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Goya
Goya
Claude Henri Rocquet
Buchet-Chastel
Paris
2008
Le bicentenaire du déclenchement de la Guerre d’Indépendance espagnole est l’occasion - à Paris, Lille, Saragosse et Madrid – de rendre hommage au peintre qui résume le mieux cette période tourmentée, Francisco José de Goya y Lucientes. Peintre de cour inspiré par Tiepolo et Mengs à la fin du XVIIIème siècle, au moment où la Cour des Bourbons d’Espagne profite encore, pour peu de temps, de la « douceur de vivre » qui demeurera la marque de cette époque, il est confronté, en 1808, à la terrible rupture que représente, en réponse à l’occupation française, le déclenchement de l’insurrection nationale. Il immortalise, avec les deux grandes compositions du Dos de Mayo et du Tres de Mayo, le soulèvement de Madrid et l’impitoyable répression qu’il entraîne. Il a également réalisé, à partir de 1810, une série de gravures qu’il intitule Fatales conséquences de la guerre sanglante d’Espagne contre Bonaparte, qui seront rebaptisées en 1863 Les désastres de la guerre. Ce ne sont que corps mutilés, scènes de massacre, de pillage ou de viol, le quotidien engendré par l’occupation française face à une population rebelle mobilisée à l’appel de ses prêtres, à Saragosse ou dans les sierras désolées où s’abritait la résistance. Cette vision, qui n’est pas sans rappeler celle que le Lorrain Jacques Callot nous avait donnée Jacques Callot de la Guerre de Trente Ans, rompt avec l’inspiration souriante des premières années de la carrière du peintre. Une fois restaurée la monarchie bourbonienne, il espère la mise en place d’un système constitutionnel qui puisse faire place aux idées nouvelles qui ont triomphé avec les Lumières mais c’est un pouvoir réactionnaire et obscurantiste qu’impose Ferdinand VII et le peintre fera finalement le choix de l’exil pour mourir à Bordeaux en 1828. Déterminé par la dimension tragique de l’époque, le parcours de l’artiste ne se résume pas à ses inspirations successives et aux succès remportés auprès de la cour et de ses commanditaires. Rompant avec la conception traditionnelle de la beauté qui avait commandé jusque là la production artistique européenne, cet héritier de Velasquez nous révèle en fait la part sombre de l’homme quand, selon la légende de l’une de ses gravures, " Le sommeil de la raison ne peut engendrer que des monstres". C’est cette dimension de l’artiste qu’a privilégiée, dans une étude originale, Claude-Henri Rocquet dont on ne sera pas surpris d’apprendre qu’il fut, il y a quelques années, un analyste avisé des oeuvres de Bosch et de Brueghel. Commentateur féru de l’oeuvre d’Eliade et des grands auteurs de la spiritualité européenne, il interprète comment la « modernité » de Goya, comme l'exploitation d’un monde où l’esprit diurne laisse place à l’esprit nocturne et à l’inconscient, au moment où a disparu la lumière surnaturelle de la religion. C'est face au désespoir engendré par l’absence de Dieu, l’art du peintre et les beautés fulgurantes qu’il engendre, y compris dans les sombres figures de la Quinta del Sordo, lui apparaît comme une réponse au destin, au Saturne dévoreur de ses enfants, qu’André Malraux sut si bien formuler dans l’essai qu’il a consacré au peintre de Saragosse.
 
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