La Lituanie. Un millénaire d’Histoire
Suzanne Champonnois et François de Labriolle
Editions de l’Harmattan
Paris
2007
Tous deux professeurs à l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales, Suzanne Champonnois – qui accompagne régulièrement les voyageurs de Clio dans les pays baltes – et François de Labriolle nous entraînent, avec cette Histoire de la Lituanie, à la découverte d’une petite nation trop ignorée en Occident et qui n’a connu, depuis la fin du XVIIe siècle, qu’une quarantaine d’années de véritable indépendance. Entourée par la Lettonie, la Biélorussie, la Pologne et l’enclave russe de Kaliningrad, la Lituanie d’aujourd’hui, qui ne dispose que d’une façade maritime réduite sur la Baltique, apparaît comme un bien petit Etat quand on la compare au grand-duché qui l’a précédé au cours des XIVe-XVe siècles, quand les Lituaniens tenaient tête aux chevaliers teutoniques à l’ouest et aux Mongols à l’est. Souvent mal distinguée de la Lettonie et de l’Estonie voisines tombées comme elle sous la domination russe, elle mérite pourtant de retrouver toute sa place dans la longue histoire du continent européen. Le pays va fêter en 2009 le millénaire de son existence, son nom, Litua, étant mentionné pour la première fois le 14 février 1009 dans les Annales de Quedlinburg. Celles-ci rapportent comment saint Brunon de Querfurt fut tué par les Païens avec dix-huit de ses compagnons à la limite de la Russie et de la… Lituanie (in confino Rusciae et Lituae). La Lituanie d’aujourd’hui correspond à peu près au territoire qu’occupaient aux XIe et XIIe siècles les tribus lituaniennes qui constituaient encore l’un des derniers îlots de résistance païenne au sein de l’Europe devenue chrétienne. La volonté des chevaliers Teutoniques et autres Porte-Glaive d’imposer la foi du Christ aux rudes habitants de ces régions forestières les conduisit à rechercher l’appui de la Pologne catholique. Une alliance scellée en 1386 par le mariage du grand-duc Jogaila avec Hedvige de Pologne, une union qui allait de pair avec l’acceptation du baptême, symbole de l’intégration des Lituaniens dans la Chrétienté romaine. La fin du Moyen Age voit l’apogée du grand-duché lituanien qui est alors, sous les règnes de Gedilminas et de Vytautas, l’Etat le plus vaste du continent, étendu de la Baltique à la Mer Noire et comprenant la Biélorussie et l’Ukraine occidentale d’aujourd’hui. Conclue en 1569, l’Union de Lublin confirme l’alliance étroite des noblesses polonaise et lituanienne, chacun des deux peuples conservant sa propre identité culturelle. La Lituanie est ainsi entraînée dans le naufrage polonais, conclu à la fin du XVIIIe siècle par les trois « partages » effectués au profit de la Russie, de la Prusse et de l’Autriche. Tombée sous la domination des Russes, la Lituanie n’en connaît pas moins, au XIXe siècle, un brillant réveil national, qui prépare le retour à l’indépendance, obtenue au lendemain de la première guerre mondiale, dans le contexte de relations difficiles avec la nouvelle Pologne, dont la résurrection va de pair avec l’affirmation d’appétits territoriaux tout à fait démesurés, qui conduisent les dirigeants de Varsovie à s’emparer de Vilnius, capitale traditionnelle de la Lituanie, réduite à installer à Kaunas son nouveau centre politique. Victime du pacte Molotov-Ribbentrop d’août 1939, la Lituanie prend son indépendance dès 1940 et devient république soviétique à l’issue de la seconde guerre mondiale. Près d’un demi-siècle d’occupation soviétique n’a pas eu raison de l’identité lituanienne, vigoureusement réaffirmée à la fin des années quatre-vingt, lors de la « chute finale » de l’Empire qui était l’héritier de celui des tsars. Redevenue indépendante en 1991, la Lituanie a adhéré à l’Alliance atlantique et à l’Union européenne, rejointe en mai 2004 et dont elle a été le premier pays à ratifier le projet de constitution.