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Hérésie et Inquisition dans le midi de la France
Hérésie et Inquisition dans le midi de la France
Jean-Louis Biget
Picard
Paris
2007
Largement instrumentalisée au profit de l’anticléricalisme des adeptes du petit père Combes, d’un ésotérisme de bazar, du régionalisme occitan ou d’une exploitation touristique qui entraîne de plus en plus de randonneurs vers Montségur ou les « citadelles du vertige » juchées sur les crêtes des Corbières, l’Histoire de l’hérésie cathare avait besoin d’un sérieux dépoussiérage. Il a été entrepris depuis plusieurs années par des historiens aussi sérieux que Jean Duvernoy, Michel Roquebert ou Anne Brenon mais le livre de Jean Louis Biget lui apporte une cohérence qui renouvelle largement la vision généralement répandue de cet épisode de l’Histoire du Midi. Le sac de Béziers, les martyrs de Montségur ou de Minerve, la terreur inquisitoriale et la résistance de tout un peuple face à la conquête brutale perpétrée par les chevaliers du nord composent un imaginaire historique qui est désormais remis en cause. L’auteur, qui s’est livré à une critique rigoureuse de la documentation disponible peut ainsi affirmer l’inanité des hypothèses qui attribuent à l’hérésie méridionale une origine orientale recherchée jusque dans le manichéisme des premiers siècles de notre ère, relayé lui même par le bogomilisme des Balkans et un catharisme italien des plus incertains. Il apparaît en effat que l’emploi du terme « catharisme » - jamais utilisé à l’époque dans le Midi - pour donner un semblant d’unité à divers courants dissidents désignés comme « hérétiques » par les clercs ne tient pas compte de leur éloignement géographique et des différences qui les distinguent. L’auteur, qui remet en cause de manière convaincante la réalité du célèbre « concile cathare » de Saint Félix de Caraman, montre surtout que la dissidence apparue dans le Midi s’inscrit dans le contexte de la réforme grégorienne qui, en distinguant plus rigoureusement le clergé des fidèles et en transformant l’Eglise en une structure de pouvoir hiérarchisée, a laissé de côté des aspirations spirituelles qui - marquées par un fondamentalisme évangélique évoluant ultérieurement vars un certain dualisme – vont trouver des réponses dans la prédication des « bons hommes » et dans l’ascétisme qu’ils affichent au moment où le clergé séculier se voit reprocher un train de vie peu en rapport avec la pauvreté valorisée par le Nouveau Testament. La dissidence qui se met ainsi en place au XIIème siècle et qui est désignée comme une « hérésie » héritière de celles qui avaient troublé antérieurement la vie de l’Eglise ne touche en fait qu’une minorité de la population languedocienne et ne peut être assimilée à la forme qu’aurait prise une « résistance nationale occitane » tout à fait anachronique. Peu affectée par la croisade déclenchée en 1209 mais davantage ébranlée par une Inquisition qui la contraint à la clandestinité ou à l’exil quand elle ne lui offre pas l’occasion du martyre, l’hérésie sera finalement vaincue par les transformations qui interviennent au cours de la seconde moitié du XIIème siècle, quand les groupes – le patriciat urbain et la petite noblesse - qui s’y étaient ralliées trouvent dans le service de la monarchie capétienne la perspective d’un nouveau statut social et quand l’action des ordres mendiants vient répondre à des attentes spirituelles demeurées longtemps insatisfaites. Le travail réalisé par Jean Louis Biget renouvelle donc largement l’historiographie d’une question trop souvent abordée au risque de l’anachronisme et de l’idéologie.
 
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