation consécutive à la conquête macédonienne et la romanisation ultérieure ne viennent ouvrir une période nouvelle dans l'histoire de la région. L'intérêt archéologique que celle-ci présente ne fut reconnu que tardivement, après les grandes découvertes réalisées auparavant sur les rives du Nil ou du Tigre. Outre l'identification par Heinrich Schliemann du site de l'ancienne Troie – retrouvée sur la colline d'Hissarlik, non loin de l'entrée des Dardanelles –, la découverte des ruines de Boghaz Keuy par le Français Charles Texier, celle de Xanthos par l'Anglais Ch. Fellows, ou celle de Gordion, l'ancienne capitale du roi phrygien Midas, ont révélé l'importance d'une région où naquirent sans doute, à Catal Hüyük ou à Hacilar, les premières villes des temps néolithiques, qui font elles-mêmes suite au curieux ensemble de Göbekli Tepe, daté du X
e millénaire avant J.-C. et caractérisé par d'impressionnantes stèles de pierre hautes de trois à quatre mètres figurant divers animaux. C'est sur cette terre anciennement humanisée que se développe – à la fin du III
e millénaire avant J.-C. et au cours du second – une civilisation du Bronze ancien particulièrement riche, illustrée à Troie par le fameux « trésor de Priam » découvert et baptisé par Schliemann, même s'il est antérieur d'un millénaire à l'expédition achéenne qui, au XIII
e siècle avant J.-C., donna naissance au récit légendaire ultérieurement mis en forme par Homère. Mais la civilisation troyenne du Bronze ancien est davantage tournée vers le monde égéen que vers l'intérieur de l'Anatolie où se développe alors la culture identifiée sur le site néolithique de Beycesultan et où la découverte des tombes d'Alaca Höyük a révélé – à travers bijoux en or, fibules et « étendards » de bronze – une civilisation tout à fait originale, celle du pays de Hatti, dont l'étonnante prospérité dépendait des richesses en métaux de son sous-sol. La fin du Bronze ancien, à la charnière des III
e et II
e millénaires, ouvre une époque nouvelle marquée par l'arrivée des commerçants assyriens, qui établissent un comptoir à Kanesh (Kultépé) pour s'y procurer l'or et l'argent qu'ils échangent contre l'étain nécessaire à la fabrication du bronze. C'est durant la même période que de nouveaux venus d'origine indo-européenne s'emparent de Kanesh – transformée en Nésa – et s'imposent ensuite sur l'ensemble du Hatti qui leur donnera finalement son nom, quand les souverains « hittites » installeront leur capitale à Hattusa (Boghaz Keuy) dont Texier découvrira les ruines au XIX
e siècle. Le Bronze récent voit l'apogée de Troie, bientôt détruite par le raid achéen qui fera ultérieurement figure de mythe fondateur de l'épopée homérique et, surtout, celui de l'Empire hittite devenu, face à l'Egypte des XVIII
e et XIX
e dynasties, et à la faveur de l'éclipse du Mitanni voisin, l'une des superpuissances du Proche-Orient. Maîtres de l'Asie Mineure, les souverains de Hattusa doivent cependant compter avec de farouches adversaires : les Gasgas, un peuple mal connu du Nord-Est, mais aussi les Ahiyyawa à l'ouest, sans doute les Achéens de l'époque mycénienne, ou les Lukkas, ancêtres des Lyciens, au sud. Cet équilibre régional est remis en question quand l'empire s'effondre – à la fin du XIII
e siècle ou au début du XII
e avant J.-C. – sous les coups des envahisseurs que l'on a convenu de désigner sous le nom de « Peuples de la mer », acteurs d'une nouvelle migration de populations venues de l'ouest qui constitueront en Palestine le Royaume philistin et menaceront directement l'Egypte de Ramsès III, qui a immortalisé sur les reliefs du temple de Médinet Habou la victoire remportée contre eux. L'empire des Mursil, Hattusil ou Suppiluliuma, celui que Ramsès II prétendait avoir vaincu à Qadesh, disparaît donc un siècle plus tard, mais des principautés « néohittites » vont cependant prospérer au sud-est de l'Anatolie – à Karkémiskh, Karatépé ou Zincirli – au début du I
er millénaire. Cette même époque voit se développer, alors que commencent les migrations grecques vers l'Ionie, le royaume de l'Urartu (au sud du Caucase) et le royaume de Phrygie dont le souverain, Midas, installe sa capitale à Gordion. Au VII
e siècle, c'est la Lydie des rois Gygès, Alyatte et Crésus qui devient la puissance dominante. C'est à ce moment que l'or récupéré dans le cours de la rivière Pactole permet de frapper les premières pièces de monnaie. La richesse légendaire de Crésus ne lui permettra pas de sauver son royaume quand il sera confronté aux conquérants perses achéménides qui s'empareront de Sardes, sa capitale. Révélée par les fouilles effectuées sur l'acropole de Xanthos, la civilisation lycienne connaît, pour sa part, son apogée au VI
e siècle avant J.-C., juste avant que la région ne tombe pour deux siècles, vers -546, sous la domination perse. C'est enfin la conquête d'Alexandre qui fait entrer la région dans l'espace de la civilisation hellénique.
L'ouvrage de Jacques de Courtils nous offre ainsi un survol clair et complet de l'histoire d'une région trop souvent méconnue et rend, en particulier, toute la place qui leur revient à la Phrygie et à la Lycie anciennes.
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