Les éditions Picard nous entraînent vers les hauts plateaux éthiopiens pour nous y faire découvrir Lalibela, cette étonnante "Jérusalem noire" née de la volonté du souverain médiéval qui lui a donné son nom. D'une érudition sans faille mais aisément accessible, le texte de l'ouvrage – que l'on doit à un anthropologue spécialiste de l'Ethiopie et à un historien de l'art byzantin et de l'art chrétien oriental – est enrichi par une somptueuse iconographie qui constitue à elle seule une invitation au voyage.
La découverte du site
C'est au XVI
e siècle que le Portugais Francisco Alvarez révéla aux Occidentaux l'existence d'un ensemble tout à fait exceptionnel d'églises creusées dans le roc au début du XIII
e siècle. Il identifie l'Ethiopie au royaume mythique du Prêtre Jean et la description qu'il en donne en dit long sur la fascination que pouvaient exercer alors ces étonnants sanctuaires. Il fut impressionné par la conjonction du monolithisme et de l'extrême qualité du décor : l'intérieur de l'église du Golgotha est si bellement travaillé, dit-il, que « ni un orfèvre de l'argent, ni un plasticien de la cire ne pourrait faire mieux ».
La légende d'un saint roi
Les églises de Lalibela attirèrent très tôt de nombreux pèlerins venus honorer le saint roi dont la vie et les actions ont été racontées au XV
e siècle dans un récit anonyme glorifiant ses vertus, sur un fond d’éléments historiques nimbés de merveilleux. Entouré à sa naissance par un essaim d'abeilles qui lui donna son nom, Lalibela fut l'objet de la haine de son frère et d'autres membres de sa famille, mais, après qu'il eut été empoisonné, l'ange Gabriel l'entraîna auprès de Dieu qui lui présenta les modèles de grandes églises monolithiques qu'il devait reproduire dans son pays. Revenu à la vie, mais toujours persécuté par son frère, Lalibela suivit l'ange Gabriel à Jérusalem pendant que l'archange Michel protégea son épouse réfugiée à Axoum. Dans la ville sainte il conclut avec le Christ un pacte qui fit de lui le « Serviteur de la Croix » et, à son retour, son frère félon lui abandonna le trône. Honorant son engagement, Lalibela entreprit alors de réaliser les dix églises qu'il avait promis de construire.
La réalité historique
Cette tradition hagiographique a évidemment été remise en question, mais la connaissance du site ne progressa que très lentement. Ce furent des sources coptes qui permirent de placer au début du XIII
e siècle le règne de Lalibela et il fallut attendre la seconde moitié du XIX
e siècle pour que des voyageurs tels qu'Achille Raffray ou Gabriel Simon ramenassent en Europe les premières images des églises qu'ils faisaient à tort remonter au V
e siècle de notre ère.
C'est à la faveur de l'occupation italienne qu'Alessandro Monti della Corte et Luigi Bianchi Barriviera donnent la première description scientifique du site. Engagée à la fin des années soixante, la restauration des sanctuaires a abouti, en 1978, à leur inscription au patrimoine de l'humanité par l'Unesco.
On pense aujourd'hui que certaines des églises correspondent en fait à d'anciens palais royaux et, tout récemment, l'archéologue David Phillipson a établi une chronologie qui étale sur six siècles la réalisation du site, ce qui rend vain le débat relatif au « projet » monolithique attribué au souverain...
Des églises creusées dans le roc
Lieu d'un grand pèlerinage toujours très important en Ethiopie, le site de Lalibela est situé à 645 kilomètres d'Addis-Abeba. Il est composé de onze églises creusées dans la roche. L'ensemble était censé remplacer pour les pèlerins les sites de Terre Sainte où ils n'avaient plus accès du fait de la politique des Ayyoubides après la reprise de Jérusalem aux croisés, à la fin du XII
e siècle.
On distingue deux groupes principaux de sanctuaires. Au nord du canal baptisé « Jourdain » se dressent l'église Sainte-Marie, l'église de la Croix, l'église des Vierges, l'église Golgotha-Mikaël et les cinq nefs de l'église du Sauveur-du-Monde, la plus vaste église monolithique du monde. On trouve au sud : l'église d'Emmanuel, l'église Saint-Mercorius, l'église de l'abbé Libanos, l'église Gabriel-Raphaël et l'église du Saint-Pain. Une onzième église, l'église Saint-Georges au plan cruciforme parfaitement harmonieux et spectaculaire est séparée des autres, auxquelles elle est cependant reliée par un système de tranchées.
Toutes ces églises ont été creusées dans le roc pour former des blocs monolithiques dans lesquels on a dégagé ensuite des portes, des fenêtres, des colonnes, des salles intérieures et des étages. On a ajouté des fossés destinés au drainage des eaux et des tranchées empruntées par les processions. Les intérieurs des sanctuaires sont parfois décorés de peintures murales. L'église Golgotha-Mikaël abrite des répliques du tombeau du Christ et de la Crèche de la Nativité.
L'idée selon laquelle le roi Lalibela aurait voulu créer en Ethiopie une nouvelle Jérusalem s'appuyait sur les noms tirés de la géographie testamentaire : Jourdain, Golgotha, Bethléem... Mais, en fait, des toponymes identiques sont remarqués en d'autres lieux d'Ethiopie et le sanctuaire de Golgotha, plus qu'une réplique du lieu abritant le tombeau du Christ, avait vocation à accueillir celui du roi Lalibela dont la naissance était fixée au jour de Noël. Plus que Jérusalem, c'est Axoum, la première capitale chrétienne de l'Ethiopie, qu'on aurait cherché à reconstituer à Lalibela, ce que semble confirmer la ressemblance remarquée de la cathédrale du Sauveur-du-Monde avec Sainte-Marie-de-Sion d'Axoum.
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