Première puissance de la planète, les Etats-Unis d’Amérique ont imposé des valeurs, fourni des modèles et déterminé des comportements ou des modes de vie qui définissent aujourd’hui un monde « occidental » tenté de se confondre avec l’universel. Née il y a un peu plus de deux siècles dans le vaste mouvement des « révolutions atlantiques » entamé en Angleterre et poursuivi en France, la jeune république du Nouveau Monde a profité des divisions suicidaires qui ont ruiné la vieille Europe pour devenir, au siècle dernier, « l’hyperpuissance » évoquée par Hubert Védrine, l’arbitre ultime des affaires du monde.
Un tel statut nourrit à la fois la fascination qu’exerce l’american way of life et le rejet qu’inspire un « empire » d’un genre nouveau dont la puissance doit autant au soft power économique et culturel qu’à une force militaire qui n’en demeure pas moins, et de très loin, la première du monde. Aujourd’hui contesté, le leadership américain a largement raté la sortie de la guerre froide - quand un boulevard semblait s’ouvrir à « l’Empire bienveillant » de George Bush père ou à « la nation indispensable » de Madeleine Albright - mais si le XXIème siècle commençant voit l’émergence, comme on l’annonce, d’un monde « multipolaire », l’acteur américain n’en conservera pas moins un rôle majeur. Une bonne raison de s’interroger sur ce qui fait son identité si particulière. Le dixième volume de la collection « Culture-Guides », coéditée par Clio et les Presses Universitaires de France, arrive à point pour nourrir cette réflexion.
Rendus familiers par l’omniprésence de leurs produits et par l’invasion des images qu’ils exportent les Etats-Unis demeurent en fait très mal connus du public européen, qu’il s’agisse de leur Histoire ou de leur tradition culturelle, trop souvent résumée à quelques écrivains prestigieux, au jazz ou aux productions d’Holywood. C’est tout l’intérêt du livre réalisé par Alain Manier et préfacé par Philippe Labro d’inscrire dans la longue durée des trois derniers siècles la genèse du phénomène américain tel que nous le connaissons aujourd’hui.
Après avoir évoqué l’immensité « états-unienne», l’auteur revient sur les premiers occupants du continent, longtemps réduits au rôle de figurants des westerns de John Ford ou de Raoul Walsh, pour nous révéler l’extrême diversité de ce monde « précolombien » d’Amérique du nord. La présentation des diverses communautés europénnes qui ont contribué au développement de cet immense espace colonial donne la part qui leur revient aux Espagnols du sud-ouest ou de Floride, aux Français de l’Ohio ou de la Nouvelle Orléans, aux Hollandais de la Nouvelle-Amsterdam appelée à devenir New-York… sans oublier le rôle fondateur des colons anglais de Virginie et des Pères Pélerins venus bâtir outre-Atlantique la Terre promise sur laquelle leurs descendants rêveront de bâtir « la maison sur la colline » à partir de laquelle ils s’attribueront ultérieurement la « destinée manifeste » d’améliorer le monde et d’en éradiquer les forces du Mal, au nom de la démocratie et de la Liberté.
L’émancipation des treize colonies anglaises, l’établissement de la république de Washington et de Jefferson, l’Amérique que découvrit Tocqueville au début des années 1830, celle de la Guerre de Sécession conclue sur l’écrasement du vieux Sud, le temps de l’essor écalatant de la seconde moitié du XIXème siècle - quand les immigrants arrivent par paquebots entiers et que la mise en valeur des immenses ressources du pays le propulse rapidement au premier rang des puissances économiques du monde - sont successivement analysés, ce qui permet de mieux mettre en lumière l’avènement, à la faveur des deux guerres mondiales du XXème siècle, de la « République impériale » définie en son temps par Raymond Aron.
Au delà des grandes étapes de l’Histoire « classique », Alain Manier nous présente les nombreux courants littéraires et artistiques qui ont caractérisé ces divers moments d’une culture américaine trop souvent méconnue des Européens, de l’école de Concord à William Faulkner, des peintres de l’Ouest tels que Remington aux avant-gardes qui, au milieu du siècle dernier, ont fait que New-York a pu ravir à Paris sa place de capitale de l’art contemporain. Selon la formule retenue pour la collection « Culture-Guides », c’est en compagnie d’écrivains tels que Chateaubriand, Tocqueville, Walt Whitman, Paul Morand ou Jean Baudrillard que le lecteur partira à la découverte de ce Nouveau Monde né d’une vieille Europe dont il s’éloigne rapidement aujourd’hui.
Parmi les trésors du patrimoine mondial
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